La Lettre du Cardiologue • n° 470-471 - décembre 2013-janvier 2014 | 19
Les rumeurs entourant le médicament générique masquent les vrais enjeux. Assujetti aux mêmes exigences,
le médicament générique est avant tout un médicament de qualité qui contribue à la soutenabilité de la
Sécurité sociale. Il est urgent de s’émanciper des dogmes infondés : la recherche et l’innovation scientifique
ne sont pas en opposition avec la prescription du médicament générique. Le médecin doit aujourd’hui être
un acteur décisif pour développer l’utilisation du médicament générique.
Mots-clés
Qualité
Efficacité
Sécurité
Économies
Enjeux
Summary
Rumours surrounding generic
medicines interfere with
the real challenges. Generic
medicines are subject to the
same requirements and are,
above all, high quality medi-
cines which contribute to the
sustainability of the French
social heath system. It is urgent
to escape from unfounded
dogma: research and scientific
innovation do not oppose the
prescription of generic medi-
cines. Today, doctors have to
play a decisive part in devel-
oping the usage of generic
medicines.
Keywords
Quality
Efficacity
Security
Savings
Challenges
un enjeu économique de premier ordre pour la
maîtrise des dépenses de santé. Leur utilisation est
devenue indispensable dans le respect de l’ONDAM
en permettant, en 2012, 2,4 milliards d’euros d’éco-
nomies collectives, soit presque autant que la valeur
de son marché. Le développement des médicaments
génériques constitue ainsi un atout important dans
la soutenabilité du système d’Assurance maladie : les
économies issues du générique permettent d’amé-
liorer la prise en charge d’autres maladies par l’Assu-
rance maladie et d’éviter le déremboursement ou la
baisse de remboursement de certains médicaments.
D’un point de vue sanitaire, les laboratoires fabri-
quant des médicaments génériques ont conçu une
offre organisée autour de gammes larges avec des
industriels responsables (la gamme des 10 premiers
laboratoires couvre 55 % du Répertoire des médi-
caments génériques quand la moyenne européenne
est à 19 %), qui disposent d’importantes équipes de
pharmaciens et de médecins pour gérer la qualité des
spécialités et la pharmacovigilance. La production de
médicaments génériques se fait à 54 % sur le terri-
toire national et à 96 % sur le territoire européen et
représente 12 000 emplois, en croissance constante.
Cette implantation française du réseau de fabrication
du médicament générique permet d’en assurer la
sécurité sanitaire, et de garantir les volumes néces-
saires dans un contexte mondial de tensions sur la
chaîne d’approvisionnement en médicaments.
En Europe, les médicaments génériques représentent
54 % de parts de marché en volume et constituent
une source importante d’emplois pour l’industrie
pharmaceutique du façonnage, plus de 1 000 entre-
prises employant notamment 150 000 personnes (1).
En dépit de tous leurs atouts, la pénétration des
médicaments génériques en France reste largement
inférieure à ce niveau moyen : seuls 14 % en valeur
et 27 % en volume du marché contre 24 % en valeur
et 60 % en volume en Allemagne, plus de 60 % en
volume au Royaume-Uni.
Il faut en effet souligner que le médicament géné-
rique évolue dans un environnement difficile : forte
pression sur les prix et campagnes de dénigrement
récurrentes.
Malgré des prix fabricants hors taxes (PFHT) tout à
fait dans la moyenne européenne, les médicaments
génériques ont été ces dernières années la cible de
nombreuses baisses de prix. Ainsi le différentiel de
prix entre le générique et la spécialité de référence
est-il toujours plus important : de 30 % en 2000, la
décote a successivement été fixée à 40 % en 2006
puis 55 % en 2009, pour atteindre 60 % pour les
spécialités commercialisées à partir de 2012. Cette
décote est la plus importante de tous les pays qui ont
un régime de prix administré pour les médicaments.
Sur le Projet de loi de financement de la Sécurité
sociale (PLFSS) 2014, les médicaments génériques
devront supporter 10 % des économies, alors qu’ils
ne représentent que 2 % des dépenses de santé.
En 2013, ces médicaments auront permis une
économie de plus de 2,5 milliards d’euros pour l’en-
semble des systèmes de couverture sociale, Assurance
maladie obligatoire et assurance maladie complémen-
taire. Et les économies cumulées depuis les années
2000 représentent plus de 15 milliards d’euros.
Ces médicaments font également l’objet de
nombreuses controverses infondées ; balloté entre
la rumeur et les diabolisations, le médicament géné-
rique est régulièrement questionné. Au cœur de cette
tourmente déraisonnée, fin 2012, de nombreuses
autorités indépendantes ont réagi en France en
publiant des rapports pour rappeler la fiabilité du
médicament générique (figure 1, page 20) [2].
Ainsi, malgré un cadre réglementaire de qualité, des
laboratoires particulièrement investis sur le marché
français et un réseau de distribution pharmaceu-
tique parmi les plus denses d’Europe, le médica-
ment générique en France peine à trouver sa place
et souffre cruellement du manque de confiance de
certains acteurs et des patients. Il convient d’apaiser
le discours afin de définir une stratégie globale de
développement du médicament générique et de
mettre en œuvre d’autres mesures qui permettraient
de générer des économies plus substantielles, sans
fragiliser le système de santé.
En France, 70 % de la valeur du marché du médica-
ment correspondent à des prescriptions de spécia-
lités sous brevets non accessibles à la concurrence
des génériques. Aujourd’hui, la place du médicament
générique dans les économies de santé doit être
encouragée par tous les moyens. Le développement
du médicament générique a en effet atteint un palier
puisque la politique actuelle arrive à bout de souffle :
la substitution via le pharmacien a atteint son niveau