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Médecine
& enfance
Evaluation et prise en charge
d’une première crise épileptique
de l’enfant
NEUROLOGIE
S. Auvin, service de neurologie pédiatrique et
des maladies métaboliques, hôpital RobertDebré, Paris
La première crise épileptique représente chez l’enfant la première cause de
consultation en urgence pour motif neurologique. Si ce motif n’est pas rare, il
reste difficile à appréhender par le praticien, ce qui est à l’origine d’erreurs diagnostiques par défaut comme par excès [1]. L’objectif, devant une suspicion de
première crise d’épilepsie, est, en premier lieu, de déterminer si l’événement
paroxystique était réellement épileptique. Si c’est le cas, il faut chercher une
crise épileptique d’origine occasionnelle. Différentes causes peuvent induire
des crises épileptiques : infectieuse, métabolique, traumatique ou toxique…
Dans certains cas (méningite, hématome sous-dural…), une prise en charge
urgente est nécessaire.
Nous allons donc voir les étapes successives de l’évaluation diagnostique
d’une première crise épileptique. La survenue d’une première crise épileptique
au cours d’un épisode fébrile est une circonstance particulière, pour laquelle
nous détaillerons la conduite à tenir. Enfin, nous aborderons brièvement la
question du diagnostic d’une épilepsie au décours d’une crise isolée et celle
d’un éventuel traitement.
La démarche est fondée principalement sur la clinique. L’enregistrement
électroencéphalographique est une aide précieuse, mais n’a de valeur que s’il
est interprété en fonction des données cliniques.
Nous n’aborderons pas ici la conduite à tenir devant la survenue de plusieurs
crises épileptiques similaires ou de différents types : salve de spasmes, crises
épileptiques myocloniques isolées ou non, absences…
ÉLIMINER UN ÉVÉNEMENT
PAROXYSTIQUE
NON ÉPILEPTIQUE
Rubrique dirigée par S. Auvin
L’interrogatoire devra être « rigoureux »,
l’objectif étant d’éviter une démarche
clinique erronée et/ou la réalisation
d’examens paracliniques inutiles. Aucun élément clinique isolé ne permet de
déterminer si l’épisode était ou non une
crise d’épilepsie. De même, il n’existe
aucun examen paraclinique permettant
d’affirmer a posteriori si une crise épileptique est survenue. C’est donc à partir d’un faisceau d’arguments qu’il faudra raisonner.
Le caractère paroxystique et le début
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brutal d’une crise sont les éléments sémiologiques les plus évocateurs de l’origine épileptique de l’épisode, mais il n’y
a pas de sémiologie typique d’une crise
d’épilepsie. Les symptômes observés dépendent de l’origine topographique et
de la propagation de la décharge corticale. L’épisode est le plus souvent bref.
Les événements sont stéréotypés et se
succèdent dans le temps. Il peut exister
une confusion postcritique, qui n’est ni
systématique ni spécifique de l’origine
épileptique. De même, la morsure de
langue ou la perte d’urine ne sont ni
sensibles ni spécifiques pour affirmer le
caractère épileptique d’un événement
paroxystique.
En cas de manifestations paroxystiques
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non épileptiques, c’est souvent la séquence clinique des symptômes qui permet de faire le diagnostic. Il faut donc
retracer précisément la chronologie des
événements. Les manifestations paroxystiques non épileptiques de l’enfant
s’analysent en fonction de l’âge de survenue, de leur relation avec le sommeil
et bien entendu selon les symptômes
observés (tableau I). Les événements les
plus fréquents sont les terreurs nocturnes, les syncopes, les myoclonies
d’endormissement et les rythmies d’endormissements.
CAS D’UNE PREMIÈRE
CRISE ÉPILEPTIQUE
FÉBRILE
Lors d’une crise épileptique concomitante à de la fièvre, il faut avant tout éliminer les crises épileptiques occasionnelles
associées à de la fièvre (tableau II) avant
de parler de convulsions fébriles (CF).
Les convulsions fébriles sont des crises
épileptiques survenant le plus souvent
chez un enfant de six mois à cinq ans,
associées à de la fièvre, sans signe d’infection intracrânienne ou d’autres
causes définies.
