30 | La Lettre du Cardiologue • n° 461-462 - janvier-février 2013
Spécificités du sujet âgé dans la gestion pré- etpostopératoire
DOSSIER THÉMATIQUE
Cœur et anesthésie
dépression, amyotrophie, rétraction tendineuse et
complications thromboemboliques. L’alitement d’un
patient âgé doit attirer l’attention du clinicien, en
raison de ces enjeux. La reprise de la marche peut
requérir un certain nombre d’intervenants, comme
le kinésithérapeute ou le psychologue en cas de
syndrome postchute, mais rien ne doit différer une
verticalisation précoce.
Procédures perçues comme
“banales” chez le patient âgé
mais à éviter
L’infection urinaire sur sonde est la première cause
d’infection liée aux soins aux États-Unis, et le risque
de développer une bactériurie sur sonde est estimé
à 25 %, avec un risque qui augmente de 5 % par
jour où la sonde est laissée en place (10). La pose
d’une sonde urinaire représente une procédure
invasive, souvent indispensable en peropératoire.
Elle doit être retirée au plus tôt, en raison de son
caractère douloureux et du risque de complications
infectieuses, avec si possible, après le retrait, la
surveillance de la diurèse, la recherche d’un globe
ou l’utilisation d’un bladder-scan1, dont une méta-
analyse récente confirmait l’efficacité pour éviter le
recours à la sonde urinaire, et a montré qu’il réduit
les infections urinaires sur sonde (11).
La contention chimique et physique
La gestion des troubles du comportement, générale-
ment dans le cadre de la confusion, met souvent les
équipes en difficulté. En particulier chez les patients
ayant des troubles cognitifs, le recours à des psycho-
tropes, dont les neuroleptiques, est associé à une
augmentation du risque de pneumonie (12). Il faut
savoir s’appuyer sur l’entourage et le faire venir
auprès du patient pour atténuer la composante
anxieuse de la situation. Si l’option médicamen-
teuse est jugée indispensable, elle devra toujours
essayer d’obtenir un effet rapidement progressif
plutôt que brutal, en maintenant un état de vigilance
suffisant pour ne pas aggraver les troubles de la
déglutition (13). De même, le recours à une conten-
tion physique, qui doit répondre à une prescription
médicale, représente le symbole de la procédure
invasive, faussement rassurante puisqu’associée
aux risques allant de la chute du lit au décès (14).
Quelle évaluation
pour quelle décision ?
La gériatrie ne se résume pas à la réalisation
d’échelles, tant cognitive que nutritionnelle ou
autre. Dans le cadre de la chirurgie programmée, il
faut réfléchir à des collaborations avec les gériatres
(pour l’instant peu structurées) afin d’évaluer le
risque de complications selon les comorbidités
bien plus que selon l’âge. Tel patient présentant
de nombreuses comorbidités pourra être pris en
charge en gériatrie, et ce précocement. La géria-
trie possède une expertise qui ne s’applique pas à
tous les patients, et vouloir transférer en gériatrie
des patients sur le simple fait de l’âge n’est pas
une démarche adaptée. À l’opposé, vouloir y trans-
férer un patient qui ne possède aucune marge de
progression ou de récupération n’a pas de sens non
plus. Il faut donc cibler, et évaluer avant même la
chirurgie, les patients qui bénéficieront d’un séjour
en gériatrie : en priorité, les patients cumulant de
nombreuses comorbidités, les patients à risque
de syndrome confusionnel (patients présentant
un syndrome démentiel connu), dont la survenue
met en difficulté tous les services, et les patients
à risque de perte d’autonomie (à travers le risque
nutritionnel, fonctionnel ou encore thymique).
Encore faut-il, pour cela, que le service de gériatrie
correspondant soit suffisamment dimensionné…
Exemple de filière
périopératoire gériatrique
La filière du groupe hospitalier de la Pitié-Salpê-
trière repose sur l’implication de tous les acteurs
de la prise en charge gériatrique, de l’urgentiste
au médecin de rééducation, en passant par l’anes-
thésiste, le chirurgien et le gériatre. Sa création a
permis la prise en charge de plus de 500 patients
en unité périopératoire gériatrique depuis son
ouverture. Comparée à une prise en charge usuelle
dans le cadre de la FESF, elle a permis la réduction
d’événements tels que les escarres ou la conten-
tion physique, et a diminué la durée moyenne de
séjour, ainsi que la mortalité à 6 mois. Ce type de
collaboration doit être développé, mais nécessite
des moyens spécifiques adaptés. ■
1. Instrument portable destiné à la mesure du volume de la vessie. Le
volume de la vessie est échantillonné à l’aide d’un capteur volumé-
trique 3D.
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