
La Lettre du Cardiologue • n° 474 - avril 2014 | 29
CONGRÈS
RÉUNION
Qu’apporte la génétique
au clinicien ?
(D’après les communications de P. Froguel,
P. Amouyel et P. Charron)
La génétique – plus précisément la génomique –
vise à rechercher des associations entre les variants
génétiques et le risque de maladie, pour apporter de
nouvelles hypothèses de recherche, mesurer le risque
et le prévenir, mettre en place une recherche trans-
lationnelle et pratiquer une médecine de précision
personnalisée. L’avenir de la génétique est dans l’étude
des associations entre variants fréquents ou rares et
environnement, pour identifier le risque de développer
une maladie et appréhender la complexité de cette
maladie ou la susceptibilité de réponse au traitement.
L’étude de E.A. Ashley et al., parue en 2010, en constitue
un très bon exemple
(3)
. En effet, elle a poussé l’inter-
prétation du génome humain au maximum. Stephen,
un individu atteint de nombreuses anomalies familiales
dont les bilans biologique, métabolique et cardiaque
sont bons, a séquencé l’ensemble de son génome et a
identifié tous les risques possibles (maladies et modi-
fication de la sensibilité aux traitements). Il a ensuite
établi les interactions entre gènes et environnement,
dans le but de comprendre comment la santé de l’indi-
vidu peut être conservée le plus longtemps possible en
repérant ce qui doit être corrigé dans son mode de vie.
La cardiologie recense une cinquantaine de gènes de
susceptibilité ; la génétique va informer sur l’origine
des maladies et identifier des cibles thérapeutiques.
Un bilan cardiaque familial et un test génétique
permettent de surveiller le patient à risque ou de
prédire et traiter la maladie de façon adaptée. La
pharmacogénétique est importante aussi en cardio-
logie pour expliquer les différences de réponse entre
les individus et anticiper les moins bons répondeurs
de manière à adapter le traitement à l’aide de produits
de remplacement. En ce qui concerne le diabète de
type 2, quelque 2 % des cas sont monogéniques
contre 95 % de formes polygéniques. Le diagnostic
génétique des diabètes monogéniques est désor-
mais facile, rapide et peu onéreux. Un questionnaire
clinique simple permet de rechercher la probabilité
de détecter une anomalie génétique de diabète. La
génomique va ensuite permettre de connaître les
causes du diabète et, de ce fait, d’instaurer un traite-
ment adapté et efficace. La connaissance des diabètes
monogéniques a également permis de construire des
cellules β artificielles pour une médecine régénéra-
trice et pour la thérapie génique. Le diabète de type 2
d’origine polygénique est dû à la combinaison gènes-
environnement. La génomique va alors rechercher
le rôle de ces gènes dans la toxicité pancréatique,
dans la réponse aux différents traitements, dans les
complications du diabète et dans le risque de diabète.
Les nouvelles méthodologies génétiques permettent
aussi une caractérisation génétique des diabètes
familiaux et l’amélioration de leur prise en charge.
Dans les maladies monogéniques, le test génétique
est devenu un outil de routine qui peut aider le clini-
cien dans le diagnostic, le pronostic, la prédiction
ou le traitement de la maladie. Dans les maladies
multifactorielles, le test génétique reste un outil
de recherche. Grâce à l’évolution des technologies,
l’analyse du génome est aujourd’hui rapide et de
moins en moins onéreuse. Le séquençage de haut ou
de moyen débit permet depuis peu de cibler des gènes
de susceptibilité de diabète ou de cardiomyopathie.
L’ischémie myocardique
du diabétique
(D’après les communications de P. Henry
et C. Spaulding)
Les recommandations du dépistage de l’ischémie
myocardique silencieuse chez le diabétique ont connu
de nombreux changements. Malgré des recomman-
dations européennes peu favorables au dépistage, la
recherche d’ischémie myocardique est souvent prati-
quée en France. Cependant, le dépistage ne modifie
pas le pronostic du patient : il identifie les lésions
coronaires stables et ne sait pas prédire les lésions
instables, à plus haut risque. L’utilisation d’une échelle
spécifique au dépistage est utile mais peu définie.
Depuis peu, la Société francophone du diabète (SFD)
recommande de réaliser un doppler carotidien et des
membres inférieurs afin de rechercher la présence de
plaques athéromateuses pouvant être prédictives
d’une maladie coronarienne associée. Le score de
calcification, peu onéreux, constitue également un
moyen rapide de détecter les diabétiques à haut risque.
Chez le diabétique, un diagnostic complémentaire
d’insuffisance rénale, qui aggrave le pronostic, sera
intéressant pour optimiser la prise en charge.
L’ischémie myocardique silencieuse sera donc recher-
chée chez les diabétiques à risque, c’est-à-dire ceux
présentant une dysfonction rénale, un score de calci-
fication élevé, une autre atteinte athéromateuse et/
ou un diabète ancien. Une fois la maladie corona-
rienne dépistée, la priorité sera d’optimiser le traite-
ment médical, sachant que ces patients présentent un
risque d’événement ultérieur. La revascularisation n’est
pas forcément l’objectif systématique. En effet, selon
l’étude FREEDOM, la revascularisation chirurgicale par