8 | La Lettre du Sénologue • n° 57 - juillet-août-septembre 2012
DOSSIER THÉMATIQUE Hormones avant et après cancer du sein
atteintes de cancers canalaires et 1 501 témoins.
Ils n’ont pas mis en évidence de risque plus important
de survenue de cancer lobulaire (OR : 1,10 ; IC
95
: 0,68-
1,78) avec, pour les cancers canalaires infiltrants, un
OR égal à 1,21 (IC95 : 1,01-1,45). Ils ont donc conclu
qu’il n’y avait pas de différence notable liée à la CO.
◆Y aurait-il un risque plus important
pour les carcinomes in situ ?
Cette question est d’importance, car elle pourrait faire
évoquer un rôle précoce de la pilule dans la carcino-
genèse et pas uniquement un éventuel rôle promoteur
sur des cellules cancéreuses préexistantes. Claus et al.
(16) ont mené une étude cas-témoins chez 875 femmes
atteintes d’un carcinome canalaire in situ (CCIS) appa-
riées à 999 témoins aux États-Unis. Ils ne retrouvent
aucune élévation du risque (OR : 1 ; 0,8-1,2), ni d’effet
durée ou dose, ni même de différence en fonction du
type d’estrogène ou de progestatif. Il n’a pas non plus
retrouvé de différence en fonction de l’âge à la première
utilisation, ni en fonction des antécédents familiaux.
Les études de Gil et de Nichols (17, 18) ne retrouvent
pas non plus d’élévation significative de l’incidence
des CCIS sous pilule.
◆Qu’en est-il pour les cancers triple-négatifs ?
Phipps et al. (19) ont mené une étude rétrospective
dans le cadre de l’étude WHI. Parmi 155 723 femmes,
307 cancers du sein triple-négatifs ont été comparés
à 2 610 cancers RH+. Aucune élévation du risque n’a
été mise en évidence en association avec la pilule ni
d’effet durée.
◆La pilule augmente-t-elle le risque de survenue
d’un cancer du sein controlatéral ?
Figueiredo et al. (20) ont conduit une étude cas-
témoins en Californie : 708 patientes avec un cancer
du sein bilatéral asynchrone ont été comparées à
1 395 patientes avec un cancer du sein unilatéral.
L’utilisation de la pilule avant le diagnostic n’a pas
augmenté le risque (OR : 0,88 ; IC95 : 0,67-1,16). Ils
n’ont pas mis en évidence d’effet durée, ni de risque
majoré en cas d’utilisation à un jeune âge, ni de
risque accru en cas d’utilisation après le diagnostic
du premier cancer (OR : 1,56 ; IC95 : 0,71-3,45).
Contraception progestative
Skegg et al. (21) ont mené une étude cas-témoins chez
des femmes atteintes de cancer du sein qui avaient
pris une contraception par lévonorgestrel (LNG)
[0,03 mg] ou par noréthistérone (0,35 mg) et ont
retrouvé un RR non augmenté à 1,1 (IC95 : 0,73-1,5).
Ils ont observé cependant un risque plus élevé en cas
de contraception progestative prise avant 34 ans (RR :
2,3 ; IC95 : 1,2-4,3), le risque semblant lié à la durée
(p = 0,06), et en cas d’utilisation dans les 10 années
précédant le cancer (RR : 1,6 ; IC95 : 1-2,4). Le risque
était en revanche diminué si les progestatifs avaient
été utilisés plus de 10 ans auparavant (RR : 0,44 ; IC95 :
0,22-0,90). Il n’a pas été retrouvé d’effet protecteur lié
à la durée d’utilisation. Des résultats similaires avaient
été notés avec les progestatifs injectables (acétate
de médroxyprogestérone en dépôt [DMPA]). En effet,
Paul et al. (22) avaient retrouvé un risque de cancer
du sein multiplié par 2 en cas d’utilisation avant l’âge
de 34 ans et un RR de 1,7 si les progestatifs avaient
été utilisés dans les 5 ans précédant l’apparition du
cancer. La WHO (23, 24) avait noté un RR de 2 (IC95 :
1,5-2,8) en cas de prise avant 35 ans ou en cas d’uti-
lisation dans les 5 dernières années. Là encore, ces
études peuvent simplement refléter une surveillance
accrue chez ces femmes ou un éventuel effet promoteur
sur des cancers infracliniques. Shapiro et al. (25) ont
rapporté une étude cas-témoins menée en Afrique
du Sud sur 419 femmes atteintes d’un cancer du sein
appariées à 1 625 témoins avec le DMPA en injectable.
Les conclusions sont identiques : globalement pas
d’élévation du risque (RR : 0,9 ; IC
95
: 0,7-1,2), pas
d’effet durée, ni d’effet en fonction du délai depuis
la dernière utilisation. En revanche, il a observé en
cours d’utilisation un risque majoré entre 35 et 44 ans
(RR : 2,3 ; IC95 : 1,3-4,1). Strom et al. (26), en 2004,
ont comparé 4 575 cas de cancer du sein diagnosti-
qués entre 1994 et 1998 appariés à 4 682 témoins
en s’intéressant, là encore, à une contraception par
DMPA mais aussi par Norplant®. Ils n’ont pas retrouvé
d’élévation du risque (OR : 0,9 ; IC95 : 0,7-1,2), ni en
cas d’utilisation en cours (OR : 0,7 ; IC95 : 0,4-1,3) ni
dans les 5 ans après la prise (OR : 0,9 ; IC95 : 0,5-1,4).
Il n’ont pas retrouvé de différence en fonction de l’âge.
En cas de début de l’utilisation avant 35 ans, l’OR
est de 0,9 (IC95 : 0,6-1,3). Aucun effet durée n’a été
mis en évidence, ni augmentation du risque avec les
progestatifs implantables. Quant aux micropilules
progestatives, la méta-analyse de 1996 retrouvait
0,8 % d’utilisatrices et il était observé une tendance
à une augmentation du risque non significative (RR :
1,17 ; p = 0,06). Dans la publication de Kumle et al.
(27), le surrisque était identique entre estroprogesta-
tifs et progestatifs, dans celle de Dumeaux et al. (8),
aucun surrisque significatif n’a été mis en évidence.
Il n’y a donc pas, semble-t-il, de risque accru lié à la
contraception progestative, ni d’effet protecteur mis
en évidence. Nous n’avons aucune donnée quant à
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