Place de la tomographie par émission de positons avec tomodensitométrie au 18-fluorodéoxyglucose

344 | La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 5 - mai 2011
MISE AU POINT
Place de la tomographie
par émission de positons
avec tomodensitométrie
au 18-fluorodéoxyglucose
en oncogynécologie
The ability of 18FDG PET-CT in onco-gynecology
M. Faraggi*, L. Bensimhon*, F. Hugonnet*
* UF de médecine nucléaire et TEP,
hôpital européen Georges-Pompidou,
Paris.
Technique
La tomographie par émission de positons (TEP) est
une technique scintigraphique utilisant des traceurs
spécifiques émettant des électrons positifs (les posi-
tons) dont l’annihilation dans la matière produit un
signal détectable par un anneau (la caméra dédiée
ou TEP). Ce signal est beaucoup plus résolu qu’une
scintigraphie conventionnelle (environ 5 mm pour
les appareils les plus modernes), quantifiable et
couplé à une imagerie anatomique tomodensito-
métrique (TDM) qui permet de localiser le point
d’émission du signal, de corriger les pertes de
signal provenant de structures profondes ou denses
(correction d’atténuation) et, au besoin, de réaliser
un scanner diagnostique. Le signal dépend essen-
tiellement du traceur injecté. Nous nous résume-
rons ici au 18- fluorodéoxyglucose (18FDG), dont la
captation cellulaire est voisine de celle du glucose.
Ce traceur reflète la capacité proliférative de la
cellule par l’intermédiaire de la surexpression des
récepteurs au glucose et l’intensité de sa captation,
elle-même reflet du métabolisme glucidique, est
donc un indicateur potentiel de l’agressivité cellu-
laire tumorale. D’autres traceurs marqués au 18F se
développent : traceurs d’apoptose, qui devraient
permettre d’évaluer le potentiel cytotoxique de la
radio-chimiothérapie ; fluoroestradiol, pour évaluer
la densité des récepteurs hormonaux des cancers
mammaires et donc la sensibilité à l’hormono-
thérapie ; acides aminés marqués, dont on espère
une spécificité accrue ; traceurs de l’hypoxie, pour
évaluer la radiorésistance, etc. Il faut mentionner que
l’avidité d’une cellule tumorale pour le 18FDG peut
varier selon le degré de surexpression des récepteurs
au glucose, selon sa différenciation cellulaire et la
nature des contingents cellulaires, certains (tels les
carcinoïdes) étant particulièrement peu avides et
sources de faux négatifs.
Intérêt potentiel de la TEP
en oncogynécologie
Comme pour toute technique d’imagerie en oncologie,
l’intérêt de la TEP peut se discuter à différentes étapes.
Lors de la stadification initiale
Compte tenu de la résolution spatiale et des
performances de l’imagerie anatomique conven-
tionnelle (échographie, TDM et IRM), l’intérêt de
la TEP porte rarement sur le T (tumeur primitive).
La caractérisation tissulaire (bénin/malin) d’un
nodule ou d’une lésion indéterminée n’est pas non
plus une indication élective, car nombre de lésions
bénignes et/ou inflammatoires et/ou infectieuses
peuvent accumuler le
18
FDG. En revanche, la TEP
peut guider certaines biopsies supplémentaires, en
prenant la précaution d’interpréter prudemment
Figure 1. Cancer du
sein : TEP-TDM au
18FDG avec, de haut
en bas, les images
d’émission du 18FDG
(de gauche à droite :
coupes transverse,
sagittale et frontale),
de la TDM, et de la
fusion des deux. Outre
la lésion mammaire
droite (plus gros point
de fixation), on repère
des ganglions hyper-
métaboliques, parfois
de petite taille, en
axillaire et même en
susclaviculaire.
Figure 2. Cancer du
col : TEP-TDM au 18FDG
avec, de haut en bas,
les images d’émission
du 18FDG (de gauche
à droite : coupe trans-
verse, sagittale et
frontale), de la TDM et
de la fusion des deux.
On observe en avant
une plage hypermé-
tabolique intense
représentant l’élimi-
nation physiologique
vésicale du traceur,
la vessie étant bien
individualisée sur la
coupe sagittale. En
arrière, hypermétabo-
lisme du col étendu à
l’endo mètre.
La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 5 - mai 2011 | 345
Points forts
»
Sensible dans la détection des atteintes ganglionnaires (sauf les micro-métastases) et métastatiques distantes.
»L’intensité de fixation du
18
FDG sur la tumeur primitive est souvent de mauvais pronostic.
