SÉNAT RAPPORT D'INFORMATION N 147

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N 147
SÉNAT
PREMIÈRE SESSION ORDINAIRE DE 1992 - 1993
Annexe au proces-verbal de la séance du 18 decembre 1992 .
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1 ) à la
suite d'une mission effectuée en Espagne , chargée de suivre les
travaux de la XVème Conférence mondiale de l'énergie et
d'étudier l'évolution de l'économie espagnole dans le contexte
européen ,
Par M. Bernard HUGO ,
Sénateur .
< 1 ) Cette commission est composée de : MM . Jean François l Poncet, président ; Philippe François ,
Henri Revol, Robert Laucournet, Jean Huchon , vice présidents ; William Chervy , Francisque Collomb ,
Jean Paul Émin, François Gerbaud Louis Minetti , secrétaires ; Henri Bangou , Bernard Barraux ,
Jacques Baudot, Jacques Bellanger, Georges Berchet, Roger Besse, Jean Besson , François Blaizot,
Marcel Bony , Jean Boyer, Jacques Braconnier , Robert Calmejane Louis de Catuelan , Joseph Caupert,
Gérard César , Roland Tourteau, Marcel Daunay , Désiré Debavelaere, Jean Delaneau , Jean-Pierre
Demerhat, Rodolphe Désiré , Michel Doublet, Pierre Dumas, Mme Josette Durrieu , MM Bernard
Dussaut, André Fosset , Aubert Garcia , Charles Ginésy , Jean Grandon , Georges Gruillot , Mme Anne
Heinis, MM . Rémi Herment, Bernard Hugo, Roger Husson, Pierre Lacour, Gérard Larcher , JeanFrançois Le Grand, Charles Edmond Lenglet, Félix Leyzour, Maurice Lombard, René Marques, François
Mathieu, Serge Mathieu, Jacques de Menou, Louis Mercier , Gerard Miquel , Louis Moinard , Paul
Moreau, Joseph Ostermann, Jean Pépin, Daniel Percheron , Jean Peyrafitte, Alain Pluchet, Jean
Pourchet, André Pourny , Claude Pradille, Jean Puech , Henri de Raincourt , Paul Raoult , Jean - Marie
Rausch, Roger Rigaudière, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra , Jean Roger, Josselin de Rohan,
Raymond Soucaret, Michel Souplet , Fernand Tardy .
Cette délégation était composée de : MM . Richard Pouille , président, Bernard Barraux , Roland
Courteau, Aubert Garcia , Georges Gruillot , Bernard Hugo, Louis Minetti , Louis Moinard, Jean Roger .
Espagne - Énergie - Rapports d information .
-1-
SOMMAIRE
Pages
INTRODUCTION
5
PREMIÈRE PARTIE : LE XVe CONGRÈS DE LA CONFÉRENCE
MONDIALE DE L'ÉNERGIE
7
I. LES PERSPECTIVES ÉNERGÉTIQUES DANS UN MONDE DE
7
NEUF MILLIARDS D' HABITANTS
A. PRINCIPALES CONCLUSIONS DU RAPPORT
8
B. LES DONNÉES SPÉCIFIQUES À L'EUROPE DE L'OUEST ...
9
II . LES PRINCIPAUX THÈMES DU CONGRÈS
12
A. ÉNERGIE ET ENVIRONNEMENT
12
B. ÉNERGIE ET ÉCONOMIE
12
C. ÉNERGIE ET DÉVELOPPEMENT
14
D. ÉNERGIE ET COOPÉRATION
14
III .
LES
CONCLUSIONS
ET
RECOMMANDATIONS
ESSENTIELLES DU CONGRÈS
15
A. LES CONCLUSIONS
15
B. LES RECOMMANDATIONS
15
DEUXIÈME PARTIE : L' ÉVOLUTION DE L' ÉCONOMIE
ESPAGNOLE DANS LE CONTEXTE EUROPÉEN
19
CHAPITRE PREMIER : LE « MIRACLE ESPAGNOL»
19
I. L'IMPACT POSITIF DE L'ADHÉSION DE L'ESPAGNE À LA
COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE
19
A. L'ÉCONOMIE ESPAGNOLE AVANT 1986
19
1 . La forte croissance des années 1960-1980
20
2. Une mutation inachevée
22
a) Une agriculture retardataire
22
b) La faiblesse du capitalisme industriel
23
c) Un niveau de vie qui reste faible
24
d) Un développement régional déséquilibré
24
-2-
•
Page »
B. 1986 : L' ESPAGNE ADHÈRE A LA COMMUNAUTÉ
EUROPÉENNE
26
1 . Le nouvel « eldorado »
27
a ) La libéralisation des flux commerciaux
27
b) La libéralisation des mouvements de capitaux
30
c) La "manne "des fonds structurels européens
32
2. L'Espagne rattrape son retard sur l'Europe
33
II . PROBLÈMES ACTUELS ET PERSPECTIVES D'AVENIR DE
L'ÉCONOMIE ESPAGNOLE
A.
34
LE RALENTISSEMENT CONJONCTUREL DE LA
CROISSANCE
34
1 . Le ralentissement de l'activité depuis 1990
34
2. L'infléchissement de la dynamique communautaire
36
H. DES PROBLÈMES STRUCTURELS PERSISTANTS
37
I. Une croissance inflationniste
37
2.... largement liée à une dérive des coûts salariaux
37
3. Un taux de chômage qui reste très élevé
38
4. Des déficits budgétaires et commerciaux importants
38
C. LES PERSPECTIVES DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET
MONÉTAIRE
39
III . LA NÉCESSITÉ D' UNE POLITIQUE ÉCONOMIQUE
VOLONTAIRE
40
A. LES RECOMMANDATIONS DE L'O.C D E
40
B. LE - PLAN DE CONVERGENCE . PROPOSÉ PAR LE
41
GOUVERNEMENT
CHAPITRE 2 : ASPECTS PARTICULIERS DE L' ÉCONOMIE
ESPAGNOLE
43
I. L'AGRICULTURE ESPAGNOLE
43
A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE
43
1 . Des conditions naturelles pas toujours favorables
43
-3-
Pages
2. L exploitation des ressources
44
a ) Les problèmes structurels
44
b) Des efforts de mise en valeur
44
3. La place importante de l'activité agricole dans l'économie
nationale
45
a) Part de l'agriculture et des industries agro-alimentaires dans le
P.I.B. marchand
45
b) Population employée dans l'agriculture
46
c) Production finale et valeur ajoutée
46
B. LES PRODUCTIONS
45
1 . Les productions végétales
47
2. Les productions animales
48
3. Les industries agricoles et alimentaires
50
C. ATOUTS ET HANDICAPS DE l/ AGRICULTURE
ESPAGNOLE
51
I). L'AGRICULTURE ESPAGNOLE DANS LE CONTEXTE
EUROPÉEN
52
1 . Concurrence et complémentarités
53
2 . Les problèmes posés par l'élargissement de la
Communauté
54
3. L'agriculture espagnole et la politique agricole commune . .
55
a) La réglementation communautaire
55
b) Les aides communautaires
56
4. Le commerce extérieur agricole et alimentaire
56
II. LE SECTEUR ÉNERGÉTIQUE
57
A. LES AXES PRINCIPAUX DU NOUVEAU PLAN
ÉNERGÉTIQUE NATIONAL (P.E.N.)
57
B. LES DIFFÉRENTES SOURCES D'ÉNERGIE
58
1 . Un secteur pétrolier atypique et en pleine mutation
58
2. Un pari clair sur le gaz
60
3. L'électricité
61
4. Un plan d'économies d'énergie
62
C. LES CONSÉQUENCES PRÉVISIBLES DU NOUVEAU P.E.N .
62
-4-
Pages
CHAPITRE 3 : QUELLE PLACE POUR LA FRANCE SUR LE
MARCHÉ ESPAGNOL ?
65
A. LA FRANCE : PARTENAIRE DE PREMIER PLAN DE
L'ESPAGNE
65
1 . Le développement des relations commerciales francoespagnoles
65
a) Des données globales favorables à la France
65
b) L'analyse sectorielle
67
2. L'importance des investissements directs français
69
B. QUELLES SONT LES PERSPECTIVES D'AVENIR ?
71
1 . Une stratégie d'accueil réaffirmée
71
2. Un marché qui reste porteur
72
TROISIÈME PARTIE : L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1992 ..
75
75
I. UNE TENTATIVE DE PRÉSENTATION
A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE
75
B. LE PAVILLON DE LA FRANCE : UNE RÉUSSITE
77
II . SÉVILLE : CAPITALE DE LA MÉDITERRANÉE
OCCIDENTALE ?
78
A. SÉVILLE 1992 : UN ENJEU ESSENTIEL POUR L'ESPAGNE .
78
1 . Un objectif d'envergure
78
2. Des moyens considérables
79
3. Des résultats positifs
79
B. QUID DE L'APRÈS-EXPOSITION ?
80
1 . Des investissements parfois contestés
80
2. Des lendemains qui restent incertains
80
EXAMEN EN COMMISSION
83
ANNEXES
87
Annexe 1 : Liste des membres de la délégation
89
Annexe 2 : Entretiens et visites de la délégation
91
-5-
Mesdames, Messieurs,
Quel voyageur n'a pas été frappé par le développement
extraordinaire de l'Espagne au cours de ces dernières années ?
Ce pays, champion de la croissance économique des pays
de l 'O.C.D.E., a attiré tous les regards en 1992. Choisie comme pays
d'accueil de l'Exposition universelle, des Jeux Olympiques d'été, des
fêtes commémoratives du cinquième centenaire de la découverte de
l'Amérique par Christophe Colomb, l'Espagne a également vu sa
capitale recevoir le XVe Congrès du Conseil mondial de l'Énergie en
septembre 1992.
C'est donc tout naturellement en Espagne que la
Commission des Affaires économiques et du Plan a décidé d'organiser
une mission d'information chargée de suivre les travaux du
XVe Congrès mondial de l'Énergie et d'étudier l'évolution de la
situation économique espagnole dans le contexte européen.
7
PREMIÈRE PARTIE : LE XVE CONGRÈS DE LA
CONFÉRENCE MONDIALE DE L' ÉNERGIE
Votre délégation a participé partiellement aux travaux du
XVe Congrès de la Conférence mondiale de l'énergie, qui s'est tenu à
Madrid du 20 au 25 septembre 1992. Ce congrès, auquel ont participé
52 pays et 22 organisations internationales, a donné lieu à près de 470
interventions et à l'étude d'environ 250 rapports, autour du thème
« énergie et vie ».
Outre la présentation d' un premier rapport de la
commission « Énergie pour le monde de demain », les travaux se sont
organisés autour des principaux concepts suivants : l'énergie en tant
qu'accès à la qualité de la vie, en tant qu'essence du bien-être
économique , moteur d'un monde en constante évolution et trait
d'union entre les peuples.
Votre délégation a souhaité présenter une synthèse de ces
différents travaux, avant d'exposer les principales conclusions et
recommandations du Congrès.
I. LES PERSPECTIVES ÉNERGÉTIQUES DANS UN MONDE
DE NEUF MILLIARDS D' HABITANTS
La commission « Énergie pour le monde de demain instituée lors du précédent congrès tenu à Montréal en 1989- a
présenté les conclusions de son rapport d'étape, qui fait suite au
rapport «Perspectives mondiales de l'énergie en 2020 » présenté en
1989 .
Seront exposées les conclusions de ce rapport, puis celles
relatives plus spécifiquement à l'Europe de l'Ouest.
H
A. PRINCIPALES CONCLUSIONS DU RAPPORT
Les experts estiment que les ressources énergétiques ne
devraient pas manquer à l'horizon 2020. En effet, les réserves de
pétrole dépassent quarante années de consommation , celles de gaz
près de soixante. Il faudra deux siècles pour épuiser les ressources
charbonnières et trois cents ans pour celles de lignite.
Le problème réside, en réalité, dans la mise à disposition
de cette énergie , sans laquelle il n'y a pas de développement
économique possible.
Les experts ont échafaudé trois scénarios à l'horizon
2020.
Dans le « scénario de référence », marqué par une
croissance économique modeste, la consommation d'énergie passe de
8 ,7 milliards de tonnes d'équivalent pétrole (TEP) en 1990 , à
13,3 milliards en 2020. En cas de croissance accrue, en particulier
dans les pays du tiers-monde, elle grimperait à 17,2 milliards de TEP
et elle s'élèverait à 11,2 milliards de TEP dans l'hypothèse d'une
croissance privilégiant les préoccupations en matière
d'environnement.
Aucun bouleversement n'est pourtant prévu en ce
qui concerne la part relative des différentes énergies. *11 serait
très imprudent de prévoir un changement de structure radical », avertit
le Conseil mondial de l'énergie, qui estime que les énergies fossiles
(hydrocarbures, charbon) continueront à dominer largement la scène
en 2020, couvrant de 63 % à 75 % des besoins selon le scénario retenu .
La part du nucléaire devrait augmenter, « mais à un rythme modéré»
et sous réserve d'avoir résolu le problème de la sûreté des
installations et celui de l'élimination des déchets. Les énergies
nouvelles, quant à elles, ont peu de chances de connaître un
développement significatif au cours des trente prochaine années,
l'investissement de départ étantjugé prohibitif.
Les experts estiment que le changement dans le paysage
énergétique mondial du vingt- et- unième siècle viendra
essentiellement de la demande.
En effet, dans l 'O.C.D.E. et les pays d'Europe centrale et
orientale, les besoins énergétiques augmenteront au plus de 19%
entre 1990 et 2020, d'après les experts, ce qui est relativement peu. Ils
estiment qu'ils pourraient même diminuer de 12 % si le scénario d'une
croissance « écologique » se réalisait. Mais, dans les pays du
tiers-monde , l'augmentation de la consommation d'énergie
s'annonce vertigineuse : 110 % dans le scénario de croissance
9
« écologique », 140 % dans le scénario de référence et 240 % en cas de
croissance économique soutenue.
La pression démographique explique cette explosion des
besoins en énergie. En effet, d'ici à 2020, la population passera de
5,3 milliards d'habitants à 8 à 9 milliards. «La croissance rapide de la
population est certainement l'une des menaces les plus graves qui
pèsent sur le bien-être économique des pays en voie de développement»
a lancé à la tribune du Congrès l'ancien ministre d'État indien à
l'environnement, Mme Maneka Gandhi , qui a attiré l'attention du
Congrès sur les graves menaces que le type de croissance actuel fait
peser sur l'environnement.
A cet égard, M. Jiahua Zou , vice-premier ministre du
Conseil d'État chinois, a exposé les problèmes posés par le
développement de son pays. Il a précisé que, alors qu'elle arrive en
troisième position dans le monde, par la production d'énergies, la
consommation par tête d'habitant de la Chine est près de huit fois
inférieure à celle d'un pays riche. « En l'an 2000, a- t- il expliqué, la
demande d'énergie primaire atteindra 1,7 milliard de tonnes
d'équivalent charbon (TEC), alors que les ressources nationales
chinoises ne devraient pas dépasser 1,4 milliard».
Dans cette perspective, les experts recommandent des
solutions combinant adroitement investissements massifs et
démantèlement des monopoles, vérité des prix et utilisation
rationnelle de l'énergie .
Les travaux de la Conférence ont également confirmé que
si l' environnement est une des données fondamentales du
développement énergétique, la priorité qui doit lui être donnée n'est
pas perçue de façon identique par les pays développés et par les pays
en développement.
B. LES DONNÉES SPÉCIFIQUES A L'EUROPE DE L'OUEST
Un rapport spécifique étant présenté pour chaque région
du globe, voici les principales conclusions et recommandations du
rapport régional pour l'Europe de l'Ouest. S'agissant de la politique à
mettre en oeuvre pour répondre aux préoccupations croissantes
concernant les effets négatifs de l'énergie sur l'environnement, les
experts ont estimé que cette politique devrait être basée sur le
renforcement et le développement du marché ainsi que sur les
10
mécanismes de prix , plutôt que sur une intervention
gouvernementale. Les principales mesures envisageables seraient
l'introduction d'une tarification englobant la totalité des coûts -y
compris l' internationalisation des frais de protection de
l'environnement-, des encouragements financiers sélectifs, appliqués
par les gouvernements afin de promouvoir la fourniture et
l'utilisation d'une énergie plus propre et d'un meilleur rendement.
Ces mesures leur paraissent devoir être plus efficaces qu'une taxation
sur l'énergie ou le carbone, dont ils estiment qu'elles doivent être
considérées avec précaution , ceci d'autant plus qu'il n'y a pas, à
l'heure actuelle, de consensus scientifique sur l'incidence éventuelle
des émissions de CO2 sur le climat.
A cet égard, il conviendrait, dans le cas où un instrument
commun ne serait pas accepté à l'échelle internationale , de
poursuivre une stratégie basée sur l'encouragement aux économies
d'énergie et sur un changement de répartition énergétique tel que le
suggère le scénario alternatif. Cet encouragement devrait être
poursuivi par l'application de réglementations, par une tarification
énergétique appropriée, et, si nécessaire, par des subventions sous
forme de réductions fiscales.
Dans le secteur des transports, les moyens suivants
semblent plus efficaces qu'une nouvelle augmentation des taxes :
- développement de réseaux de transports urbains
collectifs plus attrayants, sûrs et facilement accessibles ;
- coopération avec les industries du transport pour le
développement de nouveaux systèmes de transport de marchandises
sur les longues distances, en intégrant les moyens routiers et
ferroviaires ;
- trains à grande vitesse pour le transport des personnes ;
- coopération avec l'industrie automobile pour la
promotion de véhicules d' un meilleur rendement et d' une
consommation énergétique spécifique plus faible.
Puisqu'il s'agit, en fait, d'assurer un « développement
soutenable », l'amélioration du rendement énergétique et la
promotion d'énergies renouvelables sont des stratégies
fondamentales. Les ressources en énergies renouvelables se
développeront rapidement dans les prochaines décennies, mais leur
distribution à grande échelle et leur substitution à d'autres formes
d'énergies ne se fera qu'après les années 2020, date à laquelle la part
de ces ressources pourrait avoir triplé ou quadruplé.
