essai e conomie circulaire 0414v10

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L’économie circulaire, Graal du développement durable? Introduction Notre monde est en crises. Les rapports s’accumulent année après année sur des disfonctionnements sérieux de notre environnement économique, naturel et social : taux de chômage, réchauffement climatique, crise alimentaire, surpopulation, inégalités, pollutions, crise financière, crise sociale, extinction des espèces animales et végétales, déforestation, etc. Si la nécessité du développement durable est reconnue par tous, force est de constater l’absence de résultats significatifs : les crises continuent et les indicateurs sont de plus en plus alarmants. Depuis près de trente ans, des écoles de pensées sont apparues afin de développer une réponse globale, cohérente et surtout positive, chargée de sens. Parmi celles-­‐ci, l’économie circulaire semble à la fois suffisamment simple pour en appréhender et apprécier ses principes et à la fois suffisamment robuste pour fournir des réponses aux défis actuellement posés à nos sociétés. L’objectif de cet article est de comprendre l’économie circulaire, de la positionner par rapport aux divers modèles de développement et d’examiner sa capacité à répondre de manière globale aux défis auxquels l’humanité est confrontée. Un monde en crises Notre monde est en crises. Les rapports s’accumulent année après année sur des disfonctionnements sérieux de notre environnement économique, naturel et social : taux de chômage, réchauffement climatique, crise alimentaire, surpopulation, inégalités, pollutions, crise financière, crise sociale, extinction des espèces animales et végétales, déforestation, etc. Le modèle économique actuel, élaboré depuis la révolution industrielle, repose sur l’extraction de matières premières, la fabrication de produits, leur utilisation et leur mise au rebut. Toutes les phases de transformation reposent sur l’utilisation d’énergies principalement fossiles (charbon, gaz, pétrole). Image 1 : le modèle d’économie linéaire, source fondation Ellen MacArthur Ce modèle a permis un accroissement énorme des biens produits en une période très courte vis-­‐à-­‐vis de l’histoire de l’humanité. Cependant, ce modèle actuel, optimisé pour la performance et l’efficacité de la production des biens, ne prend pas en compte la génération des déchets qui accompagne la production. L’accroissement de cette production s’accompagne automatiquement d’un impact plus accentué sur les matières premières, qui, combiné à une population en forte croissance, amène aujourd’hui l’émergence de crises multiples. L’évolution d’indicateurs multiples de l’activité humaine et de l’environnement depuis 1750 met en effet en avant une croissance exponentielle. Or une croissance exponentielle ne peut pas continuer indéfiniment à partir de ressources finies. Surtout que de multiples rapports indiquent que des seuils alarmants de consommation de ressources ont été dépassés, comme les travaux du Global Footprint Network1 sur l’empreinte écologique l’indiquent. De nouveaux modèles de développement doivent donc être élaborés et mis en place. 1 Global Footprint Network : http://www.footprintnetwork.org, méthode de calcul de l’empreinte écologique -­‐ http://www.footprintnetwork.org/download.php?id=508 POPULATION, WATER USE, MOTOR VEHICLES, GDP, FISHERIES EXPLOITATION...
Northern
Hemisphere
average surface
temperature
Water use
Population
Fisheries
exploited
CO2 concentration
GDP
Loss of tropical
rainforest and
woodland
Foreign
investment
Paper consumption
Species extinction
Ozone depletion
Motor vehicles
1750
1800
1850
1900
1950
2000
Source: New Scientist October 2008
Image 2 : des indicateurs qui évoluent de manière exponentielle, source fondation Ellen MacArthur Image 3: Photo prise par l’équipage d’Appolo 8 le 29 décembre 1968 -­‐ Première vue de la terre isolée dans l’espace, source NASA Si Paul Valéry déclarait dès 1945 « le temps du monde fini commence », il faudra attendre 1968 et la première photo de la terre prise depuis l’orbite lunaire lors de la mission Apollo 8 pour que la vision du monde change profondément dans l’inconscient collectif : notre planète est unique et il n’existe pas de planète de rechange dans un voisinage proche.