»
La baisse marquée de la captation du 18FDG en cours de traitement est prédictive d’une bonne réponse
thérapeutique.
»La recherche de récidive devant une remontée isolée des marqueurs est une bonne indication.
Mots-clés
Oncologie
gynécologique
18FDG PET-CT
Stadification
Pronostic
Réponse
thérapeutique
Highlights
Sensitivity for detecting node
involvement (except for micro-
metastasis) and distant metas-
tasis is high.
A high level of 18FDG uptake on
the primary tumour frequently
indicates a bad prognosis.
A marked decrease in 18FDG
uptake during therapy is a
predictor for a good therapeutic
response.
Searching for a recurrence in
case of isolated tumor marker
rising is a good indication.
Keywords
Onco-gynecology
18FDG PET-CT
Staging
Therapeutic response
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Place de la tomographie par émission de positons avec tomodensitométrie
au 18-fluorodéoxyglucose en oncogynécologie
MISE AU POINT
les sites récemment biopsiés du fait de l’inflamma-
tion induite par un geste récent. L’intérêt de la TEP
repose donc davantage sur la stadification N et M
(puisque l’imagerie est corps entier”). Dès lors, il
est logique de ne la réserver qu’aux tumeurs ayant
un fort potentiel métastatique, ce qui, en pratique,
exclut les “petits T”. Des ganglions encore morpho-
logiquement “rassurants” peuvent être en fait des
adénopathies hypermétaboliques. Cependant,
compte tenu des défauts de spécificité précédem-
ment mentionnés, une adénopathie hypermétabo-
lique isolée doit être confirmée histologiquement.
La TEP doit donc s’inscrire dans une logique ses
résultats seraient à même de modifier la stratégie
thérapeutique (indication d’un geste chirurgical
complémentaire, d’une radio-chimiothérapie ou, au
contraire, contre-indication à un traitement chirur-
gical curatif mutilant). Enfin, en cas de cancer histo-
logiquement avéré, la TEP peut fournir des éléments
pronostiques, indépendamment de ceux montrés
par la stadification. Un indice de captation élevé
(mesuré en général par le standardized uptake value 
[SUV]) pour certains cancers et certaines localisa-
tions serait prédictif d’un risque de récidive. Enfin,
l’existence d’adénopathies ou de “cibles” hyper-
métaboliques peut avoir un impact sur la détermi-
nation des champs de radiothérapie et sur la dose à
délivrer, par l’intermédiaire du calcul d’un volume
tumoral macroscopique “métabolique”.
Lors du suivi des patientes
L’imagerie métabolique présente l’avantage d’être
plus sensible et plus précoce que l’imagerie anato-
mique chez les patientes traitées par radio-chimio-
thérapie. Une diminution “suffisante” du SUV (de
l’ordre de 50 %, variable selon le type de cancer)
permettrait d’identifier les répondeuses à bon
pronostic par rapport aux autres, parfois même
dès la première cure.
Dans le suivi longitudinal des femmes préalablement
identifiées avec un haut risque de récidive (sur des
critères cliniques, biologiques et histologiques, mais
aussi TEP), la TEP peut permettre d’identifier le site
de rechute. La réascension des marqueurs tumo-
raux est ainsi une excellente indication de la TEP,
lorsque l’imagerie anatomique n’a pas déjà identifié
la lésion coupable. Le couplage d’une TEP à une TDM
diagnostique (effectuée sur la TDM de la caméra
TEP) permettrait de grouper les deux informations
en un seul examen, avec des gains de temps et logis-
tiques évidents, mais ces actes couplés ne sont pas
reconnus (ni valorisés) par les pouvoirs publics.
Selon les cancers
Il ne peut être question ici d’effectuer une revue
exhaustive de la littérature et nous nesquisserons
que les grandes lignes de ces thématiques.
Dans les cancers du sein (figure 1, p. 345)
Sur le T, l’intensité de la fixation du
18
FDG est
associée aux facteurs pronostiques suivants :
grade élevé, absence de récepteurs à l’estro-
gène, mutation p53 (1). La TEP ne peut et ne
doit pas prétendre se substituer à la technique du
ganglion sentinelle. Sa résolution ne lui permettra
d’ailleurs jamais d’identifier les micrométastases.
En revanche, dans les stades IIb et III (surtout ceux
classés Nx sur la base de l’imagerie convention-
nelle), la TEP peut se révéler précieuse (2). Dans
la prédiction de la réponse thérapeutique des
chimiothérapies néo-adjuvantes, notamment
pour les stades II et III, une diminution de 50 %
du SUV identifie les patientes répondeuses avec
une sensibilité et une spécificité de 96 % et 75 %
dès la fin de la première cure (2). La sensibilité de
la TEP est notablement supérieure à celle de la
TDM. Dans le suivi à distance, la TEP est proba-
blement le meilleur examen en cas de réascension
des marqueurs (3) et peut être plus sensible que
le CA15.3 (4), tous stades confondus.
