18 | La Lettre du Sénologue • n° 46 - octobre-novembre-décembre 2009
Les inhibiteurs de l’aromatase (2e partie)
DOSSIER THÉMATIQUE
Impact sur les événements
cardio-vasculaires
Les informations issues de l’essai ATAC sont limitées en
raison de l’absence de recueil systématique des ECV.
Néanmoins, les résultats à 68 mois montrent une
augmentation non significative des crises d’angor
dans le bras traité par l’anastrozole par rapport aux
femmes qui ont reçu du tamoxifène, respectivement
4,1 % versus 3,4 % (p = NS). En revanche, l’incidence
des ECV ischémiques majeurs (infarctus ou décès
d’origine cardio-vasculaire) est similaire entre les
deux groupes.
Dans l’étude IES, à 60 mois de suivi, l’incidence
des ECV est comparable entre les deux groupes,
soit 16,5 % dans le bras exémestane et 15 % dans le
bras tamoxifène. Néanmoins, parmi les patientes du
groupe anastrozole, le taux d’infarctus du myocarde
était de 1,3 % contre seulement 0,8 % dans le groupe
tamoxifène. Bien que la différence ne soit pas signifi-
cative, les auteurs soulignent certaines associations,
en particulier l’association exémestane-hyperten-
sion, avec respectivement 71,1 % d’hypertendues
dans le groupe exémestane contre seulement 31,6 %
dans le groupe tamoxifène. Cela plaide fortement
en faveur de la surveillance régulière de la pression
artérielle chez les patients recevant l’exémestane
en traitement adjuvant.
Contrairement à d’autres essais adjuvants avec les
IA, l’étude BIG 1-98 a été conçue pour examiner
méthodiquement l’effet potentiel de l’IA sur les
risques cardiaques et une analyse systématique des
ECV a été réalisée. Les résultats, après une période
de 30 mois de suivi, ont démontré que l’incidence
des ECV était similaire dans les groupes létrozole et
tamoxifène, respectivement 4,8 % versus 4,7 %. En
revanche, il existait une tendance pour une augmen-
tation de l’incidence des cardiopathies ischémiques
avec le létrozole par rapport au tamoxifène (1,1 %
versus 0,7% ; p = 0,06) et une augmentation signi-
ficative de l’incidence des insuffisances cardiaques
(0,7 % versus 0,3 % ; p = 0,04).
Dans tous les cas, le nombre d’événements était
faible dans chaque bras et doit être pondéré par
le bénéfice carcinologique et surtout par l’impact
thérapeutique cardio-vasculaire, aussi bien en termes
d’insuffisance cardiaque qu’en termes d’ischémie.
Les comparaisons IA versus placebo représentent
la meilleure voie pour comprendre l’impact cardio-
vasculaire des IA. Dans l’étude MA 17, avec un suivi
de 2,5 ans, chez 5 187 patientes, les ECV sont simi-
laires entre les deux groupes, respectivement 5,8 %
sous létrozole et 5,8 % sous placebo, dont 0,3 %
et 0,4 % pour les infarctus du myocarde. Dans une
sous-analyse des causes de décès de l’étude MA 17,
les auteurs mettent en évidence que 60 % des décès
ne sont pas carcinologiques, et ce taux varie de 72 %,
chez les femmes de plus de 70 ans, à 48 % chez
les femmes de moins de 70 ans. Mais surtout, les
femmes ayant des antécédents cardio-vasculaires
ont un surrisque de décès de cause non carcinolo-
gique (p = 0,02).
En conclusion, les facteurs de risque cardio-vasculaire
présents chez les patientes porteuses d’un cancer
du sein reflètent ceux de la population générale.
L’impact des thérapeutiques sur les ECV se produi-
sant dans ces essais cliniques doit continuer à être
monitoré. Néanmoins, il n’existe à ce jour aucune
preuve d’un risque cardio-vasculaire ouvertement
accru avec les IA par rapport au placebo, mais les
femmes ménopausées qui reçoivent des IA demeu-
rent à risque de complications. En conséquence, les
patientes doivent être réévaluées régulièrement et
une prise en charge thérapeutique du risque cardio-
vasculaire reste un élément majeur pour les femmes
ayant un cancer du sein. ■
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Références bibliographiques
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