Il
Par ailleurs, les experts estiment que :
- il faut favoriser les combustibles moins polluants que le
charbon ;
- à cet égard , il convient de développer de façon
raisonnable l'énergie nucléaire, les politiques de moratoires devant
être évitées ;
- le rôle du gaz naturel ira croissant, sa part dans les
approvisionnements pouvant passer de 18 % à l'heure actuelle à
25-27 % en 2020 .
Le rapport conclue à la nécessité de mettre en oeuvre, pour
réaliser ces objectifs, une politique de coopération active avec les
pays d'Europe de l'Est ainsi qu'avec la Communauté des Etats
indépendants.
Enfin , il met l'accent sur la nécessité de poursuivre les
efforts de recherche et développement afin de préparer une
nouvelle ère énergétique pour la seconde moitié du siècle prochain,
grâce à des études dans les domaines suivants :
- sur les risques de changement climatique ;
- sur les réacteurs surgénérateurs, qui permettraient de
réduire les déchets radioactifs par un facteur de 100 ;
- sur la fusion nucléaire ;
- sur les nouvelles énergies renouvelables : solaire
photovoltaïque, éolienne, marémotrice, géothermique ainsi que la
biomasse, par adaptation de cultures spécifiques grâce à des semis
développés par la biogénétique ;
- sur les nouvelles technologies de production et
d'utilisation des carburants traditionnels et de l'électricité .
Les experts estiment que la recherche doit également être
appliquée aux domaines économiques et sociaux afin d'améliorer :
- la théorie et la pratique des coûts liés à l'environnement,
leur internalisation et la tarification de l'énergie ;
- la connaissance des attitudes sociales et des arguments
développés dans le public concernant les grandes questions relatives
à l'énergie ( le nucléaire , les réseaux énergétiques, les énergies
renouvelables ) ;
- 12-
- les coûts économiques et les avantages liés aux
économies d'énergie .
II . LES PRINCIPAUX THÈMES DU CONGRÈS
A. ÉNERGIE ET ENVIRONNEMENT
L environnement a dominé les premiers travaux du
Congrès. A cet égard, la mise en oeuvre d'une taxe sur l'énergie et la
limitation des émissions de CO2, qui avaient déjà dominé les travaux
de la Conférence de Rio sur l'environnement, au mois de juin dernier,
ont de nouveau été largement évoquées par les experts.
Le secrétaire général de l 'OPEP, le Dr SUBROTO, a fait
valoir qu'une taxe frappant notamment les produits pétroliers
entraînerait un transfert net de revenus des pays en développement
vers les pays industriels, car ces derniers répercuteront le coût de la
taxe dans leurs prix de vente à l'exportation.
Il a également mis en garde les pays occidentaux contre
les conséquences néfastes d'un* éventuelle baisse des revenus des
pays de l 'OPEP qu'entraînerait une réduction de leur consommation
pétrolière.
La plupart des autres participants au Congrès ont eu une
appréciation plus nuancée . M. Pierre DESPRAIRIES, président du
CIFOPE (Institut français du pétrole) a jugé que l'objectif de réduction
de 20 % des émissions de CO2 que s'étaient fixés les pays industrialisés
en 1989 pour l'année 2005, ne sera atteint, au mieux, qu'en 2020.
S'agissant de la taxe sur l'énergie , que souhaite instituer la
Commission européenne , il a estimé que l'état d'avancement de
l'harmonisation fiscale en Europe ne permettait pas qu'elle soit
imposée de manière uniforme dans les douze pays de la C.E.E.
B. ÉNERGIE ET ÉCONOMIE
Dans ce domaine , s'il a relevé que les ressources
énergétiques restaient abondantes, M. Jean BERGOUGNOUX ,
directeur général d'Électricité de France, s'est interrogé sur les
13
contraintes que posaient l'utilisation à venir des différentes énergies
primaires et il a constaté que, à cet égard, « rien ne va de soi». En effet :
- les économies d'énergie, qui sous-tendent les scénarios
retenus, n'ont aucune chance de se réaliser spontanément ;
- la disponibilité du pétrole, la mise en exploitation et le
transport du gaz nécessiteront de lourds investissements ;
- l'utilisation « propre » du charbon appelle des techniques
performantes et des équipements coûteux ;
- le développement du nucléaire se heurte à des problèmes
d'acceptation par l'opinion publique ;
- le développement des énergies renouvelables restera au
niveau du discours si des capacités de financement suffisantes ne sont
pas mobilisées en faveur des techniques d'ores et déjà compétitives et
si la recherche et le développement ne s' amplifient pas
considérablement.
Il a également évoqué les questions essentielles qui
alimenteront les débats dans les années à venir. Ainsi , par exemple :
- Faut-il, au nom de l'efficacité économique, rechercher
toujours plus de concurrence et briser les situations monopolistiques
ou oligopolistiques qui se sont créées pour des raisons de logique
économique ou par la volonté des Etats dans tel ou tel secteur ? Ne
risque-t-on pas ainsi de renoncer à des effets d'échelle bénéfiques ou
de négliger certaines spécificités des secteurs en cause ? La logique du
. marché est-elle suffisante pour permettre le développement
harmonieux des infrastructures et assurer les arbitrages corrects
entre le court terme et le long terme ?
- Comment les pays où l'économie de marché est encore
embryonnaire pourront-ils rejoindre , notamment en matière
énergétique, des modèles plus efficaces et plus respectueux de
l'environnement ?
- S'il est vrai que dans certains pays du tiers-monde on
doive rechercher une meilleure efficacité des services publics et
qu' une solution envisageable consiste en un plus grand
développement de la concurrence, la première étape n'est-elle pas
d'améliorer les régulations, parfois insuffisantes, du système ?
14
C. ÉNERGIE ET DÉVELOPPEMENT
Le Congrès est parti du constat que, pour soulager la
pauvreté des pays en développement et donc favoriser leur
développement économique, l'utilisation de ressources énergétiques
était indispensable.
Il faut souligner qu'à l'heure actuelle, la moitié de la
population mondiale n'a pas accès à l'énergie commerciale.
Le Congrès a estimé que la reconnaissance de ce besoin
marquait un tournant pour la communauté énergétique et qu'elle
exigeait une modification radicale des politiques énergétiques.
Ce problème débouche naturellement sur la nécessité de
développer la coopération dans ce domaine.
I). ÉNERGIE ET COOPÉRATION
La coopération est, en premier lieu, le vecteur d'aide aux
pays en développement dont les besoins énergétiques risquent
d'exploser.
En second lieu , seule la coopération permettra de résoudre
les problèmes d'environnement liés à la satisfaction de ces besoins.
Les pays développés doivent donc jouer un rôle
prépondérant pour faciliter le financement approprié des nécessaires
investissements et le transfert de technologie à ces pays.
Au total, les différents thèmes abordés par le Congrès sont
interdépendants et on peut conclure, avec M. Jean BERGOUGNOUX ,
que « surmonter toutes ces difficultés suppose, d'une part, des
mécanismes permettant d'assurer la pertinence des choix
énergétiques dans le respect de l'efficacité économique et de la
protection de l'environnement, d'autre part une volonté politique
forte permettant de faire jouer la solidarité et la coopération
internationales ».
15
III . LES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
ESSENTIELLES DU CONGRES
A. LES CONCLUSIONS
Le Congrès a conclu à un triple constat :
• L'utilisation accrue des ressources énergétiques est
inévitable eu égard, notamment, à l'évolution démographique et à
l'état de pauvreté des pays en développement.
• Le développement économique , accompagné de
l'augmentation de l'utilisation des ressources énergétiques et de la
protection de l'environnement ne représente pas -comme on le croyait
auparavant- une opposition inévitable, un conflit entre le bien et le
mal .
A cet égard , seule la croissance économique permet, d'une
part, d'envisager une réduction de la croissance démographique ,
d'autre part, de dégager les moyens nécessaires à la protection de
l'environnement.
• Il ne faut pas s'attendre à un manque de ressources
énergétiques dans les trois prochaines décennies. Mais, il n'existe pas
non plus de réponse technique à portée de la main ou révolutionnaire
pour augmenter l'approvisionnement énergétique et protéger
l'environnement. Cela signifie que nous aurons à affronter le défi
de la distribution inégale des ressources énergétiques et le
problème mondial d'une grande partie de la destruction de
l'environnement avec les armes dont nous disposons
actuellement.
H. LES RECOMMANDATIONS
Ce constat a incité le Congrès à estimer que, outre le
nécessaire développement de la coopération internationale, de
l'utilisation de technologies propres et de la promotion de l'efficacité
et des économies d'énergie, certaines conditions devaient être
remplies pour que les besoins énergétiques puissent être satisfaits :
16
- les prix de l'énergie doivent être établis en tenant compte
de tous leurs coûts , y compris certains coûts en matière
d'environnement, de telle façon que les consommateurs sachent à tout
moment qu'elles sont les conséquences de leurs actes et de leurs
préférences, afin par ailleurs de pouvoir optimiser l'usage des
ressources en termes d'investissement dans l'approvisionnement et
l'efficacité énergétique, et pour que ces fonds d'investissement
puissent être mobilisés à une échelle mondiale ;
- les subventions en faveur de l'énergie doivent être
progressivement supprimées et les marchés libéralisés, de telle façon
que les concurrents sur le marché soient libres de fournir des
approvisionnements dans l'énergie adéquate, ceci à leur coût réel ;
- les barrières internationales au commerce et à la
concurrence dans le secteur énergétique devraient être abolies ;
- l'encadrement législatif, la réglementation et l'accès aux
marchés dans chaque pays doivent être développés et structurés de
façon à encourager la libre circulation financière dans le monde.
Favorable à une politique de « développement
soutenable », alliant croissance économique et protection de
l'environnement, le Congrès a conclu à la nécessité :
- d'améliorer l'efficacité opérationnelle des installations
énergétiques et de réduire les émissions ;
- de réduire le coût des sources d'énergie renouvelable ;
- de développer la capacité mondiale d'utiliser l'énergie
nucléaire dans le respect des impératifs de sécurité.
A cet égard, M. John BAKER, vice-président du comité des
programmes du Conseil mondial de l'énergie a estimé que «si on peut
satisfaire pleinement la préoccupation généralisée du public envers la
sécurité opérationnelle des centrales nucléaires et envers l'évacuation
des résidus radioactifs, et si le problème des réacteurs de l'Europe de
l'Est et de la CEI peut être abordé efficacement, nous ne devons pas
abandonner l 'énergie nucléaire ».
Par ailleurs, le Congrès a donné des priorités différentes
aux différents types d'économies :
- pour les pays en développement, les thèmes clés sont la
croissance économique et l'accès à des approvisionnements
appropriés ;
17
- pour les pays en transition de l'ex - URSS et de l'Europe de
l'Est, les thèmes principaux sont la modernisation de l'infrastructure
d'approvisionnement, la promotion d'une utilisation rationnelle de
l'énergie et le passage à des politiques et à des entreprises de marché ;
- pour les pays développés, les thèmes dominants sont la
garantie d'une plus grande efficacité énergétique et l'amélioration
continue des technologies employées non seulement dans leurs
propres pays mais aussi dans les autres pays.
Le défi des institutions mondiales sera de faire face à ces
différentes priorités et d'avancer sur tous les fronts.
- 19-
DEUXIÈME PARTIE : L' ÉVOLUTION DE L' ÉCONOMIE
ESPAGNOLE DANS LE CONTEXTE EUROPÉEN
CHAPITRE PREMIER
Le « miracle espagnol »
I. L'IMPACT POSITIF DE L'ADHÉSION DE L' ESPAGNE À LA
COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE
L' Espagne apparaissait encore, dans les années
soixante, comme un pays faiblement industrialisé et à bas
niveau de vie.
Elle est devenue , en moins de vingt ans , une
puissance industrielle et agricole de premier plan.
C'est que l'on a coutume d'appeler le « miracle
espagnol », miracle qui a été rendu possible, dans le contexte
d'un retour à la démocratie, par l'adhésion de l'Espagne à la
Communauté économique européenne, le 1erjanvier 1986.
A. L'ÉCONOMIE ESPAGNOLE AVANT 1986
A partir de 1875, l'Espagne a développé une politique
protectionniste et elle a ainsi vécu largement en autarcie jusqu'aux
années 1950.
20
Sont alors mis en place, un plan de stabilisation, une
planification et la politique économique est révisée dans le sens d'un
plus grand libéralisme.
En 1959, l'Espagne adhère à l 'O.C.D.E. et à l'accord
monétaire européen.
1 . La forte croissance des années 1960-1980
• Durant les deux décennies 1960-1980, le pays connaît un
rythme de croissance très élevé, qui s'est traduit par une mutation
rapide de son économie : déclin relatif de l'industrie, croissance du
secteur des services et du secteur de la construction (lié à l'exode rural
et au développement des infrastructures touristiques).
En outre, ainsi que le souligne le tableau ci-dessous, la
part de l'agriculture dans le produit intérieur brut est passée de
21,3 % à 6,4 % en vingt ans (de 1962 à 1982).
STRUCTURE DU PIB MARCHAND PAR GRANDS SECTEURS
D'ACTIVITÉ EN 1962-1982
Espagne
1962
France
1982
1962
1982
M ]
Agriculture
21,3
6,4
11,8
Industrie
34,9
39,3
37,0
Construction
5,9
7,9
41,0
6,2
50,5
100,0
100,0
Services
37,9
27,9
7,6
58,1
TOTAL
100,0
100,0
Source : O.C.D.E. - Comptes nationaux
L'Espagne développe , durant cette période , une
industrialisation dite intermédiaire, caractérisée par l'importance des
secteurs traditionnels, le développement rapide des industries lourdes
et de celles situées immédiatement en aval (automobile, électronique,
21
construction navale , transformation des matières plastiques),
faiblesse relative des biens d'équipement.
• Les deux décennies 1960-1980 ont également été
caractérisées par l'insertion croissante de l'économie espagnole
dans l'économie mondiale.
En vingt ans, la part du commerce extérieur dans son
produit intérieur brut est ainsi passée de 19 % à 28 % et la structure
de ses échanges -notamment de ses exportations- a connu des
bouleversements profonds, avec une diminution significative de la
part de ses exportations de produits agricoles et agro-alimentaires et
l'émergence du commerce de produits manufacturés (machines et
matériel de transport, chimie, sidérurgie...), ainsi que le décrit le
tableau ci-dessous.
ÉVOLUTION DE LA STRUCTURE PAR PRODUITS DU
COMMERCE EXTÉRIEUR DE L'ESPAGNE
ESPAGNE
1960
1982
Exportations
Combustibles, minéraux et métaux
Produits agricoles et alimentaires
Textiles et habillement
j Machines et matériel de transport
Autres biens manufacturés
Sous-total produits manufacturés
TOTAL
j Importations
21
57
18
7
4
2
27
13
40
22
100,0
100,0
Produits agricoles et alimentaires
16
12
Combustibles
22
40
Autres produits primaires
25
9
Machines et matériel de transport
22
Autres biens manufacturés
15
Sous-total produits manufacturés
37
TOTAL
100,0
I
19
20
|
39
100,0
22
A partir du début des années 60, tout en étant soumis à
autorisation gouvernementale, les investissements étrangers sont
désormais recherchés et encouragés. En outre, les prêts et crédits
internationaux représentent une part croissante des ressources
financières extérieures du pays ( les deux tiers environ de 1976 à
1984 ).
Les investissements directs s'orientent essentiellement
vers le secteur manufacturier et, au sein de celui-ci , vers les
industries lourdes, ainsi que vers le secteur agro-alimentaire.
La part occupée par la C.E.E. dans les relations
extérieures de l'Espagne s'accroît jusqu'en 1974, pour marquer un
recul après cette date. L'intégration de ses échanges avec cette zone
géographique reste toutefois forte puisque , en 1983 , 48 % de ses
exportations lui sont destinées. En outre, jusqu'à la fin des années
1970 , les investissements européens représentent 37 % des
investissements étrangers réalisés en Espagne.
• Les évolutions qui ont marqué la période 1960-1980 se
sont accompagnés de profonds déséquilibres : déséquilibre
commercial et de la balance des paiements ainsi qu'endettement
extérieur.
En outre, en dépit des transformations radicales qui,
dans les décennies 1960-1980, ont rapproché l'Espagne des
économies développées, les structures économiques et sociales
de ce pays traduisent le caractère inachevé de sa mutation.
2. Une mutation inachevée
a) Une agriculture retardataire
Agriculture méditerranéenne , l'agriculture de
l'Espagne est caractérisée par la prépondérance des productions
végétales : 55 % de la valeur de la production agricole finale , contre
45 % dans la C.E.K. à Dix.
Les produits typiques des régions méridionales (fruits
et légumes frais, vins, huiles végétales) y occupent une place
23
privilégiée, tandis que le développement de 1 élevage y est nettement
plus faible que dans les régions du Nord de l'Europe.
Pour
certaines
cultures
essentielles
à
l'approvisionnement, les rendements sont encore bas. Dans leur
ensemble, les structures productives apparaissent peu efficaces.
Certes, les conditions naturelles dans lesquelles se
développe l'agriculture espagnole sont souvent défavorables (relief
accidenté, sols pauvres, précipitations insuffisantes ou mal réparties
dans l'année ). Néanmoins, d'autres éléments interviennent pour
expliquer ces différences de productivité : l'irrigation , de même que
l'emploi des engrais de synthèse, sont insuffisants.
Il faut signaler aussi l'extrême importance des petites
exploitations : 70 % des exploitations espagnoles avaient, avant 1986,
une dimension inférieure à 5 hectares, 80 % inférieure à 10 hectares.
Depuis, un effort important a permis à l'Espagne
d'accroître l'étendue des superficies irriguées, de développer la
mécanisation, l'emploi des engrais et des produits phytosanitaires et
d'accélérer le remembrement foncier. Les structures agricoles de ce
pays présentent, de ce fait, une grande diversité : petites exploitations
morcelées dans les régions montagneuses du Nord et du Nord-Ouest,
agriculture efficace dans les zones de production irriguée de la côte
méditerranéenne et des vallées inférieures des grands fleuves.
b) La faiblesse du capitalisme industriel
La croissance s'est accompagnée d'une concentration
importante de l'appareil de production espagnol. Les 250 premières
entreprises représentent 31 % de la valeur ajoutée de l'industrie en
1973 , contre 22 % en 1964 .