Les réponses face aux crises
Cette première prise de conscience collective allait déclencher l’élaboration de nouveaux modèles économiques et la notion d’un développement durable trouvait une formalisation à travers la commission Brundtland2 qui en 1987 définissait ainsi le développement durable : « Le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. » Si la notion de développement durable est désormais bien comprise et acceptée, les réalisations n’ont pas amené les résultats escomptés. Depuis la parution du rapport Brundtland, les indicateurs continuent de se dégrader. Les sociétés semblent bien en peine de transformer leurs trajectoires. Tout semble se résumer à « Green after Gold » (le vert après l’or, l’environnement après l’économique), comme si l’économie devait avoir la précédence sur ses impacts et comme si l’économie pouvait se permettre de fonctionner indéfiniment sans inclure ses impacts associés. Trois grandes options sont possibles afin de construire une réponse globale aux crises. Une première réponse est de laisser le marché s’autoréguler. Les coûts des matières premières augmentant, une partie des consommateurs va se trouver dans l’impossibilité d’accéder au marché et un nouvel équilibre s’établira où les plus riches pourront continuer leur consommation. Cette option est clairement peu équitable et condamne une partie de la population humaine, trop pauvre pour accéder au marché. Nous avons assisté en partie à ce scenario avec le renchérissement du prix du mais suite à la demande en bioéthanol pour fabriquer du carburant3. Le prix du blé étant corrélé de près à celui du mais, c’est tous les prix des céréales qui ont fortement crus entraînant des tensions sur les marchés des denrées alimentaires. De plus ce modèle, peu moral, ne règle pas vraiment le problème des divers impacts environnementaux et de la question de la disponibilité des ressources à long terme. Une variante à ce modèle est de construire une croissance plus responsable où les impacts sont réduits. Le modèle ne change pas de manière 2 Rapport Brundland en anglais http://www.are.admin.ch/themen/nachhaltig/00266/00540/00542/index.html?lang=fr&downloa
d=NHzLpZeg7t,lnp6I0NTU042l2Z6ln1ae2IZn4Z2qZpnO2Yuq2Z6gpJCDdnx6gmym162epYbg2c_JjKb
NoKSn6A-­‐-­‐ 3 Maïs: la catastrophe du biocarburant-­‐ http://www.slate.fr/story/60321/mais-­‐ethanol-­‐scandale intrinsèque et le résultat est plus un décalage dans le temps des conséquences inévitables liées au modèle. Les grands mouvements du développement durables sont généralement liés autour de la réduction des impacts, sans considérer une approche globale. Ainsi se mettent en place des politiques de réduction de consommation, sans clairement afficher le seuil durable. Ces principes sont généralement vécus de manière culpabilisante puisque l’objectif est de « faire moins mal », sachant que de toute manière tout comportement crée des impacts irréversibles, car le système dans sa globalité n’a pas été conçu pour éviter les externalités négatives. Une deuxième réponse consiste à opérer une réduction importante de notre consommation de ressources. Tim Jackson est un des penseurs de cette théorie avec notamment son modèle IPAT de gestion des impacts, où l’Impact (I) est le produit de la Population (P) par l’Affluence – la richesse – (A) par le niveau de Technologie (consommation de biens) (T), soit I = P.A.T. L’Affluence est égale à la richesse globale (PIB) divisée par la population globale et la Technologie est égale au rapport entre l’impact par la richesse globale (PIB). Le produit P.A.T est donc égal à P . (PIB/P) . (I/PIB), soit après simplification I. La réduction de l’impact demande à réduire les divers termes de l’équation. Or, les prévisions d’évolution de la population à 2050 indiquent un passage de 7,5 à 9,5 milliards de personnes. Il est alors nécessaire soit de réduire le niveau de richesse, soit le niveau de consommation ou les deux. Il faut entrer dans un cycle de décroissance durable. Or cette notion est difficilement acceptable par les populations des économies en croissance ainsi que par celles des économies développées et rencontre un rejet plutôt massif, souvent assimilé « au retour à la bougie » par ses détracteurs, alors que la proposition de valeur est plus de considérer l’épanouissement humain dans sa globalité plutôt que la seule satisfaction de la composante économique. La troisième réponse est de repenser de manière globale le fonctionnement fondamental de l’économie et de s’inspirer du modèle biologique qui existe depuis 3,8 milliards d’années sur terre et qui a crée un système stable sur le long terme : l’économie circulaire. L’approche de l’économie circulaire replace l’humain au cœur du processus de création et se propose de redésigner notre environnement, de renouveler notre économie et de régénérer notre capital. C’est remplacer la formule célèbre « reduce, reuse, recycle » utilisée dans les formules classiques du développement durable par « redesign, renew, regenerate » (M. Braungart, W. McDonough)4. Une telle proposition demande une innovation dans tous les domaines d’activité. L’économie circulaire propose un changement de modèle : tout produit ou service est conçu pour ne pas générer d’externalités négatives et même produire des services supplémentaires bénéfiques. Dans ce cadre toute consommation devient positive et enrichit notre capital économique, social et environnemental ! L’économie circulaire répond totalement aux critères du développement durable formulé par la commission Brundtland et même les dépasse puisque l’ambition est d’enrichir l’environnement, à l’instar du modèle biologique. Le changement de paradigme est total ! 