Fiche n°1 Technique La neuromodulation sacrée

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Fiche n°1
Technique
Sous la responsabilité de leurs auteurs
La neuromodulation sacrée
Introduction
Fiche à détacher et à archiver
Principe
Technique
Figure 1. Test percutané de stimulation sacrée. Recherche
de la racine sacrée permettant d’obtenir une contraction
anale.
L e traitement chirurgical de l’incontinence fécale (IF) par rupture du
sphincter anal externe donne de bons résultats grâce à la réparation
directe. En revanche, l’IF due à une incompétence du sphincter externe
sans rupture (par exemple, la neuropathie d’étirement) ou à une déficience du sphincter interne est plus difficile à traiter. En effet, les résultats à long terme du postanal repair sont décevants. Par ailleurs, les
techniques de substitution sphinctérienne, comme la graciloplastie
dynamique et le sphincter anal artificiel, sont des procédés invasifs
et non dénués de morbidité. Chez ces patients, la neuromodulation
sacrée pourrait être une alternative thérapeutique.
La
neuromodulation sacrée, ou électrostimulation des racines
sacrées, est utilisée depuis une dizaine d’années en urologie pour
traiter l’incontinence par hyperactivité vésicale et les troubles de
l’évacuation. L’observation d’une amélioration des troubles anorectaux chez des patients atteints d’une incontinence mixte, urinaire et
fécale, explique l’application récente de cette technique dans le traitement de l’IF. Bien que le mécanisme d’action de l’électrostimulation
sacrée soit encore méconnu, trois hypothèses ont été avancées. La stimulation sacrée renforcerait l’activité du sphincter anal externe, en
stimulant directement le nerf pubendal qui l’innerve (1). La stimulation sacrée inhiberait l’activité pelvienne autonome parasympathique, entraînant une diminution de la sensibilité et de la contactilité rectale (2). Enfin, évoquée mais non observée, la stimulation
sacrée pourrait également influer sur la continence fécale, en modifiant le transit du côlon gauche innervé par les mêmes racines
sacrées que l’appareil ano-rectal. Les deux dernières hypothèses
expliquent le terme de neuromodulation plutôt que d’électrostimulation des racines sacrées.
L e principal intérêt de ce nouveau traitement de l’IF est la possibilité
de réaliser un test thérapeutique. En effet, la technique de neuromodulation sacrée comprend deux étapes : un test de stimulation
externe temporaire et une implantation définitive du neurostimulateur.
Test de stimulation temporaire
Le test se fait au cours d’une consultation. Le patient est placé en
décubitus ventral, et une électrode aiguille (Medtronic, Interstim) est
insérée sous anesthésie locale dans les trous sacrés par voie percutanée (figure 1). Le 3e trou sacré est testé en premier, suivi par S2 et
S4 en cas de réponse insuffisante ou inadaptée. Le point de ponction pour S3 est situé environ à deux travers de doigt au-dessus du
sillon interfessier et un travers de doigt latéralement par rapport à
la ligne médiane. Un courant électrique à basse fréquence est appliqué de façon croissante, par l’intermédiaire du neurostimulateur,
pour tester chaque trou sacré à la recherche de la réponse optimale.
Le test est considéré comme positif si l’on a pu obtenir une contraction visible du sphincter externe de l’anus. L’association à une
flexion du gros orteil témoigne du niveau S3 de la stimulation ; la
flexion plantaire de la cheville, la contraction du mollet ou la rotation de la jambe correspondent au niveau S2 ; l’absence de réponse
motrice au niveau S4. Si le test est positif, l’électrode aiguille est
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Le Courrier de colo-proctologie (II) - n° 1 - mars 2001
F O R M E R
E. Rullier
(Service de chirurgie digestive, hôpital Saint-André, Bordeaux)
Fiche n°1
Technique
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remplacée par une électrode test fixée à la peau puis raccordée à
un neurostimulateur externe que le patient gardera sur lui (figure 2).
L’efficacité de la neuromodulation sacrée sur la continence sera évaluée sur une période de 7 jours, durée limite en raison du risque
potentiel d’infection locale dû au matériel transcutané. Le test peut
être renouvelé en cas de déplacement de l’électrode.
Conclusion
Figure 3. Implantation du neurostimulateur. L’électrode est fixée au contact de la
troisième racine sacrée droite, puis connectée à un stimulateur positionné dans la fosse
iliaque en région sous-cutanée.
Références
L a neuromodulation sacrée est un apport thérapeutique récent pour
les patients atteints d’IF. Cette technique, plus simple à réaliser et
moins traumatisante que la graciloplastie dynamique et le sphincter
anal artificiel, a pour originalité de permettre un test thérapeutique.
Les 75 à 100 % de guérison ou d’amélioration chez les premiers
patients implantés sont prometteurs (1, 3, 4). La place de ce traitement dans l’IF sera mieux ciblée dès que le mécanisme d’action de
la neuromodulation des racines sacrées sera élucidé. Cependant,
les indications pourraient s’élargir dès maintenant dans la mesure
où la neuromodulation a des effets sur les fonctions urinaires,
sphinctériennes et digestives, ces fonctions étant souvent altérées
simultanément, et où le test thérapeutique est facile à réaliser.
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1. Matzel KE, Stadelmaeir U, Hohenfellner M, Gall FP. Electrical stimulation of sacral
spinal nerves for treatment of faecal incontinence. Lancet 1995 ; 346 : 1124-7.
2. Vaizet CJ, Kamm MA, Turner IC et al. Effects of short term sacral nerve stimulation on
anal and rectal function in patients with anal incontinence. Gut 1999 ; 44 : 407-12.
3. Malouf AJ, Vaizet CJ, Nicholls RJ, Kamm MA. Permanent nerve stimulation for fecal
incontinence. Ann Surg 2000 ; 232 : 143-8.
4. Leroi AM. Neuro-modulation des racines sacrées et incontinence fécale. HépatoGastroentérol 2000 ; 7 : 453-8.
Le Courrier de colo-proctologie (II) - n° 1 - mars 2001
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Fiche à détacher et à archiver
Figure 2. Test de stimulation temporaire.
L’électrode sacrée est extériorisée et connectée à un stimulateur externe.
Implantation définitive (IF)
Lorsque l’IF a été améliorée (disparition ou diminution d’au moins
50 % des épisodes d’incontinence) par la stimulation temporaire des
racines sacrées et qu’elle s’est détériorée après le test, l’implantation
définitive est proposée. L’intervention nécessite une courte hospitalisation de 48 heures. Le patient est installé en décubitus ventral, sous
anesthésie générale et sans curare, afin de retester la situation optimale de l’électrode. Une incision verticale (8 cm) est réalisée jusqu’à
l’aponévrose sacrée. Une électrode quadripolaire est implantée directement dans le trou sacré, fixée au périoste puis raccordée à un neurostimulateur. Celui-ci est implanté sous la peau dans la fosse iliaque
ou, plus volontiers, dans la région dorsale sus-fessière, ce qui évite
de retourner le malade en cours d’intervention (figure 3). L’électrode
est régulièrement retestée lors des différents temps de l’intervention
pour vérifier sa position optimale qui conditionne à la fois l’efficacité
et la tolérance de la méthode. Dès le lendemain de l’intervention, le
patient peut déambuler et s’alimenter et le stimulateur est activé. Les
constantes de stimulation sont programmées par le médecin par télémétrie : impulsions électriques 210 ms, fréquence 14 Hz, intensité
variable selon les patients 0,5 à 2 Volts. Par la suite, en fonction
des résultats, le patient peut modifier l’intensité de la stimulation à
l’aide d’une télécommande.
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