Les données de l’examen clinique permettent de faire la différence entre CF
et crises épileptiques secondaires à une
encéphalite ou à une méningite… Au
moindre doute, ou lorsque la CF présente des critères de complexité, il faut réaliser les investigations paracliniques
adéquates (PL, imagerie cérébrale).
Toute CF brachiofaciale survenant chez
un nourrisson doit faire craindre une
encéphalite à réplication virale, en particulier une encéphalite herpétique.
Dans ce cas, il s’agit d’une urgence diagnostique et thérapeutique, et tout doit
être mis en œuvre pour réaliser les investigations (PL, imagerie, EEG…) et
débuter le traitement (aciclovir et traitement symptomatique).
Lorsque le diagnostic de CF est retenu,
il faut évaluer les caractéristiques de
l’épisode afin de le classer en CF simple
ou CF complexe (tableau III). Cinq critères
font suspecter une CF complexe :
l’âge de survenue avant un an ;
la durée de l’épisode et le nombre
d’épisodes sur le nycthémère ;
le caractère partiel de la CF ;
la présence d’anomalies à l’examen
neurologique postcritique ;
la présence d’antécédents neurologiques.
Cependant, tous ces critères n’ont pas la
même signification :
les antécédents familiaux et la répétition dans la même journée augmentent
le risque de récurrence ;
en revanche, les crises prolongées
et/ou le déficit neurologique postcritique sont des signes de gravité, car ils
augmentent le risque d’épilepsie ultérieure et de déficit durable ;
la survenue avant un an constitue un
risque de récurrence et de gravité.
En l’absence de critères pour un épisode
de CF compliquée, on parle de CF
simple. Par extension, ces critères guident souvent la conduite à tenir. En cas
de CF compliquée, un avis neurologique
et éventuellement des examens paracliniques seront à réaliser.
La survenue d’une CF simple n’inquiète
plus les praticiens, à juste titre, mais les
parents ont toujours grand besoin d’être
écoutés et rassurés. La plupart des parents d’enfants qui ont présenté des CF
ont cru que leur enfant allait mourir [2].
Cela induit une angoisse profonde, qui
s’exacerbe lors de l’apparition de fièvre.
Une information complète et transparente permet de réduire cette angoisse [3]
(voir la fiche de conseils à remettre aux
parents page 356).
ÉLIMINER UNE CRISE
OCCASIONNELLE
Après avoir éliminé un événement paroxystique non épileptique, la démarche se poursuit à la recherche d’arguments pour une crise épileptique occasionnelle (tableau II).
Une crise épileptique occasionnelle est
une crise d’épilepsie secondaire à une
condition occasionnelle (comme un
désordre électrolytique, une lésion cérébrale aiguë, etc.) et qui n’est pas en rapoctobre 2008
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Tableau I
Evénements paroxystiques non
épileptiques de l’enfant les plus
fréquents
Pendant le sommeil :
myoclonies d’endormissement
rythmies d’endormissement
cauchemars
terreurs nocturnes
autres parasomnies
En dehors du sommeil :
myoclonus bénin du nourrisson
spasmes du sanglot
syncopes
tics
origine psychogène
simulation
port avec une épilepsie ou le début
d’une épilepsie. Nous avons déjà abordé
la question des crises épileptiques occasionnelles survenant en contexte fébrile. Certaines de ces crises occasionnelles peuvent avoir une cause grave et
potentiellement curable (tableau II) .
L’examen clinique minutieux est fondamental. L’ensemble des étiologies des
crises épileptiques doit être éliminé.
Dans le cas où une crise de cause occasionnelle est fortement suspectée, il
faudra mener les examens permettant
d’infirmer ou d’affirmer le diagnostic.
Le tableau II présente une liste non exhaustive d’étiologies de crises épileptiques occasionnelles.
