correctrice (d’ailleurs mentionnée dans la nomenclature), pour
peu, bien sûr, qu’elle soit la réponse médicale adaptée à une
gêne sociale ? Les exemples sont multiples et variés, dans le
cadre de la pratique médicale actuelle.
... qui doit être défendue
Un certain nombre de professionnels ont, par des échanges
impliquant, entre autres, le Conseil national de l’Ordre des
médecins et le Collège national des gynécologues et obstétri-
ciens français, insisté sur le fait qu’une récente modification
législative pouvait avoir un retentissement éventuel sur la
“reconnaissance de la stérilisation volontaire à but contraceptif
comme acte médical”. En effet, la loi n° 99-641 du 28 juillet
1999, portant création de la couverture maladie universelle,
stipule, dans son article 70, que “dans le premier alinéa de
l’article 16.3 du Code civil, le mot ‘thérapeutique’ est rem-
placé par le mot ‘médicale’”. Bien que cet article 16-3 – rédigé
dans le chapitre “Du respect du corps humain” du Code civil, à
laquelle de nombreux auteurs ayant pris position sur la stérili-
sation font régulièrement référence – n’ait pas été élaboré spé-
cifiquement pour la stérilisation, mais pour les soins médicaux
en général, et que cette modification ne change pas les prin-
cipes de l’appréciation d’une démarche médicale, cette prise
de position exprime bien la volonté d’accepter que la réflexion
sur le choix et la prescription d’une contraception, quelle
qu’elle soit, puisse être une démarche de soin, un acte médical.
L’action menée actuellement devrait donc permettre aux
couples d’avoir, dans un contexte comparable, un accès simi-
laire et équitable aux différentes méthodes sans se trouver
confrontés à des réserves ou oppositions uniquement fondées
sur une perception personnelle négative de la part du (ou des)
médecin(s) consulté(s).
... mais dont le choix devra aussi être pesé
La stérilisation fait donc partie d’un “arsenal” contraceptif, et
quel que soit le contexte de sa demande, elle devra être mise
en balance avec les méthodes contraceptives les plus clas-
siques et diffusées (méthodes hormonales, dispositifs intra-uté-
rins). Le devoir “d’information et de conseil” qui s’impose au
praticien prend alors toute sa valeur.
Les prises de position extrêmes ont été nombreuses, et nous ne
reviendrons pas sur les débats partisans quels qu’ils soient.
Cependant, à l’époque où la charge de la preuve de l’informa-
tion incombe à l’opérateur, comment un praticien pourra-t-il
défendre (malgré des écrits, même complets, paraphés ou non)
le choix d’une méthode opératoire dont le risque de complica-
tions graves est, dans les publications les plus récentes, estimé
à environ 1 pour 1 000 (3), plutôt que celui d’une méthode
contraceptive plus simple et moins invasive (contraception
orale ou dispositif intra-utérin) pour laquelle la patiente
n’aurait pas de contre-indication ?
Ce n’est, d’ailleurs, que dans le contexte de contre-indications
médicales aux contraceptions les plus usuelles que les risques
graves de celles-ci ou d’une absence de contraception efficace
s’équilibrent avec ceux encourus lors d’une stérilisation
tubaire.
Prenons quelques exemples de la pratique contraceptive quoti-
dienne pour mettre en valeur les orientations qu’impose ce
devoir d’information et de conseil :
– Prescririez-vous une contraception estroprogestative à une
femme à risque accentué de thrombose, qui, de plus, peut dis-
poser d’une autre méthode contraceptive moins dangereuse ?
Non, bien sûr, et ce même si elle vous suppliait de le faire, car
elle ne “supporte” pas les dispositifs intra-utérins. Vous vous
emploieriez à la convaincre du bien-fondé des options vers les-
quelles vous tentez de l’orienter, en restant dans le cadre de sa
demande d’une contraception fiable. Alors, n’en sera-t-il pas
de même face à une patiente qui souhaite une stérilisation
tubaire, mais n’a pas de contre-indication à la pilule ou au sté-
rilet ?
– Accepteriez-vous encore d’appliquer aveuglément une
méthode censée être irréversible (ou “mal” réversible) à une
femme de moins de 35 ans, alors qu’elle exprime une demande
fondée sur sa perception actuelle de son équilibre génital ?
Non, car il est clair, à la lecture de la littérature sur le sujet,
que le risque de regret est d’autant plus élevé que la femme est
jeune, que son dernier enfant n’est pas âgé, et qu’elle va refaire
sa vie (… mais cela n’est pas, ou rarement, prévisible).
EN PRATIQUE
Il existe, de façon indéniable, des éléments de réflexion qui
plaident en faveur de la poursuite d’une pratique médicalement
justifiée et raisonnablement réfléchie.
Il reste à en poser, très clairement pour tous, les bases, afin de
ne pas laisser les patientes se diriger, “par manque de clair-
voyance”, vers des impasses qu’elles regretteraient ultérieure-
ment, et qui leur imposeraient une prise en charge thérapeu-
tique lourde et exposée à des échecs, alors très mal vécus.
C’est ainsi que, dans une population nord-américaine, dans
une enquête rétrospective sur plus de 11 000 patientes ayant
subi une stérilisation tubaire, le taux de regret (dans les
14 années suivant la stérilisation), qui s’élevait à 20,3 % chez
les femmes stérilisées avant 30 ans, atteignait aussi 5,9 % chez
celles stérilisées au-delà de 30 ans (4). On peut regretter de ne
pas disposer d’informations plus précises pour des tranches
d’âge plus étroites sur une telle cohorte, mais de tels résultats
doivent inciter à une information exhaustive, très détaillée,
compréhensible et adaptée chez les patientes demandeuses
d’une stérilisation. Un article destiné au personnel paramédical
anglo-saxon me semble particulièrement bien synthétiser ces
éléments de bonne pratique, en insistant, entre autres, sur les
points suivants : “… Aborder et expliquer les autres méthodes
de contraception courantes disponibles ; évaluer l’intérêt réel
et le fait que la patiente y soit vraiment préparée… ; insister
sur le caractère définitif de la méthode, mais aussi ses possibi-
lités d’échec ; bien expliquer la technique chirurgicale utilisée
(de façon explicite et imagée), et y intégrer la notion
bénéfice/risques ; s’assurer du recueil d’un consentement bien
éclairé…” (5).
Ainsi, si l’on se reporte aux derniers travaux collaboratifs
nord-américains, la possibilité de survenue d’une grossesse
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La Lettre du Gynécologue - n° 253 - juin 2000