226 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXIII - n° 6 - juin 2014
Points forts
»
La présence d’une mutation EGFR a modifié radicalement la prise en charge thérapeutique des cancers
bronchiques non à petites cellules (CBNPC).
»
L’activité supérieure des inhibiteurs de tyrosine kinase (ITK) par rapport à la chimiothérapie (survie
sans progression [SSP], taux de réponse, tolérance et amélioration de la qualité de vie) a été largement
démontrée sans pour autant entraîner de modification de la survie globale, en raison du nombre important
de crossover dans les études randomisées.
»
Les ITK constituent tout de même un standard thérapeutique en situation de première ligne métastatique
en présence d’un driver oncogénique.
»
Actuellement, aucun des 3 ITK n’a été évalué en comparaison directe, et nos critères de choix se
fondent donc sur des paramètres secondaires tels que les données pharmacocinétiques et la gestion des
effets indésirables.
Mots-clés
EGFR
Inhibiteurs de tyrosine
kinase
Erlotinib
Géfi tinib
Afatinib
Highlights
»
It has been demonstrated
that activating EGFR muta-
tions lead to increased affi nity
of tyrosine kinase inhibitors
(TKIs) for the mutant receptor.
»
Randomized clinical trials
have demonstrated the supe-
riority of TKIs over chemothe-
rapy as first-line therapy of
EGFR mutated non-small-cell
lung cancer (NSCLC), in terms
of response rate, progression-
free survival, quality of life
and tolerability. However, no
improvement in overall survival
has been observed, probably
because of cross over from fi rst-
line chemotherapy to second-
line therapy with EGFR TKIs.
»
Nevertheless, TKIs of EGFR
are the current standard fi rst-
line treatment of patients with
advanced NSCLC harboring
activating EGFR mutations.
»
Currently, there are no direct
comparisons between different
TKIs and our choice is based
on pharmacocinetic data and
toxicity profi le.
Keywords
EGFR
Tyrosine kinase inhibitors
Erlotinib
Gefi tinib
Afatinib
sous chimiothérapie dans une population sélec-
tionnée, aussi bien asiatique que caucasienne (4).
Par conséquent, des études de phase III ont été
mises en place sur ce type de population, l’essai
IPASS étant le plus important avec 1 217 patients
randomisés entre géfitinib et chimiothérapie.
Cette étude a montré la supériorité du géfitinib
en termes de SSP limitée aux patients présentant
un driver oncogénique (EGFR). Dans le sous-groupe
des patients EGFR muté (n = 261), la SSP est signi-
ficativement plus longue (9,5 versus 6,3 mois) de
même que les taux de réponse (71 versus 47 %)
en faveur du géfitinib par rapport à l’association
carboplatine et paclitaxel. Il n’y avait pas de diffé-
rence en SG en raison du fort taux de crossover
à l’issue de la première ligne (64 % des patients
ont reçu un ITK en deuxième ligne après la chimio-
thérapie) [5]. Des résultats similaires ont été
retrouvés dans l’étude First-SIGNAL, de phase III
randomisée, qui comparait le géfitinib et le doublet
cisplatine et gemcitabine en première ligne chez
309 patients asiatiques non fumeurs, porteurs
d’un adénocarcinome. Dans le sous-groupe des
patients EGFR muté (n = 42), les taux de réponse
sous géfitinib étaient remarquables (84,6 %), et
la SSP prolongée (8 versus 6,3 mois) par rapport
à la chimiothérapie (6). L’étude de phase III du
WJTOG3405 a comparé le cisplatine et le docé-
taxel au géfitinib chez 172 patients japonais dont
la tumeur était EGFR muté, le groupe géfitinib
avait une SSP plus longue : 9,2 versus 6,3 mois.
Le taux de réponse objective était de 62 % dans le
groupe géfitinib et de 32 % dans le groupe chimio-
thérapie. Dans cet essai, aucune différence de SG
n’a été démontrée (7). Enfin, l’étude NEJ002 a
comparé le géfitinib avec le doublet carboplatine
et paclitaxel en première ligne chez 230 patients
atteints d'un CBNPC muté pour l’EGFR. L’étude a
été interrompue prématurément après l’analyse
intermédiaire en raison d’un gain de SSP, et l’ana-
lyse finale a confirmé ce bénéfice (SSP médiane :
10,8 versus 5,4 mois) [8]. Tout récemment, une
étude de phase IV (IFUM), réalisée dans une
population caucasienne (n = 107), a été publiée
et retrouvait des taux de réponse de 70 %, un taux
de contrôle tumoral de 91 %, une SSP médiane à
9,7 mois et une SG à 19 mois (9).
Erlotinib
L’activité de l’erlotinib chez les patients EGFR muté a
d’abord été évaluée dans un essai espagnol de grande
envergure dans lequel 2 105 patients ont bénéfi cié
d’une analyse en biologie moléculaire montrant
la faisabilité de ce type de sélection en vue d’un
traitement par ITK. Le taux de réponse tumorale
était élevé (70,6 %), et une SSP de 14 mois avait été
observée chez les 350 patients présentant une muta-
tion EGFR (10). Deux essais randomisés de phase III
ont évalué l’effi cacité de l’erlotinib en situation de
première ligne en présence d’une mutation EGFR.
L’étude OPTIMAL a comparé l'erlotinib à l’associa-
tion carboplatine et gemcitabine chez 154 patients
chinois. Le bénéfi ce est en faveur de la thérapie ciblée
pour la SSP (objectif principal) avec une médiane de
13,7 mois, versus 4,6 mois pour la chimiothérapie.
Les patients traités par erlotinib avaient un meil-
leur taux de réponse (83 versus 36 %), et la SG ne
différait pas dans les 2 groupes pour des raisons de
crossover (11). Ces résultats ont été confi rmés par
l’étude EURTAC, de phase III randomisée en première
ligne chez des patients caucasiens, comparant un
groupe avec chimiothérapie standard comportant
un doublet à base d’un sel de platine et un groupe
expérimental avec erlotinib. Sur les derniers résultats
actualisés (janvier 2013), 173 patients ont été inclus
dans cette étude qui est positive sur son objectif
principal − avec une SSP de 10,4 mois pour l’erlotinib
contre 5,1 mois pour la chimiothérapie −, les taux de
réponse sont de 65,1 % pour l’ITK contre 16,1 % pour
la chimiothérapie, et la médiane de SG ne diffère
pas dans les 2 groupes (22,9 mois pour l’erlotinib
et 22,1 mois pour le groupe contrôle) [12].
Afatinib
Les données in vitro montrent une effi cacité anti-
tumorale des ITK irréversibles sur les lignées cellu-
laires porteuses d’une mutation T790M. C’est la
raison pour laquelle le programme de dévelop-
pement de l’afatinib a concerné dans un premier
temps les patients dont la maladie progresse à l’issue
d’un traitement par ITK de première génération.
L’essai de phase IIb/III LUX-Lung 1 a comparé l'afa-