Efficacité du développement - Conseil canadien pour la coopération

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Efficacité du développement
L’efficacité du développement : revendication des droits et développement réussi
Par Tony Tujan
Adaptation du discours prononcé par Tony Tujan lors des Journées de la coopération internationale de
l'ACDI 2008. Pour visionner le discours, cliquer ici. (en anglais seulement)
« Le Bilan de l’aide 2008 révèle que l’aide n’arrive toujours pas à promouvoir un développement
humain en vue d’une élimination de la pauvreté d’après les valeurs fondamentales que sont les droits
de la personne, la démocratie, l’égalité des sexes et la durabilité de l’environnement. Cela, malgré des
progrès apparents sous forme d’annulations de dettes très médiatisées, de nouvelles promesses d’aide
et de la signature de la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide. »
Le Bilan de l’aide 2008
L’efficacité de l’aide doit s’inscrire dans le cadre général de l’efficacité du développement. Il ne s’agit
pas de notions opposées ou contradictoires, mais complémentaires. L’aide ne peut être efficace si elle ne
sert pas les objectifs du développement, notamment les droits de la personne, la justice sociale et l’égalité
des sexes. L’efficacité du développement part du principe que les gestionnaires et les prestataires de l’aide
se conforment à une reddition de comptes rigoureuse et font en sorte qu’il en résulte le renforcement du
pouvoir des personnes démunies et de leurs pays, ainsi que la prise en compte de leurs priorités.
Cependant, le système d’aide devra évoluer considérablement pour parvenir à une telle efficacité. Nous
n’avons aucun moyen de transformer rapidement l’aide en un instrument efficace de lutte contre la
pauvreté. L’élimination de la pauvreté nous amène à entreprendre un nombre incalculable d’actions et à
nous joindre aux pays et aux populations pauvres pour revendiquer leurs droits et accomplir des progrès
en matière de développement.
Devant la conjoncture actuelle, où le monde est plongé dans des crises alimentaire, énergétique,
climatique et financière, il a grand besoin qu’on lui montre la voie à suivre en matière de développement
et de lutte contre la pauvreté. Les politiques axées sur les préoccupations et les intérêts nationaux doivent
faire place à des politiques de paix et de développement qui visent à éliminer la pauvreté.
La prise en charge démocratique
L’efficacité du développement constitue un objectif global et
un cadre général pour évaluer le rendement des
gouvernements et la mesure dans laquelle les pays
parviennent à faire respecter les droits de leur population. Un
développement efficace passe inévitablement par une aide
efficace ayant pour assises les droits de la personne, l’égalité
des sexes et la viabilité. Toutefois, les principes et les
objectifs de l’efficacité du développement doivent toujours
définir l’efficacité de l’aide.
On entend par « processus de développement » les efforts
que déploient les pays en développement pour soutenir,
promouvoir et défendre l’ensemble des droits politiques,
économiques, sociaux et culturels de leurs citoyens. Le rôle
des partenaires internationaux, y compris des organisations
de la société civile (OSC), consiste à offrir un soutien pour
que les acteurs nationaux, c’est-à-dire le gouvernement et la
population, puissent réaliser ces objectifs en matière de
droits de la personne, et ainsi permettre aux gouvernements
de mettre en œuvre les accords internationaux relatifs aux
droits de la personne.
En définitive, l’efficacité du développement vise le
développement démocratique, lequel se fonde également sur
les droits de la personne. Les partenaires de l’aide
internationale parviendront à réduire l’aide à long terme
grâce à un processus de développement démocratique,
prônant la revendication par les pauvres de leurs droits civils
et politiques, et faisant de ces derniers le levier de leur
développement.
Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide
au développement : Appropriation,
harmonisation, alignement, résultats et
responsabilité mutuelle (extraits)
I. Exposé des résolutions
Nous, ministres de pays développés et de pays
en développement chargés de la promotion du
développement, et responsables d’organismes
bilatéraux et multilatéraux d’aide au
développement, réunis à Paris le 2 mars 2005,
prenons la résolution de mener des actions
ambitieuses, se prêtant à un suivi, afin de
réformer nos modalités d’acheminement et de
gestion de l’aide dans la perspective du bilan
après cinq ans, qui doit être effectué plus tard
dans l’année dans le cadre des Nations unies, de
la mise en œuvre de la Déclaration du millénaire
et des Objectifs du millénaire pour le
développement (OMD).
II. Engagements de partenariats
Conçus dans un esprit de responsabilité
mutuelle, les présents engagements de
partenariat s’appuient sur les enseignements tirés
de l’expérience. Nous sommes conscients qu’ils
doivent être interprétés à la lumière de la
situation propre à chaque pays partenaire.
Appropriation : Les pays partenaires exercent
une réelle maîtrise sur leurs politiques et
stratégies de développement et assurent la
coordination de l’action à l’appui du
développement.
C’est dans ce contexte que le sens de la prise en charge
démocratique devient aussi limpide qu’un principe général.
En ce qui concerne la prise en charge démocratique, le rôle
des gouvernements ne se limite pas à privilégier l’inclusivité,
à mobiliser les OSC, à rallier le secteur privé ou même
d’autres institutions gouvernementales, telles que le
parlement et les administrations locales, bien que ce rôle soit
essentiel. La prise en charge démocratique met l’accent sur la
participation des pauvres à toutes les étapes du processus de
développement.
Alignement : Les donneurs font reposer
l’ensemble de leur soutien sur les stratégies
nationales de développement, les institutions et
les procédures des pays partenaires.
Mise en pratique de façon efficace, la prise en charge
démocratique permettrait de régler de nombreux problèmes
rencontrés par les donateurs et de mettre un terme à bon
nombre de leurs préoccupations au chapitre de l’efficacité de
Responsabilité mutuelle : Les donneurs et les
pays partenaires sont responsables des résultats
obtenus en matière de développement.