Cependant, les structures du système productif restent
encore largement marquées par la présence d'un nombre important de
petites unités. La croissance, maintenue à l'abri de fortes protections
douanières, a permis l'extension d'un vaste secteur artisanal (les
unités de moins de six employés, qui représentent 80 % du nombre
d'établissements et emploient 26 % des effectifs industriels) et de
petites et moyennes entreprises, largement majoritaires dans la
production industrielle légère, le bâtiment et les services.
Les petites et moyennes entreprises sont très diverses.
Certaines ont investi dans des installations modernes et compétitives
et/ou adopté une organisation flexible de leur production leur
permettant d'élaborer des produits bien adaptés au marché
• 24 .
national et extérieur. D'autres, en revanche, ont supporté très
difficilement la crise et sont restées fortement attachées à l'ordre des
choses ancien (bas salaires, faible syndicalisation des travailleurs) et
se sont enfoncées dans l'économie souterraine.
c) Un niveau de vie qui reste faible
En Espagne , l' avènement de la société de
consommation a, dans une large mesure, marqué un temps de retard
important par rapport aux autres pays développés. Malgré la
croissance d'après-guerre, le niveau de vie espagnol se situait, en
1984, parmi les plus bas d'Europe occidentale. En termes de standards
de pouvoir d'achat, qui tiennent compte des différences de structures
de prix dans chaque pays, le produit intérieur brut moyen par
habitant était nettement plus faible en Espagne que dans le reste de
la Communauté.
PRODUIT INTÉRIEUR BRUT PAR HABITANT EN ESPAGNE
ET DANS LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE EN 1984
(En standard de pouvoir d'achat)
Pays
Europe des
Douze = 100
Pays
122
Europe des
Europe des
Douze = 100
Pays
Douze = 100
Pays-Bas
105
Grèce
57
120
Royaume-Uni
101
Portugal
45
Danemark
RFA
Luxembourg
France
119
Italie
91
Europe des Douze
100
116
Espagne
73
Etats-Unis
152
Belgique
113
Irlande
71
Japon
117
Source : Eurostat
d) Un développement régional déséquilibré
La croissance économique espagnole a coïncidé avec un
accroissement important des déséquilibres régionaux. Celui-ci s'est
traduit, pour certaines régions (la Catalogne, le Pays basque et
Madrid), par une expansion sans précédent et pour d'autres régions
25
(celles du Centre et du Sud , notamment) par une régression
inéluctable.
Ainsi , le déclin de l'Andalousie coïncide précisément avec
le développement du capitalisme espagnol ; cette région, qui
fournissait 25% du produit intérieur brut national en 1800, n'en
représentait plus que 12 % en 1980 alors que, durant la même période,
la part de la Catalogne est passée de 8 % à 20 %. Les déséquilibres
régionaux, l'une des composantes essentielles de la croissance
espagnole, ont constitué une condition nécessaire, en même temps
qu'une contrainte primordiale pour le système de production. Ils ont
été amplifiés avec l'ouverture de l'économie espagnole sur l'extérieur.
Ainsi , en 1983, Madrid, la Catalogne, le Pays Basque et la Navarre
étaient toujours en tête pour le revenu par habitant, alors que
l'Andalousie et l'Estremadure étaient toujours les régions les plus
pauvres ainsi que l'illustre le tableau ci-après.
REVENU DISPONIBLE PAR HABITANT
DANS LES DIFFÉRENTES RÉGIONS D'ESPAGNE
%
%
%
%
moyenne
croissance
nationale
100
annuelle
1979/ 1983
moyenne
nationale
100
croissance
annuelle
1979/ 1983
Baléares
136,3
3
Asturies
97
0,6
Catalogne
121,5
0,9
Castille Léon
90,2
1,1
Madrid
120,8
1.2
Canaries
1
Rioja
113,6
1,4
Galice
88,7
86,3
Pays Basque
107,7
2,8
Murcie
85,2
Navarre
107,1
1.9
Andalousie
79,9
0,8
Valence
105,6
0,8
Castille-La
Mancha
77,2
- 1,2
Cantabrie
102,4
2,2
Estremadure
67,7
- 0,3
Aragon
100,7
- 0,5
Espagne
100,0
- 0,9
|
- 0,4
!
o
26
Après la crise de la fin des années 1970, l'Espagne a mis
en place :
- un nouveau cadre de détermination des salaires, qui a
permis de limiter la progression des salaires nominaux entre 1982 et
1985 ;
- un programme de reconversion industrielle, ayant pour
ambition de restaurer la rentabilité dans certains secteurs en
difficulté ;
- une réforme importante pour améliorer la flexibilité du
marché du travail : l'introduction des contrats de travail à durée
déterminée.
En dépit de ces mesures, à la veille de son entrée dans la
Communauté européenne , l'Espagne comptait 2,5 millions de
chômeurs de plus qu'en 1975 et le niveau de la production et de
l'investissement restait déprimé.
B. 1986 : l/ ESPAGNE ADHERE À LA COMMUNAUTÉ
EUROPÉENNE
C'est peu après la création de la Communauté économique
européenne, en 1958, que les autorités espagnoles se sont fixées pour
objectif l'adhésion de leur pays. En 1962, le gouvernement espagnol a
demandé l'ouverture de discussions exploratoires. En 1970, un accord
préférentiel a été conclu avec la C.K.K. ; il prévoyait une nette
réduction des obstacles aux exportations espagnoles et assouplissait
quelque peu les restrictions aux importations en provenance de la
C.K.K. C'est à la fin des années soixante-dix qu'ont été entamées les
négociations officielles d adhésion . Avec la signature de l'acte
d'adhésion, en juin 1985, l'Espagne est devenue membre de la
Communauté économique européenne à compter du
1er janvier 1986. Toutefois, l'établissement de mesures transitoires a
permis d'atténuer le choc de l'élargissement de la C.K.K.
27
1 . Le nouvel « eldorado »
Avant son adhésion à la C.K.E., l'Espagne avait une
économie relativement fermée et protégée . Son adhésion s'est
accompagnée d'une libéralisation des flux commerciaux et des
mouvements de capitaux ainsi que d'un afflux de subventions
communautaires.
a) La libéralisation des flux commerciaux
En adhérant à la C.K.K. , l'Espagne obtenait
pratiquement sans restriction l'accès à un marché quinze fois plus
important que le sien en termes de pouvoir d'achat. Pour les autres
Etats-membres, l'avantage économique le plus manifeste de cette
adhésion était l'obligation faite à l'Espagne de démanteler ses fortes
barrières à l'importation.
• Avant 1986, ( économie espagnole était l'une des
plus protégées de la zone européenne de l'O.C.D.E. ; la part de ses
échanges extérieurs dans son PIB n'était que de 15 % environ, taux
inférieur d'un tiers à la moyenne de la Communauté européenne.
Le faible niveau des importations tenait à trois
facteurs.
En premier lieu, les droits de douane représentaient en
moyenne 6 % des importations non pétrolières.
En second lieu , les taxes sur le chiffre d'affaires étaient
plus faibles pour les biens produits localement, ce qui équivalait à un
droit implicite à l'importation de 8 % environ. L'Espagne avait ainsi
un taux moyen de protection trois fois plus élevé qu'il ne l'était dans le
reste de la Communauté européenne .
Enfin, l'existence d'un régime de contingentement
pour un quart environ des importations (notamment pour les
automobiles, les textiles, les articles d'habillement et les téléviseurs)
freinait très fortement l'importation.
Par ailleurs, le niveau des exportations de
l'Espagne vers la C.K.E. était faible.
28
Pourtant, à la suite de l'accord préférentiel de 1970, les
droits de douane perçus par les pays de la C.K.E. sur les produits
espagnols ont été ramenés au niveau modeste de 3 % et les
restrictions quantitatives frappant les exportations espagnoles n'ont
été appliquées que sporadiquement et pour de brèves périodes.
Il est, en fait, probable que le niveau médiocre de ces
exportations ait été dans une certaine mesure la conséquence des
restrictions à l'importation et d'un phénomène corrélatif de
substitution de productions nationales aux importations.
• A compter de l'adhésion de l'Espagne à la C.E.E.,
en 1986, la libéralisation des échanges extérieurs s'est faite
rapidement et elle a entraîné une chute spectaculaire des taux de
protection, sauf pour les produits alimentaires.
Entre 1986 et 1989, l'écart entre les droits de douane
espagnols et le tarif extérieur commun a été réduit de près de 40 %,
une nouvelle réduction étant opérée chaque année jusqu'à
élimination complète de cet écart en 1992. En outre, les contingents et
autres barrières non tarifaires ont été sensiblement démantelés dès le
début de 1986. L'Espagne appliquera pleinement le régime
d'importations communautaire à la fin de l'année 1992.
La conjonction d'un abaissement progressif des
barrières à l'importation et d'une expansion vigoureuse de la
demande globale s'est traduite par une forte progression des
taux de pénétration des importations. Avant l'adhésion de
l'Espagne à la C.E.E., ses importations totales de marchandises hors
pétrole oscillaient autour de 10 % du PIB. Après son adhésion, sous
l'effet des importations de produits manufacturés, ce pourcentage a
augmenté d'environ cinq points. La part importée de la consommation
de produits manufacturés est passée de 15,1 % en 1985 à 21,5 % en
1989. En volume, l'accroissement de la pénétration des importations
est encore plus marqué en raison de la hausse comparativement très
faible des prix à l'importation.
Il faut noter que ce phénomène a été favorisé par le fait
que l'investissement fixe a, en Espagne, un contenu particulièrement
élevé en importations.
• La ventilation géographique des échanges
commerciaux de l'Espagne a évolué, avec une part grandissante
29
de la zone C.E.E. tant dans ses importations (63,6 % en 1989) que dans
les exportations (68,3 % en 1989), comme l'illustre le tableau ci-après.
L'ouverture du marché espagnol a donc offert aux
autres pays européens des débouchés importants, notamment pour
leurs biens de consommation et d'équipement.
Il faut surtout souligner l'élargissement de la part des
importations de produits alimentaires en provenance de la
Communauté, qui a doublé au détriment des importations de ces
mêmes produits en provenance de pays tiers.
VENTILATION GÉOGRAPHIQUE DES ÉCHANGES ESPAGNOLS HORS ÉNERGIE
Exportations
Importations
Total des échanges hors énergie
1985
1989
1985
1989
100
100
100
100
CEE.
53,9
63,6
51,8
68,3
Etats-Unis
14 ,9
9,8
9,5
6,6
O.C.D.E.
82,1
86,5
70,3
82,6
Amérique latine
7,0
3,4
4,2
3,2
Reste du Monde
10,9
10,1
2571
14,2
Échanges de produits alimentaires
100
100
100
100
C.E.E.
22,0
45,5
56,3
68,2
Etats-Unis
28,1
14,4
9,1
6,4
O.C.D.E.
55,2
65,1
79,1
86,5
Amérique latine
29,2
16,7
Reste du monde
15,6
18,2
1,4
19,5
Échange de produits manufacturés
100
100
9,1
93,1
91,7
68,0
82,0
1,2
0,9
5,0
3,8
7,4
27,0
14,2
68,4
Etats-Unis
12,5
O.C.D.E.
Source : Secrétariat d'Etat au Commerce espagnol
100
68,5
65,4
Reste du Monde
12,2
50,2
9,9
C.E.E.
Amérique latine
100
1,3
6,9
30
S'agissant des exportations, les droits de douane et les
barrières non tarifaires communautaires frappant les produits
espagnols ont été fortement réduits ou totalement éliminés. Mais les
restrictions aux exportations espagnoles de fruits, légumes et
graisses, points forts de l'agriculture espagnole, et qui représentent
environ 7,5 % des exportations hors pétrole , demeurent très
importantes et ne seront pas totalement supprimées avant 1996.
b) La libéralisation des mouvements de capitaux
L'Espagne avait traditionnellement peu de restrictions
aux mouvements de capitaux. Un an avant l'entrée dans la C.E.E., les
restrictions qui subsistaient pour l'investissement direct productif ou
immobilier étranger ont été entièrement levées, sauf pour les
opérations intervenant dans un certain nombre de secteurs (défense,
médias, communications et transports aériens). En vertu de l'Acte
unique européen , dont l'adoption a coïncidé avec l'adhésion de
l'Espagne, tous les obstacles aux échanges et aux mouvements de
capitaux doivent être supprimés à la fin de 1992.
Cette libéralisation des mouvements de capitaux a
suscité un afflux considérable d'investissements étrangers en
Espagne, au point que l'on a pu la qualifier de paradis des firmes
multinationales. Ainsi, les investissements étrangers y ont été
multipliés par sept entre 1985 et 1991 .
Le tableau ci-dessous retrace l'évolution de l'origine
des investissements directs étrangers durant les années 1980.
On note une forte progression de la part des pays
membres de la C.K.E., qui passe de 38,4 % en 1984 à 52,% en 1989.
• 31-
PAYS I ) ORIGINE DES INVESTISSEMENTS DIRECTS
ÉTRANGERS
( en pourcentage du total )
1984-1985
Pays de la CEE
1986-1989
38,4
52,0
- Pays-Bas
7,3
16,5
- Royaume-Uni
7,5
10,1
- France
8,2
9,4
10,5
8,7
I Etats-Unis
18,4
4,9
Entreprises étrangères en Espagne
! Autres pays
12,9
25,3
30,3
17,8
dont :
- Allemagne
TOTAL
100
100
Pour mémoire :
Total cumulé des investissements
directs étrangers en milliards de
3,3
26,5
dollars
Source : Secrétariat d'État au Commerce espagnol
A l'heure actuelle , les entreprises étrangères
génèrent plus de la moitié de la production industrielle
espagnole. Elles emploient un quart de la population active et
dominent complètement les secteurs concurrentiels. Elles détiennent
ainsi l'intégralité du secteur automobile avec Fasa-Renault ( 18,5%
du marché), P.S.A. , Ford, Opel... Dans l'agro-alimentaire, les étrangers
comme Nestlé, B.S.N. , Ferruzzi , réalisent près de 40% du chiffre
d'affaires global. D 'I.B.M. à Siemens, l'informatique est totalement
sous tutelle extérieure . A quelques nuances près, la chimie l'est
également. L'électronique est contrôlée aux deux tiers par Alcatel,
Ericsson et Sony.
Les investissements étrangers se sont multipliés à la
faveur de conditions d'investissement très favorables. En effet, en
1985, les coûts de main d'oeuvre ne représentaient que 55 % de la
moyenne dans les pays de l' 0.C.D.E. En 1988, le rendement du capital
atteignait 34%, soit le double de la moyenne dans la C.E.E.
Parallèlement, la richesse du pays -donc les débouchés potentiels- se
développait à un rythme rapide, le PIB ayant progressé d'environ 5 % •
- 32-
par an de 1986 à 1990. A titre d'exemple, le parc automobile espagnol
a doublé en dix ans.
En réalité, on peut dire que les multinationales ont
nourri la croissance espagnole et se sont nourries d'elle.
Le tableau ci-après précise quelles sont les vingt
premières multinationales présentes en Espagne.
Les vingt premièrs multinationales en Espagne
Groupe
Activité
Actionnaire principal
CA 1990
(en milliards
Effectifs
de francs)
SEAT
Fasa-Renault
CEPSA
General Motors Espana
Ford Espana
FIAT Iberica
Citroën Hispania
IBM Espana
Peugeot • Talbot
Automobile
Automobile
Pétrole
Automobile
Automobile
Automobile
Automobile
Informatique
Automobile
Alcatel standard Iberica
Nissan Motors Iberica
Nestlé-AEPA
Agro-alimentaire
Mercedes-Benz
Cristaleria espanola
SAFE-Michelin
ENASA
Ericsson télécommunication
Dow Chemicals Iberica
Petromed
Industria de aluminium
Télécommunications
Automobile
Volkswagen (99,99 %)
Renault (83 %)
Elf (34 %)
GM (100 %)
Ford (100 %)
Fiat (100 %)
27
23
PSA (92 %)
IBM ( 100 %)
PSA (100 %)
Alcatel ( 100 %)
12.2
11.7
22,6
19.6
19.5
13
9
8
Automobile
Nissan (100 %)
Nestlé ( 100 %)
Daimler-Benz (87 %)
7.8
5.2
5.1
Verre
Saint-Gobain (75 %)
Pneumatique
Michelin (100 %)
Fiat (60 %)
Ericsson (100 %)
Dow (100 H)
BP (100 %)
Pechiney
5
7
Automobile
Télécommunications
Chimie
Pétrole
Aluminium
4.8
4.8
4.3
4.1
3.8
Source : Entreprises
c) La » manne » des fonds structurels européens
Depuis l'entrée dans la Communauté européenne ,
l'Espagne a largement bénéficié de concours financiers dans le cadre
des programmes structurels de la C.E.E.
Ainsi , compte tenu de ses versements à la C.E.E.,
l'Espagne était, en 1989, globalement bénéficiaire de 162,6 milliards
de pesetas. En 1986, date de son adhésion, Bruxelles lui versait
quelque 102 milliards de pesetas d'aides. Six ans plus tard, en 1992,
Madrid recevra plus de 757 milliards de pesetas.
21600
17400
2700
10 300
10 900
6400
9 000
5200
6 600
7300
6700
5100
3 300
3000
12 000
5200
3300
1000
5 600
4 000
33
L agriculture est la première bénéficiaire de cette
manne communautaire. De 1986 à 1991 , le Fonds européen agricole
- le Feoga- aura attribué à l'Espagne plus de 1 500 milliards de
pesetas, qui ont en grande partie permis de soutenir ses prix agricoles.
Par ailleurs , 76 % du territoire espagnol
appartiennent à l'«objectif numéro un » du Feder qui aide les
régions les moins développées. Le plan d'aide adopté à ce titre pour les
années 1989-1993 -près de 7 800 milliards de pesetas- en reversera
1 400 milliards aux régions espagnoles.
Enfin, de 1986 à 1991 , le Fonds social européen
aura versé à l'Espagne près de 490 milliards de pesetas, destinés en
majorité à des programmes de formation professionnelle.
Grâce notamment à ces aides communautaires et
aux nombreux investissements étrangers qu'elle a accueillis,
l'Espagne a partiellement rattrapé son retard avec les autres
pays européens.