Les études ayant évalué l’apport diagnostique d’un bilan biologique systématique comprenant une glycémie et
un ionogramme montrent que les anomalies biologiques observées étaient
toujours associées à des éléments cliniques évocateurs. En cas de troubles
ioniques, les crises épileptiques sont le
plus souvent prolongées et/ou répétitives. La prescription d’examens biologiques ne semble avoir de rendement
diagnostique que dans trois situations :
contexte de fièvre ; crise épileptique
prolongée ; présence d’éléments pouvant être à l’origine d’un trouble électrolytique, comme des vomissements,
l’absorption d’eau pure dans un but de
réhydratation, une anorexie, des signes
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Tableau II
Etiologies des crises épileptiques occasionnelles présentées par catégories
étiologiques et en fonction de leur degré d’urgence (plus grande urgence en haut)
Infectieuses
Traumatiques
Toxiques
Métaboliques
Autres
Méningite
Encéphalite
(HSV ou autres)
Hématome
extradural
Hématome
sous-dural
Tricycliques
CO
Hyperhydratation
Déshydratation
Hypoglycémie
Hyponatrémie
Hypocalcémie
Hypertension
intracrânienne
Hypertension
artérielle
Maladies
métaboliques
Anoxie
Ischémie
Infections
diverses
Contusion
cérébrale
Tableau III
Caractéristiques des convulsions fébriles simples et compliquées
CF simple
CF compliquée
Age de survenue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ≥ 1 an . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . < 1 an
Durée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . < 15 mn et 1 crise/24 h . . . . . . > 15 mn ou > 1 crise/24 h
Focalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Crise généralisée. . . . . . . . . . . Crise partielle
Examen neurologique . . . . . . . . . . . . . . . . Normal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Anormal
Antécédents familiaux d’épilepsie . . . . . . Non. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Oui
Tableau IV
Adaptation de la classification des crises épileptiques selon ILAE (1981)
Crises généralisées
Crises partielles
Absences
Crises myocloniques
Crises cloniques
Crises toniques
Crises tonico-cloniques
Crises atoniques
Crises partielles simples
Crises partielles complexes
Crises partielles
secondairement généralisées
Crises non classées
Pour les crises partielles, on distingue les crises partielles simples, où il n’y a pas de rupture de
conscience, des crises partielles complexes, où l’on observe une altération de la conscience. Dans
ces crises, les symptômes peuvent être moteurs, sensitifs, sensoriels, végétatifs et/ou psychiques
cliniques de déshydratation… Dans
l’étude prospective de Valencia et al.,
qui portait sur 107 patients, 54 enfants
ont eu une exploration biochimique [4].
8 anomalies métaboliques ont été notées chez 7 enfants et seuls 3 patients
avaient une anomalie pouvant être à
l’origine d’une crise d’épilepsie (2 hyponatrémies et 1 hypoglycémie) ; chez ces
patients, il existait toujours des signes
cliniques consistant en des troubles de
conscience ou des troubles digestifs (vomissements ou diarrhées).
Les intoxications peuvent également
être à l’origine de crises épileptiques occasionnelles. Le diagnostic n’est pas toujours facile et l’interrogatoire doit porter
sur les médicaments pris par l’entourage
de l’enfant. Il existe très peu de données
sur l’intérêt d’une exploration toxicologique lors d’une première crise épileptique. Cette situation ne semble pas fréquente dans les études publiées sur ce
sujet. Un screening toxicologique peut
être demandé selon le contexte clinique
(risque d’ingestion et/ou d’exposition à
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un toxique proconvulsivant au domicile
ou dans l’entourage). Cette demande est
d’autant plus motivée s’il s’agit d’une crise épileptique prolongée ou de crises répétitives, s’il existe des anomalies de
l’examen clinique ou si la crise n’est pas
suivie d’un retour à l’état habituel.
DÉMARCHE SYNDROMIQUE
Il est impossible de prédire, lors de la
survenue d’une première crise épileptique, si le patient va présenter une épilepsie. On ne peut parler d’épilepsie que
si les crises épileptiques se répètent
spontanément. La démarche diagnostique devant une épilepsie repose sur
différents paramètres, comme l’âge de
survenue, le ou les types de crises, les
éléments de l’examen clinique puis les
données électroencéphalographiques et
de la neuro-imagerie [5]. La collecte de
ces données pour aboutir au diagnostic
précis est appelée en épileptologie « démarche syndromique ». Les éléments sémiologiques de la crise épileptique sont
fondamentaux. La qualité du recueil initial pourra être d’une grande aide en
cas de répétition des crises.
