dossier
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Le Courrier de la Transplantation - Volume VIII - n
o 2 - avril-mai-juin 2008
61
Coordinateur :
Y. Calmus
Infections
transmises
par le greon
Infections transmises par la greffe
de cellules souches hématopoïétiques
Infections transmitted during hematopoietic stem
cell transplantation
P. Ribaud*
* Service d’hématologie-greffe de moelle, hôpital
Saint-Louis, Paris.
C
ontrairement aux greffes
d’organes, les greffes de cellu-
les souches hématopoïétiques
(CSH) se font toujours à partir d’un
donneur vivant et en dehors du contexte
de l’urgence extrême. Il existe des gles
strictes, garantes des bonnes pratiques.
Parmi les infections transmises, on dis-
tingue celles provenant du donneur et
celles provenant du greffon.
LES INFECTIONS PROVENANT
DU DONNEUR
Les infections virales actives
(tableau I)
Parmi les virus actifs, la transmission
du virus de l’hépatite B (VHB) est
à l’origine d’événements hépatiques
potentiellement graves. Le risque de
transmission du VHB, qui est moindre
si le patient est porteur d’anticorps anti-
HBs+, est fortement lié à la charge virale
du donneur. La détection de l’ADN viral
se fait dans les 4 semaines postgreffe.
Les complications hépatiques apparais-
sent à 3 mois en moyenne, au début de
la reconstitution immunitaire (1-3). Le
risque d’hépatite fulminante est de 10 %.
Globalement, la mortalité postgreffe
est augmentée en cas de transmission
virale B.
Tableau I. Donneur : infections actives.
Virus des hépatites B/C
EBV
West Nile
Chikungunya
Parvovirus
Il existe des recommandations (proto-
cole dérogatoire de l’Afssaps) pour
l’utilisation de greffons provenant de
donneurs ayant été en contact avec le
VHB. Cette situation n’apparaît que
dans le contexte de greffes apparen-
tées, car ces donneurs sont bien sûr
exclus des banques de donneurs non
apparentés (idem pour lhépatite C).
Pour les virus rapidement mortelsWest Nile virus, chikungunya, parvovirus –, des
précautions ont été mises en place pour éviter la transmission. La transmission du
virus de l’hépatite B (VHB) peut être à l’origine d’événements hépatiques graves.
Il existe des recommandations simpliées (protocole dérogatoire de l’Afssaps)
pour l’utilisation de dons de donneurs porteurs du VHB (contexte de greffe
apparentée uniquement) chez des receveurs naïfs. Pour le VHC, il est utile de
traiter le donneur (greffe apparentée) avant le don an de diminuer la charge
virale. Pour le prion, le risque théorique et les précautions sont les mêmes que
pour le don de sang.
Le risque de développer une lymphoprolifération EBV est augmenté chez le receveur
séronégatif. Le risque lié à l’infection à CMV est réduit grâce aux traitements, mais
la survie des patients CMV+ reste inférieure à celle des patients CMV–.
Les greffes de cellules souches hématopoïétiques ne posent pas de problème
majeur en termes de transmission d’infection bactérienne, du fait de la mise en
place de procédures strictes. En revanche, il n’existe pas de réglementation pour
l’élimination des sangs placentaires contaminés.
RÉsUmÉ
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Probabilité
15 20
Années
25
Non transplantés
Transplantés
Figure 1. Incidence cumulée de cirrhose chez les patients VHC+ ayant reçu un greffon
VHC+ comparés aux patients VHC+ non transplantés.
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Le tableau II rappelle quelles sont les
recommandations pour des receveurs
VHB négatifs en fonction du statut du
donneur (4).
L’effet des immunogloblines anti-HBs,
seules ou en association avec un traite-
ment antiviral, n’est pas clairement établi
en greffe de CSH, contrairement à la
transplantation d’organes solides.
