rieur du sphincter anal ne retentit que
modérément sur le résultat fonctionnel
digestif, et notamment sur la continence.
Cela permet de descendre les limites infé-
rieures d’exérèse des cancers du bas rec-
tum en préservant le sphincter, comme
l’ont publié certains auteurs français et
autrichiens (Rouanet, Rullier, Schiessel).
Il faut immédiatement ajouter que ces
équipes sont hautement spécialisées et
qu’elles ne réalisent de telles interventions
qu’en respectant les critères de sécurité
énoncés au-dessus, chez des patients sélec-
tionnés, après radiothérapie parfois à haute
dose et avec contrôle peropératoire des
limites de résection (5).
La cinquième règle, qui devrait être un
corollaire de l’excision totale du mésorec-
tum, est le respect de l’innervation auto-
nome du pelvis, de manière à préserver les
fonctions urinaires et sexuelles des
patients.
É
TATACTUEL DES PRATIQUES
CHIRURGICALES
EN CAS DE CANCER DU RECTUM
Alors que le taux de récidive locale après
exérèse d’un cancer colique varie peu
d’une série chirurgicale à une autre, il n’en
va pas de même pour l’exérèse d’un can-
cer du rectum, puisque les taux varient,
dans une même période, de 3 à 32%. Plu-
sieurs études ont montré que la technique
chirurgicale pure était l’un des principaux
facteurs de cette grande variabilité (6). Or,
ce n’est pas dans les séries où existent le
plus grand nombre d’amputations abdo-
mino-périnéales que les taux de récidive
locale sont les plus bas. Autrement dit, un
geste très agressif n’est pas le garant d’une
sécurité carcinologique, contrairement à
beaucoup d’idées reçues. Heald a
d’ailleurs observé plus de récidives locales
après amputation abdomino-périnéale du
rectum qu’après résection antérieure (7).
Mais inversement, un chirurgien non expé-
rimenté qui voudrait à tout prix suivre
“l’effet mode” de la préservation sphinc-
térienne, sans connaître parfaitement la
technique et les règles énoncées au-dessus,
fera peut-être perdre une chance à son
patient. Les programmes d’enseignement
de la technique par des chirurgiens spé-
cialisés ont d’ailleurs abouti à ce que les
taux de récidive locale et les taux d’am-
putation abdomino-périnéale soient dimi-
nués de manière significative (8). Dans la
littérature, le taux d’amputations abdo-
mino-périnéales varie grandement, de
moins de 10% à plus de 50%...
I
NDICATIONS DES DIFFÉRENTES
TECHNIQUES CHIRURGICALES
(
HORMIS CELLE DE L
’
EXÉRÈSE
LOCALE
)
Cancers du tiers supérieur du rectum
La discussion est facile : il faut proposer
une résection antérieure du rectum avec
anastomose colo-rectale moyenne. La sec-
tion rectale passe à 2 cm de la tumeur
(1 suffirait, mais la sécurité en impose 2,
et cela évite de recourir à un examen
extemporané de la tranche) et la section
mésorectale à 5 cm, en évitant l’effet de
“cône” (le mésorectum est sectionné per-
pendiculairement au rectum). L’anasto-
mose peut être manuelle ou mécanique en
fonction de divers critères tels que la faci-
lité de réalisation, la qualité de l’exposi-
tion, l’habitude du chirurgien, le coût, etc.
Elle peut être termino-terminale ou latéro-
terminale, plutôt selon les écoles que selon
des critères scientifiques rigoureux. Au
moindre doute quant à la préparation
colique, au terrain du patient (par exemple,
obésité, artérite, diabète, corticothérapie),
à la qualité des tissus ou, pour certains, à
titre systématique, une stomie latérale
d’amont sera confectionnée pour diminuer
la gravité (et non la fréquence) d’une éven-
tuelle fuite anastomotique. Il s’agira alors
le plus souvent d’une iléostomie, plus
facile à confectionner, moins morbide et
plus facile à fermer qu’une colostomie.
Cancer du moyen rectum
Si l’exérèse par voie transanale n’est pas
indiquée et si le patient est opérable, alors
le sphincter pourra être conservé, même en
cas de volumineuse lésion ou de récidive.
Pour certains auteurs cependant, le cas
d’une grosse tumeur fixée ou d’une réci-
dive au niveau d’un tiers moyen du rectum
impose le sacrifice de l’anus. Il ne s’agit
pas, à notre sens, d’une démarche logique,
le pronostic étant plus à la récidive locale
de dehors en dedans, à partir d’une marge
latérale insuffisante, qu’à la récidive locale
de bas en haut, à partir d’une éventuelle
anastomose. Pour une tumeur du tiers
moyen du rectum, il faut impérativement
réaliser l’exérèse totale du mésorectum :
la face antérieure du sacrum et du coccyx,
la face supérieure des muscles élévateurs
de l’anus et la face postérieure du bas rec-
tum sont mises à nu. C’est là que la dis-
cussion intervient : si on sectionne le rec-
tum à 1 ou 2 cm sous le pôle inférieur
d’une tumeur du moyen rectum, le moi-
gnon rectal sous-jacent sera, d’une part, de
capacité diminuée et, d’autre part, mal vas-
cularisé, puisque déconnecté du mésorec-
tum ; la réalisation d’une anastomose colo-
rectale basse (là pratiquement toujours
mécanique, car l’exposition est très mal-
aisée) donnera suffisamment de garanties
carcinologiques mais comportera un risque
important de fistule postopératoire par
ischémie et un résultat fonctionnel peut-
être médiocre (syndrome rectal associant
polyexonération, impériosité, fuites
anales, fractionnement des selles et
troubles de la discrimination entre les gaz
et les selles). Aussi, pour d’assez nom-
breux auteurs, mieux vaut réaliser une
résection rectale totale suivie d’une ana-
stomose colo-anale, qui offrira au moins
autant de garanties carcinologiques, s’ac-
compagnera d’un taux plus faible de fis-
tule et donnera, si un réservoir ou une colo-
plastie sont réalisés, un meilleur résultat
fonctionnel. Là encore, une anastomose
effectuée dans des conditions un peu dif-
ficiles imposera une stomie d’amont, qui
sera fermée environ 6 semaines plus tard.
Mais les possibilités techniques ne s’arrê-
tent pas là, et la discussion repose alors sur
des questions d’école. Ainsi, certains
auteurs proposent une anastomose colo-
anale directe, manuelle ou mécanique, en
privilégiant la rapidité du geste mais en
négligeant le résultat fonctionnel précoce
(car les résultats fonctionnels des anasto-
moses colo-anales avec ou sans réservoir
Dossier thématique
Le Courrier de colo-proctologie (III) - n° 4 - oct. nov. déc 2002
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