4 M. Braungart, W. McDonough, The Upcycle, p. 168 La genèse de l’économie circulaire Le point de départ de l’économie circulaire réside dans la prise en compte du monde comme un système complexe non linéaire, c’est-­‐à-­‐dire qu’une action donnée n’engendrera pas toujours une réponse proportionnelle à sa force. Un système complexe n’est pas déterministe et son pilotage s’effectue à travers des boucles de contrôle et des systèmes de feedback. Joël de Rosnay a étudié les systèmes complexe et l’analyse systémique dans « Le macroscope » 5 dès 1975. Il a tiré des principes généraux liés au contrôle des systèmes complexes et a notamment appliqué ces principes au fonctionnement de l’économie. Les principes de l’économie circulaire sont nés de plusieurs courants de pensée qui ont progressé en parallèle, à partir d’une vision systémique, globale. Une des premières approches apparaît vers la fin des années 1970 avec John T. Lyle et le « regenerative design ». John T. Lyle, architecte de formation, propose une activité économique fortement inspirée du cycle biologique qui doit non seulement rendre ses services initiaux tout en améliorant l’environnement initial. Non seulement l’activité doit-­‐elle être durable dans le temps, mais elle doit être à même de restaurer le potentiel biologique de l’environnement. A partir de ses premiers travaux, John T. Lyle fonde un institut 6 qui propose des approches multidisciplinaires pour proposer des solutions globales. En 1976, Walter Stahel, un architecte également, introduit la « performance economy ». Dans son rapport intitulé « Potential for Substitution Manpower for Energy” pour la commission des communautés européenne (maintenant commission européenne) et “The Product Life factor”, il prône un développement de la durée de vie des produits à travers la réutilisation, la réparation, la refabrication avec pour conséquence la prévention des déchets. L’écologie industrielle apparaît en 1989 dans la revue Scientific American dans un article de Robert Frosch et Nicholas Gallopoulos où les systèmes industriels doivent s’inspirer des écosystèmes où les déchets d’une espèce deviennent ressources pour une autre. Les entreprises industrielles se regroupent dans des parcs et échanges ainsi entre eux leurs sous-­‐produits de fabrication en vue de les valoriser de manière optimale. Le parc industriel de Kalundborg7 au Danemark est illustratif de cette approche. Au fur et à mesure de son développement, les entreprises ont échangé leurs sous-­‐produits de fabrication (par exemple le souffre issu de la raffinerie de Statoil est utilisé comme ressource pour la fabrication d’acide sulfurique de la société Fredericia). Une symbiose industrielle s’est ainsi établie sur le parc industriel. 5 Joel de Rosnay – The Macroscope -­‐ http://pespmc1.vub.ac.be/macrbook.html 6 John T. Lyle Center for regenerative design https://www.csupomona.edu/~crs/ 7 Kalundborg Symbiosis -­‐ http://www.symbiosis.dk/en Gunther Pauli, un entrepreneur, fonde en 1994 le « Zero Emissions Research and Initiatives ». Il constate que l’économie classique souffre de trop d’externalités négatives et n’est pas pérenne, que l’économie verte de par ses surcoûts se voit réservée à une population très restreinte. Il développe alors l’économie bleue8 basée sur l’innovation, sur un modèle économique générant plusieurs revenus simultanés, la création d’emplois et la construction du capital social. L’économie bleue fournit un modèle résilient et les revenus multiples permettent d’intensifier l’activité. Ce modèle a été mis en place à travers le monde dans des domaines d’activités variés (agriculture, urbanisme,...). Amory Lovins, un physicien, fonde en 1982, le Rocky Mountain Institute 9 qui s’intéresse à l’optimisation des ressources et au développement durable. Il publie en 1999 le capitalisme naturel (ou « natural capitalism ») qui s’appuie sur 4 principes fondateurs : -­‐ augmentation de la productivité des ressources naturelles, -­‐ transition vers un modèle de production inspiré de la nature -­‐ transition vers des modèles d’affaires orienté solution (concept du flux de services – « flow of services ») -­‐ réinvestissement dans le capital naturel. Et bien sûr, l’économie circulaire doit beaucoup à William Mc Donough, architecte, et Michael Braungart, chimiste, qui ont élaboré le modèle Cradle-­‐to-­‐Cradle. En 1992, ils publient les principes d’Hanovre qui jettent les bases de leur reflexion. En 1999, le livre « Cradle to Cradle: Remaking the Way We Make Things » définit un cadre de réflexion et d’action pour l’économie circulaire et met en avant les premières réalisations qu’ils ont conduit ensemble. La diversité des acteurs explique en partie les approches multiples et – finalement – l’absence d’une définition unique et précise de l’économie circulaire. En réalité, il faudrait évoquer les économies circulaires plutôt que l’économie circulaire, car chacune de ces écoles a développé un champ d’action particulier. Une rapide recherche sur l’article « économie circulaire » de Wikipedia indique : “L'économie circulaire est une expression générique désignant un concept économique qui s'inscrit dans le cadre du développement durable et s'inspirant notamment des notions d'économie verte, d’économie de l'usage ou de l'économie de la fonctionnalité, de l'économie de la performance et de l'écologie industrielle (laquelle veut que le déchet d'une industrie soit recyclé en matière première d'une autre industrie ou de la même). Selon la fondation Ellen Mac Arthur (créée pour promouvoir l'économie circulaire), il s'agit d'une économie industrielle qui est, à dessein ou par intention, réparatrice et dans laquelle les flux de matières sont de deux types bien séparés ; les nutriments biologiques, destinés à ré-­‐entrer dans la biosphère en toute sécurité, et 8
