La Lettre du Cancérologue • Suppl. 4 au vol. XIX - n° 6 - juillet 2010 | 19
Résumé
Sans révolution majeure, le congrès de l’ASCO 2010 aura tout de même apporté quelques éléments solides
pour la prise en charge des cancers gynécologiques. La place de la chimiothérapie adjuvante dans les cancers
du col et de l’endomètre à haut risque est probablement cruciale et devra être précisée par les essais
thérapeutiques en cours. Concernant les cancers de l’ovaire, les pistes importantes sont la caractérisation
du phénotype BRCA, le positionnement des traitements antiangiogéniques et des autres thérapies ciblées
ainsi que l’espoir raisonnable de voir arriver des techniques de dépistage.
Mots-clés
Chimiothérapie
Bévacizumab
Phénotype BRCA
Dépistage
Highlights
The 2010 annual ASCO meeting
has brought some advances in
the management of ovarian
cancer. Further characteriza-
tion and validation of BRCA-
ness features will become
paramount in the near future.
Anti-angiogenic drugs, as
well as some other targeted
therapies, will shortly enter
standard practice. Hopefully,
screening for ovarian cancer
should become reality in the
coming years. Meanwhile,
it has been recognized that
adjuvant conventional cyto-
toxic chemotherapy is about
to become a standard of care
in high risk cervical and endo-
metrial cancer.
Keywords
Chemotherapy
Bevacizumab
BRCAness
Screening
Cancer de l’endomètre
La session d’éducation “Future management of
endometrial cancer”, consacrée au cancer de l’endo-
mètre, a permis de faire le point sur plusieurs aspects
clés de la prise en charge de ces cancers parfois
un peu oubliés par la recherche clinique. D. Cohn
(Ohio State University) a souligné l’importance du
curage ganglionnaire, notamment pelvien, dans
les cancers de petit stade : au moins 10 % de ces
patientes ont un envahissement ganglionnaire,
la toxicité du curage est minime et l’information
recueillie permet d’ajuster le traitement adjuvant.
C. Creutzberg (Leiden University Medical Center),
qui avait participé aux historiques essais PORTEC,
a ensuite rappelé la place de l’irradiation dans le
traitement des formes à risque intermédiaire :
aucun apport en SG n’est constaté (4 essais rando-
misés) mais un bénéfice net en survie sans rechute
locorégionale est observé. Il est de plus acquis que la
curiethérapie vaginale est équivalente à l’irradiation
pelvienne pour cet objectif de contrôle local, mais
qu’elle présente une toxicité digestive moindre.
La place de la CT en phase précoce des cancers de
l’endomètre à haut risque de rechute reste incer-
taine et fait l’objet des essais PORTEC-3, GOG-249
et GOG-258. Ces essais sont ambitieux en termes
de recrutement et posent 3 questions stratégiques
différentes.
➤
Dans les petits stades présentant un facteur
de risque, la combinaison CT + curiethérapie vagi-
nale (mieux tolérée) suivie de CT adjuvante (essai
GOG-249) induit-elle une meilleure survie sans
rechute que la RT pelvienne classique (moins bien
tolérée, pas d’action systémique) ?
➤Dans les hauts stades, où la question métasta-
tique domine, la CT seule est-elle plus performante
que la séquence radio-chimiothérapie suivie de CT
adjuvante (essai GOG-258) en termes de survie sans
rechute ?
➤
À la confluence des 2 essais du GOG, en situation
adjuvante et de cancers à haut risque, la RT pelvienne
seule améliore-t-elle la SG comparativement à la
radio-chimiothérapie pelvienne suivie de CT (essai
PORTEC-3) ?
Au-delà de ces questions stratégiques, l’utilisation
des thérapies ciblées commence à être abordée.
G. Fleming (université de Chicago) a passé en revue
les nouvelles thérapies actuellement en cours
d’évaluation : on retiendra les agents ciblant la voie
mTOR et le bévacizumab.
Cancer de l’ovaire
De façon à poser de manière sensée et raison-
nable les questionnements actuels dans la prise en
charge des cancers ovariens, A. Du Bois a rappelé
les données fondamentales lors de la session
d’éducation. La qualité de la chirurgie initiale est
cruciale pour le pronostic. Il est ainsi possible de
modéliser la relation existant entre chirurgie, stade
tumoral initial, résultat de la chirurgie et position-
nement relatif de la chirurgie et de la CT. Ainsi, la CT
néo-adjuvante, surtout si elle est rendue nécessaire
par l’extension initiale de la maladie, ne permet pas
de corriger complètement le pronostic, y compris
en cas de résidu nul lors de la tentative chirurgicale
maximale.
La recherche d’innovations thérapeutiques est donc
indispensable pour espérer améliorer significa-
tivement le devenir des patientes. Les premiers
résultats des inhibiteurs de PARP (PARPi) dans les
cancers de l’ovaire, chez 57 patientes présentant
une mutation BRCA1 ou BRCA2 et ayant reçu une
médiane de 3 lignes de CT antérieurement, avaient
été présentés lors de l’ASCO 2009. La population
était répartie en 2 cohortes traitées à 400 mg × 2/j
et 100 mg × 2/j (6). Les taux de réponse (objectif
principal de l’étude) sont impressionnants chez
des patientes aussi lourdement prétraitées, avec
un probable effet-dose, similaires à ce qui a été
observé dans le sein. Les durées de réponse sont
également prometteuses, entre 270 et 290 jours,
et ne sont pas liées à la dose. Dans la cohorte
à 400 mg × 2/j, 2 réponses complètes ont été
observées. On ne peut cependant pas encore, à ce
stade, dégager de différence d’efficacité en fonction
de la sensibilité antérieure aux sels de platine. En
revanche, il semble exister un net avantage chez
les patientes mutées BRCA2, résultat fort logique
puisque le gène BRCA2 est directement impliqué
dans le processus moléculaire de la réparation
simple brin.