L’étude de l’évolution de l’hépatite C
après allogreffe de CSH montre que
l’hépatite biologique est rarement grave
dans les trois premiers mois. En revanche,
on peut noter l’apparition d’une hépatite
tardive, associée à la baisse de l’immuno-
suppression. Il est souvent souhaitable
de réaliser une biopsie hépatique an
de faire le diagnostic différentiel entre
hépatite active et réaction du greffon
contre l’hôte, car la charge virale peut
ne pas être informative (2). L’hépatite
chronique virale C est associée à un
risque élede cirrhose précoce chez le
receveur par rapport à la population non
transplantée (supérieur à 20 % à 20 ans)
[figure 1] (4). En outre, le traitement du
transplan(par l’association interféron-
rivabarine) est délicat du fait du risque
de réactivation de la réaction du greffon
contre l’hôte.
Le risque de transmission du VHC est
majeur si le donneur est virémique. Dans
ce cas, il est hautement souhaitable de
traiter le donneur avant le prélèvement
(par l’association ribavirine-interféron)
pendant deux à trois mois an de dimi-
nuer la charge virale, avec arrêt de l’in-
terféron au moins une semaine avant la
greffe (2, 5).
Les infections virales latentes
Elles ont un effet délétère, mais peuvent
également avoir un effet positif. Concer-
nant les effets délétères (6, 7), le risque
de développer une lymphoprolifération
EBV est inférieur à 1 %, mais peut
atteindre 15 à 20 % dans certains types
de greffe. Cette lymphoprolifération est
le plus souvent liée au donneur. Parmi
les facteurs de risque, on note :
l’incompatibilité HLA ;
la déplétion T du greffon ;
l’utilisation de sérum antilymphocy-
taire (mais pas celle d’alemtuzumab) ;
et peut-être la sérologie EBV : risque
plus élechez le receveur séronégatif
avec un donneur séropositif.
La lymphoprolifération après greffe de
CSH est précoce (inférieure à 3 mois) et
à l’origine d’une mortalité importante,
d’où la nécessité d’une surveillance
étroite du receveur et d’un traitement
préemptif par rituximab.
Les deux facteurs majeurs d’infection à
cytomégalovirus (CMV) après allogreffe
sont la séropositivité du receveur et la
réaction du greffon contre l’hôte. Les
conséquences de cette infection/réacti-
vation du CMV sont la maladie à CMV
et l’augmentation globale de la morta-
lité postgreffe. Avant 1990, l’infection
à CMV chez le receveur représentait
le risque de mortalité infectieuse (par
pneumopathie) le plus fréquent après
allogreffe. Grâce au diagnostic précoce
de l’infection et au traitement, ce risque
a été ramené à moins de 5 %, mais la
survie des patients CMV+ reste infé-
rieure à celle des patients CMV– (8).
Certaines études récentes ont montré
que la séropositivité du donneur
pouvait également avoir un impact. Les
patients D+/R+ ont une mortalité à un
an augmentée par rapport aux D–/R–.
Mais les patients D+/R– ont aussi une
mortalité plus importante, liée à une
augmentation des infections bactériennes
et fongiques. Cette étude évoque la possi-
bilité de primo-infections subcliniques
à CMV et du rôle immunosuppresseur
du CMV (8).
Il existe également pour le CMV des
effets positifs possiblement liés au trans-
fert d’immunité (figure 2) [9], que l’on
retrouve également pour le virus Herpes
simplex (figure 3) [10].
Tableau II. Recommandations selon le statut du donneur (receveur séronégatif).
Receveur Donneur Recommandation
Négatif Anti-HBc+
Ag HBs–
anti-HBs+/–
Exposition antérieure à VHB
Dosage DNA
Si – : OK
Si + : 1) TT antiviral D
2) TT antiviral R systématique
Surveillance R
Négatif Ag HBs+ Infection active
1) TT antiviral D ?
2) TT antiviral R systématique
Surveillance R
Protocole dérogatoire Afssaps 2005
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7 000 R CMV+
6 000 grees géno-identiques
1 000 grees non apparentées
Même survie pour les greffes
géno-identiques quelle que
soit la sérologie CMV du D
Pour les grees
non apparentées,
la survie est meilleure
si le donneur est CMV+
0,8
0,6
0 12 24 36 48 60 72 84
Probabilité de survie
96 108 120 132
Mois
Donneur négatif CMV
Donneur positif CMV
Figure 2. Effets positifs liés au transfert d’immunité – CMV.