Harmonisation : Les actions des donneurs sont
mieux harmonisées et plus transparentes, et
permettent une plus grande efficacité collective.
Gestion axée sur les résultats : Gérer les
ressources et améliorer le processus de décision
en vue d’obtenir des résultats.
l’aide, comme la conditionnalité par politique imposée (étant donné que les gens choisissent leurs propres
orientations politiques), l’aide liée (puisque les donateurs donnent suite en fonction des capacités des
partenaires de l’aide) ou un cadre de responsabilité (puisque la responsabilité devient multidirectionnelle).
L’efficacité du développement et les OSC
Les OSC sont des intervenantes essentielles à l’exercice d’une surveillance démocratique et jouent un rôle
complémentaire de celui des parlements. Encore plus important, elles sont l’expression de l’exercice des
droits de la population, y compris du droit d’association. Les OSC jouent un rôle de premier plan en
matière de prise en charge démocratique. Parmi les diverses formes d’OSC, celles qui contribuent le plus
aux efforts de développement sont les OSC œuvrant auprès des pauvres : celles qui sont en mesure de
mobiliser les pauvres et de leur aménager un cadre propice au renforcement de leur autonomie, ainsi que
les OSC qui offrent un soutien direct aux pauvres. Dans ce contexte, les OSC canadiennes devraient
s’attacher davantage leurs activités à établir des partenariats avec les OSC des pays du Sud plutôt que de
dispenser des services sociaux et reproduire ainsi le travail de donateurs comme l’ACDI ou les
gouvernements.
La nouvelle législation canadienne de l’aide qui a été adoptée en 2008, à savoir la Loi sur la
responsabilité en matière d'aide au développement officielle, comme l’indique son titre, porte sur la
responsabilité et insiste avec justesse non pas sur les préoccupations habituelles inhérentes à la corruption,
mais plutôt sur le cadre progressiste des droits de la personne et de la réduction de la pauvreté. Si elle est
mise en application convenablement, cette loi permettra manifestement au Canada d’assumer le rôle de
chef de file dans le système de l’aide, non seulement par choix, mais également en raison de sa
responsabilité légale. La mise en oeuvre de la Loi et les contributions du Canada au regard de l’efficacité
du développement doivent reposer sur une démarche de développement international fondée sur les droits
(collaboration avec les gouvernements des pays en développement ainsi qu’avec les OSC du Canada et
des pays du Sud).
Les droits de la personne, comme approche du travail de développement, ne doivent pas se limiter à
garantir le respect et la promotion des droits des citoyens ou à prêter une attention particulière aux
pauvres. Il est primordial de céder toute la place à l’ensemble des droits fondés sur les principes de
l’universalité et de l’indivisibilité, ce qui permettra de renforcer le pouvoir des pauvres et des personnes
marginalisées et encouragera leur participation et l’expression de leurs opinions en ce qui a trait aux
décisions qui les touchent.
Outre leur rôle essentiel au chapitre de l’efficacité de l’aide et de la prise en charge démocratique, les
OSC doivent composer avec des difficultés liées aux droits de la personne, lesquels sont le fondement de
l’efficacité du développement. Pour les OSC, les initiatives fondées sur les droits, qui sont employées
dans le cadre des partenariats de développement entre les OSC, visent, en définitive, à favoriser la
participation active des OSC du Sud au développement démocratique de leur pays. Or, on n’est pas sans
savoir qu’un climat de domination, de paternalisme, de manipulation, d’autoritarisme, ainsi qu’un manque
de confiance et de respect envers les OSC du Sud règlent souvent à les relations de partenariat entre les
OSC du Nord et celles du Sud.
La coopération au développement officielle est fondée sur des obligations internationales en vertu
d’accords sur les droits de la personne et d’autres engagements connexes. La solidarité internationale
entre les OSC repose sur les objectifs communs en matière de droits de la personne, d’égalité des sexes et
de développement durable. Ensuite, de ces objectifs et de ces valeurs émanent les principes de l’efficacité
des partenariats de développement entre les OSC. Certains diront que ces liens ont des racines plus
profondes que les partenariats officiels. Cependant, il n’en demeure pas moins que les OSC ne sont pas
des gouvernements et, par conséquent, ne représentent aucun pays ou peuple. Contrairement aux
obligations des gouvernements qui sont absolues et continues, la solidarité entre les OSC reste très fragile.
Le Forum ouvert sur l'efficacité des OSC dans le développement, tenu en septembre 2008 parallèlement
au Forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide à Accra, prévoit un processus visant à élaborer des
principes relatifs aux OSC et un cadre de responsabilité. Il est à espérer que le prochain forum de haut
niveau, se déroulera en 2011, sous le thème de l’efficacité du développement au lieu de présenter un
programme étroit axé uniquement sur l’efficacité de l’aide. Par ailleurs, il faut souhaiter que la
communauté internationale reconnaisse les OSC comme des acteurs égaux dans une architecture de l'aide
mondiale réformée. Face à la persistance de la pauvreté, de la famine, des maladies, des conflits et de la
guerre, les OSC souhaitent que les droits de la personne, la justice sociale et l’égalité des sexes
constituent les fondements de l’efficacité du développement.
Tony Tujan, de la Fondation IBON, est président du Reality of Aid Network (réseau du Bilan de l’aide).
Pour en savoir davantage
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Visionner le discours prononcé par Tony Tujan lors des Journées de la coopération internationale
de l'ACDI 2008 (fichier audio-vidéo) (en anglais seulement)
Direction de la coopération pour le développement – Déclaration de Paris
La Déclaration de Paris
Programme d’action d’Accra
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