L Cancer de l’endomètre : enquête sur les pratiques chirurgicales en France

La Lettre du Gynécologue 354 septembre 2010 | 15
DOSSIER
Cancer de l’endomètre :
enquête sur les pratiques
chirurgicales en France
en 2008
Endometrial cancer: survey of surgical practice
in France in 2008
M. Brzakowski*, R. Fauvet*, J. Gondry*, E. Daraï**
L
e cancer de l’endomètre est le cancer gynécolo-
gique le plus fréquent et son incidence ne cesse
d’augmenter dans les pays industrialisés. En
France, en 2002, le nombre annuel de nouveaux cas
a été estimé à 6 000, et le nombre annuel de décès à
1 235. Si la médiane de survie à 5 ans est de 70 % tous
stades et tous types histologiques confondus, la survie
dépend des modalités du traitement – notamment
des modalités chirurgicales – qui restent la pierre
angulaire.
Les standards, options et recommandations (SOR)
publiés en 2000 indiquaient une stratégie diagnos-
tique, un bilan préopératoire ainsi que les modalités
du traitement chirurgical. Divers référentiels, notam-
ment ceux de la Société française d’oncologie gyné-
cologique (SFOG), préconisent une prise en charge
différente. Du fait des variations sensibles des divers
référentiels, il apparaissait nécessaire d’évaluer les
pratiques des chirurgiens français.
Matériel et méthode
Une enquête épidémiologique descriptive par
sondage à l’aide d’un questionnaire anonyme validé
par le Collège national des gynécologues et obsté-
triciens français (CNGOF) a été réalisée en octobre
2008 lors du Cercle de vidéochirurgie gynécologique
(CVG) et en décembre 2008 pendant les Journées
nationales du CNGOF. Six cents exemplaires ont été
distribués ; les différents items concernaient d’une
part, l’âge, le sexe, l’activité, le lieu d’exercice et
l’expérience du praticien interrogé et, d’autre part,
le bilan préopératoire et le traitement chirurgical du
cancer de l’endomètre. Les praticiens ont également
été interrogés sur 3 cas cliniques de cancer de l’en-
domètre (2 cas d’adénocarcinomes endométrioïdes
de stade IB et de stade II, et 1 cas d’adénocarcinome
séro-papillaire de stade IB) [tableau I]. Les résultats
ont été comparés aux référentiels français actuels de
la SFOG et des SOR émis par la Fédération nationale
des centres de lutte contre le cancer (FNCLCC).
Résultats
Nous avons obtenu un taux de réponses analysables
de 19 %, soit 114 questionnaires.
Caractéristiques épidémiologiques,
lieu d’exercice des praticiens
et nombre annuel de cancers
de l’endomètre pris en charge
L’âge moyen des praticiens interros était de 47,7 ans
(24-70 ans). Les hommes représentaient la majorité
des sondés : 73,7 % versus 26,3 % de femmes. Les
praticiens étaient essentiellement des gynécologues
obstétriciens (93,8 %) ; on observait 4,5 % de chirur-
giens oncologues et 1,7 % de chirurgiens viscéraux.
L’intervalle de temps depuis la date d’obtention de
la thèse était de 19 ans en moyenne (1-40 ans). Le
lieu d’exercice était public dans 67,6 % des cas, et
privé dans 32,4 % des cas. En excluant les internes et
les chefs de clinique assistants, les praticiens étaient
répartis de façon homogène entre les établissements
publics et privés selon leur âge et leur sexe.
* Centre de gynécologie obstétrique,
CHU Amiens, 124, rue Camille-
Desmoulins, 80054 Amiens Cedex 1.
** Service de gynécologie obsté-
trique, CHU Tenon, 4, rue de la Chine,
75970 Paris Cedex 20.
16 | La Lettre du Gynécologue 354 - septembre 2010
Résumé
Le cancer de l’endotre est le cancer gynécologique le plus fréquent. En France, sa prise en charge est codife
par des référentiels. Le but de cette enquête est d’évaluer les pratiques et leur conformité par rapport aux
férentiels. Six cents questionnaires ont été distribués en 2008 lors de deux congrès français. Les questions
concernaient, d’une part, le praticien (âge, sexe, activité, lieu d’exercice et nombre de cancers traités indivi-
duellement et par structure) et, d’autre part, la pathologie étudiée (bilan préopératoire, stratégie chirurgi-
cale). Trois cas cliniques ont été proposés (2 adénocarcinomes endométrioïdes de stade IB et de stade II, et 1
adénocarcinome séro-papillaire de stade IB). Malgré les limites des études de pratiques fondées sur la réponse
volontaire au questionnaire, nos résultats soulignent l’effort que les colges de spécialités, les sociétés savantes
et les tutelles doivent déployer pour homogénéiser le traitement des cancers. Une réflexion doit également
être menée sur les critères de formation initiale et tout au long d’une carrière professionnelle, pour offrir aux
patientes une prise en charge optimale.