0,3
0,4
0,2
0,1
0
0,6
0,5
0 1 2 3 4 5 6 7
Probabilité
8 9 10 11 12
Mois 396 R HSV-1–
33 % de D HSV-1–
0,3
0,4
0,2
0,1
0
0,6
0,5
0 1 2 3 4 5 6 7
Probabilité
8 9 10 11 12
Mois
Réactivation HSV-1 Maladie à HSV-1
Donneur HSV-1+
Donneur HSV-1–
Donneur HSV-1–
Donneur HSV-1+
A B
Figure 3. Effets positifs liés au transfert d’immunité – Herpes simplex (HSV).
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INFECTIONS BACTÉRIENNES
TRANSMISES PAR LE GREFFON DE CSH
Les greffons sont soumis à des contrôles
bactériens lors des principales étapes
de préparation : recueil, manipulations
au laboratoire, congélation/décongé-
lation éventuelles. Il existe des procé-
dures strictes permettant de limiter
le risque d’infection. L’arrêté du
16 décembre 1998 porte sur l’homolo-
gation des règles de bonnes pratiques
relatives au prélèvement, au transport
et à la transformation (y compris la
conservation) des cellules CSH issues
du corps humain et des cellules mono-
nucléées sanguines utilisées à des ns
thérapeutiques.
De nombreuses études ont évalué les
taux de contamination des greffons.
L’étude Oklahoma s’est intéressée au
taux de contamination des greffons entre
1998 et 2003 (tableau III) [11]. Aucun
germe n’a entraîné d’infection majeure
chez le receveur.
Tableau III. Infections bactériennes des
greffons : étude Oklahoma (1998-2003).
Type
de greon
Nombre
de contaminés
% Sepsis
Moelle 8/177 4,5
CSP 21/532 3,9
Cordons 22/375 15,4
Littérature
(M + CSP)
332/10 888 3 3
(0,027 %)
V. Vanneaux et son équipe (12) se
sont intéressés aux greffes de moelle
entre 2003 et 2006. Les germes trouvés
étaient majoritairement d’origine cutanée,
sans conséquence pour le receveur. La
cause de la transmission était vraisem-
blablement liée à une asepsie insufsante
au moment du prélèvement.
Tableau IV. Infections bactériennes des
greffons : étude de Minneapolis (1990-
2004).
36 greons contaminés (1,2 %)
Streptocoque coagulase négatif (19/38),
Bacillus sp. (5), K. pneumoniae (1), E. coli (1),
P. cepacia (1)
35 patients sans problème, un épisode de choc
septique létal
Enn, l’étude de Minneapolis (1990-
2004) a porté sur 2 935 greffons, avant
transfusion, avant cryopréservation et
après décongélation (13). Les résultats
sont rapportés dans le tableau IV.
RéféRences
b i b l i o g R a p h i q u e s
1. Locasciulli A et al. Blood 1995;86:3236-40.
2. Strasser SI et al. Blood 1999;93:3259-66.
3. Lau GK et al. Blood 2000;96:452-8.
4. Peffault de Latour R et al. Blood 2004;103:
1618-24.
5. Surapaneni SN et al. Am J Gastroenterol 2007;
102:449-51.
6. Hale G et al. Blood 1998;91:3079-83.
7. Wagner HJ et al. Blood 2004;103:3979-81.
8. Nichols WG et al. J Infect Dis 2002;185:
273-82.
9. Ljungman P et al. Blood 2003;102:4255-60.
10. Nichols WG et al. J Infect Dis 2003;187:
801-8.
11. Kamble R et al. Transfusion 2005;45:874-8.
12. Vanneaux V et al. Cytotherapy 2007;9:
508-13.
13. Klein MA et al. Biol Blood Marrow Transplant
2006;12:1142-9.
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