
Dossier thématique
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La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 5 - mai 2007
Une seule association a fait la preuve d’une amélioration
signifi cative de la survie globale (9,2 mois versus 7 mois pour
le cisplatine seul) dans l’essai 179 du Gynecologic Oncology
Group (GOG) associant le CDDP (50 mg/m2 J1) au topotécan
(0,75 mg/m2 J1, J2, J3) [23]. La médiane de survie du bras de
référence CDDP seul peut paraître étonnante au vu des autres
essais de polychimiothérapie à base de CDDP, qui avaient pour
ce groupe de meilleurs résultats, allant de 8 (24) à 17 mois (25)
de survie globale. Ce résultat peut s’expliquer par l’avènement
de la radiochimiothérapie à base de CDDP. Dans les études les
plus anciennes, il s’agissait pour les patientes de leur première
exposition aux sels de platine. On remarquera d’ailleurs que,
dans l’essai 179 du GOG, le sous-groupe de femmes non traitées
au préalable par du cisplatine présentait une meilleure réponse.
Cette association CDDP et topotécan est donc actuellement la
polychimiothérapie de référence dans ces stades (26).
Malgré cela, la mise en place d’un traitement médical n’est pas
systématique et doit être discutée en tenant compte de plusieurs
facteurs : le faible taux de réponse des lésions en territoire irradié
et l’intervalle libre entre la fi n du traitement initial et la récidive,
en particulier si le traitement a comporté du CDDP. Aucun essai
à grande échelle n’a été réalisé afi n de comparer la chimiothérapie
aux meilleurs soins de support. En eff et, le gain de survie globale
n’est pas majeur, et la toxicité importante : asthénie, cytopénies,
neuropathie périphérique, insuffi sance rénale organique chez
des patientes ayant une fonction rénale de base déjà souvent
altérée par les obstructions vésico-urétérales.
Dans ces stades, les options thérapeutiques sont donc, en dehors
de l’inclusion dans des essais thérapeutiques testant de nouvelles
associations ou de nouvelles drogues (en particulier, les théra-
peutiques ciblées), la chimiothérapie seule par CDDP (le meilleur
index thérapeutique étant à la dose de 50 mg/m
2
/3 semaines)
ou associé au topotécan (0,75 mg/m2 pendant 3 jours toutes les
3 semaines) et la prise en charge palliative active, en particulier
s’il s’agit de récidive en zone irradiée et donc peu sensible à la
chimiothérapie (environ 5 % de réponses).
FORMES HISTOLOGIQUES
Les carcinomes épidermoïdes sont la forme la plus fréquente des
cancers du col (environ 85 %) et représentent avec les adéno-
carcinomes (environ 10 %) la grande majorité de ces tumeurs.
Les protocoles thérapeutiques pour ces types de tumeurs sont
globalement identiques. Lorsqu’une patiente présente une autre
forme, le premier réfl exe doit donc être, étant donné le peu de
cas dans la population et la diffi culté de leur prise ne charge, de
l’adresser à un centre de référence de cancer du col.
Parmi les types histologiques rares, on retrouve les tumeurs
neuro-endocrines à petites cellules qui présentent des carac-
téristiques à la fois des tumeurs cervicales classiques (rôle des
papillomavirus) et des tumeurs à petites cellules d’autres localisa-
tions (agressivité, métastases précoces). Il s’agit donc d’une forme
de mauvais pronostic avec une survie globale à 5 ans d’environ
25 %, même dans les formes localisées. Il n’y a pas de consensus
sur leur prise en charge, mais leur risque métastatique élevé a
amené les équipes à recourir à des protocoles lourds associant
chimiothérapie néo-adjuvante, adjuvante, radio-chimiothérapie
en plus de la chirurgie, qui se doit d’être radicale.
AVENIR
L’avenir de la prise en charge du cancer du col utérin passe
d’abord par sa prévention : primaire grâce au vaccin anti-HPV,
secondaire grâce aux frottis cervico-vaginaux et tertiaire grâce
à l’amélioration de la surveillance des patientes traitées.
L’avenir du traitement curatif passera d’abord par l’amélioration
des techniques de radio-chimiothérapie (en déterminant les
meilleures modalités d’irradiation et les meilleures drogues à
lui associer), de curiethérapie et de chirurgie.
En ce qui concerne la chimiothérapie, les améliorations vien-
dront de l’utilisation de nouvelles drogues et de nouvelles
synergies mais aussi peut-être de la modifi cation des modes
d’administration. Plusieurs essais sont en cours pour évaluer
la meilleure chimiothérapie des stades métastatiques et récidi-
vants, en particulier l’essai 204 à quatre bras du GOG évaluant
le CDDP associé au paclitaxel, à la gemcitabine, à la vinorelbine
ou au topotécan.
En plus de ces modalités classiques, deux nouvelles voies d’avenir
semblent intéressantes. Les thérapeutiques ciblées permettent
une action précise sur le plan moléculaire en fonction de la
biologie spécifi que d’une tumeur. Plusieurs essais sont actuelle-
ment en cours, mais leurs résultats sont trop précoces. Plusieurs
orientations sont à évaluer : les antiangiogéniques (bévacizumab,
sunitinib, lapatinib, pazopanib, etc.), les anti-EGFR (cétuximab),
un inhibiteur du protéasome (bortézomib), mais, peut-être
aussi, bientôt les inhibiteurs de MDM2 (la dysrégulation de
p53 étant probablement le primum movens de cette tumeur)
et d’autres voies encore…
La seconde direction est l’immunothérapie. Deux méthodes
sont explorées : celle d’un vaccin à base de peptides longs immu-
nogènes dérivés des deux onco-protéines de HPV, ainsi que
l’utilisation d’une immunothérapie par cellules dendritiques
préparées avec l’onco-protéine E7 de HPV 18.
Ces nouvelles thérapeutiques laissent espérer en association
avec les thérapeutiques actuelles une amélioration du taux de
survie de ces patientes. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Hill C, Doyon F. e frequency of cancer in France: all ages and under age 15,
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le cancer ; La Ligue 101 Comités ; Société française d’oncologie gynécologique ;
Fédération hospitalière de France ; Fédération de cancérologie des CHR & U.
Standards, options and recommendations for the management of invasive
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