Gunther Pauli: l’économie bleue -­‐ http://www.theblueeconomy.org/blue/Home_Fr.html 9 Rocky Mountain Institute -­‐ http://www.rmi.org/ des intrants techniques (« technical nutrients »), conçus pour être recyclés en restant à haut niveau de qualité, sans entrer dans la biosphère.” Même si le terme « économie circulaire » est une expression générique, certains principes communs se retrouvent dans les diverses écoles de pensée, notamment l’approche systémique à mettre en œuvre, le besoin de créer un système qui restaure l’environnement (le capital social et environnemental) et un design prenant en compte l’absence d’externalités négatives. L’économie circulaire est une approche récente, globalement apparue dans les vingt dernières années et l’article prend le parti de s’appuyer fortement sur les travaux de la fondation Ellen MacArthur comme base de référence. La fondation Ellen MacArthur a été créée en 2010 par l’ex-­‐navigatrice Ellen MacArthur avec comme ambition d’accélérer la transition de l’économie vers l’économie circulaire. La fondation travaille sur trois axes : l’éducation, l’aide aux entreprises pour qu’elles amorcent leur transition vers l’économie circulaire et une influence auprès des gouvernements et institutions afin qu’un cadre favorable à l’économie circulaire se mette en place. L’approche développée par la fondation réalise une synthèse plutôt réussie des diverses approches des économies circulaires. Dans la suite de l’article, l’économie circulaire sera employée au singulier. Les principes de l’économie circulaire Le point de départ de l’économie circulaire est une vision de l’homme dans le monde où la vie ne pollue pas, ne produit pas de déchets ultimes, comme dans le cycle biologique. La vie au contraire s’enrichit au fur et à mesure en créant la biodiversité qui permet une adaptation aux climats et fournit une résilience aux perturbations. Le modèle circulaire repose sur une approche biomimétique (ou copie du vivant). La nature est prise pour exemple, en considérant que nos systèmes techniques devraient fonctionner comme des organismes vivants qui synthétisent des nutriments qui à leur tour nourrissent le cycle, sans fin. De l’énergie est nécessaire dans toutes les étapes de transformation. Comme dans la nature, le soleil doit y pourvoir. L’économie doit refléter ces principes de résilience, d’enrichissement, de revalorisation (« upcycle » en anglais selon les termes de M. Braungart et W. McDonough) et doit être conçue comme un système complexe s’inspirant de la science des systèmes dynamiques. Tout processus de design doit avoir comme ambition de faire mieux, pas moins bien dans une approche itérative, comme dans le cycle biologique afin de dessiner une trajectoire de transition vers un modèle totalement circulaire. La figure « The Upcycle Chart », tirée des travaux de M. Braungart et W. McDonough), illustre ce principe. A partir de l’inventaire des composants, toxiques (rouges) et non toxiques (verts), un plan de transition est conçu et, par optimisations successives, va amener vers un modèle 100% vertueux. Image 4 : la trajectoire de revalorisation (« upcycle »), source M. Braungart, W. McDonough Les principes majeurs de l’économie circulaire sont : -­‐ Optimiser le système dans sa globalité et ne pas rechercher une efficacité trop élevée qui fragilise la résilience. Comme dans tout système complexe, un point d’optimisation existe entre la résilience maximale et l’efficacité maximale. Trop de résilience complexifie le système et le ralentit, et trop d’efficacité rend le système fragile et instable aux perturbations. Considérer le système dans sa globalité permet également de travailler à divers niveaux d’échelle puisqu’en réalité nous avons des systèmes imbriqués, comme dans un système fractal. « Penser global, agir local » peut évoluer en « Penser universel, agir moléculaire » 10(M. Braungart, W. McDonough). 10 M. Braungart, W. McDonough, The Upcycle, p. 208 Image 5 : trouver la zone de fonctionnement optimal d’un système, source fondation Ellen Mac Arthur -­‐
Déchet = nourriture (ou tout est nourriture). Dans le cycle biologique, un organisme vivant est mangé par un autre à la fin de sa vie et sa décomposition sert de substrat pour l’émergence de nouveaux organismes vivants. La conception d’un produit ou d’un service doit inclure son devenir après son utilisation (ou ses utilisations) et la récupération sans perte de qualité de ses composants. Le principe de ne plus avoir de déchet ultime doit s’appliquer au cycle biologique, comme au cycle technique et demande la mise en place de circuits d’échanges entre les acteurs. Dans le cycle technique, il est possible d’utiliser des matériaux toxiques sous réserve de garantir qu’ils ne peuvent se répandre dans l’environnement ni interférer avec le vivant. Comme le font remarquer M. Braungart et W. McDonough, quel est l’intérêt de recycler des bouteilles en fourrure polaire si les bouteilles contiennent des molécules toxiques pour l’homme qui peuvent passer dans l’organisme à travers la peau ? Est-­‐il juste que le lait maternel soit contaminé par des produits chimiques qui sont bio accumulés et qu’il ne serait pas légal de vendre dans un magasin11 ? L’absence de déchets ultime comprend aussi la création de matériaux de substitution non toxiques et ouvre les champs d’innovation de la chimie verte. 