Mots-clés
Cancer de 
l’endomètre
Pratiquechirurgicale
Parmi les établissements de soins, 34,2 % d’entre
eux prenaient en charge plus de 20 cancers de l’en-
domètre par an, 61,4 % de 5 à 20 cancers de l’en-
domètre par an, et 4,4 % moins de 5 cancers de
l’endomètre par an.
Le nombre de cancers de l’endomètre était supérieur
à 20 pour 1,7 % des praticiens, compris entre 5 et
20 pour 57,9 % des praticiens et inférieur à 5 pour
40,4 % des praticiens.
Le caractère public ou privé des établissements
n’avait pas d’influence sur la répartition du nombre
de cancers de l’endomètre pris en charge par an et
par praticien.
Modalités du diagnostic positif
et du bilan préopératoire
Pour 98,2 % des praticiens, le diagnostic anatomo-
pathologique préopératoire a été obtenu soit par
Pipelle de Cornier®, soit par hystéroscopie avec cure-
tage biopsique, soit en s’aidant des deux examens.
Pour le bilan préopératoire, une imagerie par réso-
nance magnétique (IRM) abdomino-pelvienne
était demandée dans 84,2 % des cas ; ceux qui ne
préconisaient pas d’IRM prescrivaient une tomoden-
sitométrie abdomino-pelvienne (TDM) dans 10 %
des cas et une échographie pelvienne seule dans
5,8 % des cas. Globalement à visée préopératoire,
l’échographie pelvienne était prescrite dans 78,9 %
des cas, la TDM dans 30,7 % des cas, l’échographie
abdominale dans 27,2 % des cas et l’urographie intra-
veineuse dans 3,5 % des cas. Le Ca 125 (carbohydrate
antigen) était prescrit dans un tiers des cas, l’anti-
gène carcino-embryonnaire (ACE) et le Ca 19-9 dans
respectivement 19 % et 13 % des cas.
Modalités du traitement chirurgical
La laparotomie transversale était la voie d’abord la
plus fréquemment utilisée (35,4 %), avant la lapa-
rotomie médiane (29,1 %) et la cœlioscopie associée
à la voie vaginale (21,7 %). Les voies cœlioscopiques
ou vaginales exclusives étaient réalisées dans respec-
tivement 8,3 % et 5,5 % des cas. Les voies d’abord
pratiquées ne différaient pas selon l’âge ou l’expé-
rience du praticien. Les critères de choix des voies
d’abord étaient : l’âge de la patiente pour 56,4 % des
praticiens, l’indice de masse corporelle (IMC) pour
47,3 %, les comorbidités pour 56,4 %, les antécé-
dents de laparotomie pour 45,5 % et le stade de la
maladie pour 61,8 %.
L’hystérectomie totale extrafasciale non conser-
vatrice était réalisée dans plus de la moitié des cas
(56,7 %), la colpohystérectomie dans un tiers des
cas (35,7 %) et l’hystérectomie intrafasciale dans
7,6 % des cas. La lymphadénectomie était prati-
quée dans 74,7 % des cas, la lymphadénectomie
lombo-aortique dans 7,5 % des cas, et la technique
du ganglion sentinelle dans 3,3 % des cas. La cyto-
logie péritonéale était pratiquée dans 69,9 % des cas,
Keywords
Endometrial cancer
Surgical practice
Patiente A : femme ménopausée de 55 ans, en bon état de santé général, présentant un 
carcinome endométrioïde de grade 1 infiltrant moins de 50 % du myomètre. Quelle chirurgie 
faites-vous ?
HT intrafasciale non conservatrice        
HT extrafasciale non conservatrice        
Colpohystérectomie totale non conservatrice       
Lymphadénectomie pelvienne         
Lymphadénectomie lombo-aortique       
Ganglion sentinelle           
Cytologie péritonéale           
Omentectomie           
Autre :………………………………………………………….…………………
PatienteB : femme de 60 ans, en bon état de santé général, présentant un carcinome endomé-
trioïde infiltrant plus de 50 % du myomètre avec atteinte de l’isthme à l’IRM. Quelle chirurgie 
faites-vous ?
HT intrafasciale non conservatrice        
HT extrafasciale non conservatrice        
Colpohystérectomie totale non conservatrice       
Lymphadénectomie pelvienne         
Lymphadénectomie lombo-aortique       
Ganglion sentinelle           
Cytologie péritonéale           
Omentectomie           
Autre :………………………………………………………….……………….
