fiche technique n° 44
230 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XII - n° 6 - novembre-décembre 2009
Technique d’exérèse
Sous anesthésie générale ou locorégionale, une dilatation anale
progressive est réalisée afi n d’introduire le rectoscope. Une fois la
tumeur repérée, le rectoscope est maintenu en place par un bras
articulé qui est fi xé à la table opératoire. L’exérèse chirurgicale
de la tumeur devra respecter les règles de toute exérèse locale,
qui ont été récemment actualisées
(3)
. Tout d’abord, une marge
de sécurité péritumorale d’au moins 5 mm est repérée autour de
la lésion par des points de coagulation. À l’aide d’une pince, on
tracte la muqueuse saine péritumorale en prenant soin d’éviter
de traumatiser la tumeur, notamment en cas de lésion villeuse
le plus souvent fragile et hémorragique. L’exérèse chirurgicale
est réalisée au bistouri électrique, en zone macroscopiquement
saine et devra intéresser toute l’épaisseur de la paroi (excision
dite
full-thickness
), c’est-à-dire en exposant la graisse périrec-
tale pour des lésions sous-péritonéales. Cette exérèse devra
être monobloc et non fragmentée. Après lavage de la zone
d’exérèse, le défect peut ou ne pas être suturé par un surjet de
fi l monobrin, en prenant soin d’éviter tout risque de sténose
rectale. Il est primordial que le chirurgien analyse lui-même
la qualité macroscopique de l’exérèse. La pièce opératoire est
adressée en anatomo-pathologie, épinglée et repérée
(fi gure 4)
.
Une alimentation liquide est autorisée le soir même de l’interven-
tion chirurgicale. Le patient est déperfusé le lendemain et peut
s’alimenter normalement. La sortie est habituellement autorisée,
en l’absence de complication, dès le 3e jour postopératoire.
Indications et avantages
La TEM présente de nombreux avantages par rapport aux autres
techniques d’exérèse locale conventionnelle.
➤
Elle permet l’exérèse de tumeurs du moyen et du haut
rectum (c’est-à-dire à plus de 8 cm de la marge anale) qui sont
techniquement inaccessibles par voie locale classique. La seule
condition est que la tumeur doit être située dans la portion sous-
péritonéale du rectum (en dessous du cul-de-sac de Douglas) afi n
de diminuer le risque de perforation rectale. Ainsi, il est conseillé
de respecter une limite supérieure par rapport à la marge anale
de 12 cm pour des lésions à la face antérieure du rectum et
de 20 cm pour celles situées à la face postérieure du rectum.
➤La morbidité postopératoire est faible et varie dans la litté-
rature entre 2 et 20 %
(2)
. Les complications les plus fréquem-
ment rapportées sont les brèches péritonéales peropératoires,
les fi stules au niveau de la suture, les hémorragies tardives et
les complications urinaires. Quelques cas de sténose rectale et
de fi stules rectovaginales ont été rapportés. De plus, il n’existe
aucune conséquence à long terme sur la fonction anorectale avec
un taux d’incontinence anale inférieur à 0,5 % au-delà de 6 mois.
➤Grâce à la distension continue du rectum par l’insuffl ation,
la TEM offre une parfaite exposition du site opératoire avec
une vue magnifi ée, notamment pour la limite supérieure de
l’exérèse en facilitant l’exérèse complète et monobloc de la
tumeur. Une méta-analyse récente a montré, d’ailleurs, que le
taux de récidive locale après exérèse de tumeurs bénignes du
rectum était signifi cativement plus bas après TEM (6 %) comparé
aux techniques d’exérèse locale conventionnelles (22 %). Les
auteurs expliquaient cette différence par le taux plus élevé de
résection microscopiquement complète (R0) après TEM
(2)
.
Malgré tous ces avantages, la TEM est une technique très peu
développée en France. En effet, bien que pouvant être comparée
à la laparoscopie, cette technique est diffi cile du fait de l’étroi-
tesse du site opératoire, nécessitant donc un long apprentissage.
D’autre part, elle requiert un équipement complexe et coûteux.
L’exérèse transanale par microchirurgie endoscopique des
tumeurs villeuses du moyen et du haut rectum, le plus souvent
inaccessibles par voie locale transanale conventionnelle, constitue
une alternative à la chirurgie radicale, minimisant ainsi la morbi-
dité et les séquelles fonctionnelles d’une résection rectale. Par
rapport aux autres techniques d’exérèse locale conventionnelle,
elle permet de meilleurs résultats en termes de récidive locale
(< 10 %). Cette technique, encore méconnue en France, devrait
avoir une place de choix dans la stratégie chirurgicale de la prise
en charge des tumeurs du moyen et du haut rectum en évitant
une chirurgie radicale d’exérèse rectale. ■
1. Buess G, Thiess R, Gunther M. Endoscopic operative
procedures for the removal of rectal polyps. Coloproc-
tology 1984;6:254-9.
2. Bretagnol F, Merrie A, Georges B et al. Local excision of
rectal tumors by transanal endoscopic microsurgery. Br J
Surg 2007;94:627-33.
3. Bretagnol F. Choix des thérapeutiques du cancer du
rectum. Gastroenterol Clin Biol 2006;30:59-69.
Références bibliographiques
Figure 3. Vue opératoire de l’installation pour exérèse par TEM d’une
tumeur du rectum.
Figure 4. Pièce opératoire épinglée et orientée d’une tumeur villeuse
rectale réséquée par TEM pour examen histologique.
FICHE À DÉTACHER