11 M. Braungart, W. McDonough, The Upcycle, p. 43 et p.158 Image 6 : le modèle d’économie circulaire, source fondation Ellen MacArthur -­‐ Utiliser des énergies renouvelables. Le soleil fournit une ressource inépuisable et continue d’énergie. La consommation mondiale annuelle était en 2010 de 1,5x1020 J tandis que le soleil fournit 5,5×1024 J par an, soit 11000 fois plus12. L’énergie du soleil peut être récupérée par son rayonnement direct (solaire photovoltaïque et thermique), par le vent, les courants marins, la biomasse. Il est également possible de récupérer l’énergie marémotrice et géothermique. L’énergie issue du soleil est distribuée sur l’ensemble de la terre. Plusieurs scenarios de transition énergétique vers les énergies renouvelables ont été élaborés. En France, l’association negaWatt 13 a modélisé un scenario de transition énergétique de la France jusqu’en 2050 en utilisant les technologies actuelles et a démontré sa possibilité. L’Allemagne a engagé une transition énergétique appelée Energiewende 14 pour, à l’horizon 2050, atteindre plus de 80% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique. -­‐ Célébrer la biodiversité. 12 http://fr.wikipedia.org/wiki/Ordre_de_grandeur_%28%C3%A9nergie%29 13 Association negaWatt : Le Manifeste negaWatt (http://www.negawatt.org/le-­‐manifeste-­‐
negawatt-­‐p98.html-­‐) 14 Transition énergétique allemande : Energiewende -­‐ http://www.agora-­‐
energiewende.org/presse/pressematerial/ -­‐
La biodiversité fournit la résilience, la capacité à résister aux aléas. La biodiversité est également un élément de beauté pour l’homme, un service intéressant à intégrer comme facteur de bien-­‐être. La biodiversité est aussi une source d’inspiration pour trouver des solutions qui ont bénéficié des raffinements de l’évolution. Janine Benyus a crée une pratique appelée « Biomimicry 3 .8 »15 (en français biomimétisme) en référence aux 3,8 milliards d’années que la vie prolifère sur terre et invente des solutions. Le biomimétisme étudie la manière dont des organismes vivants se sont adaptés à diverses contraintes pour les répliquer dans le monde technique. La chimie réalisée par le vivant se produit à température ambiante et avec de l’eau comme solvant, alors que la chimie classique des matériaux se déroule en général en chauffant et traitant. Des nouveaux matériaux non polluants sont ainsi fabriqués. Par exemple, des innovations sur les structures sont en cours d’élaboration avec l’impression 3D pour imprimer des produits avec des propriétés différentes à partir d’un même matériau. Développer l’économie de la fonctionnalité et de la performance. Dans un monde qui devient de plus en plus contraint sur la disponibilité des ressources, donc sur les prix des matières premières qui augmentent, l’économie de la fonctionnalité permet d’offrir l’utilisation d’un bien ou d’un service à meilleur coût. Elle encourage le fournisseur de service à utiliser son bien de manière plus intensive et plus longtemps (maintenance plus élevée, réparation, refabrication). Les matériaux restent la propriété de l’opérateur. Ils peuvent ainsi être plus facilement réutilisés en fin de vie. Avec un produit correctement éco-­‐conçu, le démantèlement permet de récupérer les matériaux sans mélange et donc de les réutiliser sans perte de valeur. L’économie de la fonctionnalité amène également la création d’emplois d’entretien, de réparation, de refabrication proches des lieux d’utilisation, donc non délocalisables. Elle permet ainsi de fixer des emplois sur tout le territoire. L’impact environnemental est également important : ¾ de l’énergie d’un produit est dépensée pour l’extraction de ses matières premières et ¼ pour la fabrication du produit lui-­‐même. Augmenter la durée de vie d’un produit permet ainsi un gain substantiel d’énergie. La réduction de consommation de matières premières n’a pas un effet très fort sur l’emploi car ¼ du travail est fourni pour l’extraction des matières premières et ¾ pour la fabrication du produit. L’utilisation des ressources en cascade ainsi que la mise en place de services de location, maintenance, réparation, refabrication et recyclage permettent de multiplier les opportunités d’activités et donc la création de valeur comme la figure des cycles biologique et technique l’illustre. Le principe de circularité apparaît très clairement. Plus le circuit est court et plus la valeur est forte. La mise en place de circuits courts nombreux entraîne la création de nombreux emplois souvent moyennement qualifiés. Or, l’emploi des personnes peu qualifiées est un des problèmes de nos sociétés tournées vers les services à forte valeur ajoutée. Selon la société Ifixit16, spécialisée dans la réparation, le 15 Biomimicry 3.8 : http://biomimicry.net/ 16 Ifixit -­‐ http://www.ifixit.com/ traitement de 1000t d’électronique génère moins d’un emploi pour la mise en décharge, 15 emplois pour le recyclage et 200 emplois pour la réparation. De nouvelles activités apparaissent grâce à l’utilisation des technologies de communication mobiles et les réseaux sociaux : l’économie collaborative. Par exemple Blablacar permet d’assurer un service de transport en covoiturage ou Lyft (actuellement disponible aux Etats-­‐Unis) transforme une voiture particulière en taxi à la demande. Dans une transition vers l’économie circulaire, ces activités permettent de rendre les services en mutualisant les supports. Les étapes suivantes consistent à rendre le produit le moins toxique possible (voiture construite à partir de produits recyclés, énergie renouvelable). -­‐
Image 7: les divers cycles de l’économie circulaire, source fondation Ellen MacArthur Philips vient de commercialiser un service de fourniture de lumière auprès de ses clients. Philips installe ses lampes, reste propriétaire de ses luminaires et vend à ses clients la lumière (lux . heures). Il assure la maintenance des luminaires et paie la facture électrique. Dans ce modèle, Philips a tout intérêt à installer des systèmes qui durent longtemps et consomment peu. Le coût du luminaire a relativement peu d’importance, car il reste propriété de Philips qui peut le réparer, le mettre à niveau et récupérer les composants en fin de vie17. Les prix doivent refléter les vrais coûts. Les prix n’intègrent pas les externalités. Malgré les nombreuses déclarations, le principe pollueur-­‐payeur n’est pas appliqué. Par exemple les agriculteurs ne 17 Philips : “Pay per lux” -­‐ http://www.lighting.philips.com/main/projects/rau.wpd -­‐