PatienteC : femme de 55 ans, en bon état de santé général, présentant un adénocarcinome 
séro-papillaire de l’endomètre infiltrant moins de 50 % du myomètre. Quelle chirurgie faites-
vous ?
HT intrafasciale non conservatrice        
HT extrafasciale non conservatrice        
Colpohystérectomie totale non conservatrice       
Lymphadénectomie pelvienne         
Lymphadénectomie lombo-aortique       
Ganglion sentinelle           
Cytologie péritonéale           
Omentectomie           
Autre ………………………………………………………….…………………
Tableau I. Cas cliniques proposés dans le questionnaire.
La Lettre du Gynécologue 354 septembre 2010 | 17
DOSSIER
et l’omentectomie dans 11,7 % des cas. Les critères
modifiant le traitement chirurgical étaient l’envahis-
sement du myomètre dans 75 % des cas, l’atteinte de
l’isthme (70 %) et l’âge (66 %). Par ordre décroissant,
les autres critères décisionnels étaient la prise en
compte des comorbidités (50 %), le grade histolo-
gique (45 %), la suspicion de carcinose (36,5 %) et
le type histologique (35,1 %).
Réponse aux cas cliniques
et comparaison avec les référentiels
(tableau II, figure).
Treize pour cent des praticiens interrogés ont
respecté les référentiels nationaux pour les 3
cas cliniques, avec plus précisément 41,9 % de
bonnes réponses au cas A, 57,1 % de bonnes
réponses au cas B et 20 % de bonnes réponses au cas
C. Les critères corrélés à une réponse concordante
avec les référentiels étaient l’âge des praticiens, l’in-
tervalle de temps depuis leur thèse et le nombre
annuel de cas de cancers de l’endomètre traités.
Les praticiens qui appliquent les recommandations
aux 3 cas cliniques sont plus jeunes de 8 ans (41,2
ans versus 49,1 ans ; p = 0,01), ce qui explique que
l’intervalle de temps depuis l’année d’obtention de
la thèse est plus faible (9,1 ans versus 20,5 ans ; p =
0,002). Les praticiens respectant les référentiels
traitent plus de 5 cancers de l’endomètre par an
(92,9% versus 57,8% ; p = 0,01).
Conclusion
Cette enquête fait ressortir une concordance rela-
tivement faible entre les référentiels et la stratégie
thérapeutique proposée par les praticiens pour le
traitement du cancer de l’endomètre. Malgré l’exis-
tence de SOR élaborés en 2000 et d’un référentiel de
la SFOG publié en 2008, l’analyse des cas cliniques
montre que le taux de réponses conformes aux réfé-
rentiels ne dépasse pas 60 %. Cette non-conformité
est surtout notable pour le cas clinique concernant le
carcinome séro-papillaire. Ces constatations posent
le problème de la nécessité d’un seuil individuel
d’activité minimale par praticien et rappellent le
rôle important des réseaux de cancérologie, des
réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP)
et de la formation médicale continue.
Tableau II. Réponses apportées aux cas cliniques du questionnaire et comparaison avec les référentiels.
Âge Intervalle de temps
depuis la thèse
Activité
personnelle (%)
Activité
de la structure (%)
% p Années p < 5 ≥ 5 p ≤ 20 > 20 p
Cas A r (%) 41,9 46,4 ±10,4 ns 16,4 ± 9,9 0,03 20,5 79,5 0,002 61,4 38,6 ns
nr (%)° 58,1 49,3 ±10,7 21,4 ± 9,5 50,0 50,0 62,7 37,3
Cas B r (%) 57,1 45,3 ±11,2 0,002 16,0 ± 10,5 0,002 36,7 63,3 ns 56,7 43,3 ns
nr (%) 42,9 51,8 ±8,6 23,1 ± 7,9 38,6 61,4 69,8 30,2
Cas C r (%) 20 43 ±10,1 0,02 15 ± 9,2 ns 9,5 90,5 0,002 61,9 38,1 ns
nr (%) 80 49,3 ±10,5 20,2 ± 9,9 44,6 55,4 62,2 37,8
Total 
A+B+C
r (%) 13,3 41,2 ±9,6 0,01 9,1 ± 6,5 0,002 7,1 92,9 0,01 71,4 28,6 ns
nr (%) 86,7 49,1 ±10,4 20,5 ± 9,6 42,2 57,8 60,7 39,3
r : respect des standards. nr : non respect des standards. ns : non significatif.
Figure. Graphique des réponses comparées aux référentiels.
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
A B CABC
nr
r
r : respect des standards. nr : non-respect des standards.
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