2. L Espagne rattrape son retard sur l'Europe
Entre 1986 et 1990, le produit intérieur brut espagnol a
enregistré une croissance cumulée de 24,1 %, suscitant ainsi un
climat d'euphorie. Le produit national brut par habitant est passé de
400 dollars dans les années 1980 à près de 13 000 dollars en 1991 .
Durant la même période, un million d'emplois ont été
créés, soit plus de 1 000 parjour.
L'Espagne est ainsi devenue un gigantesque chantier. Ce
« miracle espagnol » a été entretenu par le lancement de projets
pharaonesques à Barcelone et à Sévi Ile , en vue des Jeux
Olympiques et de l'Exposition universelle de 1992, qui ont requis
environ 80 milliards de francs d'investissements en autoroutes ,
aéroports, tunnels, trains à grande vitesse etc...
On peut globalement estimer que l' Espagne a ,
jusqu'à présent, tiré pleinement parti de son adhésion à la C.K.K.
Bien qu'il soit difficile d'évaluer précisément le rôle joué
par celle-ci dans l'évolution des performances globales de l'économie
espagnole, on peut néanmoins noter qu'elle s'est traduite par des
gains substantiels de bien-être.
- 34-
Une impulsion considérable a été donnée à la demande
globale ainsi qu'au produit intérieur brut. A cet égard , il faut
souligner le rôle joué par le net renforcement de l'investissement et
par l'accélération de la diffusion du progrès technologique.
Par ailleurs , l'ouverture du marché intérieur à la
concurrence étrangère et les effets bénéfiques, au niveau de l'offre,
des taux élevés d'investissement ont -jusqu'à une date récenteatténué la propension de l'économie espagnole à l'inflation . En outre,
l'ouverture du marché intérieur aux investissements étrangers et
l'inversion de la tendance à la baisse des taux de rendement du capital
dans le long terme ont fait de l'Espagne un pôle d'attraction pour les
capitaux internationaux.
Enfin, l'intégration plus poussée de l'Espagne au sein de
l'économie européenne a favorisé la spécialisation et les économies
d'échelle .
Pourtant, il semble que le « miracle espagnol »
s'essoufle et que, outre qu'elle doit faire face à une conjoncture
devenue difficile, l'Espagne est confrontée à des problèmes
structurels persistants , qui exigent d'elle de nouvelles
orientations en matière de politique économique.
II . PROBLÈMES ACTUELS ET PERSPECTIVES D'AVENIR
DE L' ÉCONOMIE ESPAGNOLE
A.
LE
RALENTISSEMENT CONJONCTUREL
DE
LA
CROISSANCE
1 . Le ralentissement de l'activité depuis 1990
Après cinq années consécutives de croissance accélérée
(avec un taux de croissance moyen de 4,8%), l'Espagne est entrée
depuis la fin de 1990 dans une phase d'ajustement. La croissance de
son produit intérieur n'a atteint que 2,5 % en 1991 -contre cependant
+ 1,2 % seulement pour la C.E.E.- et sera sans doute encore inférieur
en 1992 . L'Espagne n'a donc pas échappé au ralentissement
économique général.
35
En réalité, les dernières prévisions de la B.B.V. (Banco de
Bilbao -Vizcaya ) pour 1992, qui font autorité en Espagne, n'incitent
pas à l'optimisme : PIB en faible croissance ( + 1,2 %), consommation
publique encore soutenue ( + 5,0 %) mais formation brute de capital
fixe en nette diminution (- 2,1 %), avec un coup d'arrêt très sévère
dans la construction (- 3,0 %). Dans le même temps, l'inflation devrait
remonter à 6,5 % et le taux de chômage dépasser 17 %.
Pour 1993, les prévisions sont également pessimistes,
même si celles du Gouvernement sont un peu moins sombres que
celles de la B.B.V.
Prévisions économiques pour 1993
(Taux de croissance en %)
Gouvernement
B.B.V.
62.891
62.487
Croissance du PIB
1,0
0,5
Consommation privée
1,3
Consommation publique
0,8
PIB (en milliards de pesetas)
Formation brute de capital fixe
dont construction
dont biens d'équipement
- 3,3
- 3,0
- 4,0
0,6
0,0
Exportation de biens et services
5,8
7,0
Importation de biens et services
2,9
3,5
Indice des prix à la consommation
5,0
Rémunération des salariés
6,0
Coût du travail unitaire
4,7
Emploi
- 1,3
Taux de chômage
17,0
Solde commercial (en % du PI B)
7,0
Solde courant ( en % du PI B )
- 3,3
Dette publique (en % du PIB)
47,0
amande nationale
f
- 1,2
- 1,8
- 0,2
1,1
2,5
Source : Banco de Bilbao-Vizcaya
5,2
6,0
4,1
- 2,0
17,5
- 6,3
- 3,0
47,5
36-
2.
L infléchissement
communautaire
de
la
dynamique
En réalité, le ralentissement économique international
met en évidence les limites d'un progrès spontané, fondé sur
l'intégration à l'Europe, et la difficulté à obtenir une croissance
équilibrée et non inflationniste.
La croissance passée a, en effet, essentiellement résulté
d'un rythme rapide de l'investissement tant en équipements qu'en
infrastructures et dans le domaine de la construction résidentielle.
Ces investissements, nationaux et étrangers, étaient largement sous-
tendus par la dynamique communautaire et leurs effets
multiplicateurs se sont diffusés à la consommation privée pour,
conjugués à d'autres facteurs, aboutir à une surchauffe et un
déséquilibre extérieur ; surchauffe et abaissement des barrières
tarifaires ont favorisé la pénétration étrangère et un développement
excessifdes importations.
A l'heure actuelle, les investissements s'essouflent
face à l'atonie de la demande étrangère, au ralentissement de
l'économie espagnole et au coût du crédit.
Ainsi , sur les cinq premiers mois de l'année 1992, les
investissements étrangers nets en Espagne ont chuté de 51 %, passant
à 48 milliards de francs. Le ralentissement s'est d'abord manifesté
dans les grands projets d'équipement et la fin des grands travaux.
Parallèlement, le tassement de la demande intérieure commence à se
faire sentir, de même que celui des recettes touristiques.
Dans ce contexte, le problème est de savoir si les
exportations sont en mesure de prendre le relais. La demande
étrangère ne s'y prête guère pour l'instant. Il semble pourtant que les
échanges avec la C.K.K. se rééquilibrent progressivement, grâce
notamment aux fortes exportations vers l'Allemagne. La progression
des exportations de biens et services prévue pour 1991 et 1992 est
honorable , compte tenu du ralentissement du commerce
international, les recettes touristiques étant gonflées par l'Exposition
universelle et les Jeux Olympiques. Mais elle n'est guère plus élevée
que celle des années 1989 et 1990. Le relais de l'investissement par les
exportations n'apparaît donc que très partiellement assuré.
Cette conjoncture difficile révèle également, davantage
que par le passé, les problèmes structurels dont souffre l'Espagne.
37
B. DES PROBLÈMES STRUCTURES PERSISTANTS
La croissance espagnole s'est accompagnée de
certains déséquilibres et l'Espagne souffre de la persistance de
handicaps structurels.
1 . Une croissance inflationniste...
L'inflation avait beaucoup diminué de 1984 à 1988, les
hausses de salaires ayant été plus modérées que par le passé .
Toutefois, les pressions inflationnistes sont restées fortes et l'inflation
a peu fléchi entre 1989 et 1990 (son taux était encore de 6,5 % fin
décembre 1990), les tensions les plus fortes se manifestant dans le
secteur des services.
Depuis 1986, la progression moyenne des prix de détail
dans le secteur des services est chaque année supérieure de près de
2,5 points à la hausse moyenne de l'ensemble des prix à la
consommation. Cet écart ne s'atténue pas, au contraire : fin mars
1991 , les prix des services avaient augmenté de 10,7 % sur un an. Une
tendance très différente caractérise les prix de vente au
consommateur final des produits manufacturés. Leur taux de
croissance annuel moyen a atteint 4,7 % sur la période 1986- 1990,
contre 6,5 % pour l'ensemble des prix à la consommation.
2. ... largement liée à une dérive des coûts salariaux
La cause essentielle de la résistance de l'inflation
espagnole à la baisse réside dans l'inadéquation entre l'évolution des
salaires et celle des gains de productivité.
D'après les estimations du ministère de l'Économie
espagnol, la productivité, mesurée en nombre d'unités de PIB par
personne active, a progressé de 1,1 % en 1990 , soit une légère
amélioration par rapport à 1989 ( + 0,8 %). Ce gain est cependant sans
commune mesure avec la progression de la rémunération par tête,
égale à 7,8% en 1990 contre 6,1 % en 1989. Résultante de ces deux
évolutions, la hausse du coût salarial unitaire s'est nettement
accélérée entre 1989 et 1990, passant de 5,3 % à 6,6 %. Cette dérive
38
s'observe particulièrement dans le secteur des services , dans
l'ensemble plus protégé de la concurrence.
3. Un taux de chômage qui reste très élevé
Le très haut niveau du chômage reste une des
caractéristiques de l'économie espagnole. Si la croissance a permis la
création d'un million de postes de travail entre 1986 et 1990 et une
forte réduction du taux de chômage -qui est passé de 22 % en 1986 à
environ 16 % en 1991-, ce dernier restant un des plus élevés d'Europe.
Cette situation s'explique, notamment, par l'existence
d'un certain nombre de handicaps structurels liés :
- au déficit de production dû à la mauvaise spécialisation
internationale pour certains biens ( biens d'équipement) ;
- au mouvement de rationalisation entamé à la fin des
années soixante-dix entraînant des licenciements non encore
achevés ;
- au phénomène d' «insiders * ( les chômeurs
n'interviennent plus dans la formation des salaires) ;
- à l'inadéquation de l'offre et de la demande de travail du
point de vue des qualifications.
4 . Des déficits budgétaires et commerciaux
importants
• En 1991 , le déficit public atteignait 4,4 % du produit
intérieur brut.
• L'ouverture des frontières espagnoles a entraîné une
forte hausse des importations. De 1986 à 1990, ces dernières ont
augmenté de 14 %, contre moins de 6 % pour les exportations. Dans le
même temps, le solde négatif de la balance commerciale a triplé.
39
C. LES PERSPECTIVES DE L' UNION ÉCONOMIQUE ET
MONÉTAIRE
Rappelons que dans le cadre du Traité de Maastricht, les
Etats membres ont fixé quatre critères que devront respecter les pays
désirant adopter la monnaie unique européenne : inflation et taux
d'intérêt à long terme dans la moyenne européenne, déficit public
inférieur à 3 % du produit intérieur brut ( PIB), dette totale inférieure
à 60% du PIB.
A l'heure actuelle, les performances économiques des pays
européens sont encore divergentes, ainsi que l'illustre le tableau ciaprès. Certes, l 'Espagne n'est pas le seul pays à ne pas remplir
les critères de convergence. Mais, sa naturelle volonté d'être
prête pour l'union économique et monétaire lui impose encore
plus sûrement un assainissement économique.
CEE : Des performances encore divergentes
en pourcentage
Inflation
Déficit public
Dette brute
( en % du PIB ) (en % du PIB )
Taux d'intérêt
Prêt pour
(2)
(2)
à long terme
( 3)
3,9
3,7
43,9
8,5
non
2,5
5,7
131,5
9,2
non
Danemark
1,8
1,7
59,6
Espagne
M
3.9
45.3
11,6
non
France
2,6
1,7
47,1
9,3
oui
4,1
2,1
36,7
17,9
17,9
85,2
9,5
19.4
Irlande
3,5
2.7
113,0
9.2
non
Italie
6,6
10.1
103,8
11.2
non
Luxembourg
3,2
2,0
6,9
8,8
oui
Pays- Bas
4,4
3,5
79,8
8,9
non
Portugal
10,2
5,4
64,7
17.1
non
(1)
Allemagne
Belgique
I
Gde-Bretagne
Grèce j
. OCDE. calculs OFCE
(1) Octobre 1991 -octobre 1990.
( 2) Année 1991
l'UEM
ouï
non
non
40-
111 . UNE POLITIQUE ÉCONOMIQUE VOLONTARISTE EST
NÉCESSAIRE
A. LES RECOMMANDATIONS DE L'O.C.D.E.
En mars 1992 , l'Organisation de coopération et de
développement économique (0.C.D.E.) a publié un rapport dans lequel
ses experts estiment que l'Espagne doit «prendre d'urgence des
mesures pour enrayer inflation et mettre un terme à la dégradation
tendancielle de la compétitivité extérieure».
En réalité, si l'Espagne veut renouer durablement avec
une croissance économique rapide, capable de faire reculer un
chômage très élevé, elle doit encore réaliser des progrès et
entreprendre des réformes. A cet égard, il conviendrait non seulement
qu'elle combatte l'inflation par les moyens classiques de politiques
monétaire, budgétaire et salariale restrictives, mais aussi qu'elle
réduise des dépenses sociales trop généreuses, qu'elle lutte contre la
fraude et les abus en matière de santé, qu'elle contrôle mieux les
allocations de chômage, réduise une fraude fiscale massive et
soumette à la concurrence des professions et des entrepreneurs
responsables de hausses excessives des prix des services.
L 'O C D E. insiste surtout sur l'indispensable lutte contre
l'inflation, qui doit passer par un rééquilibrage dans les efforts
demandés aux politiques monétaire, budgétaire et salariale. A cet
égard, l'O.C.D.E. critique le fait que les pouvoirs publics espagnols
aient fait supporté à la politique monétaire, sous forme de taux
d'intérêt très élevés, l'essentiel des efforts de rigueur qui doivent être
faits, alors même que les dépenses budgétaires et salariales ont
dérapé.
Une plus grande rigueur budgétaire s'avère donc
nécessaire .
Par ailleurs, une plus grande flexibilité du marché de
l'emploi serait de nature à améliorer la situation.
L'assainissement économique réclame également que la
priorité soit donnée à la bataille de la compétitivité. A cet égard, il
faudrait limiter les hausses de salaires aux gains de productivité.
• 41
B. LE - PLAN DE CONVERGENCE . PROPOSÉ PAR LE
GOUVERNEMENT
L Espagne veut éviter «à tout prix » -selon les termes de
son Premier ministre- une Europe à deux vitesses. Dans cette
perspective, le Gouvernement espagnol a récemment établi un « plan
de convergence» de l'économie avec les critères exigés par le
Traité de Maastricht -adopté par les Cortès le 29 octobre 1992- pour
l'adoption de la monnaie unique européenne. Ce plan est donc destiné
à mettre l'Espagne « au niveau » de ses principaux partenaires
européens d'ici 1997 .
Il faut rappeler que, outre la réduction de l'inflation, ces
critères de convergence imposent notamment la fixité du change. A
cet égard, la double dévaluation récemment réalisée sur la peseta
peut inquiéter. Il faut, en effet, rappeler que la peseta a dévalué de
1 1 % en deux mois, soit de 5 % le 16 septembre 1992, puis de 6 % le
21 novembre. A tout le moins est-il nécessaire de mettre en place,
parallèlement, un plan d'accompagnement, de façon à ce que
l'avantage de compétitivité qu'en retirera l'Espagne ne soit pas
immédiatement grignoté par un regain d'inflation , importée
notamment.
Par ailleurs, la réduction des déficits publics constitue
un autre axe prioritaire de convergence en vue de l'union économique
et monétaire .
A cet égard, il faut rappeler qu'après avoir culminé à 6,9 %
du P.I.B. en 1985, le déficit des administrations publiques s'est réduit
à 2,8 % en 1989, pour remonter à 4,9 % en 1991 .
Le transfert de plus en plus important de compétences
« budgétaires » aux régions , sans retrait correspondant de
l'administration centrale, a accentué la récente dégradation liée au
ralentissement économique .
Dans ces conditions, on peut estimer à près de 5 % du P.I.B.
le déficit global des administrations publiques en 1992, en dépit de
règles plus restrictives sur le déficit des budgets régionaux.
Dans ce contexte, le Gouvernement vient de proposer le
projet de budget le plus restrictif depuis dix ans. Les dépenses de
l'État ne devraient pas augmenter de plus de 3,7 % en 1993 ; le budget
de l'État s'élèverait ainsi à 14.800 milliards de pesetas, ce qui
permettrait de contenir le déficit public à 2,6 % du PIB (dans le respect
des critères de convergence).
42
Ce souci d'austérité budgétaire va dans la bonne direction ,
bien que :
- d'une part, touchant principalement les investissements
en infrastructures , logements etc , elle risque de ralentir la
modernisation du pays ;
- d'autre part, certains craignent un relâchement de cette
politique de rigueur dans la perspective des élections législatives qui
doivent se dérouler à la fin de l'année 1993.
Un débat s'est ainsi instauré en Espagne sur la capacité de
ce pays à suivre les recommandations du Traité de Maastricht.
A cet égard, M. Garcia DIEZ, ancien ministre de l'économie
sous le Gouvernement de M. SUAREZ, que votre délégation a pu
rencontrer, a récemment déclaré : «Même si je n'aime pas l'idée d'une
Europe à deux vitesses, elle existe, et l 'Espagne n 'est pas dans le groupe
des plus rapides.»
On le voit, l' Espagne se débat donc dans ses
nouvelles contradictions, à la recherche des grands équilibres
économiques . Mais, en dépit de ses difficultés et des
interrogations que celles-ci suscitent, les entrepreneurs restent
optimistes et les entreprises françaises continuent de voir dans
ce pays de belles opportunités.
43
CHAPITRE 11
Aspects particuliers de l'économie espagnole
I. L'AGRICULTURE ESPAGNOL !
A. PRÉSENTATION GÉNÉRAI ,K
1 . Des conditions naturelles pas toujours favorables
L'agriculture espagnole est fortement conditionnée par le
milieu naturel qui se caractérise par :
- un relief montagneux (58 % du territoire est à plus de
600 mètres d'altitude) ;
- de fortes pentes, qui entraînent des difficultés de
mécanisation et de transport ;
- une pluviométrie réduite, avec plus de 80 % du territoire
observant un déficit de 300 millimètres, et mal répartie ;
- des phénomènes d'érosion importants dans certaines
régions et un risque élevé de catastrophes naturelles ;
- des sols peu profonds sur une grande partie du territoire ;
- un ensoleillement important, puisque 75% du territoire
reçoivent plus de 2 500 heures de soleil par an.