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paient pas les coûts de dépollution des eaux chargées des pesticides qu’ils ont épandus. Par ailleurs, les états par le biais de taxes et de subventions orientent les prix. N. Myers, un professeur de l’Université d’Oxford et environnementaliste, et J. Kent18 estiment que 2000 milliards de dollars de subventions sont dépensées par an sur les secteurs des énergies fossiles, de l’exploitation du bois, de la pêche, de l’eau, de l’agriculture et des mines. Un prix qui reflète un vrai coût doit inclure les externalités que le produit ou le service induit, et ne pas laisser à un tiers (souvent la collectivité) son support. Reconstruire et maintenir le capital afin d’accroitre les flux utiles. L’économie classique privilégie les flux sur le capital. L’outil de mesure de l’activité économique qui sert de référence est le PIB qui ne prend en compte que les flux d’argent, indépendamment de la valeur du capital. L’exemple classique est le cas de l’accident de voiture. Le véhicule est détruit et réparé : le PIB a augmenté alors que la valeur est restée identique ou bien a diminué si l’accident a de plus détruit des éléments du patrimoine. La préservation du capital garantit sa valorisation continue. La maintenance est une opération clé dans ce cas. Par exemple, un violon Stradivarius ne peut pas garder sans valeur au cours du temps sans un entretien permanent. L’économie circulaire propose de mesurer le capital afin d’en assurer sa préservation voire son augmentation afin de pouvoir continuer à l’utiliser dans les divers circuits économiques. Le travail étant une ressource renouvelable, la préservation du capital humain entre dans cette dynamique. De la même manière, la reconstruction du capital social est également un objectif de l’économie circulaire. Mélodie Seznec 19 , étudiante en master à l’Ecole de Management de Strasbourg, a rédigé un article sur les rapports entre l’éthique professionnelle et l’économie circulaire. Elle a ainsi clairement montré que l’économie circulaire était intrinsèquement éthique et contribuait ainsi à enrichir le capital social d’une société. L’argent est principalement un medium d’échange. L’argent est le fluide qui favorise les échanges dans l’économie, un peu comme le sang dans le corps. Dans le modèle économique actuel, l’argent est aussi créé comme une dette et son échange n’est pas toujours lié à une création de valeur réelle. Plusieurs travaux ont souligné cette dérive, comme Paul Grignon dans l’Argent Dette20 ou Ben Dyson dans Positive Money21 qui démontrent comment 18
N. Myers, J. Kent (2001) : Perverse Subsidies: How Tax Dollars Can Undercut the Environment and the Economy 19 Mélodie Seznec -­‐ http://gblogs.cisco.com/fr-­‐greenit/2011/06/23/economie-­‐circulaire-­‐lorsque-­‐
lethique-­‐structure/ 20 Paul Grignon : l’Argent Dette -­‐ http://www.moneyasdebt.net/ 21 Ben Dyson : Positive Money -­‐ https://www.positivemoney.org/ les banques créent de la monnaie à travers les crédits qu’elles délivrent. Ben Dyson indique ainsi qu’en Grande-­‐Bretagne 97% de la monnaie est ainsi créée par les banques et seulement 3% par la Banque d’Angleterre ! Des réalisations et un potentiel déjà conséquents Les diverses approches de l’économie circulaire ont été mises en œuvre à travers le monde dans des réalisations diverses. M. Braungart et W. McDonough ont fondé des sociétés – MBDC et EPEA – afin d’accompagner des sociétés sur des éco-­‐conceptions Cradle-­‐to-­‐Cradle et certaines de leurs réalisations sont documentées dans leur ouvrage « Cradle to Cradle: Remaking the Way We Make Things ». L’usine de Rivière Rouge de Ford est ainsi redésignée, repensée autour des collaborateurs et réaménagée. L’installation d’une toiture végétalisée permet d’éviter l’installation d’une centrale d’épuration des eaux et non seulement permet à Ford d’économiser 35 millions de dollars mais en plus offre à l’environnement des services gratuits (fleurs mellifères pour les abeilles, régulation des crues,…) et un cadre de travail très agréable pour les employés. Un autre exemple concerne la conception d’un siège Cradle-­‐to-­‐Cradle pour Hermann Miller. Après étude des matériaux du siège, il s’avère que la suppression des éléments toxiques du tissu demande la création d’un nouveau tissu. Au final, la chaine de production se trouve simplifiée et l’absence de produits toxiques dans le siège évite l’installation de systèmes onéreux de dépollution ainsi que l’absence de port de masque de protection pour les ouvriers. Gunther Pauli 22 dans l’économie bleue illustre également de nombreuses réalisations à travers le monde. Il part d’une pensée systémique pour construire des activités intégrées, comme dans un écosystème naturel. De manière plus large, la fondation Ellen MacArthur s’est associée avec le cabinet McKinsey pour quantifier l’impact économique de l’économie circulaire et a publié le résultat de ces études dans trois fascicules qui ont été présentés lors du Forum Economique Mondial de Davos en 2012, 2013 et 201423. La première étude montre notamment qu’une transition vers l’économie circulaire pourrait permettre des économies annuelles de matières premières de 340 à 380 milliards de dollars dans une transition basse et de 520 à 630 milliards dans une transition haute au niveau de l’Union Européenne (soit environ 3% du PIB de l’Union Européenne). La deuxième étude s’intéresse aux biens de consommation courante (nourriture, habillement et emballage) et montre qu’une économie annuelle de 700 milliards de dollars dans les matières premières peut être atteinte, soit 1,1% du PIB de l’Union Européenne. 