La Lettre du Rhumatologue - n° 238 - janvier 1998
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AUTRES MALADIES SYSTÉMIQUES
au moins deux pertes fœtales associées à la présence d’au moins
un autoanticorps (anticorps antinucléaire, anti-DNA natif, anti-
lymphocytes, anticardiolipine et/ou anticoagulant lupique).
Parmi les 43 patientes sur 50 qui ont fini l’étude, 35 (80 %) ont
accouché normalement. Il n’y a pas eu d’anomalie congénitale,
d’incidence anormale de prématurité ou de nouveau-nés hypo-
trophes. Il n’y a pas eu de complications hémorragiques (throm-
bopénie). Le seul effet indésirable a été une ecchymose aux points
d’injection.
Cette étude a également montré l’absence de retentissement des
héparines de bas poids moléculaire sur la masse osseuse (sans que
soient précisés les données techniques et les résultats chiffrés).
L’association héparine de bas poids moléculaire et aspirine semble
être un traitement efficace et bien toléré des fausses couches répé-
tées présumées d’origine auto-immune. La rivéparine est dispo-
nible en France depuis quelques semaines pour la prévention des
thromboses.
Les ostéonécroses aseptiques
Quel est le rôle des corticoïdes ? Wong et coll. (Hong Kong) ont
observé 29 cas (10 %) d’ostéonécrose aseptique, essentiellement
de la hanche (bilatérale dans 69 % des cas), parmi 291 lupus étu-
diés rétrospectivement. Ils ont comparé le groupe de lupus avec
ostéonécroses aseptiques à 53 lupus appariés sans ostéonécrose.
Ces deux groupes de lupus n’ont pas de différence clinique, bio-
logique (anticardiolipine et anticoagulant lupique) significative
en dehors d’une plus grande fréquence d’atteintes rénales (69 %
versus 45 %, p = 0,02) et d’atteintes du système nerveux central
(41 % versus 14 %, p = 0,0005) dans le groupe avec ostéonécrose.
Dans ces deux groupes, la dose totale de corticoïdes est compa-
rable (19,7 g versus 14,1 g, p = 0,09) mais le facteur qui semble
favoriser le risque d’ostéonécrose est la dose totale initiale admi-
nistrée pendant le premier mois (1,7 g versus 1,1 g, p = 0,01) et
pendant les 4 premiers mois (4,4 g versus 2,8 g, p = 0,01).
Ce travail confirme donc que la corticothérapie, en particulier la
dose totale initiale, est le facteur de risque d’ostéonécrose le plus
important au cours du lupus. La plus grande fréquence d’atteinte
rénale et neurologique qui a été observée est donc simplement le
reflet d’une maladie sévère nécessitant une corticothérapie plus
forte.
Quel est le rôle des anti-phospholipides ? Wong et coll. (Hong
Kong) ont montré dans leur étude rétrospective qu’il n’existait
pas de corrélation entre l’ostéonécrose aseptique et la présence
d’anticorps anticardiolipines ou d’un anticoagulant circulant. En
revanche, Gharavi et coll. (États-Unis) ont montré que les diffé-
rents anticorps antiphospholipides (anticardiolipines, anti-bêta 2-
glycoprotéine I, anti-phosphatidyléthanolamine) peuvent être un
facteur de risque de l’ostéonécrose dans le lupus et le syndrome
des antiphospholipides primaires. Ce facteur de risque pourrait
potentialiser le risque induit par la corticothérapie.
Rôle de l’hyperhomocystéinémie ? Pétri et coll. (États-Unis) ont
montré que l’hyperhomocystéinémie (> 13 µmole/l) peut aug-
menter le risque d’ostéonécrose. Dans une cohorte de 337 lupus
suivis prospectivement pendant plus de 10 ans, ils ont constaté
que l’hyperhomocystéinémie était significativement associée au
risque d’ostéonécrose aseptique et de fractures ostéoporotiques.
Cette hyperhomocystéinémie semble liée à l’atteinte rénale (en
raison du métabolisme rénal de l’homocystéine) et à la prise de
corticoïdes. L’hyperhomocystéinémie pourrait favoriser non seu-
lement la morbidité cardiovasculaire, mais aussi l’ostéonécrose
aseptique du lupus.
Traitement du lupus
Le méthotrexate peut être un traitement efficace du lupus
sans atteinte viscérale sévère
Sato et coll. (São Paulo, Brésil) ont présenté une étude prospec-
tive randomisée en double aveugle comparant le méthotrexate
(15 à 20 mg per os par semaine) à un placebo dans le lupus sans
atteinte viscérale sévère.
Parmi les 41 patients inclus, 37 ont suivi le traitement pendant
6 mois, ce qui a permis d’objectiver une certaine efficacité du
méthotrexate :
– une efficacité sur les signes articulaires et cutanés (p < 0,01),
– une efficacité sur le score d’activité clinique SLEDAI (p < 0,01),
– un effet d’épargne cortisonique (p = 0,02),
– une hypocomplémentémie moins fréquente (p < 0,01).
L’efficacité de ce traitement est intéressante mais on a noté des
effets secondaires chez 13 patients sur 20 (65 % des cas). Ces
effets indésirables sont, pour la plupart, mineurs : dyspepsie, cyto-
lyse. Seuls deux patients ont arrêté le traitement pour des cyto-
pénies sans complications infectieuses.
Arce-Salinas et coll. (Mexico, Mexique) ont comparé le métho-
trexate (7,5 à 15 mg per os/semaine) à l’azathioprine (< 50 mg/j)
et à la chloroquine (< 225 mg/j) dans des lupus sans atteinte vis-
cérale. Parmi 36 lupus stables sous azathioprine ou chloroquine
depuis 6 mois, 19 ont poursuivi leur traitement et les 19 autres
ont été traités par méthotrexate après randomisation. Les résul-
tats de cette étude après 18 mois de traitement ont été :
– une efficacité comparable de ces différents traitements d’en-
tretien sur l’évolutivité globale évaluée par le score SLEDAI et
par un score fonctionnel (HAQ),
– un meilleur effet d’épargne cortisonique du méthotrexate
(p = 0,05),
– l’absence d’effet indésirable grave du méthotrexate.
Cette étude démontre que le méthotrexate est comparable à l’aza-
thioprine et à la chloroquine dans le traitement d’entretien du
lupus sans atteinte viscérale sévère.
La ciclosporine peut être un traitement efficace des néphro-
pathies lupiques sévères
Dostal et coll. (Prague, République tchèque) ont comparé, dans
une étude ouverte, la ciclosporine (3 à 5 mg/kg/j) au cyclophos-
phamide (Endoxan®) utilisé aux doses thérapeutiques usuelles
(per os ou intraveineux). Vingt-trois glomérulonéphrites dont 14
prolifératives diffuses (classe IV OMS) ont été traitées pendant
24 mois. Parmi les 11 patients traités par ciclosporine, 7 avaient
été traités préalablement par cyclophosphamide, arrêté pour inef-
ficacité (3 patients) ou intolérance (4 patients). Les deux groupes
de lupus étaient comparables et ont bénéficié d’une corticothé-
rapie identique. Les résultats de cette étude ont été les suivants :
– Une efficacité équivalente des deux traitements sur l’atteinte
rénale et les signes extrarénaux, notamment le score SLEDAI.
Parmi les 14 patients qui ont eu une biopsie rénale de contrôle
après un an, tous ont eu une diminution des critères d’activité his-
tologiques (critères OMS). .../...