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se trouve au même endroit dans le membre, même si la forme, la fonction de ce membre changent
entre ces animaux.
Ce concept d'homologie permet de comparer de façon pertinente les organismes, ce qui est la
condition pour proposer une bonne systématique.
3. La mort des espèces
En plus du concept d’homologie, George Cuvier (1769–1832) apporte une autre notion, qui a un
impact considérable. Il démontre, par la paléontologie, que les espèces meurent. Grâce à des fossiles
de vertébrés, en particulier ceux du gypse de Montmartre, il prouve qu'il existait des animaux qui
n'existent plus actuellement dans le monde, c'est-à-dire que les espèces disparaissent.
Ce concept de mort des espèces a été une révolution extrêmement importante à l'époque, au tout
début du XVIIIesiècle. Cet extrait de La peau de chagrin, de Balzac, illustre la portée de ce concept
dans le monde des lettres :
« Cuvier n'est-il pas le plus grand poète de notre siècle. Notre immortel naturaliste a
reconstruit des mondes avec des os blanchis. Il fouille une parcelle de gypse, y perçoit une
empreinte et vous crie : « Voyez ! ». Soudain, les marbres s’animalisent, la mort se vivifie, le monde
se déroule »
Brusquement, l’idée apparaît que des mondes, qui n’existent plus, existaient; le monde « se
déroule » ; on verra qu’il « évolue ».
C. Lamarck et le transformisme
1. Logique et transformisme
Pour résumer, si vous réfutez les métamorphoses, si vous abandonnez le concept de génération
spontanée, si vous allongez l'échelle de temps, si vous relativisez l'Echelle des Êtres, si vous
imaginez une unité de classification, si vous concevez les concepts d'homologie et de plan
d'organisation et si vous acceptez l'idée de mort des espèces, vous ne pouvez que suivre Jean-
Baptiste Lamarck (1744-1829), puis proposer de conserver avec lui la notion de transformisme.
Pourquoi ? Très brièvement, si on suit un raisonnement logique, il ne reste que deux possibilités
pour réunir ces idées. Soit on reste créationniste : il faut alors nécessairement imaginer des créations
multiples. Or, cela ne figure pas dans la Bible, qui ne mentionne qu’une seule création. Soit, on opte
pour une seconde possibilité : les espèces se transforment les unes en les autres. Une troisième
possibilité a été retenue par quelques théologiens : le stock des espèces allait en s'amenuisant - ce
qui, d'après eux, n'était pas important, puisque seul l'homme a une valeur. Cette dernière théorie a
eu très peu d'impact.
2. La théorie de Lamarck
Lamarck présente une classification. Il a l’idée remarquable, même si elle a été réfutée plus tard, de
séparer vertébrés et invertébrés. Au niveau des animaux, il construit ce qui reste une échelle des
Êtres. Il classe les animaux en trois catégories : les animaux apathiques, les animaux sensibles, les
animaux intelligents. Cette vision demeure hiérarchisée.
Il imagine une transformation des organismes les uns en les autres (fig 4). Un premier point est
fondamental, novateur : Lamarck présente des bifurcations, c’est-à-dire qu’il construit un arbre, une
arborescence. A ma connaissance, c'est la première représentation qui rompt ainsi la linéarité de
l'échelle des Êtres. Deuxième innovation, les espèces sont reliées par des points (actuellement ce
serait symbolisé par des flèches), qui désignent les transformations possibles : les vers en insectes,
les poissons en reptiles ou en amphibiens. La limite de la vision de Lamarck se situe à la base de ce
réseau de transformations : la génération spontanée alimente le stock des organismes les plus
simples - les vers -. Pour expliquer ce schéma, on a utilisé l'image de l'escalier roulant, qui, avec ses
arrêts, ses paliers, paraît particulièrement pertinente : elle montre que Lamarck n'a pas une vision
historique. Par exemple, au niveau des oiseaux, certains viennent de prendre l'escalier roulant - ils
viennent de se transformer -, tandis que d’autres sont là depuis longtemps. Cela signifie que les