Ces conditions géo-climatiques déterminent une mosaïque
de petites régions. Elles constituent, dans bien des cas, un facteur
limitant pour l'agriculture (déficit hydrique, érosion, gelées) mais
peuvent aussi devenir un atout pour un certain nombre de
productions.
• 44-
2. h exploitation des ressources
La surface agricole utile occupe en Espagne près de
27,2 millions d'hectares, soit 53,8% du territoire national .
L'Espagne représente 21 % de la surface agricole utile (S.A.U.) de la
C.E.E. Elle compte 1,8 million d'exploitations agricoles d'après les
critères d'identification Eurostat.
a) Les problèmes structurels
• Déjà particulièrement nombreuses dans le reste de
l'Europe, les petites exploitations dominent l'agriculture
espagnole : près des deux tiers des exploitations ont moins de
5 hectares et occupent moins de 6 % de la superficie, tandis que 1,3 %
des exploitations ont plus de 200 hectares et utilisent 51 % de la
surface totale. Au total, à peine 400 000 exploitations ont une marge
brute suffisante pour assurer leur viabilité et elles représentent plus
de 80 % de la marge brute.
• En Espagne, nord et sud du pays s'opposent par la
prépondérance des petites exploitations de culture intensive dans le
premier cas, des grands domaines d'agriculture extensive dans le
second .
• Enfin, plus de la moitié des chefs d'exploitation ont
plus de 55 ans et les classes d'âge plus jeunes (jusqu'à 45 ans) sont
moins bien représentées que dans les autres pays européens.
b) Des efforts de mise en valeur
Un effort important a été engagé depuis de
nombreuses années afin d'accroître l'étendue des superficies
irriguées, de développer la mécanisation, l'emploi des engrais et des
produits phytosanitaires et d'accélérer le développement foncier.
• 45 •
Notre délégation a pu constater la réalité de ces efforts,
notamment au cours de ses visites d'exploitations agricoles dans la
région de Sévi Ile.
• Ainsi , une politique d'irrigation ambitieuse a été
accomplie afin de remédier au déficit hydrique : 3 300 000 hectares
sont irrigués à l'heure actuelle, soit plus de 15 % des terres cultivées.
Ces projets se poursuivent avec un rythme de croissance annuel
d'environ 60 000 hectares, ce qui signifie, en termes de rendement,
des hausses de 100 à 200 % d'ici l'an 2000 .
• Les moyens de production ont été améliorés,
mais un retard certain demeure :
- Le nombre de tracteurs est en Espagne de 722 000
unités (contre 1,5 million en France ). Le taux de mécanisation
(nombre de chevaux par 100 hectares cultivés) est passé de 14,9 en
1960 à 224 en 1987 .
- La consommation totale d'engrais est de 1 million de
tonnes (alors qu'elle dépasse 6 millions de tonnes en France).
- Enfin , bien qu'en rapide augmentation , le niveau
d'utilisation des produits phytosanitaires représente moins de 20%
du niveau d'emploi français.
3. La place importante de l'activité agricole dans
l'économie nationale
a ) Part de l'agriculture et des industries agro­
alimentaires dans le P. I. II . marchand
L'agriculture contribuait pour 5,5% au produit
intérieur brut marchand en 1989 et les industries agricoles et
alimentaires à hauteur de 4,8 %.
Le poids de l'activité agricole et alimentaire dans
l'économie espagnole est de 10,3%, soit très sensiblement
supérieur à celui observé en France, où il ne représente que 6,8 % du
P.I.B. national .
46
b) Population employée dans l'agriculture
La population active agricole qui , en 1970 ,
représentait 25 % de la population active totale est passée, en 1988, à
environ 12,5% ( soit 1 848 400 actifs). Elle demeure élevée par
rapport à la moyenne communautaire, à 8,3%, et sa répartitition
territoriale est très inégale. Par ailleurs, 41 % des actifs agricoles ont
plus de 50 ans.
Enfin , le revenu agricole par actif est passé de
545 000 pesetas en 1982 à 1 434 000 pesetas en 1989.
c) Production finale et valeur ajoutée
La croissance tendancielle de la production agricole
finale a été de l'ordre de 3 à 4 % par an, au cours de la période récente,
pour atteindre 3 400 milliards de pesetas, soit 180 milliards de francs
en 1990 .
La valeur ajoutée brute au prix du marché par
personne occupée a , dans les dix dernières années, pratiquement
doublé. Ceci traduit bien l'importance des gains de productivité de
l'agriculture espagnole.
li. LES PRODUCTIONS
L agriculture espagnole est caractérisée par la
prépondérance des productions végétales : 59,5 % de la valeur de
la production agricole finale (contre 45 % dans l'Europe des Dix) et
par un développement de l'élevage plus faible (39,5 %) que dans
les régions du Nord de la Communauté.
Si les céréales occupent une part à peu près identique de la
superficie agricole utile dans l'Europe des Dix et en Espagne, les
cultures favorisées par le climat méridional (vignes, oliviers, fruits et
légumes, riz, fleurs et plantes ornementales, tournesol) sont beaucoup
plus largement développées en Espagne. Elles représentent ensemble
près d'un quart de la superficie agricole , contre 11 % dans la
Communauté à Dix, l'importance du vignoble et des oliveraies
expliquant l'essentiel de la différence (environ 6 % de la superficie
agricole utile en Espagne, contre 2 % dans l'Europe des Dix).
• 47-
La faible extension des surfaces fourragères ( un quart de
la superficie agricole en Espagne, la moitié dans l'Europe des Dix)
traduit dans le paysage agricole espagnol l' importance
proportionnellement moins grande des productions animales.
1 . les productions végétales
Les productions les plus significatives figurent dans le
tableau ci-après :
Espagne/CEE
1989
1990
à Douze
(en %)
Blé
5.468
4.759
6
Orge
<9.394
9.414
16
Maïs
3.328
3.051
14
241
256
9
Pommes de terre
5.366
5,342
12
Betteraves sucrières
7.333
7.364
8
Légumes
10.602
10.500
23
Fruits frais ( sauf agrumes)
3.243
2 600
17
Agrumes
4.752
4.655
44
551
626
44
33
42
19
Légumineuses
Huile d'olive
Vin ( en millions
d'hectolitres )
Au rang des secteurs fortement exportateurs, pratiquant
souvent la culture irriguée et obtenant d'excellents rendements à des
coûts généralement inférieurs à ceux de la Communauté des Dix,
figurent les agrumes (l'Espagne est le premier exportateur mondial
d'oranges et de mandarines), les melons, les pastèques, les fraises, les
poivrons, les courges et courgettes, les aubergines, les artichauts, les
haricots verts et les salades.
48
Le vignoble espagnol, premier au monde par son étendue,
permet l'exportation d'environ 5 à 6 millions d'hectolitres par an, en
dépit de rendements moyens inférieurs à ceux des pays producteurs de
l'Europe des Dix ; occupant plus de deux millions d'hectares, les
oliveraies dégagent des quantités exportables d'huile variant entre
quelques dizaines de milliers et plus de cent mille tonnes selon les
années. Enfin, l'Espagne est le premier producteur et exportateur
d'amandes dans le monde .
En revanche, toutes les céréales, sauf le riz et les graines
oléagineuses, demeurent des secteurs problématiques, dans lesquels
la production agricole de l'Espagne ne suffit pas à couvrir la
consommation intérieure : céréales fourragères et graines
oléagineuses représentent près de 40 % des importations agro­
alimentaires.
2. Les productions animales
Le cheptel espagnol occupe la deuxième place en Europe
en ce qui concerne les porcins (derrière la K.F.A.), les caprins (derrière
la Grèce) et les ovins (derrière le Royaume-Uni ). Il se situe au
troisième rang communautaire pour les bovins de boucherie et au
sixième pour les vaches laitières.
Les effectifs de poules pondeuses (deuxième place derrière
la France) et de volailles de chair ( troisième rang) sont également
importants.
49
CHEPTEL
(en fin d'année 1989 et en milliers de tètes)
Milliers
de tètes
Vaches laitières
2094
Vaches allaitantes
894
Brevis et agnelles
17 671
Chèvres et chevrettes
2121
Truies reproductrices
1929
Pondeuses sélectionnées
41434
PRODUCTION DE VIANDE EN 1990
(en milliers de tonnes )
Milliers
de tètes
Bovins
513,9
Ovins
217,4
Porcins
Volailles
1 788,8
836,6
PRODUCTION DE LAIT EN 1989
( en millions de litres )
Millions
de litres
Vaches
5 626
Brebis
276
Chèvres
414
50
Déjà proportionnellement moins important que dans
l'Europe des Dix, l'élevage espagnol n'a pas été en mesure de
satisfaire entièrement la demande croissante de produits
animaux ( viandes, produits laitiers) qui s'est fait jour au cours des
dernières années, parallèlement à l'élévation du niveau de vie. De
fait, ses structures de production rendent problématique son
expansion : en Espagne, si la taille moyenne des troupeaux ovins est
supérieure à celle de la Communauté à Dix (90 animaux contre 80),
les autres élevages détiennent en moyenne deux fois ( porcins) ou trois
fois moins d'animaux ( bovins) que dans l'Europe des Dix.
A l'exception des grands élevages extensifs du sud de
l'Espagne et des unités de production modernes dans le secteur des
volailles et, dans une moindre mesure , du porc, les petites
exploitations orientées vers les productions animales ne disposent
pas, pour le moment, des moyens nécessaires à la mise en place d'un
élevage comparable dans sa taille et ses performances à la moyenne
du reste de la Communauté .
3. Les industries agricoles et alimentaires
Le secteur des industries agro-alimentaires en Espagne se
caractérise par le nombre considérable et l'atomisation des
entreprises. On recense, en effet, 40000 entreprises, qui emploient
près de 320 000 salariés permanents.
Le chiffre d'affaires du secteur a été de 290 milliards de
francs en 1989 .
Le produit intérieur brut des industries agro-alimentaires
connaît une évolution positive, en moyenne sensiblement supérieure
à l'évolution de la production industrielle. Le taux d'accroissement a
ainsi été de 3,2 % en 1988.
On relèvera la faiblesse du secteur coopératif (moins de
20 % du secteur des industries agro-alimentaires).
Une autre caractéristique importante de ce secteur est la
cohabitation de deux modes de production et de distribution.
En 1988, Alimarket estimait que les 50 premières entreprises agro­
alimentaires du pays assuraient le tiers du chiffre d'affaires. Ainsi ,
d'un côté subsiste un secteur traditionnel important - meunerie ,
production d'huile d'olive, abattage des gros bovins -qui s'apparente
davantage à l'artisanat qu'à l'industrie ; de l'autre côté, existe un
secteur moderne et efficace, utilisant pleinement la communication
• 51 •
médiatique de masse et les techniques les plus modernes : Nestlé,
Coca-Cola , B S N. occupent ainsi les tous premiers rangs de l'industrie
agro-alimentaire espagnole.
Enfin, il convient de noter que le marché alimentaire
espagnol est de plus en plus sous contrôle étranger et, pour bien des
observateurs, cette tendance pourrait se poursuivre ces prochaines
années. En 1991 , les dix premières sociétés du secteur étaient aux
mains de capitaux étrangers.
C. ATOUTS ET HANDICAPS DE l /AGRICULTURE ESPAGNOLE
• Au niveau des handicaps
S'agissant des handicaps, il faut souligner :
- une grande disparité au sein de l'activité agricole ( une
agriculture très compétitive face à une agriculture très en retard),
ainsi qu'il a été exposé précédemment ;
- une faible productivité dans de nombreux secteurs ;
- l'importance des problèmes socio-structurels ( problèmes
d'adaptation , de modernisation et de reconversion des exploitations)
et le manque d'infrastructures ;
- des secteurs en difficulté, céréales en particulier ;
- des facteurs climatiques limitatifs pour la production
agricole ; le problème du manque d'eau constitue un facteur
particulièrement limitant pour l'Andalousie, qui , de ce fait, pourra
difficilement accroître la superficie de terres irriguées, sachant qu'à
l'heure actuelle celles-ci représentent 600.000 hectares sur un total de
4 milliards d'hectares de terres cultivées ;
- un secteur de transformation et de commercialisation des
produits agro-alimentaires assez faible et atomisé ;
• un secteur coopératif peu développé ;
- un manque de formation des agriculteurs ;
- une organisation économique insuffisamment
développée.
• 52-
• Au niveau des atouts
S'agissant des atouts de l'agriculture espagnole, il faut
citer notamment :
- une vitalité et un dynamisme importants ;
- un potentiel de croissance sensible et la possibilité de
réaliser de gros gains de productivité ;
- des conditions climatiques favorables pour un certain
nombre de productions ( fruits et légumes, vin...) ;
- des secteurs compétitifs ( fruits et légumes, primeurs) ou
susceptibles de se développer ( ovins, porcins , bovins pour
l'engraissement, certains oléagineux : soja, tournesol ) ;
- des coûts de production encore plus faibles que dans
nombre de pays communautaires ;
- des efforts importants en matière d'irrigation.
I ). L AGRICULTURE ESPAGNOLE DANS I.K CONTEXTE
EUROPÉEN
L Espagne est, par sa surface, le deuxième pays de
l'Europe des Douze. Avec son adhésion, 2,2 millions d'exploitations,
2 millions d'actifs et 27 millions d'hectares sont venus s'ajouter au
potentiel agricole de la C.K.K. Il s'agit d'un saut quantitatif très
important, puisque la C.K.K. a ainsi enregistré une augmentation de
27 % de sa surface agricole utile et de 32 % du nombre de ses
exploitations. Cependant, l'apport à la production finale en valeur fut
nettement moins important, puisqu'il a représenté environ 10 % de la
production européenne. Cela signifie qu'avec l'entrée de l'Espagne,
l'agriculture communautaire a perdu en termes d'efficacité technique
et économique.
Les données de base et les productions de l'agriculture
communautaire se trouvent ainsi profondément modifiées : si , dans le
domaine des fruits et légumes, l'Espagne pouvait compter sur une
position concurrentielle forte, grâce à des conditions naturelles
favorables, des coûts de production bas et un réel dynamisme
commercial, à l'inverse, des transformations devaient s'opérer dans
l'élevage et le secteur des céréales pour leur permettre d'affronter la
concurrence des autres pays européens.
53
1 . Concurrence et complémentarités
L apport des produits agricoles méditerranéens récoltés en
Espagne a augmenté la production communautaire dans des
proportions variant entre 20 et plus de 100% selon les produits
(abricots, agrumes, oignons, riz, huile d'olive, tomates, vin, pèches,
etc...) alors que , dans les autres secteurs, l'accroissement a été
généralement plus modeste : de 8 à 12% pour le sucre, le blé, la
viande bovine ou la viande de porc.
• L' Espagne représente ainsi une menace
particulièrement précise pour les régions méridionales de la
Communauté, qui sont aussi des régions en proie à de graves
déséquilibres socio-économiques, et ce d'autant plus qu'elle dispose
d'un potentiel de production important, lié au développement de
l'irrigation. Mais elle concurrence également les serristes du Nord
produisant à contre-saison. Les producteurs ibériques, du fait de
conditions météorologiques particulièrement favorables, peuvent, en
effet, produire hors-saison sans avoir recours au chauffage. Ils
bénéficient, en outre, d'un réseau à l'exportation très bien organisé.
• Entre la production de l'Europe des Dix et celle de
l'Espagne , existe également un certaine complémentarité. La
Communauté des Dix est excédentaire pour de nombreuses céréales,
pour le sucre, les pommes de terre, les produits laitiers, le fromage,
toutes productions que le nouvel Etat-membre importe ; à l'inverse,
elle s'approvisionne auprès de l'Espagne en oranges, raisins de table,
fruits à coque ou légumes.
• Cependant, des excédents sont apparus ou se sont
renforcés dans la Communauté élargie pour l'huile d'olive, le riz,
certains fruits et légumes frais, les tomates et le vin. Ces excédents
risquent de s'accroître, l'agriculture de l'Espagne disposant de
réserves de productivité ( possibilité d'étendre l'irrigation , de
restructurer les exploitations, de recourir de façon accrue aux
techniques de production moderne). Par ailleurs, certains secteurs
déficitaires de l'Espagne sont aussi des domaines où la C.K.E. est ou
devient globalement importatrice : le maïs, les protéines végétales, le
tabac, la viande (dans une moindre mesure).
54
2. Les problèmes posés par l'élargissement de lu
Communauté
• Le saut quantitatif provoqué par l'élargissement de
la Communauté à l'Espagne -et au Portugal- s'est accompagné
d'une modification du paysage agricole de la Communauté,
reflet des grandes caractéristiques de l'agriculture du nouvel Etatmembre :
- renforcement du poids de certaines cultures (vigne,
oliviers, riz, fruits et légumes), diminution relative de l'importance
des grandes cultures des régions septentrionales de la Communauté
(blé, colza, betteraves à sucre) et surtout des productions animales,
plus particulièrement de l'élevage bovin ;
- aggravation des problèmes structurels de l'agriculture
communautaire par la constitution d'une vaste zone d'agriculture aux
structures souvent fragiles.
• Des conditions de concurrences nouvelles sont
apparues. Si la libre circulation des produits agricoles espagnols à
l'intérieur de la Communauté avait été établie dès l'adhésion de
l'Espagne, le développement des échanges aurait conduit, pour
certains produits méditerranéens (vins, agrumes, abricots, melons,
fraises, raisins de table, amandes, noisettes, aubergines, artichauds,
tomates, pommes de terre primeurs, laitues, scaroles), à une vive
concurrence entre régions de la Communauté élargie , tournant
rapidement à l'avantage du nouvel arrivant, dont les coûts de
production sont généralement plus bas , même à niveau de
performance identique, et qui n'appliquait, en outre, jusqu'à une
période récente, qu'à une fraction réduite de sa production de fruits et
légumes, les disciplines de mise en marché auxquelles sont astreints
les producteurs du reste de la Communauté (normes de qualité,
interventions sur le marché).
En sens inverse , les secteurs problématiques de
l'agriculture espagnole n'auraient probablement pas pu supporter
une confrontation brutale avec la production des autres Etatsmembres, qui aurait suivi l'extension sans aménagement du marché
commun agricole. Plusieurs variétés de fruits et de légumes produites
dans la Communauté des Dix auraient d'ailleurs pu se substituer sur
son propre marché à la production espagnole, lorsqu'elles y étaient
faiblement représentées ou inexistantes.