Lors de l’interrogatoire mené après une
première crise épileptique, il faut particulièrement rechercher des crises d’épilepsies antérieures passées inaperçues.
Cette situation est fréquente [6], et c’est
l’interrogatoire orienté à la recherche
de malaises mal interprétés jusqu’à présent qui permettra de la découvrir.
Dans ce cas, le diagnostic d’épilepsie
pourra être envisagé mais nécessitera
confirmation.
Il faut donc noter l’âge des premières
crises, le type des crises et l’état clinique
entre les crises. L’analyse des crises repose sur la sémiologie observée par l’entourage. Il faut s’attacher à interroger la
personne ayant vu la crise et le patient
lui-même si cela est possible. Les éléments à rechercher sont : existence
d’une aura, existence d’une perte de
conscience, description des phénomènes
moteurs et/ou des automatismes, des
phénomènes sensitifs ou sensoriels, présence d’une vocalisation, existence de
signes végétatifs (pâleur, modification
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pupillaire, vomissements, modification
des rythmes cardiaque et respiratoire,
incontinence…). Les éléments cliniques
faisant suite à la crise seront également
notés. On recherchera en particulier la
présence de céphalées, de nausées et/ou
de vomissements, ainsi que la durée de
la confusion postcritique. La chronologie des événements est importante à
préciser. La classification des crises épileptiques de 1981 pourra également
être utilisée (tableau IV [7]).
Figure 1
Electroencéphalogramme d’un patient avec une épilepsie à paroxysme rolandique.
On note sur le tracé de veille et de sommeil la présence dans les régions centrales de
pointes ondes biphasiques dont le nombre augmente lors du sommeil.
PLACE DE L’EEG
Seul l’enregistrement d’une crise permet d’affirmer l’origine épileptique de
la crise par la corrélation entre les phénomènes cliniques observés et la modification du tracé EEG. L’enregistrement
d’une crise est exceptionnel lors d’une
première crise épileptique. En pratique,
l’EEG est réalisé le plus souvent en période intercritique. La découverte
d’anomalies à l’EEG sans manifestation
clinique ne permet pas de poser un diagnostic d’épilepsie. Des pointes ou
pointes ondes focalisées ou généralisées
peuvent être observées chez 3 à 4 % des
enfants non épileptiques [8]. Enfin, un
EEG normal à la suite d’une crise épileptique ne doit pas faire conclure à l’absence de crise épileptique.
L’EEG est réalisé dès que possible après
la crise, mais sans urgence. Idéalement,
le tracé doit correspondre à une durée
de une heure avec un état de veille et de
sommeil, une épreuve d’hyperpnée et
une stimulation lumineuse intermittente (SLI). Un EEG réalisé précocement ou
après une privation de sommeil montrera plus d’anomalies qu’un EEG réalisé à
distance d’une première crise. Le sommeil, l’hyperpnée et la SLI ont pour objectif de sensibiliser le tracé pour rechercher des graphoéléments critiques. Le
sommeil peut également montrer un
foyer de pointes biphasiques dans la région centrotemporale (figure 1), ce qui
permet, si les éléments cliniques sont
concordants, d’évoquer le diagnostic
d’épilepsie à pointes centrotemporales.
L’épreuve d’hyperpnée peut être à l’origine soit d’un phénomène non spéci-
fique (activation du tracé), soit d’éléments spécifiques en déclenchant une
absence avec une bouffée de pointes
ondes à 3 cycles/seconde sur l’EEG, permettant le diagnostic d’épilepsie absence de l’enfant. Ce cadre diagnostique
n’est en général pas rencontré lors d’une
première crise épileptique, car les absences sont très nombreuses chaque
jour. La SLI peut fournir des éléments en
faveur du diagnostic : la présence d’une
photosensibilité est en faveur d’une épilepsie myoclonique juvénile ; l’entraînement de pointes par les flashs de la stimulation lumineuse à basse fréquence
est en faveur d’une épilepsie myoclonique progressive. Outre ces situations
permettant d’aboutir à un diagnostic
syndromique, l’EEG peut donner des
éléments d’orientation topographique :
la présence d’un foyer d’ondes lentes ou
de rythmes rapides permet d’évoquer la
localisation d’un foyer épileptique ou
d’une dysplasie corticale.
