Q
uelle est la vocation de la presse médicale ? La
question peut paraître incongrue tant la réponse est
é v i d e n t : transmettre aux médecins les informa-
tions nécessaires à l’exercice de leur profession et, notamment,
les maintenir au contact des connaissances nouvelles. Au fil du
temps, la culture médicale mais aussi les idées évoluent en fonc-
tion des travaux scientifiques dans toutes les disciplines, et nul
ne peut négliger ces évolutions, sauf à risquer de se marginaliser
dans la profession. Les innovations techniques des méthodes
d’investigation biologiques ou d’imagerie, en pharmacologie
comme en médecine et en chirurgie, constituent autant de besoins
d’information pour tous les médecins, quels que soient leur mode
d’exercice ou leur spécialité. La complexité du progrès des
connaissances explique la tendance que l’on observe à une spécia-
lisation de plus en plus marquée des publications médicales.
L’information doit également intéresser l’organisation de la pro-
fession, ses rapports avec les pouvoirs publics, la déontologie, la
responsabilité médicale, les problèmes d’investissement et de
gestion, notamment du personnel, en bref tout ce qui fait la vie
des cabinets ou des hôpitaux. Enfin, la presse médicale parle de
la santé publique, dont on peut voir tous les jours les problèmes
qu’elle pose et auxquels les médecins ne peuvent être étrangers,
compte tenu du rôle prépondérant qu’ils ont à jouer pour y
répondre. Toutes ces informations font la trame de la formation
permanente des praticiens, et toutes les enquêtes prouvent que la
presse en assure l’essentiel. Ajoutons qu’en publiant les travaux
originaux, les revues scientifiques leur permettent d’atteindre la
communauté scientifique et, par là même, de les authentifier en
ouvrant le nécessaire débat critique. La presse médicale, du fait
même de l’ampleur de son rôle, doit être diverse pour répondre
aux attentes de l’ensemble du corps médical.
Pour mener à bien sa mission, elle doit satisfaire à certaines exi-
gences. La première, qui ne lui est pas propre, est l’indépendance.
Ardente obligation, elle doit s’exercer à l’égard de tout pouvoir, éco-
nomique, politique ou syndical et garantit ainsi, si ce n’est l’objec-
tivité, du moins la liberté d’expression. Elle est un engagement à
ne pas céder à une tentation mercantile ou à une complaisance par-
tisane. Elle impose la transparence des sources d’information.
La deuxième exigence est de fournir aux lecteurs des informa-
tions validées par des experts et d’en dégager la signification pour
aider le médecin dans sa pratique. De plus, en ces temps où
l’information médicale circule en permanence dans les médias
destinés au public, il est nécessaire que le médecin puisse dispo-
ser de sources sérieuses pour convaincre ses patients lors de la
prise de décision, au besoin en rectifiant des idées reçues aux
bases scientifiques imprécises ou en réfutant des affirmations
erronées qui pourraient fausser le jugement du patient.
Pour être crédibles, les articles de la presse médicale doivent res-
pecter les règles de la démarche scientifique, et donc fournir aux
questions traitées dans les textes des réponses claires et précises
reposant sur des faits établis soutenus par des références véri-
fiables. Cela n’exclut pas, bien évidemment, l’expression d’opi-
nions divergentes, dès lors qu’elles sont étayées par des faits tirés
de pratiques fondées sur des preuves.
Parce que la presse médicale est un outil indispensable d’aide à la
décision, il est souhaitable, pour qu’elle joue pleinement son rôle,
que les praticiens acquièrent dès leur formation initiale l’expérience
de la lecture critique. En outre, parce que chaque médecin est appelé
à devenir un jour l’auteur d’une communication, il est fondamental
qu’un enseignement de la rédaction soit dispensé à la faculté.
Le succès d’une publication médicale est acquis lorsqu’elle
a su susciter l’adhésion et la confiance de ses lecteurs pour la dif-
fusion du savoir qu’ils viennent y chercher.
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© La Lettre du Pharmacologue 2004;18(1):2.
La vocation de la presse médicale
The medical press’ mission
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F.C. Mignon*
* ACCA - Président d’honneur du SNPM (2, avenue du Colonnel-Bonnet, 75016
Paris).
ÉD I T O R I A L
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La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n
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292 - mai-juin 2004