essai e conomie circulaire 0414 synthese

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L’économie circulaire, Graal du développement durable? Notre monde est en crises. Les rapports s’accumulent année après année sur des dysfonctionnements sérieux de notre environnement économique, naturel et social. L’évolution d’indicateurs multiples de l’activité humaine et de l’environnement depuis 1750 met en effet en avant une croissance exponentielle. Or une croissance exponentielle ne peut pas continuer indéfiniment à partir de ressources finies. Image 1: Evolution exponentielle des indicateurs -­‐ New Scientist 2008 from Steffen et al 2004 Depuis les années 1970, le développement durable a été pensé afin de répondre aux enjeux. La commission Brundtland 1 définit ainsi pour la première fois le développement durable comme « le développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins”. Si la notion de développement durable est désormais bien comprise et acceptée, les indicateurs continuent de se dégrader, comme si l’économie devait l’emporter sur 1 Rapport Brundland en anglais http://www.un-­‐documents.net/wced-­‐ocf.htm 1 l’environnement dans un modèle « Green after Gold » (le vert après l’or, l’environnement après l’économie)2. Ken Webster élabore ainsi trois réponses possibles aux crises : -­‐ Laisser le marché s’autoréguler. La résolution des problèmes est laissée pour… plus tard ! -­‐ Réduire fortement notre consommation à travers la décroissance. Cette option est à la fois rejetée par les Etats ainsi que par la majorité de la population qui y voit une régression. -­‐ Repenser le système économique en s’inspirant du modèle du vivant: l’économie circulaire. L’économie circulaire développe un modèle où l’être humain est au cœur du processus de création et tout produit ou service est conçu pour ne pas générer d’externalités négatives et même produire des services supplémentaires. Dans ce contexte, toute consommation devient positive et enrichit notre capital économique, social et environnemental. Le changement de paradigme est total ! Le point de départ de l’économie circulaire réside dans la prise en compte du monde comme un système complexe non linéaire. Joël de Rosnay a étudié les systèmes complexe et l’analyse systémique dans « Le macroscope » 3 dès 1975. Il a tiré des principes généraux liés au contrôle des systèmes complexes, notamment appliqués au fonctionnement de l’économie. Les principes de l’économie circulaire sont nés de plusieurs courants de pensée, à partir d’une vision systémique, globale. Nous pouvons ainsi citer John T. Lyle et le « regenerative design », Walter Stahel et la « performance economy », Robert Frosch et Nicholas Gallopoulos et l’écologie industrielle, Gunther Pauli et la « Blue Economy », Amory Lovins et le capitalisme naturel. L’économie circulaire doit beaucoup à Michael Braungart et William Mc Donough qui ont élaboré le modèle Cradle-­‐to-­‐Cradle qui définit un cadre de réflexion et d’action pour l’économie circulaire avec ses multiples réalisations. Selon la fondation Ellen Mac Arthur , « l’économie circulaire est un terme générique pour une économie industrielle qui est à dessein réparatrice et dans laquelle les flux de matériaux sont de deux sortes : les matériaux biologiques, susceptibles de réintégrer la biosphère, et les matériaux techniques, destinés à être revalorisés sans entrer dans la biosphère.”4 2 Webster Ken (2012), session TEDx sur l’économie circulaire http://www.youtube.com/watch?v=mvQEBB3IdZM 3 J. de Rosnay – The Macroscope -­‐ http://pespmc1.vub.ac.be/macrbook.html 4 Fondation Ellen MacArthur -­‐ http://www.ellenmacarthurfoundation.org/fr 2 Image 2 : Le modèle d’économie circulaire, source fondation Ellen MacArthur Certains principes communs se dégagent, notamment l’approche systémique, la restauration du capital social et environnemental et l’absence d’externalités négatives. Les principes majeurs de l’économie circulaire sont : -­‐ Optimiser le système dans sa globalité et ne pas rechercher une efficacité trop élevée qui fragilise la résilience. Comme dans tout système complexe, un point d’optimisation existe entre la résilience maximale et l’efficacité maximale. -­‐ Déchet = nourriture (ou tout est nourriture). La conception d’un produit ou d’un service doit inclure son devenir après son utilisation et la récupération de ses composants sans perte de qualité. Le principe de ne plus avoir de déchet ultime demande la mise en place de circuits d’échanges entre les acteurs. Dans le cycle technique, des matériaux toxiques s’utilisent sous réserve de garantir qu’ils ne peuvent se répandre dans l’environnement ni interférer avec le vivant. Comme le remarquent Michael Braungart et William McDonough, quel est l’intérêt de recycler des bouteilles en fourrures polaires si les bouteilles contiennent des molécules toxiques qui peuvent passer dans l’organisme à travers la peau5? 5 M. Braungart, W. McDonough, The Upcycle, p. 44 3 -­‐