55
Il convenait donc de prévoir pour ces secteurs sensibles des
dispositions particulières, propres à permettre de part et d'autre une
adaptation progressive aux conditions nouvelles engendrées par
l'élargissement et, par là , l'interpénétration sans dommage des
marchés.
3. L'agriculture espagnole et la politique agricole
commune
a) La réglementation communautaire
A l'heure actuelle, les agriculteurs espagnols ont la
sensation que l'Espagne a adhéré à la Communauté européenne au
mauvais moment.
Pourtant, l'Espagne s'est montrée favorable à la
réforme de la politique agricole commune ( PAC), dont elle éprouve des
difficultés à respecter la réglementation, particulièrement dans le
domaine dés quotas laitiers.
Par ailleurs, premier pays du monde en matière de
surface de vignoble, l'Espagne souhaite qu'une solution soit trouvée
pour améliorer les problèmes de commercialisation du vin.
A cet égard , l'Espagne a « boycotté » le programme
européen d'arrachage, dont elle craint les conséquences néfastes en
matière de désertification .
En réalité , l'Espagne , et tout particulièrement
l'Andalousie -dont 18 % de la population est agricole mais dont seuls
21 % des produits sont affectés par la réforme de la PAC, les olives et le
coton n'étant pas visés par elle- ont pour stratégie, révélée par le
ministre andalou de l'agriculture, de profiter au maximum des
avantages de la PAC et d'en limiter les coûts.
S'agissant des coûts, l'Andalousie a mis en place un
plan global , qui comprend deux axes :
- d'une part, un volet reboisement, un plan forestier
ayant été adopté en 1989 , pour une durée de 60 ans et un
investissement de 1.600 milliard de pesetas ;
- d'autre part, un plan de reconversion, qui vise à
stabiliser la population en zone rurale et à répartir les charges
• 56
nouvelles sur l'ensemble des secteurs, et non exclusivement sur le
secteur agricole.
Dans un autre domaine, il faut souligner les craintes
que suscitent chez les Espagnols le développement des importations
ainsi que la pression de l'immigration illégale en provenance du
Maroc.
S'agissant des avantages , il faut rappeler que
l'Espagne a perçu des aides communautaires très conséquentes.
b) Les aides communautaires
Ainsi qu'il a été précisé précédemment, l'agriculture
espagnole bénéficie des aides communautaires transitant par le
Fonds européen d'orientation et de garantie agricole ( FEOGA). Ainsi ,
en 1989, l'Espagne a reçu du FEOGA plus de 2 milliards d'ÉCU.
Au sixième rang des pays bénéficiaires de la section
garantie après la France, l'Italie , la K.P.A. , les Pays-Bas et le
Royaume-Uni , l'Espagne se situe au troisième rang des bénéficiaires
de la section orientation , après l'Italie et la Grèce.
4. Le commerce extérieur agricole et alimentaire
L Espagne a exporté pour plus de 856 milliards de
pesetas de produits agro-alimentaires en 1990, essentiellement
des agrumes et autres fruits, des légumes frais et transformés, de
l'huile d'olive .
Elle a importé pour 996 milliards de pesetas de
produits agro-alimentaires en 1990, principalement des produits
d'origine animale ( produits de la pêche, produits laitiers, viandes,
animaux vivants), des graines oléagineuses, du sucre brut et des
céréales.
Excédentaire jusqu'en 1988 , la balance commerciale agro­
alimentaire espagnole est déficitaire, depuis 1989, avec un taux de
couverture de 86 % en 1990.
. 57 .
II . LK SECTEUR ÉNERGÉTIQUE
A.
LES
AXES
PRINCIPAUX
DU
NOUVEAU
PLAN
ÉNERGÉTIQUE NATIONAL (P.E.N. )
Alors que le Gouvernement socialiste de M. Felipe
GONZALEZ devait approuver avant la fin de l'année 1990 le Plan
énergétique national 1991-2000 (P.E.N.), la présentation de ce texte
avait été différée à cause de la crise da Golfe. C'est donc seulement le
26 juillet 1991 que le Gouvernement espagnol a approuvé le nouveau
P.E.N. établissant les lignes directrices de la politique énergétique
espagnole pour la décennie à venir.
Les quatre principaux axes de ce plan sont les suivants :
- reconduite du moratoire nucléaire ;
- développement de la consommation de gaz naturel ;
- extension de l'autogénération et application des normes
européennes en matière d'environnement ;
- renforcement des programmes d'économie d'énergie.
Le P.E.N. prévoit que la consommation finale d'énergie
enregistrera une augmentation annuelle de 2,5 % ; les
investissements devraient atteindre 3 700 milliards de pesetas
pendant la période envisagée : le secteur de la production d'électricité
devrait ainsi recevoir 900 milliards , celui de la distribution
2 000 milliards. La construction des gazoducs se verra consacrer
500 milliards et les économies d'énergie seront soutenues à hauteur
de 200 milliards de pesetas, ce qui devrait entraîner des
investissements de l'ordre de 1 000 milliards.
Le plan visant à réduire la dépendance du pays à l'égard
du pétrole, la part de ce dernier dans la consommation énergétique
sera ramenée de 52,59 % actuellement à 50,73 % en l'an 2000.
Parallèlement, la contribution du gaz dans le bilan énergétique
devrait passer de 5,57 % à 12,16 %. Les énergies alternatives
progresseront dans le même temps de 2,74 à 3,17 %, une croissance de
2,45 à 2,83 % étant attendue en ce qui concerne l'hydraulique.
• 58 .
Tout en continuant de jouer un rôle important dans la
production d'électricité, le charbon verra sa contribution ramenée de
21 % à 19,40 %, tandis que l'énergie nucléaire ne fournira plus que
11,28 % de la consommation d'énergie contre 15,76 % à l'heure
actuelle. Ce recul s'explique par le fait qu'aucune nouvelle tranche
n'entrera en service, puisque le gouvernement a décidé de maintenir
le moratoire qui touche cinq réacteurs depuis le milieu de la dernière
décennie.
B. LES DIFFÉRENTES SOURCES D'ÉNERGIE
1 . Un secteur pétrolier atypique et en pleine mutation
• Depuis 1927 existait en Espagne un monopole
d' importation , de raffinage et de distribution des
hydrocarbures . L'État prenait ainsi la responsabilité de
l'approvisionnement du pays en produits pétroliers, en délégant ce
monopole à plusieurs sociétés de raffinage et à une seule société de
distribution ( la C.A.M l'.S.A.).
• Depuis quelques années, ce secteur fait l'objet d'une
restructuration progressive importante, qui devrait aboutir à une
réorganisation totale . Ainsi , en 1981 , l'Institut national des
Hydrocarbures ( I.N.H .) a été créé, avec pour mission de coordonner et
de contrôler les activités du secteur public des hydrocarbures. La
deuxième étape a été achevée en octobre 1987 avec la constitution de
REPSOL., groupe réunissant la totalité des compagnies d'I.N. II .,
partiellement privatisé en 1989 . Un projet de loi devrait
prochainement venir parachever cette réorganisation du secteur.
• Le monopole de la société de distribution
(C.A.M.P.S.A.), incompatible avec les principes du Traité de
Home, a été assoupli. Le 31 décembre 1991 , l'assemblée générale de
la C.A.M.P.S.A. a approuvé sa propre scission en deux sous-ensembles,
logistique et commercial . Le pays comprend donc actuellement deux
réseaux :
69
- le « réseau du monopole » (4 978 points de vente ),
alimenté par la C.A.M.P.S.A. et possédé par cette dernière ou par des
exploitants bénéficiant d'une concession de l'administration ;
- le • réseau parallèle», constitué de sociétés autorisées à
importer des produits européens ou d'opérateurs ayant avec elles des
contrats d'approvisionnement. Ce réseau est soumis à des quotas
d'importation et de mise à la consommation.
La C.A.M.P.S.A. garde, pour le moment, un monopole de
fait, -compte tenu des infrastructures existantes-, en ce qui concerne
le transport des hydrocarbures, et elle vend ses actifs commerciaux à
d'autres sociétés .
• La réglementation a évolué vers plus de souplesse
dans le cadre de la préparation au grand Marché européen :
- la fixation des prix a été remplacée par un système de
prix-plafond, déterminé actuellement par la C.A.M.P.S.A. ainsi que par
le Gouvernement depuis octobre 1992 ;
- la distribution des carburants aviation , des lubrifiants et
du bitume a été libéralisée ;
- les autres produits pétroliers en provenance de la C.K.K.
sont soumis à des quotas et peuvent être distribués à des prix
réglementés en dehors du monopole de la C.A.M.P.S.A., en bénéficiant
d'une fiscalité plus avantageuse.
• En dépit de la réduction du monopole dans le secteur
énergétique, l'Espagne refuse -tout comme la France à certains
égards- d'épouser les principes de totale libéralisation proposés par la
Communauté européenne, estimant que • l'énergie ne peut pas être
considérée comme une marchandise quelconque ». Ainsi , les autorités
espagnoles, même si elles ont admis et traduit dans les faits le
principe de la libre concurrence dans le secteur pétrolier, ne
demeurent pas moins partisanes du fait que des mesures de
régulation doivent exister afin d'assurer une juste répartition de
l'énergie entre les citoyens et une sécurité des approvisionnements.
60
2. Un pari clair sur le gaz
• Les autorités espagnoles ont entamé un processus de
restructuration du secteur gazier, en se fixant comme objectif une
consommation accrue de cette source d'énergie, passant de moins de
6 % du total de la consommation d'énergie à l'heure actuelle à 10 ou
12% en l'an 2000.
Ce plan ambitieux requiert de la part de l'État et du
secteur gazier un très gros effort en matière d'équipement,
d'infrastructures et de distribution.
C'est pourquoi , le gouvernement espagnol a mis en place
deux pôles :
- le premier, ENAGAS, filiale de l'I.N.H ., est une société
publique qui importe le gaz naturel . Cette entreprise n'a aucun
monopole de droit, mais on peut considérer qu'elle jouit d'un monopole
de fait ;
- le deuxième pôle concerne la distribution domestique. A
la fin de l'année 1991 , a été créée la société CAS NATUREL SA , qui
résulte du regroupement de très nombreuses sociétés privées de
distribution et qui distribue à présent 90 % du gaz destiné à l'usage
domestique.
• Cependant, cette politique volontariste de l'État
espagnol est difficilement compatible avec la logique des projets
de directives de la Communauté européenne en matière de
libéralisation du secteur. La clause dite de l'accès des tiers au réseau
(A T. H.). est donc inacceptable pour le gouvernement espagnol qui
avance les arguments suivants : l'Espagne ne dispose pas d'une
infrastructure gazière suffisante. Elle veut s'en doter et doit donc
investir massivement. Dans ce but, elle a besoin d'une forte
intervention de l' État pour garantir la sécurité des
approvisionnements en gaz. Ainsi , l'Espagne a dû conclure avec des
pays tiers (l'Algérie, notamment) des contrats à long terme sur une
base de « take or pay ».
Par conséquent, une libre et totale concurrence dans ce
secteur ruinerait ses efforts et compromettrait les accord passés.
61 •
En outre, le gaz est essentiel dans la stratégie énergétique
de l'Espagne dans une optique de rentabilité et de protection de
l'environnement.
3. L'électricité
• Le secteur électrique espagnol n'est pas dominé par
une entreprise monopolistique. On trouve dans ce secteur de
nombreuses entreprises privées , d'ailleurs en cours de
restructuration , et une entreprise publique : ENDESA. La situation de
l'Espagne dans le domaine électrique est donc moins critique vis-à-vis
des directives européennes que celle du pétrole et du gaz.
• Les autorités espagnoles ont entamé , voie» deux ans
environ , une restructuration de ce secteur, afin de le rendre plus
compétitif. En voici les principes essentiels :
- maintien du « cadre tarifaire stable », cadre légal
déterminant le calcul du prix de l'énergie électrique ;
- concentration de la production ;
- renforcement du rôle de REDESA (monopole de la hautetension et rôle accru de contrôle et de régulation des
approvisionnements) ;
- planification concertée des investissements et gestion
intégrée du système ;
• séparation des actifs de production et de distribution.
Il s'agit concrètement de créer deux groupes privés
d'entreprises et de renforcer l'influence de l'entreprise publique
ENDESA, complétée par celle de REDESA en matière de planification et
d'approvisionnements extérieurs.
Toutes ces dispositions seront confirmées par l'adoption
d'une loi de restructuration du secteur électrique à la fin de l'année
1992 .
62
• Enfin, le Gouvernement espagnol a décidé de reconduire
le moratoire nucléaire en vigueur depuis 1984,
• Afin de faire face à la consommation énergétique de l'an
2000, le P.E.N. compte notamment sur le développement de
l'autoproduction dans le secteur industriel, qui pourrait fournir
2000 mégawatts (MW). On va également s'attacher à allonger la
durée de vie des centrales existantes, dont seule une puissance de
quelque 400 MW sera mise à l'arrêt d'ici à la fin du siècle. D'autre
part, Électricité de France mettra à la disposition de l'Espagne une
puissance de 1 000 MW.
S'agissant des nouvelles capacités à mettre en oeuvre ,
elles totaliseront environ 4 900 MW . Les nouvelles centrales
hydrauliques devraient fournir 940 MW. Par ailleurs, des centrales
brûlant du charbon national et du charbon importé devraient être
construites. Enfin, des centrales au gaz naturel (ce dernier arrivant
d'Algérie dans quelques années par le gazoduc traversant le détroit de
Gibraltar) augmenteront le parc de 1 800 MW tandis que, pour la
demande de pointe, des turbines à gaz seront mises en chantier.
4. Un plan d'économies d'énergie
Le gouvernement espagnol ayant décidé de stimuler les
économies d'énergie, un groupe de travail pluridisciplinaire sera
prochainement mis en place. Composé de représentants des
ministères de l'économie et des finances, de l'industrie, des travaux
publics, il aura un rôle de proposition dans ce domaine.
C. LES CONSÉQUENCES PRÉVISIBLES DU NOUVEAU P.K.N.
C'est une restructuration importante et un réel effort
d'adaptation aux exigences communautaires qui a été
accompli, ou est en voie de l'être, par l'Espagne dans le domaine
énergétique. Ce plan fait cependant l'objet de vives critiques,
dont les principales sont les suivantes :
• 63-
• Un alourdissement de la fiscalité indirecte sur les prix
de l'énergie, en particulier l'essence, afin d'agir sur la demande, est
probable.
• La reconduite du moratoire nucléaire devrait, en outre ,
avoir pour conséquence une augmentation de 10 % du prix de
l'électricité .
• La dépendance énergétique de l'Espagne se trouvera
augmentée de 6 points, du fait du recours intensif au gaz naturel
( fourni principalement par l'Algérie) et du moratoire nucléaire.
• S'agissant des projets de directives européennes, il faut
rappeler que les Etats-membres se sont récemment opposés à la totale
libéralisation du secteur de l'énergie que leur adoption aurait
entraînée. En conséquence, ils ont demandé à la commission de faire
de nouvelles propositions.
65
CHAPITRE 3
Quelle place pour la France sur le marché espagnol ?
L' adhésion de l Espagne à la communauté
européenne a tout d'abord suscité certaines craintes en France.
Pourtant, les deux pays se sont rapidement révélés
être des partenaires de premier plan et l'Espagne reste «en dépit
des difficultés qu'elle traverse- un pays porteur d'opportunités.
A. LA FRANCE : UN PARTENAIRE ÉCONOMIQUE DE PREMIER
PLAN POUR L'ESPAGNE
1 . Le développement des relations commerciales
franco-espagnoles
a) Des données globales favorables à la France
En 1978 , notre déficit avec l'Espagne atteignait
2,9 milliards de francs et représentait notre 8e déficit bilatéral. Ce
déficit est accentué jusqu'en 1985, où il a atteint son niveau record de
7,2 milliards de francs.
Depuis l'entrée de l' Espagne dans la C.K.K., les
échanges de la France avec ce pays se sont nettement redressés
en notre faveur. La France a donc bien su tirer parti de
l'ouverture du marché espagnol.
Ainsi , dès 1986, notre déficit s'est contracté pour
s'établir à 3,2 milliards de francs, et depuis 1987, notre solde dégage
un excédent qui ne cesse de croître chaque année, pour atteindre
14,9 milliards de francs en 1991 , où il représente notre premier
excédent bilatéral .
66 ■
Le volume de nos échanges s'est considérablement
accru : les flux ( importations + exportations) sont passés de
19,5 milliards de francs en 1978 à 148,7 milliards de francs en 1991 ,
soit une hausse de 660 %. Sur cette même période, les importations
ont été multipliées par près de 6 et les exportations par près de 10.
La part de marché de la France a évolué tout aussi
favorablement, puisque de 8,3 % en 1980 elle est passée à 15,2 % en
1991 , la France étant ainsi devenue le 2ème fournisseur de l'Espagne
derrière l'Allemagne.
Ainsi que l'illustre le tableau ci-dessous, ce dynamisme
des exportations françaises vers l'Espagne se traduit également par
une place plus importante de ce pays parmi nos clients : 8ème client
en 1978 ( avec 3 % de nos ventes), 5ème en 1991 (avec 6,8 % de nos
exportations). En revanche, l'évolution de l'Espagne parmi nos
fournisseurs est moins spectaculaire : 8ème fournisseur en 1978 (avec
2,4 % de nos achats), 7ème en 1991 (avec 5,1 % de nos importations).
