10 ANS INTERVIEW Réhabilitation respiratoire Dr Daniel Piperno – Centre médical Parot, Lyon La réhabilitation respiratoire peut être définie comme un programme multi­ disciplinaire de prise en charge des patients atteints de maladies respiratoires chroniques. Il doit être adapté à chaque individu, pour optimiser ses capacités physiques, psychologiques et éducatives, ainsi que son insertion sociale et son autonomie. Ces programmes – dont les deux piliers sont le réentraînement musculaire et l’éducation thérapeutique – sont appelés à se développer dans les années à venir compte tenu de leur efficacité remarquable dans la prise en charge des patients atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Les besoins en termes de structures spécifiquement consacrées à ce type de programmes demeurent très importants. Ce qu’il faut retenir de ces 10 dernières années ➤➤ Le principe de la réhabilitation respiratoire est celui d’une prise en charge globale de la maladie pulmonaire du patient, associant au traitement bronchodilatateur, à l’oxygénothérapie et au sevrage tabagique le réentraînement à l’exercice, la gymnastique, la maîtrise du souffle, l’éducation thérapeutique ainsi qu’une aide nutritionnelle et psychologique. L’intérêt pour ce type de démarche est relativement récent, puisque ce n’est véritablement qu’à partir de 1996, au vu des résultats d’une méta-analyse canadienne (1), que l’on a assisté à la montée en puissance de la réhabilitation respiratoire. En France, si le groupe ALVEOLE* a été fondé dès 1990, puis intégré en tant que groupe de travail au sein de la Société de pneumologie de langue française (SPLF), ce n’est que depuis un peu plus de 10 ans qu’une réelle sensibilisation a débuté en direction des pneumologues, des médecins généralistes et de nos organismes de tutelle. En 2003, la conférence d’experts sur la réhabilitation respiratoire a permis d’aboutir pour la première fois à un référentiel de * Ce groupe publie un nouveau Guide pratique de réhabilitation respiratoire (éditions Imothep) qui reprend les différentes sessions de formation des ateliers d’Aix. Il sera distribué lors du prochain congrès de pneumologie de langue française, en janvier 2009. 222 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XI - n° 6 - novembre-décembre 2008 la SPLF (2). Plus récemment, le plan quinquennal 2005-2010 potant sur la prise en charge de la BPCO, sous la direction du Pr Philippe Godard, l’a également incluse dans ses objectifs. Dans la préface de ce plan, signée par Xavier Bertrand, l’accent est mis à la fois sur le diagnostic précoce de la BPCO et sur la réhabilitation respiratoire… ➤➤ Les dix dernières années ont ainsi été marquées par la reconnaissance scientifique des bénéfices de la réhabilitation respiratoire en termes tant d’amélioration de la dyspnée et de la qualité de vie que de réduction du nombre d’exacerbations et d’hospi­ talisations et de diminution du coût de la prise en charge. Parallèlement, de nombreux travaux ont été réalisés sur les manifestations systémiques extrarespiratoires de la BPCO et sur l’importance de l’atteinte musculaire, en partie liée à la sédentarisation des patients. Cette atteinte spécifique paraît non seulement quantitative mais aussi qualitative (inversion des fibres de types I et II), ce qui explique l’endurance moindre des patients. Les nombreuses manifestations systémiques (on parle aujourd’hui d’une véritable “inflammation” systémique) associées à la BPCO (ostéoporose, atteinte cardio-vasculaire, troubles cognitifs, etc.) justifient, quant à elles, la notion plus globale de maladie ­chronique, au même titre que l’insuffisance cardiaque ou le diabète. ➤➤ La réhabilitation respiratoire et le réentraînement à l’effort ont d’autant plus d’intérêt chez le patient atteint de BPCO que l’atteinte musculaire consécutive à l’obstruction bronchique est un phénomène très réversible, avec des résultats qui sont rapidement quantifiables. La plus grande difficulté réside sans doute dans la mise en pratique de ces tech­ niques du fait du problème de leur mode de financement. La carence de moyens est en effet soulignée par le rapport de l’HAS de l’été 2007, qui considère pourtant le “service attendu comme suffisant pour justifier une prise en charge” (3). Plusieurs modalités de prise en charge existent à l’heure actuelle – centres de réhabilitation spécifiques ou SSR (soins de suite de réadaptation), structures ambulatoires ou prise en charge à domicile, qui se heurtent toutes au problème de l’absence de cotation. Ce que l’on peut attendre des 10 années à venir ➤➤ Des années à venir, on peut certainement attendre la reconnaissance de l’éducation thérapeutique comme faisant partie intégrante de la réhabilitation respiratoire, même s’il paraît toujours aussi difficile pour notre système de santé de se situer dans une logique de prévention. On peut s’attendre également à un développement important des structures de prise en charge, car la France, malgré ses 3,5 millions de patients atteints de BPCO, se situe actuellement très en dessous des besoins. La prise en charge à domicile (home care), devrait prendre une place privilégiée compte tenu de la nécessité de mise en place de structures relais permettant le maintien des acquis des stages initiaux (durée de 3 à 6 semaines selon les centres). D’ores et déjà, certains kinésithérapeutes s’impliquent dans le réentraînement à l’effort, mais cette prise en charge à domicile pourrait également faire intervenir des réseaux de prestataires ou, pourquoi pas, la création de nouveaux métiers. Les réseaux spécifiquement consacrés à la réhabilitation respiratoire évolueront peut-être vers des réseaux de maladie chronique. ➤➤ L’avenir passe également par le dépistage à des stades plus précoces de la BPCO, par une prise en compte systématique des répercussions fonctionnelles respiratoires et musculaires et par le développement de la pratique de l’épreuve d’effort dans l’évaluation de la dyspnée. Enfin, il faut souligner l’importance du “contrat” médecin-patient, dans lequel le sevrage tabagique constitue un prérequis, d’ailleurs obligatoire dans les pays anglo-saxons, qui n’incluent dans leurs programmes de réhabilitation respiratoire que les patients sevrés. ■ Références bibliographiques 1. Lacasse Y, Wong E, Guyatt GH, King D, Cook DJ, Godstein RS. Meta-analysis of respiratory rehabilitation in chronic obstructive pulmonary disease. Lancet 1996;348(9035):1115-9. 2. Conférence d’experts de la SPLF. Réhabilitation respiratoire, 2003. 3. Rapport de l’HAS. Réhabilitation respiratoire. Été 2007. 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