PLACE DE L’IMAGERIE
Une imagerie cérébrale doit être réalisée chaque fois qu’une anomalie cérébrale est suspectée. L’IRM devrait être
l’examen de choix, mais son accès est le
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plus souvent difficile dans le cadre de
l’urgence. Le scanner dans ce cas permet d’éliminer la quasi-totalité des
causes urgentes et graves. Il n’y a donc
pas d’indication d’imagerie systématique pour toutes les premières crises
épileptiques. Dans le cadre de l’urgence, une imagerie cérébrale doit être demandée lorsqu’il existe un déficit postcritique qui n’est pas rapidement résolutif ou si l’état clinique habituel n’est pas
récupéré rapidement. A distance d’une
crise épileptique isolée sans anomalie
de l’examen clinique, l’indication d’une
imagerie cérébrale se discutera à la récurrence des crises.
Sur 475 patients ayant eu un scanner
ou une IRM dans les suites d’une crise
épileptique, 1 % seulement des patients
(5/475) présentaient une lésion tumorale ou un infarctus (3/475 ont nécessité une intervention urgente) [9]. Warden
et al. ont étudié les critères prédictifs
d’un scanner cérébral normal à la suite
d’une crise épileptique. 203 patients
étaient inclus. Les éléments prédictifs
d’un scanner normal étaient l’absence
d’antécédents, un âge supérieur à six
ans, une crise de quinze minutes ou
moins et une absence de déficit neurologique [10].
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CONDUITE À TENIR
La situation clinique faisant suspecter la
survenue d’une première crise épileptique est fréquente. Après avoir confirmé l’origine épileptique de l’événement,
il faut s’interroger sur le caractère occasionnel de celui-ci, en recherchant en
particulier s’il existe une situation nécessitant une prise en charge thérapeutique urgente.
La survenue d’une crise épileptique ne
permet en aucun cas de poser le diagnostic d’épilepsie. Après une première
crise épileptique, il n’y a aucune raison
de proposer un traitement autre qu’un
traitement étiologique s’il s’agissait
d’une crise occasionnelle. La discussion
d’un traitement ne se fait que si le diagnostic d’épilepsie est retenu.
Après avoir confirmé l’origine épileptique de l’épisode et avoir éliminé une
crise occasionnelle, l’objectif est de recueillir les éléments qui permettront un
diagnostic syndromique au cas où les
crises se répéteraient. L’électroencéphalogramme ne permet pas d’affirmer
l’origine épileptique de l’événement.
La survenue d’une première crise épileptique est souvent vécue comme un
événement traumatisant par la famille,
il faut donc prendre le temps d’écouter
et d’expliquer : une crise isolée n’est pas
synonyme d’épilepsie ; il existe un
risque de récurrence, mais en l’absence
de récidive l’enfant ne doit pas être
considéré comme ayant une épilepsie ni
par son entourage ni dans ses activités
scolaires et extrascolaires.
Il faut également expliquer aux parents
quels sont les risques encourus lors de
la survenue d’une crise épileptique (CF
ou non) et leur donner des instructions
pratiques en disant clairement qu’il
existe deux risques :
un risque lié à la circonstance de survenue : blessure, accident, etc. Etant
donné l’âge des patients, ce risque est le
plus souvent faible, en particulier chez
les plus petits où tout événement de vie à
caractère dangereux est encadré par un
adulte. Si une crise survient, il ne faut
pas empêcher les mouvements, ne pas
secouer l’enfant, déplacer les objets dan-
AUTOÉVALUATION PAR QUESTIONS À CHOIX MULTIPLE
1. Vous recevez l’appel d’une maman affolée. Vous suivez en consultation son garçon de
deux ans, qui est en bonne santé et n’a pas d’antécédents. Elle vous dit qu’elle a eu très peur
que son enfant ne meure : alors qu’il était en train de jouer assis par terre, il est tombé sur le
côté droit en tournant sa tête vers la droite, puis sont apparues des secousses de son bras
droit pendant trois minutes. Tout s’est arrêté mais l’enfant n’a pas retrouvé son comportement normal. Que dites-vous à la maman ?
