une forme aiguë débutant en quelques
semaines par une confusion stuporeuse,
puis une apathie avec mutisme ou, à un
moindre degré, une dysarthrie.
L’ h ypertonie est intense avec attitude en
décortication évoluant par paroxysmes. Par
la suite, il peut apparaître un syndrome fron-
tal, des troubles sphinctériens et de la
marche, un syndrome pyramidal, mais aussi
des troubles du comportement (agitation
délirante). Après trois mois apparaît une
phase de récupération qui peut conduire à la
disparition complète des symptômes. Le
syndrome de dysconnexion calleuse, très
caractéristique, est en fait rarement mention-
né dans les publications. Il est vrai qu’il n’est
réellement connu que depuis 1962. De plus,
il est souvent incomplet – ce sont unique-
ment les fibres centrocalleuses qui sont
lésées – et donc difficile à diagnostiquer au
début de la maladie.
Macroscopiquement, les lésions sont
axiales et prédominent sur le tiers antérieur
du corps calleux. Elles peuvent déborder
largement sur les centres ovales, pédon-
cules cérébelleux moyens et voies optiques.
À l’échelle cellulaire, il peut s’agir, dans
les formes chroniques d’une démyélinisa-
tion isolée évoluant vers l’atrophie. Dans
les formes aiguës, on observe plutôt une
nécrose diffuse, avec des altérations vascu-
laires et une forte réaction macrophagique.
L’évolution se fait alors vers la cavitation.
Dans plus de la moitié des cas étudiés, il
existait une atteinte corticale, surtout fron-
tale, sous la forme d’une sclérose laminai-
re semblable à celle qu’a décrite Morel en
1939 chez des patients alcooliques. Il s’agit
d’ une bande macrogliale laminaire, occu-
pant la troisième couche du cortex (spon-
giose, perte neuronale, réaction gliale), par-
fois la cinquième. Les tubercules
mamillaires sont fréquemment épargnés,
traduisant un mécanisme différent de l’en-
céphalopathie de Gayet-Wernicke.
Le diagnostic radiologique fait une large
place à l’imagerie par résonance magné-
tique nucléaire, plus performante que le
scanner car elle permet des coupes fines et
jointives dans les plans sagittal et coronal.
À la phase aiguë, qui peut durer jusqu’à un
mois, les séquences en premier écho de T2
mettent en évidence l’œdème sous forme
d’un hypersignal et d’un gonflement du
corps calleux. C’est à ce stade qu’il peut
exister une prise de contraste. À la phase
chronique, on observe soit une cavitation
kystique sous la forme d’un hypo- ou
d’un hypersignal, sur les séquences res-
pectivement T1 et T2, soit une atrophie
calleuse qui s’accompagne souvent d’une
dilatation du troisième ventricule. Il y a
rarement une prise de contraste
En 1964, Souckhoroukova et son équipe
ont étudié les effets d’une intoxication
alcoolique subaiguë discontinue sur neuf
chiens, sous la forme d’une seule absorp-
tion quotidienne par sonde nasogastrique
d’alcool à 9 degrés (2 à 8 g/kg/jour, soit
un équivalent de 5 litres de vin à 10
degrés) pendant 7 semaines à 3 ans.
Après 2 mois, ils ont observé des lésions
de myélinolyse calleuse tout à fait iden-
tiques à celles de l’homme mais aussi
extracalleuses et corticales. Il n’existait
aucune lésion évocatrice d’encéphalopa-
thie de Gayet-Wernicke.
L’administration de vitamines B ou PP
n’avait aucun effet protecteur hormis sur
les lésions corticales. Il est difficile de ne
pas penser à ces futurs patients s’autori-
sant chaque année la rituelle multiplica-
tion des assauts alcooliques, qui reprodui-
sent à merveille les conditions expéri-
mentales.
Si le beaujolais nouveau n’est probable-
ment pas le meilleur de nos vins, rien ne
permet de l’incriminer directement. Il
n’en va pas de même du battage média-
tique qui accompagne sa commercialisa-
tion. Sous le prétexte de perpétuer une
tradition – qui n’en est d’ailleurs pas
une –, l’arrivée du beaujolais nouveau
devient chaque année, au plus profond du
mois de novembre, un phénomène de
mode incontournable. Parmi les nom-
breuses fêtes qui se multiplient au long du
calendrier depuis quelques années, celle-
ci risque, pour les plus assidus, de ne pas
se répéter.
Pour en savoir plus…
"Marchiafava E., Bignami A. Sopra un alte-
razione del corpo calloso osservata in sogget-
ti alcoolisti. Rev patologia nervosa mentale
1903 ; 8 : 544-9.
"Logak M., Feve A., Samson Y. et coll.
Contribution of positron emission tomogra-
phy in a case of Marchiafava Bignami disea-
se : Morel’s laminar sclerosis ? Rev Neurol
(Paris) 1996 ; 152(1) : 47-50.
"Vuadens P., Bogousslavsky J. Complications
nerveuses de l’alcoolisme. Encycl. Med.
Chir., Paris, Neurologie, 7-161 B-10.
Figure. IRM cérébrale
(coupe coronale pondé-
rée en T1) : hyposignal
de la partie centrale du
corps calleux).
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cas clinique
Cas Clinique