La place de l'Espagne dans le commerce extérieur français
Montant an Milliards
Rang de l' Espagne
de F et rang de
déficit
parmi nos clients
1% du total de nos
exportations )
1978
• 2.9 ( 8e déf )
8e 13.0 % )
8e 12.4 % )
1979
• 2.2 (1 ledit)
8e (2.6 % )
9e ( 2.9 % )
1980
• 3.4 ( 11e défi
8e (2.8 %)
9e (2.9 %)
1981
• 2.0 ( 13e défi
8e ( 2.7 % )
9e ( 2.8 % )
1982
• 4.3 ( 10e déf )
8e (3.1 % )
9« (3.0 % >
1983
• 4.9 ( 9e déf)
8e (3.2 % )
7e (3.4 %)
1984
• 4,5 (13e déf )
8e ( 3.2 % )
7e (3.4 *)
1985
• 7.2 ( 8e déf )
8e (3.3 % )
7e (3.8 %)
l' excédant ou du
Rang d« l' Espagne
parmi nos fournisseurs
(% du total de nos
importions)
8e (4,1 % )
7e (4,1 % )
1987
• 3.2 (13e déf)
♦ (3e exc)
6e ( 5.3 % >
7e (4.3 % )
1988
* 7.4 (3e exc )
7e ( 5.3 *)
7e (4.2 % )
1989
♦ V 2 (3e exc )
6e (5.7 %)
7e (4.4 %)
1990
♦ 12.8 (3e ». < c )
5e ( 6.3 % )
7e (4.7 % )
1991
+ 14.9 ( le exc)
lie (6.8 % )
7e ( 5.1%)
1986
Source : Ministère du commerce extérieur.
• t>7-
b) L analyse sectorielle
• S'agissant du secteur agro-alimentaire , le
principal client et le premier fournisseur de l'Espagne est la France.
Si l'entrée de l'Espagne dans la Communauté
économique européenne avait engendré d'importantes craintes sur la
capacité qu'aurait la France à résister à la concurrence de ses
produits agricoles, particulièrement en matière de fruits et légumes,
l'adhésion espagnole s'est en fait accompagnée d'un redressement de
nos échanges qui, déficitaires de 1,9 milliard de francs en 1978, sont
devenus excédentaires depuis 1989 et ont progressé régulièrement
pour dégager un solde positif de 2,2 milliards de francs en 1991 .
Pour autant, toutes nos appréhensions n'ont pas disparu : le secteur
des vins reste encore exposé ; en outre, le système d'exploitation
espagnol se modernise et peut, à terme, se révéler plus concurrentiel
si leurs coûts d'exploitation ne rejoignent pas les nôtres.
Nous exportons surtout vers l'Espagne des céréales,
des produits de la mer, du lait, des produits laitiers et des produits de
la sylviculture. L'ouverture du marché espagnol , en 1986, nous a
permis d'accroître nos exportations de produits agro-alimentaires
(produits à base de céréales, sucre, chocolaterie et confiserie par
exemple ).
L'Espagne, quant à elle, a maintenu ses exportations
traditionnelles de fruits et légumes, frais ou en conserves et d'huiles.
En 1991 , son principal courant d'exportations vers la
France est resté celui des fruits et légumes frais ou transformés, qui a
atteint 65,9 % des ventes espagnoles (contre 63,9 % en 1990), avec
120 milliards de pesetas . Les agrumes constituent la part principale
de ces exportations.
Au . total , on peut noter que la préférence
communautaire joue en faveur de la France, qui a consolidé sa
position et augmenté sa part sur le marché espagnol , à
l'exception cependant du secteur des fruits et légumes.
• S'agissant du secteur énergétique, les échanges
entre les deux pays sont faibles. En effet, ils n'ont représenté, en 1991 ,
que 2,6 % de nos importations et 1,7 % de nos exportations, leur solde
étant légèrement déséquilibré en. faveur de l'Espagne (• 0,4 milliard
de francs).
• ен-
• S agissant du secteur industriel, il faut souligner
que l'essentiel de l'excédent français provient de ses produits. La
France a , en effet, bénéficié de la très forte demande de biens
d'équipement professionnel des entreprises espagnoles et de biens de
consommation des ménages. Ainsi , alors que ces produits dégageaient
un déficit de 1,3 milliard de francs en 1978, ils nous ont procuré un
excédent de 12,2 milliards de francs en 1991 .
- Les produits intermédiaires ont dégagé un solde de
+ 5,5 milliards de francs en 1991 , contre - 0,4 milliard de francs en
1978. La "rance est devenue excédentaire en métaux et a fortement
consolidé son excédent en produits chimiques.
- En ce qui concerne les produits élaborés, les biens
d'équipement professionnel ont dégagé un solde positif de + 10,5
milliards de francs en 1991 , contre + 0,6 milliard de francs en 1978.
Nos exportations dans ce secteur ont été multipliées par 10 sur cette
période, nos importations par 6.
Le secteur automobile, quant à lui , est le secteur le
plus dynamique des échanges franco-espagnols. Ainsi :
• nos importations ont été multipliées par 9 pour
atteindre 24,8 milliards de francs en 1991 , soit 37 % de nos
importations totales ;
• nos exportations ont été multipliées par 10 pour
s'élever à 19,2 milliards de francs en 1991 , soit 23,4 % de nos
exportations totales.
Le solde global , négatif en début de période, est devenu
positif en 1987, puis est redevenu négatif depuis 1989 (- 1,2 milliard
de francs). Ce déficit a atteint - 5,6 milliards de francs en 1991 , soit
une hausse de 5,3 milliards de francs par rapport à 1990.
L'importance de ces échanges s'explique par la forte
implantation des constructeurs français ( Renault et RVI, Peugeot et
Citroën) en Espagne et par l'intensité des transactions entre leurs
établissements de pari et d'autre des Pyrénées.
De plus, l'installation en Espagne dans les années 1980
de grands groupes étrangers ( General Motors, Vokswagen ) exportant
un très fort pourcentage de leur production a provoqué une
augmentation des importations françaises en provenance d'Espagne.
- G9 •
En outre, l'aggravation de notre déficit dans le secteur
automobile, en 1991 , peut également s'expliquer par le fait que, pour
des raisons d'approvisionnement du marché allemand en pleine
croissance, les constructeurs français ont beaucoup importé. Mais
dans tous les cas, la dégradation de ce solde a constitué le point
faible de nos échanges en 1991 .
- Dans le domaine des biens de consommation , la
France a enregistré un excédent de 1,6 milliard de francs en 1991 .
- Nos échanges avec l'Espagne dans le secteur des
biens d'équipement ménager restent marginaux.
2. L importance des investissements directs français
Ainsi qu' il a été indiqué précédemment , les
investissements directs de la France en direction de l'Espagne se sont
multipliés ces dernières années. Leur part dans les investissements
étrangers dans ce pays est ainsi passée de 8,2 % en 1984-1985 à 9,4 %
sur la période 1986-1989.
En 1990, la France est devenue le premier investisseur en
Espagne pour occuper la deuxième place en 1991 , avec 15,5 % des
investissements étrangers et 354 milliards de pesetas, après les
Pays-Bas.
On peut dire qu'avec les grands groupes installés en
Espagne, la France est son deuxième employeur.
On peut ainsi citer, par exemple la présence de Renault,
Peugeot, Citroën, Michelin, Saint-Gobain , Bouygues, Elf et Lafarge .
En outre , après quelques opérations importantes - telles que les
rachats de Pycasa, des pâtes La Familial et de la bière San Miguel-,
B.S.N. est devenu le premier groupe agro-alimentaire en Espagne.
En outre , trois des quatre géants de la distribution
espagnole sont d'origine française. Il s'agit de Pryca ( Carrefour),
Continente (Continent) et Alcampo (Auchan ).
Il convient de souligner, par ailleurs , les efforts
d'implantation en Espagne d' un certain nombre de petites et
moyennes entreprises.
Le recul de 20 % des investissements français en
Espagne en 1991 s'explique par l'exceptionnelle intensité des
. 70 .
investissements en 1990 , du fait de l'importance d'opérations
ponctuelles menées par certains industriels ( trois des six plus grosses
opérations de l'année), conjuguée à une tendance à la baisse générale
des investissements, notamment dans les domaines de l'extraction et
de la transformation des minéraux, de l'énergie et de l'eau. Sur les six
premiers mois de 1992, ce phénomène s'est accentué en grande
partie à cause de la forte baisse des investissements dans le domaine
des institutions financières.
Le tableau ci-après retrace la répartition sectorielle de ces
investissements en 1991 .
Répartition sectorielle des investissements français
en Espagne en 1991
(en milliards de pesetas )
SECTEUR
MONTANT
% TOTAL
INVESTI
% VAR
91/90
0. Agriculture et
2,7
0,8
+ 12,5
1 . Énergie et eau
19,7
5,5
• 55,0
2 . Extraction et
transfo . de
13,8
3,9
- 82,0
35,7
10,1
+ 70,8
4 . Autres industries
manufacturières
62,6
17,6
+ 152,4
5 . Construction
3,9
1,1
■ 335
+ 6,7
hôtellerie
32,"
9,1
7. Transport et
2,1
0,6
- 1,0
180,2
50,8
- 21,0
1,5
0,4
- 33
Pêche
minéraux , indus.
chimique
3 . Indus. de
transfo. des métaux
6. Commerce,
restauration,
communication
8 . Institutions
financières
9 . Autres services
Source : Direction générale des transactions extérieures
• 71 -
La classification de la Direction générale des
transactions extérieures doit cependant être nuancée. En effet,
d'une part, les investissements des entreprises françaises installées
en Espagne ne sont pas comptabilisés dans la rubrique « France » (on
estime à 30 % la part des filiales françaises dans cette rubrique) ;
d'autre part, de nombreuses entreprises françaises (Valéo ou Alcatel
par exemple ) réalisent leurs opérations par le biais de sociétés holding
implantées aux Pays-Bas ou en Suisse, pour des raisons tenant au
droit des sociétés.
S'agissant de leur répartition géographique, on peut noter
que les investissements français se sont concentrés assez
largement sur la région madrilène. Toutefois, en 1991 , il se sont
répartis de façon presque égale entre Madrid et la Catalogne.
H. QUELLES SONT LES PERSPECTIVES D'AVENIR ?
1 . Une stratégie d'accueil réaffirmée
On peut légitimement se demander si 1 Espagne
continuera dans l'avenir à attirer les investissements étrangers. La
réponse pourrait être positive si l'on considère que la politique
d'ouverture aux capitaux extérieurs n'est pas remise en cause et
reste favorisée par la structure de l'industrie locale.
En effet, le secteur public, qui s'appuie de plus en plus sur
des partenaires étrangers, est organisé en trois pôles : l'INI ( l'Institut
national de l'industrie, chapeautant l'aéronautique, l'essentiel de
l'électricité et de la sidérurgie), Patrimonio (Telefonica) et l'Institut
national des hydrocarbures ( Repsol). Dans le secteur privé, trois
grandes banques ( le Banco central hispano, le Banesto et le BBV)
règnent sur des consortiums industriels qui fournissent 10 % du PIB
espagnol et s'allient avec des actionnaires internationaux. Pour le
reste , l'Espagne compte une myriade de PMI familiales, dont
beaucoup songent à bien se vendre.
Comptant sur les 42 milliards de francs qu'il attend du
Fonds de cohésion communautaire d'ici à 1997 , le Gouvernement
espagnol cherche à séduire les firmes internationales .
Subventionnant jusqu'à 65 % du financement d'un projet, il tente
d'orienter les flux financiers vers les régions en déclin . Il pousse
• 72 .
également certaines de ses entreprises publiques à attirer des
capitaux étrangers.
L'IN ! reste l'instrument privilégié de cette stratégie. Après
avoir fait un premier «ménage » dans ses participations, le groupe
restructure, en effet, le reste de son portefeuille : d'un côté , les
«canards boiteux » et le secteur protégé de l'armement ; de l'autre, les
entreprises rentables, pour lequel l'objectif est d'ouvrir une partie du
capital aux capitaux privés.
2. Un marché qui reste porteur
Certes, les avantages comparatifs de l'Espagne sont
devenus modestes et sa croissance s'est tassée. Pourtant, la croissance
économique espagnole reste supérieure à celle d'un certain nombre de
ses partenaires de l'O.C.O.K.
La restauration des grands équilibres sera sans doute
douloureuse ; la lutte contre les hausses salariales excessives et en
faveur de la flexibilité du marché du travail sera également difficile.
Mais, les Espagnols croient en leur avenir et l'on connaît
aujourd'hui l'importance des facteurs psychologiques sur les
réalités économiques.
En outre, votre délégation a pu s'en convaincre au cours de
sa mission d'information, les Espagnols se sentent proches du pays
ami qu'est pour eux la France, dont ils partagent souvent les prises de
position, y compris au sein de la communauté européenne.
D'après le délégué général de Fasa Renault : « malgré la
hausse des coûts, il est toujours intéressant de produire en Espagne et
le marché reste porteur».
Désormais, les entreprises doivent chercher, encore
davantage que par le passé, à suivre les évolutions de la demande
des 38,5 millions de consommateurs espagnols, dont les habitudes
d'achat sont en pleine évolution . Ainsi , si la consommation
alimentaire ne progresse plus que de 2 à 3 % par an, celle des produits
à forte valeur ajoutée enregistre , quant à elle , une croissance
annuelle de 6 à 7 %.
Par ailleurs, les hypermarchés ne représentent encore que
22 % de la distribution espagnole, mais ils se multiplient rapidement
autour des grandes villes et les opportunités ne manquent pas.
73
Une autre perspective réside dans le fait que l'Espagne
souhaite devenir un tremplin vers l'Amérique latine. C'est une
tendance qui devrait être durable, dans la mesure où l'Espagne a
besoin , pour renforcer son poids politique, de développer ses liens avec
ce continent.
Les Français témoignent à l' heure actuelle d une
attitude générale plus prudente et plus attentiste à l'égard de
l'Espagne, attitude justifiée par les difficultés conjoncturelles
que traverse ce pays et qui révèlent des fragilités structurelles.
Votre délégation croit cependant que, si la politique
espagnole de rigueur est menée à son terme et donne les
résultats escomptés, les relations commerciales et financières
et, plus généralement, l'ensemble des relations de partenariat
entre l' Espagne et la France pourront, à terme, continuer à se
renforcer.
• 75
TROISIÈME PARTIE
I /EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1992
Votre délégation a passé près de vingt-quatre heures sur
le site de l'Exposition universelle, dont elle a pu apprécier tout
l'intérêt.
1 . UNE TENTATIVE DE PRÉSENTATION
A. PRÉSENTATION GÉNÉRA LK
Il est difficile de présenter l'Exposition universelle de
1992, qui s'est déroulée à Sévi Ile du 20 avril au 12 octobre, tant y
étaient divers les thèmes exposés ou les défis architecturaux lancés.
Quatrième exposition universelle de ce siècle - après
Bruxelles en 1958, Montréal en 1967 et Osaka en 1970- celle de
Séville , point culminant de la commération du Vème centenaire de la
découverte des Amériques par Christophe Colomb, a été organisée
autour du thème « l'ère des découvertes ».
Quelques chiffres, impressionnants, illustrent l'ampleur de
l'événement : 95 pavillons représentant 113 pays, 24 organisations
internationales et les 17 communautés autonomes espagnoles ,
4 pavillons thématiques exposant la navigation, le futur, les arts et
les découvertes, 350.000 arbres et arbustes, 96 restaurants, 70 bars,
40.000 places de parking, 20 hectares de lac et de canaux ,
120 fontaines, 150 boutiques, 3.000 points de lumière, 10.000 lignes
de téléphone, le tout pour un budget total de 14 milliards de francs
et d'environ 15,5 millions de visiteurs.
Le plan ci-après permet de visualiser le site de
l'Exposition qui a occupé 250 hectares sur l'Ile de la Cartuja à Séville,
lie que quatre années de travaux auront permis de rendre
urbanisable .
76
Les organisateurs de l'Exposition ont bénéficié d'une aide
financière de l'ordre de 1,5 milliard de francs. Ils ont institué
10 niveaux de sponsors dont les principaux sont, par ordre
d'importance : les 11 fournisseurs officiels (Panasonic, Fuji , Rank
Xerox, Philips, Siemens, Schindler, Ford Espagne, Olivetti , El Corte
Ingles, Bull Espagne et Sony), pour un milliard de pesetas chacun en
produits et services ; les 2 partenaires technologiques (Telefonica et
I B M.), qui ont fourni de gros équipements d'infrastructures ; les
sponsors officiels (trois grandes banques et un brasseur espagnols,
ainsi que Coca-cola) ; 5 entreprises associées (pour 400 millions de
pesetas minimum chacune) ; les fournisseurs et les collaborateurs,
parmi lesquels Alcatel , Electrolux , Zanussi , Nestlé et American
Express . S' ajoutent des accords commerciaux pour la
77 .
commercialisation de produits portant le logo officiel et la vente dans
l'exposition .
» LE PAVILLON DE LA FRANCE : UNE RÉUSSITE
La gestion du pavillon de la France a été assurée par la
COFRES ( Compagnie française pour l'Exposition universelle de
Séville ), société anonyme dirigée par M. François DELAGE ,
commissaire général , et dont l' État français est le principal
actionnaire .
Le coût de l'Exposition pour la France s'est élevé à
400 millions de francs. La subvention de l' État pour cette
mission s'est élevée, quant à elle, à 350 millions de francs. Les
autres actionnaires de la COFRES sont la Banque française du
commerce extérieur, la Caisse des dépôts et consignations et la
Compagnie française pour le commerce extérieur.
Par ailleurs, le pavillon de la France a pu compter sur
différents partenaires, parmi lesquels il faut distinguer :
- les partenaires officiels : Aérospatiale , Air Inter-groupe
Air France , Bibliothèque nationale , Centre national d'études
spatiales (CNES), France Telecom, Futuroscope-Département de la
Vienne, Gaz de France, Matra , Région Alsace ;
• les régions et départements associés : régions
Champagne - Arden nés , Ile - de - France, Languedoc - Roussillon ,
Lorraine , Poitou-Charentes , Provence - Alpes - Côte d' Azur ,
Département du Gard ;
- les entreprises participantes et associées : Gaumont,
Groupe SCIC, Edi 7, Peugeot, Giraudy, l' . Express » ;
- le mécénat : Cogema , Pechiney , E.D.F ., Yves-SaintLaurent .
En outre , d'autres partenaires ont collaboré à la
réalisation des films ou à des journées riches en événements
spécifiques.
Le pavillon de la France est tout d'abord caractérisé par
un grand parvis couvert, bordé sur un côté par un étroit bâtimentlame à la façade recouverte de miroirs. De loin , la couverture du
78
parvis étonne : une fine plaque bleue qui semble flotter tant ses points
d'appuis, quatre colonnes, sont fins et légers.