Dans les cancers du col (figure 2 , p. 345)
Tout comme pour les cancers du sein, la TEP ne
peut prétendre à la finesse diagnostique d’une
coupe histologique (5). Dans les cancers du col
localement avancés, la TEP est probablement la
meilleure (ou la moins mauvaise) des techniques
d’imagerie (6). Son impact sur la stratégie théra-
peutique est fort (7), mais sa sensibilité semble
insuffisante pour se dispenser de l’histologie lors
du curage des ganglions para-aortiques effectué
durant la laparoscopie. Bien qu’il nexiste pas de
recommandations de haut niveau (SOR), il est
habituel de discuter la TEP à partir du stade Ib2. La
valeur de la captation initiale sur le T est un élément
pronostique important et indépendant du stade,
avec des valeurs seuils pour lesquelles le pronostic
chute : seuils de SUV de 5,2 et de 13,3 pour E.A. Kidd
et al. (8), de 10 pour F. Xue et al. (9), de 15 pour
K. Nakamura et al. (10), de 7,3 pour H.H. Chung
et al. (11). Cette notion d’hypermétabolisme pronos-
tique est également retrouvée pour la captation des
ganglions para-aortiques (10, 12). La diminution du
SUV en postchimiothérapie précoce (3 mois) est
également un facteur de bon pronostic (13).
Figure 3. Cancer de l’ovairel : TEP-TDM au
18
FDG avec, de haut en bas, les images d’émis-
sion du 18FDG (de gauche à droite : coupe transverse, sagittale et frontale) et de la TDM.
À gauche, verticalement, une représentation du corps entier, dite en MIP” ; tout en bas du
pelvis, on observe une plage hypermétabolique intense représentant l’élimination vésicale
physiologique du traceur, et, plus haut, de manière bilatérale, les cavités pyélocalicielles
et les uretères. Posé sur le diaphragme gauche, le cœur, dont la fixation myocardique
est également physiologique. Sur les coupes transverses, passant au-dessus de la vessie,
l’hypermétabolisme intense correspond à de la carcinose péritonéale ; celle-ci est diffuse
et recouvre la capsule splénique et la capsule de Glisson (visible sur le MIP).
La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 5 - mai 2011 | 347
MISE AU POINT
Dans les cancers de l’ovaire (figure 3)
Les publications portant sur TEP et cancer de l’ovaire
retrouvent des données similaires. Dans la stadifi-
cation, les petites lésions ou les micrométastases
ganglionnaires peuvent être manquées et, bien que
les performances soient globalement bonnes, la TEP
ne peut faire éviter la laparoscopie (14). L’addition
de la TEP au bilan conventionnel modifie la stra-
tégie thérapeutique chez environ 20 à 40 % des
patientes (15-17). Les atteintes mésentériques ou
épiploïques étendues, la présence d’une carcinose
péritonéale multifocale ou d’une extension supra-
diaphragmatique sont des facteurs pronostiques
péjoratifs (18). Dans la prédiction de la réponse à la
chimiothérapie néo-adjuvante, une diminution de
plus de 20 % du SUV lors de la première cure (19),
de plus de 55 % à 65 % à la troisième cure (19, 20) 
ou un SUV normalisé ou inférieur à 3 (21) sont des
prédicteurs pronostiques puissants. Dans le suivi et
en cas d’augmentation du CA125 (22) et même dans
les valeurs basses de CA125 (23), la TEP modifie la
stratégie thérapeutique.
Conclusion
La TEP au
18
FDG est une technique arrivée à maturité.
Si l’on veut bien se rappeler qu’il s’agit d’une imagerie
macroscopique, elle est sensible, pronostique et
précoce dans l’étude des modifications induites par
la thérapeutique, mais ne se substitue ni à l’histo-
logie ni à la technique du ganglion sentinelle. La TEP
voit son éventail de possibilités s’élargir par l’arrivée
de nouveaux traceurs, que l’on espère plus spéci-
fiques dans la stadification pour certains, et qui, pour
d’autres, permettront un monitorage encore plus
étroit du pronostic et de l’évaluation de l’efficacité
thérapeutique (apoptose et chimiothérapie, hypoxie
et radiorésistance, récepteurs aux estrogènes et
hormonothérapie…).
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Références bibliographiques
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