22 Gunther Pauli: l’économie bleue -­‐ http://www.theblueeconomy.org/blue/Home_Fr.html 23 Fondation Ellen MacArthur http://www.ellenmacarthurfoundation.org/fr ; Rapports sur l’impact de l’économie circulaire (Circular Economy Reports 1, 2, 3) : http://www.ellenmacarthurfoundation.org/business/reports M. Braungart et W. McDonough ont cédé leur propriété intellectuelle autour du Cradle-­‐to-­‐Cradle afin de fonder le Cradle-­‐to-­‐Cradle Products Innovation Institute24 qui standardise les méthodes de certification Cradle-­‐to-­‐Cradle de manière ouverte. Leur ouvrage « Cradle-­‐to-­‐Cradle : Remaking the Way Me Make Things » a été traduit en plus de 20 langues et imprimé à plus de 20 millons d’exemplaires en Chine, ce qui constitue le livre le plus répandu depuis le Petit Livre Rouge de Mao Tsé-­‐toung ! L’économie circulaire (même si sa mise en œuvre ne reprend pas tous les éléments proposés par M. Braungart et W. McDonough) est désormais inscrite dans la loi chinoise. En France, l’Institut de l’économie circulaire 25 a été créée en février 2013 et rassemble pouvoirs publics, organisations et entreprises pour promouvoir et accélérer la mise en œuvre de l’économie circulaire en France. Une loi cadre sur l’économie circulaire serait en préparation pour 2017. Image 8 : logo de l’Institut de l’économie circulaire, source Institut de l’économie circulaire Les challenges de l’économie circulaire L’économie circulaire remet en question le modèle établi et des résistances au changement peuvent clairement apparaître, soit de la part des acteurs dominants en place qui ne veulent pas risquer de remettre leur position en jeu, soit de la part des acteurs déjà fragilisés qui redoutent une crise encore plus forte. Comme l’architecte Buckminster Fuller le disait : « On ne change jamais les choses en combattant la réalité existante. Pour changer quelque chose, construisez un nouveau modèle qui rendra inutile l'ancien. “
L’économie circulaire se doit donc de proposer une approche globale avec une proposition audible par le plus grand nombre. Il existe trois leviers possibles pour déclencher le changement : le volontariat, l’incitation économique et la réglementation. Le volontariat est le levier qui est le plus lent et le plus difficile à activer et spontanément le moins efficace, suivi par 24 Cradle-­‐to-­‐Cradle Products Innovation Institute -­‐ http://www.c2ccertified.org/ 25 Institut de l’économie circulaire -­‐ http://www.institut-­‐economie-­‐circulaire.fr/ l’incitation économique puis la réglementation. Le volontariat permet de démarrer un mouvement et de construire les premières références. Seulement, il ne devient significatif que lorsque la pensée devient la pensée dominante. Pour passer d’un mouvement de niche à un mouvement massivement adopté, il est nécessaire de communiquer sur les bénéfices, les premières réalisations, d’éduquer sur le nouveau modèle. La fondation Ellen MacArthur s’est engagée sur l’élaboration de cursus de formation depuis l’enseignement primaire jusqu’à l’enseignement supérieur et met en avant les entreprises qui décident de s’engager vers l’économie circulaire (programme « Circular Economy 100 »). L’état néerlandais a décidé de réorienter une partie de sa politique d’achat vers des produits certifiés Cradle-­‐to-­‐Cradle en travaillant sur
les critères à prendre en compte pour une politique de la commande publique et
en éditant un guide à destination des régions et collectivités locales souhaitant
adopter cette démarche26.
L’incitation économique demande une différence de prix de l’ordre de 20 à 25% pour qu’une bascule significative du marché soit constatée. Dans le cas de l’économie circulaire, un différentiel de prix peut-­‐être introduit en incluant les externalités sur les produits polluants (principe pollueur-­‐payeur notamment) et bien sûr en réorientant les subventions et les taxes afin de privilégier les approches d’économie circulaire et l’éco-­‐conception Cradle-­‐to-­‐Cradle. Une option est de taxer de manière plus contraignante les matières premières non renouvelables en réduisant les taxes sur les matières premières renouvelables. Dans cette optique, le travail étant une ressource renouvelable verrait son coût baisser. Le levier réglementaire est le plus efficace sous réserve de pouvoir contrôler son application. Par exemple, la France a pris des mesures de réduction de vitesse sur les routes dès 1974 qui n’ont été massivement suivie qu’à partir de 2003 avec le déploiement des radars fixes automatiques. La première étape, peu contraignante, est de rendre l’affichage environnemental obligatoire. Elle permet pour les entreprises de faire un inventaire de leurs pratiques et aux clients et aux consommateurs de pouvoir plus facilement spécifier leurs exigences. Une deuxième étape peut-­‐être de limiter les déchets ultimes (soit réglementairement soit par le biais de l’augmentation des taxes d’enfouissement) et ainsi inciter la mise en place d’une éco-­‐conception qui inclut la fin de vie des produits. Enfin, la réglementation peut demander le respect de certification d’éco-­‐conception de type Cradle-­‐to-­‐
Cradle. Une des difficultés est de trouver les compétences pour encadrer de telles réglementations, puisque les compétences autour de l’économie circulaire sont principalement à former. 26