C'est un pavillon d'avant-garde aux performances
technologiques certaines . En outre , selon Jean-Paul VIGUIER ,
architecte du projet : * La recherche de la performance technique dans
l'architecture du pavillon à toujours été dirigée par la recherche d'une
impression poétique.»
Le thème retenu pour le pavillon de la France est « la
découverte par le savoir.» Le coeur du pavillon est occupé par un
immense puits de 17 mètres de profondeur . Ses parois sont
recouvertes de miroir et le fond est un écran de 500 mètres carrés sur
lequel ont été projetés trois films sur l'Espace . Au-dessus de cet écran,
le « promenoir » accueille une exposition conçue par la Cité des
sciences et de l'industrie : la « Biode », qui a pour thème l'exploration
des conquêtes technologiques de l'industrie française au travers de
58 sociétés publiques et privées, centres de recherche, institutions et
collectivités locales.
En outre, le pavillon accueille deux niveaux d'exposition,
regroupant notamment des maquettes retraçant l'évolution du tissu
urbain parisien .
En ce qui concerne le pavillon français, le bilan est plus
que satisfaisant puisque près de 5 millions de personnes l'ont
visité, soit le troisième « score » de l'exposition.
II . SE VILLE : CAPITALE DE LA MÉDITERRANÉE
OCCIDENTALE ?
A SÉVILLE 1992 : UN ENJEU ESSENTIEL POUR 1 /ESPAGNE
1 . Un objectif d'envergure
L organisation de l' Exposition universelle par
l' Espagne répond à un objectif d'envergure : prouver
- 79 •
l'émergence de l'Espagne dans le cercle des nations les plus
industrialisées et faire de l'Andalousie un nouveau pôle
d'attraction économique en hissant Séville au rang de capitale
de la Méditerranée occidentale.
Dans ce but, la métamorphose de la cité andalouse ne s'est
pas limitée à l'aménagement de l'île de la Cartuja et l'Espagne s'est
donnée les moyens de ses ambitions.
2. Des moyens considérables
Si l'Exposition représente elle-même quelque 14 milliards
de francs d'investissements, ce sont près de 50 milliards de francs
que le gouvernement espagnol a engagés pour amarrer toute
l'Andalousie à l' Europe.
Une voie de type autoroutier relie désormais Séville à
Madrid, distantes de 515 kilomètres (et au-delà à Barcelone) ; l 'A.V.E.
( Alta Velocidad Express) ; le T.G.V. espagnol, met les deux villes à
2 heures et 45 minutes l'une de l'autre, pour un investissement de
27 milliards de francs ; les capacités de l'aéroport San Pablo de Séville
ont été triplées par la construction d'un terminal supplémentaire. 11
faut ajouter à cela sept nouveaux ponts, qui étaient nécessaires pour
relier correctement les deux rives du Guadalquivir, ainsi que des
travaux de modernisation et d'embellissement à l'intérieur de la ville.
3. Des résultats positifs
L'Expo'92 a reçu 15,5 millions de visiteurs pour
42 millions d'entrées. L'objectif de 38 millions d'entrées a donc été
dépassé, même si les organisateurs avaient tablé sur davantage de
visiteurs ( 17 à 18 millions) et sur une participation étrangère ,
notamment européenne , nettement plus importante : celle-ci ne
représente qu'un tiers . En tête , viennent les Français avec
1.050.000 personnes, suivis par les Portugais (900.000) les Italiens
(300.000) et les Nord-Américains ( 280.000), puis les Anglais et les
Allemands avec 200.000. Les anglo-saxons ont boudé l'Exposition , en
dépit de l'énorme campagne effectuée dans ces pays et plus
particulièrement aux Etats-Unis.
• HO­
S'agissant des comptes financiers, le président de
l'Exposition , M. Jacinto PELLON, n'est pas inquiet. « La balance sera
plutôt positive » , affirme- t- il. Le budget général a certes été dépassé : il
est, en effet, passé de 202 milliards à 225 milliards de pesetas. Mais,
M. PELLON table, en définitive, sur un bénéfice. Il estime que la
société d'État Expo'92 s'est autofinancée et que * le résultat est
satisfaisant ».
B QUID ) DE L'APRÈS EXPOSITION ?
1 . Des investissements parfois contestés
Si en Andalousie même , l' Exposition - et les
investissements qu'elle a nécessité- ne font pas l'unanimité, les
critiques ou les réserves les plus sérieuses viennent des régions
comme la Galice, les Asturies, l'Estrémadure ou les deux Castilles,
généralement très déficitaires en matière d'infrastructures.
2. Des lendemains qui restent incertains
On ne peut cependant nier l'impact positif de l'Exposition
sur la modernisation des infrastructures de l'Andalousie et, au*
delà , de l' Espagne . Elle a également favorisé le rééquilibrage
régional, permettant d'éviter la coupure entre le Nord et le Sud du
pays. Le P.I H andalou a ainsi progressé, depuis 1986, à un rythme
moyen annuel de 5 %.
On peut également penser que le pari qui a consisté à
vouloir projeter mondialement une nouvelle image de l' Espagne
- un pays moderne, dynamique et développé- a été gagné.
Qu'adviendra- t-il du site de l' Exposition ? Son avenir a
été confié à un nouvel organisme, Cartuja 93 , dont les projets restent
flous. 11 est prévu la création de deux parcs, l'un dit thématique ,
l'autre technologique consacré à l'innovation et au développement.
Le pavillon de la France, pérenne, a été offert à l'Espagne,
mais on ignore pour l'instant son affectation future.
. Pi­
Certains secteurs, tels que le bâtiment, souffriront
particulièrement.
Dès le lendemain de l'Exposition, on évaluait à près de
17.000 les personnes se retrouvant sans emploi .
S'agissant du tourisme, un nouveau courant s'est
instauré, les étrangers représentant 33 % des visiteurs. Cependant, le
tourisme représente déjà 60 % du P.I H. de l'Andalousie, et malgré la
construction de nouveaux hôtels, il sera difficile de maintenir dans les
prochains mois les prix prohibitifs pratiqués en 1992.
Les organisateurs reconnaissent qu' une Exposition
universelle ne peut pas changer une région d'un coup de baguette
magique, mais ils estiment que c'était une opportunité exceptionnelle
pour les Andalous, à qui il appartient désormais d'en faire perdurer
les effets bénéfiques.
• 83 •
EXAMEN EN COMMISSION
Lors de sa réunion du 16 décembre 1992, la Commission des Affaires
économiques et du Plan a procédé à l'examen du présent rapport.
M. Bernard Hugo, rapporteur, a commencé par transmettre ses
félicitations à M. Richard Pouille, président de la délégation qui avait depuis renoncé à
demander le renouvellement de son mandat sénatorial . Puis, exposant de façon
synthétique le rapport de la délégation, il a, tout d'abord, présenté les conclusions de la
XVè Conférence mondiale de l'Énergie .
A cet égard, après avoir précisé les différents thèmes abordés au cours de ce
Congrès, le rapporteur a notamment souligné les problèmes que poserait, d'ici 2020, la
croissance des besoins énergétiques, particulièrement dans les pays en voie de
développement. Il a ensuite retracé l'évolution de l'économie espagnole dans le contexte
européen, soulignant sa forte croissance depuis l'adhésion de l'Espagne à la
Communauté économique européenne, le 1er janvier 1986.
Après avoir noté que le « miracle espagnol » s'était essoufflé depuis la fin de
l'année 1990, le rapporteur a exposé les problèmes structurels persistants auxquels
l'Espagne était confrontée ainsi que ses objectifs et ses nouvelles orientations en
matière de politique économique, de façon à répondre aux critères de convergence
définis dans le Traité de Maastricht.
M. Bernard Hugo, rapporteur, a ensuite défini quelle était la place,
actuelle et à venir, de la France sur le marché espagnol. Après avoir rappelé que
l'adhésion de l'Espagne à la Communauté européenne avait tout d'abord suscité
certaines craintes en France, le rapporteur a souligné que les deux pays s'étaient
rapidement révélés être des partenaires de premier plan , qu'il s'agisse du
développement de leurs relations commerciales comme de celui des investissements
directs français en Espagne.
Il a estimé, au nom de la délégation, qu'en dépit des difficultés qu'elle
traverse, l'Espagne restait un pays porteur d'opportunités ainsi qu'un partenaire
essentiel pour la France. En conséquence, il a conclu que si la politique espagnole de
rigueur était menée à son terme et donnait les résultats escomptés, les relations
commerciales et financières entre l'Espagne et la France pourraient, à terme, continuer
à se renforcer.
■ 84 •
M. Bernard Hugo, rapporteur, a conclu la présentation du rapport en
retraçant brièvement le bilan de l'Exposition universelle de Séville.
Après avoir rappelé l'ampleur de l'événement ( 95 pavillons pour
14 milliards de francs, 15,5 millions de visiteurs et 42 millions d'entrées), il a indiqué
que l'organisation de cette Exposition par l' Espagne répondait à un objectif
d'envergure : prouver son émergence dans le cercle des nations les plus industrialisées
et faire de l'Andalousie un nouveau pôle d'attraction économique en hissant Séville au
rang de capitale de la Méditerranée occidentale.
Après s'être interrogé sur l'avenir de l'Andalousie, le rapporteur a estimé
que le pavillon de la France avait été marqué par le sceau de la réussite, son bilan étant
très satisfaisant puisqu'il figure en troisième position en terme de fréquentation des
pavillons, avec 5 millions de visiteurs.
A l'issue de cette présentation, la commission a procédé à un large échange
de vues .
Après avoir félicité le rapporteur de la perfection de son analyse et de la
clarté de sa photographie de l'économie espagnole et avoir salué le succès de
l'Exposition universelle de Séville, M. René Marquès a tenu à mettre l'accent sur
l'impact négatif de l'adhésion de l'Espagne à la C.E.E. sur l'agriculture du sud de 1%
France. A cet égard, il s'est inquiété des graves dangers que fait courir la concurrence
espagnole aux agriculteurs français, particulièrement dans le domaine de la viticulture
où un véritable marasme est à craindre.
S'il s'est félicité de la place dorénavant occupée par l'Espagne sur la scène
européenne, M. René Marquès a tenu à souligner que, du fait de sa technologie, de sa
volonté, du faible coût de sa main d'oeuvre, de ses charges plus limitées qu'en France
(en matière de T.V.A. par exemple), l'agriculture espagnole représentante une menace
indiscutable pour l'agriculture du sud de la France.
A cet égard, M. Jean François-Poncet, président, a indiqué que dans le
département du Lot-et-Garonne, producteur de fruits et légumes, les perspectives
d'élargissement de la C.E.E. à la péninsule ibérique avaient été perçues comme
catastrophiques, les précautions figurant dans le traité d'adhésion ayant été
considérées comme insuffisantes. Il a, cependant, indiqué que ces inquiétudes étaient
aujourd'hui largement levées, puisqu'après deux ou trois années d'importation massive
de fraises espagnoles, la situation s'était rétablie.
• S5-
II a, pur ailleurs, rappelé que si le solde commercial de son département
dans le secteur agricole était déficitaire avant 1986 , l'adhésion de l'Espagne avait été
globalement positive pour le Lot et Garonne.
S'agissant du vin, M. Jean François-Poncet, président, a toutefois
estimé que le problème était beaucoup plus sensible, les vins français d'appellation
contrôlée souffrant sans aucun doute de la concurrence des vins espagnols.
M. Louis de Catuelan, évoquant le problème de la production de fraises en
Bretagne, a incité les producteurs à rechercher une amélioration de la qualité.
Après que M. Maurice Lombard se fut interrogé sur le nombre
d'entreprises françaises procédant à une délocalisation de leurs activités en Espagne, à
la faveur des importantes subventions allouées par ce pays aux industriels
s'implantant dans les régions en difficulté, M. Bernard Hugo, rapporteur, a évoqué
la visite pur la délégation d'une entreprise agricole exploitée par un Français en
Espagne.
M. Jean François-Poncet, président, a alors souligné les problèmes
rencontrés par les entreprises étrangères dans leurs relations avec les puissants
syndicats espagnols .
M. Richard l'ouille, ancien sénateur qui présidait la délégation , est
intervenu pour indiquer que, si cette dernière avait été relativement déçue par les
travaux du Congrès mondial de l'énergie auxquels elle avait pu assister, il convenait
cependant de souligner tout l'intérêt que repésentait ce Congrès, eu égard à la
participation de nouveaux pays (Chine, etc). Il a attiré l'attention de la commission sur
les conclusions essentielles du Congrès, relatives à la nécessaire libéralisation des prix
de l'énergie, à la libre circulation de l'énergie et à l'intégration, à son prix, du coût du
respect de l'environnement.
Abordant ensuite lu deuxième partie du rapport relative à l'économie
espagnole, M. Richard l'ouille a souligné que les interlocuteurs rencontrés par la
délégation, très francophiles, recherchaient nettement un développement de la
coopération avec la France. Il a indiqué que les deux pays devaient s'attacher &
développer leurs relations de partenariat, au-delà de leurs relations purement
commerciales ou financières. Citant l'exemple des produits agricoles méditerranéens, il
a estimé qu'ils pourraient s'unir pour obtenir des accords permettant de définir des
périodes de production différentes pour les productions espagnoles et pour celles du sud
de la France. Soulignant que les Espagnols resteront les alliés de la France, il a affirmé
la nécessité de développer la solidarité entre les deux pays, la résolution de leurs
problèmes respectifs, souvent similaires, étant liée.
. 86 .
M. Richard Pouille u ensuite indiqué que si l'Exposition universelle avait
accueilli moins d'Anglo-saxons qu'escompté, on pouvait se féliciter de l'importante
fréquentation du pavillon de la France et du fait que les Français sont arrivés en tête
des visiteurs étrangers de l'Exposition.
Après avoir évoqué les éventuelles conséquences écologiques do
l'aménagement des terres agricoles situées au sud de Séville, M. Louis Moinard s'est
interrogé sur la répartition des fonds structurels européens.
M. Jean François- Poncet, président, a alors précisé que 70% de ces
fonds étaient destinés aux pays dits « pauvres . de la Communauté européenne. 11 a
rappelé que si la France percevait plus de 20% des fonds structurels européens avant
1986, elle n'en percevait plus que 8 à 9% depuis l'adhésion de l'Espagne et du Portugal
à la C.E.E. Il a toutefois ajouté que le montant de ces derniers ayant été doublé dans le
• Paquet Delors I *, la diminution des sommes allouées à la France était moins
importante que ne le laissait supposer un pur raisonnement en pourcentage. Il a
ensuite estimé que si le niveau de l'aide aux pays du sud de l'Europe s'était trouvée
justifiée par leur retard économique, cette situation ne changerait probablement pas
dans les cinq ans à venir.
M. Jean François-Poncet, président, a alors souligné la nécessité pour
les pays concernés, désireux d'intégrer l'union économique et monétaire, de réduire leur
déficit budgétaire et de se donner les moyens de développer une croissance non
inflationniste. A cet égard , il a rappelé que les Espagnols avaient obtenu une large part
des fonds de cohésion demandés lors du compromis budgétaire réalisé à Édimbourg.
Après avoir indiqué que le département du Lot et Garonne souhaitait devenir un
partenaire majeur de l'Espagne, il a enfin précisé que les modestes fonds européens
alloués à son département étaient en réalité considérables en comparaison de la
faiblesse de l'effort du Gouvernement français en matière d'aménagement du territoire.
87-
ANNEXES
H9 •
ANNEXE 1
LISTE DES MEMBRES DE LA DÉLÉGATION
MM .
Richard POU ILLE
Vice-Président de la Commission
Président de la Délégation
Bernard BARRAUX
Roland COURTEAU
Aubert GARCIA
Georges GRUILLOT
Bernard HUGO
Louis MINETTI
Secrétaire de la Commission
Louis MOINARD )
Jean ROGER
#ι·
ANNEXE II
ENTRETIENS ET VISITES DE LA DÉLÉGATION
Lundi 21 septembre 1992 (Madrid)
• Suivi des travaux de la Conférence mondiale de l'énergie
• Diner à la résidence de l'Ambassadeur.
Mardi 22 septembre 1992 (Madrid)
• Suivi des travaux de la Conférence mondiale de l'énergie.
• Coktail-buffet et dîner offerts par M. BERGOUGNOUX , directeur
général d'K.I ) F.
Mercredi 23 septembre 1992 (Madrid)
• Entretien avec M. GARCIA DIES, ancien ministre de l'économie et du
commerce, Président du groupe PRYCA ( Carrefour Espagne ).
• Entretien avec M. TRUEBA , directeur général de la production et des
marchés agricoles au Ministère de l'Agriculture.
• Déjeuner avec des conseillers du commerce extérieur de la France
du secteur agro-alimentaire offert par Mme KAHN , ministre conseiller
pour les affaires économiques et commerciales.
• Suivi des travaux de la Conférence mondiale de l'énergie.
• 92
• Réception à la résidence de M. Henri de COIGNAC, Ambassadeur de
France à l'occasion du Congrès mondial de l'énergie (offert par
l'Ambassadeur et par le Bureau du comité français du Conseil
mondial de l'énergie).
Jeudi 24 septembre 1992 (Séville )
• Visite de la société ACETTES DEL SUR, spécialisée dans la production
et l'embouteillage d'huile d'olive.
• Déjeuner avec M. Benito MUNOZ, Président de la coopérative LAS
MARISMAS m LEBRIJA et M. Rocardo PARDA !„ Directeur de la
Fédération des coopératives agricoles d'Andalousie.
• Visite de la coopérative LAS MARISMAS DE LEBRIJA, première
coopérative d' Andalousie - Production et égrenage de coton ,
production et transformation de tomates, production de fleurs
coupées.
• Diner à la résidence de M. LEGOURRIEREC, Consul général.
V end ml i 25 septembre 1992 ( Séville)
• Entretien avec M. Leocadio M AUIN RODRIGUEZ, ministre pour
l'agriculture et la pêche du Gouvernement autonome d'Andalousie.
• Visite de l'exploitation agricole ( production d'asperges et de pèches)
de M. Thierry JEAN , ressortissant français et Conseiller du commerce
extérieur.
• Visite de l'Exposition universelle (pavillon espagnol ).
Samedi 26 septembre 1992 ( Séville)
• Visite de l'Exposition universelle ( pavillon de l'Italie, pavillon de la
France , pavillon de l'Arabie Saoudite ).
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