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Utiliser des énergies renouvelables. Le soleil fournit une ressource inépuisable et continue d’énergie et doit être la source d’énergie utilisée dans les processus de transformation. Célébrer la biodiversité. La biodiversité fournit la résilience, la capacité à résister aux aléas ainsi qu’un élément de beauté pour l’homme (service de bien-­‐être). La biodiversité est aussi une source d’inspiration pour trouver des solutions comme le mouvement « Biomimicry 3.8 »6 le pratique. Développer l’économie de la fonctionnalité et de la performance. L’économie de la fonctionnalité permet l’utilisation de produits ou de services à meilleur coût par leur taux d’utilisation plus importante. Elle encourage le fournisseur de service à utiliser son bien de manière intensive plus longtemps (maintenance plus élevée, réparation, refabrication). Cette activité créée des emplois locaux. L’utilisation des ressources en cascade ainsi que la mise en place de services de location, maintenance, réparation, refabrication et recyclage permettent de multiplier les opportunités d’activités et donc la création de valeur. De nouvelles activités apparaissent grâce à l’utilisation des technologies de communication mobiles et les réseaux sociaux : l’économie collaborative, où un bien privé peut être utilisé ou loué à la demande. Image 3: Les cycles de l’économie circulaire, source fondation Ellen MacArthur Les prix doivent refléter les vrais coûts. Les prix n’intègrent pas les externalités. 2000 milliards de dollars de subventions sont dépensées par an sur les secteurs des énergies fossiles, de 6 Biomimicry 3.8 : http://biomimicry.net/ 4 -­‐
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l’exploitation du bois, de la pêche, de l’eau, de l’agriculture et des mines7, ce qui fausse la concurrence. Reconstruire et maintenir le capital afin d’accroitre les flux utiles. L’outil de mesure principal de l’activité économique est le PIB qui ne prend en compte que les flux d’argent, indépendamment de la valeur du capital. La préservation du capital garantit sa valorisation continue et la maintenance est une opération clé. Le travail étant une ressource renouvelable, la préservation du capital humain entre dans cette dynamique. La reconstruction du capital social est également un objectif de l’économie circulaire. Mélodie Seznec 8 , a démontré que l’économie circulaire était intrinsèquement éthique et contribuait ainsi à enrichir le capital social de la société. L’argent est principalement un medium d’échange. L’argent est le fluide qui favorise les échanges dans l’économie. Dans le modèle économique actuel, l’argent est aussi créé comme une dette et son échange n’est pas toujours lié à une création de valeur réelle comme Paul Grignon dans l’Argent Dette9 le démontre. Les crises que nous traversons actuellement ne sont pas conjoncturelles mais structurelles. Seule une approche systémique permet d’appréhender de manière globale la situation et de proposer des nouvelles heuristiques afin de la contrôler. L’économie circulaire construit un schéma à partir de l’épanouissement de l’homme et du vivant, basé sur l’innovation et la création de valeur à travers une pensée systémique. Le principe est de « ne plus faire moins mal mais bien »10. En adressant de manière globale l’économie, l’environnemental et le social, l’économie circulaire constitue un parfait modèle de développement durable. Mais, comme s’interrogent Michael Braungart et William MacDonough, peut-­‐on se contenter d’un développement seulement durable (« sustainable », ou soutenable en anglais) ? Pour caractériser une relation amoureuse épanouie, emploie-­‐t-­‐on soutenable ? Faut-­‐il avoir comme ambition la seule durabilité ou l’épanouissement ? 7
N. Myers, J. Kent (2001) : Perverse Subsidies: How Tax Dollars Can Undercut the Environment and the Economy 8 Mélodie Seznec -­‐ http://gblogs.cisco.com/fr-­‐greenit/2011/06/23/economie-­‐circulaire-­‐lorsque-­‐
lethique-­‐structure/ 9 Paul Grignon : l’Argent Dette -­‐ http://www.moneyasdebt.net/ 10 M. Braungart, W. McDonough -­‐ Cradle to Cradle: Remaking the Way We Make Things 5 Le modèle d’économie circulaire n’est pas seulement durable, mais également régénérateur, innovant et épanouissant. Est-­‐il possible de ne pas l’adopter ? Comme Hermann Mulder, président du Global Reporting Initiative déclare à propos des crises et des opportunités qu’elles ouvrent : « Rien n’est impossible, surtout si c’est inévitable ! »11 11 Hermann Mulder: http://trueprice.org/nothing-­‐is-­‐impossible-­‐particularly-­‐when-­‐it-­‐is-­‐inevitable/ 6 
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