Identification des patients à risque d’échec biologique
“cliniquement signifiant” après prostatectomie
À partir d’une cohorte de 1 011 patients prostatectomisés au
Barnes-Jewish Hospital de Saint Louis inclus dans une étude
prospective entre 1989 et 2002 (18), une vélocité du PSA supé-
rieure à 2 ng/ml/an (p = 0,001) et un score de Gleason à 7
(p = 0,006) ou 8-10 (p = 0,003) à la biopsie ont été significati-
vement associés à un temps de doublement postopératoire de
moins de 3 mois. Un PSA inférieur à 10 ng/ml (p = 0,005), une
tumeur non palpable (p = 0,001) et une vélocité préopératoire
n’excédant pas 0,5 ng/ml/an (p = 0,03) ont été associés à un
temps de doublement supérieur à 12 mois ou à l’absence de
récidive biologique (la plupart de ces patients ont un PSA qui
ne dépasse pas 0,25 ng/ml après un suivi médian de 3,6 mois).
Facteurs prédictifs de mortalité spécifique
après prostatectomie radicale ou radiothérapie
À partir d’une base de données de 8 669 patients, P. Zhou et al.
(19) ont évalué, dans une série de 1 159 patients traités par
prostatectomie (n = 498) ou par radiothérapie (n = 661) pour
un cancer de la prostate localisé et en échec biologique, la
valeur prédictive pour la mortalité spécifique de facteurs précé-
demment identifiés pour le temps jusqu’à métastases, tels que
le temps de doublement du PSA (PSA-DT) post-thérapeutique,
le score de Gleason, l’intervalle jusqu’à échec biologique. Un
PSA-DT de moins de 3 mois après prostatectomie (HR : 54,9,
IC95 : 16,7-180) ou après radiothérapie (HR : 12,8 %, IC95 : 7-
23,1) ainsi qu’un score de Gleason de 8-10 après radiothérapie
(HR : 6,1, IC95 : 3,4-10,7) sont significativement associés à la
mortalité spécifique.
Pour les patients avec un PSA-DT inférieur à 3 mois versus
supérieur ou égal à 3 mois, les taux de mortalité spécifique à
5ans après prostatectomie sont de 31 % (IC95 : 17 %-45 %)
versus 1 % (IC95 : 0-2 %), ceux après radiothérapie de 75 %
(IC95 : 59 %-92 %) et 35 % (IC95 : 24 %-47 %) respectivement
en cas de Gleason supérieur ou égal à 8 et inférieur ou égal à 7,
versus 15 % (IC95 : 0,8 %-28 %) et 4 % (IC95 : 1 %-6 %). Ces
paramètres devraient être pris en compte pour sélectionner les
patients à inclure dans des protocoles randomisés évaluant
l’intérêt d’une hormonothérapie associée ou non à une chimio-
thérapie.
Valeur prédictive pour la survie sans récidive à 10 ans
après prostatectomie totale du nomogramme de Kattan
La validation à 10 ans du nomogramme postopératoire de Kattan
à partir des données de deux cohortes indépendantes de
1782 patients (MSKCC) et de 1 357 patients (Cleveland Clinic
Foundation) pour prédire la survie sans récidive (définie par
une élévation du PSA, une progression clinique, une radiothé-
rapie postopératoire plus de 12 mois après la prostatectomie ou
l’initiation d’un traitement sytémique) a montré la robustesse
du modèle prédictif (20), avec un bon index de concordance.
Rappelons qu’il tient compte de la date de la prostatectomie,
des marges chirurgicales, de l’extension extracapsulaire, de
l’envahissement des vésicules séminales, de l’atteinte gan-
glionnaire, du score de Gleason initial, du score de Gleason
secondaire et du PSA préopératoire. Dans cette étude, les pré-
dictions ont été ajustées à l’utilisation de la radiothérapie adju-
vante. Il est possible de calculer ce risque de récidive sur www.
nomograms.org. Notons qu’aucun marqueur biologique, et en
particulier l’expression de la signature moléculaire, ne s’est
montré supérieur ou n’a permis d’améliorer la valeur prédic-
tive de ce nomogramme (21).
Obésité, prise de poids et risque de rechute biologique après
prostatectomie
Des facteurs environnementaux pourraient modifier l’évolu-
tion. Une étude prospective réalisée au MD Anderson Cancer
Center (22), concernant 526 patients traités entre 1992 et
2001, a montré que les patients obèses ayant un index de
masse corporelle (IMC) supérieur ou égal à 30 kg/m2au dia-
gnostic ont un taux de récidive plus élevé que les non-obèses
(p = 0,07). Par ailleurs, ceux qui étaient obèses à 40 ans
avaient un risque beaucoup plus élevé (p = 0,001). En étude
multivariée, un IMC plus élevé et un score de Gleason supé-
rieur ou égal à 7 restaient des paramètres pronostiques indé-
pendants. Les hommes ayant une prise de poids supérieure à
1,5 kg/an entre 25 ans et le diagnostic rechutaient plus rapi-
dement (17 mois versus 39 mois, p = 0,005). L’introduction
de l’obésité dans des nomogrammes augmentait leur valeur
prédictive dans cette étude. Ces données renforcent celles
déjà rapportées montrant une association entre obésité,
formes plus avancées et formes plus agressives.
AUTRES TRAITEMENTS DES FORMES LOCALISÉES
Qualité de vie à long terme après prostatectomie,
radiothérapie externe et curiethérapie
Dans l’enquête initiale du Ann Harbor, les patients qui avaient
fait l’objet d’une évaluation de la qualité de vie après un temps
médian de 2,6 ans après traitement à visée curative ont été
recontactés 4 ans plus tard avec une médiane de 6,2 ans (23).
Sur les 964 patients éligibles, 709 (73,5 %) ont complété leur
questionnaire. Dans quatre domaines (symptômes urinaires
obstructifs ou irritatifs, incontinence urinaire, troubles diges-
tifs, impuissance), des différences significatives par rapport au
groupe témoin étaient notées pour au moins un domaine.
Durant cet intervalle de quatre ans, les troubles post-prostatec-
tomie sont restés relativement stables. En revanche, les
troubles spécifiques retentissant sur la qualité de vie ont conti-
nué à évoluer pour les patients traités par curiethérapie et
radiothérapie externe.
Étude randomisée canadienne (24) comparant implant
d’iridium + radiothérapie externe à une radiothérapie externe
Cent quatre patients avec une tumeur T2 ou T3 M0 ont été
traités : 51 par curiethérapie (35 Gy) + radiothérapie
(40 Gy), 53 par radiothérapie (66 Gy). Avec un suivi médian
de 8,2 ans, 29 % ont présenté une rechute biologique ou cli-
nique avec l’association, versus 61 % avec la radiothérapie
seule. On peut seulement conclure que la dose de 66 Gy est
insuffisante.
314
La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 6 - novembre-décembre 2005
RÉTROSPECTIVE 2005