De rester calme, que son enfant a probablement fait une crise épileptique.
De s’assurer de la liberté des voies aériennes en utilisant si besoin le manche d’une cuillère
en bois.
D’empêcher l’enfant de dormir.
De lui proposer à boire.
De vous amener l’enfant en consultation.
2. Vous voyez l’enfant en consultation une heure plus tard. Il a retrouvé son comportement
habituel. Quels sont les éléments que vous recherchez au cours de l’interrogatoire ?
L’existence d’épisodes passés mais non identifiés, ce qui est assez fréquent.
La durée de la crise, car elle est importante pour un diagnostic ultérieur en cas de récidive
de crise épileptique.
La séquence d’apparition des symptômes, car elle est importante pour un diagnostic ultérieur en cas de récidive de crise épileptique.
La survenue d’une morsure de langue, car elle est pathognomonique de la survenue d’une
crise épileptique.
Une perte d’urine, car elle est pathognomonique de la survenue d’une crise épileptique.
3. On ne retrouve pas d’élément particulier, que ce soit à l’anamnèse ou à l’examen clinique.
A l’issue de la consultation, vous demandez :
Un ionogramme à la recherche d’un trouble ionique responsable d’une crise occasionnelle.
Un dosage de CPK pour rechercher l’origine épileptique de l’événement.
Un EEG. S’il est anormal, il s’agit d’une épilepsie.
Un EEG. S’il est normal, il s’agit d’un événement paroxystique non épileptique.
Un scanner cérébral.
4. Au décours de la consultation,
Vous prescrivez un traitement anti-épileptique pour éviter les récurrences.
Vous informez la famille sur les risques des crises épileptiques.
Vous expliquez en détail la conduite à tenir en cas de récurrence.
Vous remettez une fiche de conduite à tenir en cas de récidive.
Vous dites aux parents d’appeler le 15 dès qu’une nouvelle crise survient.
Réponses
Question 1 : et . Question 2 : et . Question 3 : aucune bonne réponse. Question 4 :
, et .
gereux plutôt que déplacer l’enfant. Il ne
faut rien introduire dans sa bouche : ni
doigt ni objet. En cas de somnolence
postcritique, il faut mettre l’enfant en position latérale de sécurité et il n’est pas
nécessaire de l’empêcher de dormir ;
un risque lié à la durée de la crise épileptique. La plupart des crises durent
spontanément moins de cinq minutes.
Les travaux de Shlomo Shinnar ont établi, à l’aide d’une modélisation mathématique, que seules les crises de plus de
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cinq minutes risquaient de se prolonger
[11]. De plus, aucune donnée ne suggère
que les crises épileptiques de courte durée puissent avoir des conséquences sur
le cerveau. Il ne faut donc pas traiter
une crise de moins de cinq minutes. Par
contre, une crise de plus de cinq minutes a une probabilité élevée de durer
environ une demi-heure. Dans ce cas, il
faut, si possible, administrer une benzodiazépine et avoir un avis médical. En
fonction de l’âge de l’enfant, on peut
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proposer du diazépam (0,5 mg/kg sans
dépasser 10 mg) à administrer par voie
intrarectale en cas de crise de plus de
cinq minutes. A partir d’un certain âge,
la voie intrarectale semble difficile à
conseiller. C’est au praticien d’apprécier, en fonction de chaque patient et de
sa famille, si cette prescription reste
« acceptable ». Si la crise persiste malgré
le diazépam, il faut appeler des secours
par le 15, afin que la situation soit médicalement évaluée.
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