Comparaison des politiques publiques vis-­‐à-­‐vis de l’économie circulaire : http://www.developpement-­‐durable.gouv.fr/Comparaison-­‐internationale-­‐des.html Conclusion Les crises que nous traversons actuellement ne sont pas conjoncturelles mais structurelles. Comme Albert Einstein déclarait : « On ne résout pas les problèmes avec les modes de pensée qui les ont engendrés “. Seule une approche systémique permet d’appréhender de manière globale la situation et de proposer des nouvelles heuristiques afin de la contrôler. L’économie circulaire construit un schéma à partir de l’épanouissement de l’homme et du vivant, basé sur l’innovation et la création de valeur à travers une pensée systémique où le système fonctionne de manière optimale plutôt que sur la recherche de l’efficacité sur certains éléments de l’économie au détriment de sa stabilité. Le principe est de « ne plus faire moins mal mais bien »27. L’économie circulaire offre une vision globale de l’économie basée sur deux cycles distincts, le cycle biologique et le cycle technique où aucun déchet ultime n’est produit grâce à une éco-­‐conception Cradle-­‐to-­‐Cradle et où les matériaux circulent en permanence. Les énergies renouvelables permettent de fournir une énergie illimitée pour la transformation, le transport et la consommation. Les nouveaux modes de consommation basés sur l’économie de la fonctionnalité, de la performance ou collaborative permettent une utilisation plus intensive des biens et leur accès à une population plus importante, tout en maximisant les échanges. Les facteurs favorisant l’émergence de l’économie circulaire sont l’éducation, la mise en place de prix reflétant les conditions réelles, un environnement de collaboration entre les acteurs économiques et un cadre réglementaire favorable, privilégiant les systèmes renouvelables sur les consommations de ressources non renouvelables. Une économie circulaire permet un découplage entre la croissance économique et la consommation de ressources non renouvelables, ce qui permet de limiter la pression sur les matières premières et donc la volatilité des coûts de ces ressources. Une des conséquences induites est la paix, car les tensions sur l’accès aux matières premières diminuent très fortement. Une utilisation intensive des ressources à travers des cycles de réutilisation (maintenance, réparation, refabrication, recyclage) permet de créer des emplois stables non délocalisables. La suppression de l’émission de produits toxiques dans l’environnement élimine les coûts et les problèmes liés aux traitements des déchets et des produits toxiques. Enfin l’économie circulaire, offre une perspective d’innovation positive en réconciliant l’humain avec la société via la restauration du capital social et avec son environnement en restaurant le capital biologique. En adressant de manière globale l’économie, l’environnemental et le social, l’économie circulaire constitue un parfait modèle de développement durable. Mais, 27 M. Braungart et W. McDonough -­‐ Cradle to Cradle: Remaking the Way We Make Things comme s’interrogent M. Braungart et W. MacDonough, peut-­‐on se contenter d’un développement seulement durable (« sustainable », ou soutenable en anglais) ? Pour caractériser une relation amoureuse épanouie, emploie-­‐t-­‐on soutenable ? Faut-­‐il avoir comme ambition la seule durabilité ou l’épanouissement ? Le modèle d’économie circulaire n’est pas seulement un modèle durable, mais également régénérateur. Est-­‐il possible de ne pas l’adopter ? Comme Hermann Mulder, président du Global Reporting Initiative déclare à propos des crises et des opportunités qu’elles ouvrent : « Rien n’est impossible, surtout si c’est inévitable ! »28. 28 Hermann Mulder: http://trueprice.org/nothing-­‐is-­‐impossible-­‐particularly-­‐when-­‐it-­‐is-­‐inevitable/ Références Global Footprint Network : http://www.footprintnetwork.org, méthode de calcul de l’empreinte écologique : http://www.footprintnetwork.org/download.php?id=508 Rapport Brundland en anglais http://www.are.admin.ch/themen/nachhaltig/00266/00540/00542/index.html?l
ang=fr&download=NHzLpZeg7t,lnp6I0NTU042l2Z6ln1ae2IZn4Z2qZpnO2Yuq2Z6g
pJCDdnx6gmym162epYbg2c_JjKbNoKSn6A-­‐-­‐ Joel de Rosnay – The Macroscope -­‐ http://pespmc1.vub.ac.be/macrbook.html M. Braungart, W. McDonough, The Upcycle, p.43, p.158, p. 168, p. 208 et Cradle to Cradle: Remaking the Way We Make Things Association negaWatt : Le Manifeste negaWatt (http://www.negawatt.org/le-­‐
manifeste-­‐negawatt-­‐p98.html-­‐) Transition énergétique allemande : Energiewende -­‐ http://www.agora-­‐
energiewende.org/presse/pressematerial/ Fondation Ellen MacArthur http://www.ellenmacarthurfoundation.org/fr ; Rapports sur l’impact de l’économie circulaire (Circular Economy Reports 1, 2, 3) : http://www.ellenmacarthurfoundation.org/business/reports Ordres de magnitude de l’énergie : http://en.wikipedia.org/wiki/Orders_of_magnitude_%28energy%29 Biomimicry 3.8 : http://biomimicry.net/ Ifixit -­‐ http://www.ifixit.com/ Philips : “Pay per lux” -­‐ http://www.lighting.philips.com/main/projects/rau.wpd N. Myers, J. Kent (2001) : Perverse Subsidies: How Tax Dollars Can Undercut the Environment and the Economy Paul Grignon: l’Argent Dette -­‐ http://www.moneyasdebt.net/ Ben Dyson: Positive Money -­‐ https://www.positivemoney.org/ Gunther Pauli: l’économie bleue -­‐ http://www.theblueeconomy.org/blue/Home_Fr.html Cradle-­‐to-­‐Cradle Products Innovation Institute -­‐ http://www.c2ccertified.org/ Institut de l’économie circulaire -­‐ http://www.institut-­‐economie-­‐circulaire.fr/ Comparaison des politiques publiques vis-­‐à-­‐vis de l’économie circulaire : http://www.developpement-­‐durable.gouv.fr/Comparaison-­‐internationale-­‐
des.html Hermann Mulder: http://trueprice.org/nothing-­‐is-­‐impossible-­‐particularly-­‐when-­‐it-­‐
is-­‐inevitable/ 
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