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Actualité Santé
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Epilepsie
Encore une image négative
L’épilepsie, deuxième maladie neurologique la plus
fréquente après la migraine, touche en France près de
500 000 personnes. Parmi elles, 150 000 sont atteintes
de déficits et de troubles associés. L’objectif des nouveaux médicaments est de supprimer le risque de récurrence des crises, avec le minimum d’effets secondaires.
S
ouvent la seule image que le
grand public a de cette maladie, c’est la grande crise
spectaculaire généralisée tonico-clonique. « Le côté spectaculaire a été
exploité par une centaine de films
en un trentaine d’années », constate
le Pr H. Vespignani (Nancy), « d’où
l’impact de certains scénarios de
films sur l’imaginaire de la maladie ». Certes, le polymorphisme de
cette pathologie et la difficulté de
certains diagnostics et pronostics
rendent difficile la diffusion d’informations simples.
Manque d’information
Toutefois, il ne faut méconnaître ni la
bénignité de la maladie dans de nombreux cas, ni les profils cliniques de la
pharmacorésistance dans 30 % des
cas. Et lorsque l’épilepsie est bien
contrôlée (60 à 70 % des cas), il faut
aussi prendre en compte la qualité de
vie et le retentissement de certains
traitements antiépileptiques sur les
fonctions cognitives et la vie quotidienne. Les patients épileptiques sont
en butte aux préjugés sociaux qui ne
peuvent qu’aggraver les troubles, psycho-affectifs et relationnels, et rendre
encore plus difficile l’insertion sociale.
Les spécialistes soulignent l’importance de la mise en place des programmes d’éducation pour la santé
en épileptologie et d’une prise en
charge globale à l’écoute des patients
et de leur famille afin de diminuer les
risques d’aggravation de la maladie,
d’accidents, de développement de
sur-handicaps.
Le développement des neurosciences a en quelque sorte “dépsychiatrisé” cette maladie, mais de
nos jours les aspects psycho-patho-
logiques des épileptiques sont à
nouveau étudiés. « L’intérêt porté
aux crises psychogènes ou pseudocrises épileptiques est d’autant plus
grand qu’il pourrait expliquer dans
certains cas l’inefficacité des médicaments antiépileptiques », note le
Pr H. Vespignani.
Après plusieurs décennies marquées
par l’emploi de quatre médicaments
(phénobarbital, phénytoïne, carbamazépine et valproate de sodium), le
choix thérapeutique s’est élargi grâce
à de nouvelles molécules antiépileptiques : vigabatrin, felbamate, fosphénytoïne, gabapentine, lamotrigine, tiagabine, topiramate, oxcarbazépine et
lévétiracétam. Ce progrès dans le traitement médical permet d’envisager
des adaptations thérapeutiques et
donc une meilleure qualité de vie
des patients épileptiques. La molécule dernière arrivée, le lévétiracétam, offre une bonne tolérance dans
la fourchette haute des rapports
bénéfices/risques : les effets indésirables, à savoir l’asthénie, la somnolence et les fluctuations de l’humeur
sont rapportés dans une proportion
moindre par rapport aux autres molécules). Il ne nécessite donc aucun
contrôle biologique et ne modifie pas
les taux plasmatiques des différents
anti-épileptiques ; le lévétiracétam
est indiqué en addition dans le traitement des crises partielles avec ou
sans généralisation secondaire, chez
les patients épileptiques de plus de
16 ans, insuffisamment contrôlés par
une monothérapie ou polythérapie.
Diagnostic établi
Comme le rappelle le Pr H. Vespignani, « un traitement anti-épileptique n’est proposé qu’en cas de
crises épileptiques certaines (il n’y pas
de traitement à visée diagnostique).
Devant la première crise épileptique
généralisée tonico-clonique, il n’y a
pas lieu de commencer un traitement, dans l’hypothèse qu’il pourrait
s’agir d’une crise unique. » En
revanche, il faut rechercher si cette
première crise ne cache pas une épilepsie partielle dont le risque de récidive des crises est certain. Il faut
aussi savoir que certains types de
crises sont aggravés par la prescription de certains antiépileptiques :
ainsi les absences et les myoclonies
massives de l’épilepsie généralisée
idiopathique sont aggravées par
toutes les molécules gaba-ergiques
(phénytoïne, carbamazépine, oxcarbazépine). En cas de doute clinique
concernant le type de crises d’épilepsie, le valproate de sodium, le diazépan, le clonazépan, la lamotrigine et
le lévétiracétam ont l’avantage de ne
pas aggraver un syndrome épileptique. Le choix du médicament
dépend aussi de la pathologie associée : il faut éviter le topiramate en
cas de trouble de l’humeur ou d’antécédents psychiatriques, le gabapentin en cas de trouble de la vigilance, la carbamazépine ou
oxcarbazépine en cas de vertiges et
d’allergie cutanée facile, etc.
La monothérapie initiale est de règle.
En cas d’échec, il faut vérifier le diagnostic et la compliance du patient,
sans changer immédiatement de
médicament (les fourchettes thérapeutiques sont statistiques) en progressant par paliers et en surveillant
les effets indésirables. En deuxième
intention, le choix se fait entre une
deuxième monothérapie ou une
bithérapie. Il est conseillé de rester le
plus longtemps possible à des bithérapies, en association avec une benzodiazépine, si nécessaire. Si le recul
sans crise persiste plusieurs années
(3 à 5 ans), on peut poser la question de l’arrêt de la médication.
Ludmila Couturier
Entretiens de Bichat 2004
Infos
...
Les enfants
premières
victimes
Lorsqu’on évoque
l’épilepsie, on devrait
plutôt parler des
épilepsies, tant les
affections sont
diverses, tant le
pronostic et les
modalités de
traitement sont
différents. Si les
enfants sont les
premiers touchés, la
plupart des
épilepsies sont
heureusement
bénignes en
pédiatrie. Le taux
maximum de la
maladie se situe
entre 0 et 1 an et
reste très important
jusqu’à 10 ans. Il
décroît ensuite
progressivement
pour se maintenir à
des taux faibles entre
30 et 50 ans et
remonte de façon
spectaculaire après
75 ans.
On estime que la
durée de vie
moyenne d’une
épilepsie est de 12 à
15 ans. Certaines
formes sans gravité
guérissent toujours
alors que d’autres ne
connaîtront jamais
de rémission
spontanée.
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 60 • décembre 2004
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