Écho des congrès Écho des congrès Deux importants congrès en nutrition Jean-Michel Lecerf* La 10e Conférence européenne de nutrition La conférence européenne de nutrition est un congrès majeur. Elle s’est réunie à Paris en 2007, a rassemblé plusieurs milliers de congressistes de toute l’Europe et a donné lieu à près de 1 000 communications, faisant ainsi la preuve que la nutrition est une discipline vivante. Un symposium a concerné certains aspects de la relation entre alimentation et cancer, sujet parasité en France par les récents rapports contradictoires de l’Académie de médecine et par celui de la World Cancer Research Foundation. C.A. Gonzales a confirmé la baisse de prévalence du cancer de l’estomac, bien que celui-ci représente encore 10 % des nouveaux cancers dans le monde. Il a rapporté les travaux de l’étude EPIC abordant la relation entre la consommation de viande et de dinitrosométhylamine (NDMA), la formation endogène de composés nitrés (ENOC), leur interaction avec l’infection Helicobacter pylori (Hp) et les niveaux plasmatiques de vitamine C et de divers micronutriments. La cohorte EPIC regroupe 521 457 hommes et femmes âgés de 35 à 70 ans et répartis dans dix pays européens, dont la France, avec un suivi de 6,5 ans. Il existe une association positive significative entre cancer gastrique (sauf cardia) et apport de viande rouge, transformée et totale. L’association avec les apports en viande (totale) était plus forte chez les sujets porteurs de l’infection Hp ; inversement, elle n’a été observée chez aucun des sujets sans infection Hp. Une association positive et significative a été relevée entre ENOC et cancer gastrique (sauf cardia), et aucune avec les apports en NDMA. Les apports alimentaires en antioxydants n’étaient pas corrélés à l’incidence du cancer gastrique, mais des teneurs plasmatiques plus élevées en vitamine C, caroténoïdes, rétinol et α-tocophérol étaient associées à une réduction du risque de cancer. E. Riboli a fait le point sur le lien établi entre obésité et cancer dans l’étude EPIC. Chez les femmes, l’obésité n’est pas corrélée à la survenue d’un cancer du sein avant * Service de nutrition, Institut Pasteur, Lille. 10 Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XII), n° 1, janvier-février 2008 la ménopause, mais le syndrome métabolique l’est après la ménopause. Il a été mis en évidence une corrélation négative entre indice de masse corporelle (IMC) et sex hormone-binding globulin (SHBG), ainsi qu’une relation positive entre IMC, œstrone et œstradiol libre : la diminution de SHBG est responsable de l’augmentation de l’œstradiol libre ; elle est liée à l’augmentation de l’insulinémie et de l’IGF1, l’accroissement de l’IGF étant médié par IGF BP1 dépendant de l’insuline. On sait aussi que l’augmentation de l’incidence du cancer du sein est, chez les femmes pré- et post-ménopausées, corrélée à l’augmentation de taille (hauteur) des femmes. Nous avons présenté plusieurs communications avec I. Birlouez, à l’occasion d’un symposium sur les composés néoformés (par réaction de Maillard lors de la cuisson), communications faisant état des travaux expérimentaux que nous avons menés dans le cadre de l’étude ICARE. Nous avons inclus 60 sujets sains âgés de 20 ans (en moyenne) dans un protocole en crossover de 2 fois 4 semaines. Ils étaient randomisés en deux groupes : l’un recevant une alimentation standard à base d’aliments frits ou grillés, l’autre une alimentation à base d’aliments bouillis, cuits à l’eau ou à la vapeur. L’analyse des aliments a montré des teneurs plus élevées en carboxyméthylysine (CML), acrylamide, hydroxyméthylfurfural (HMF), furanes et acides gras trans dans les repas standard : la biodisponibilité de ces composés néoformés a été confirmée par des teneurs plus élevées de CML aux niveaux plasmatique et urinaire ; le niveau de fluorescence des AGE (advanced glycated endproducts) dans les féces, le plasma et les urines était plus élevé sous régime standard, et corrélé à la fluorescence des produits de Maillard dans les aliments. Le régime standard, isolipidique sur le plan quantitatif et qualitatif, a entraîné une augmentation des triglycérides, de la glycémie, de l’insulinémie et de l’index HOMA, une diminution des teneurs plasmatiques en vitamine E et en vitamine C (malgré une supplémentation en fruits et légumes crus dans le régime standard), une augmentation du coenzyme Q10, compensatoire d’un stress oxydant, ainsi qu’une altération du statut en acides gras oméga 3 et oméga 6 à longue chaîne. Tous ces éléments témoignent d’une augmentation du risque métabolique et cardiovasculaire.