Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 7 - septembre 2011
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Correspondances en Métabolismes Hormones Diabè
et Nutrition - Vol. XV - n°
7 - septem
re 201
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GRIO
Coordonné par :
T. Thomas (Saint-Étienne)
La régulation du phosphore,
une histoire de plus en plus complexe
M. Cohen-Solal*
L
e phosphate est un nutriment indis-
pensable au contrôle biologique de
l’organisme, car nécessaire à la plupart
des fonctions cellulaires. Le maintien d’une
phosphatémie dans une fourchette normale
est l’une des conditions à une minéralisation
osseuse suffisante. En outre, la dérégulation
du métabolisme phosphaté augmente la
morbidité des patients du fait de ses consé-
quences à la fois osseuses, vasculaires et
rénales.
Une coordination
de plusieurs organes
L’homéostasie du phosphate est assurée
grâce à un équilibre impliquant la coordi-
nation de plusieurs organes : le tissu osseux, le
rein, les glandes parathyroïdes et l’intestin (1).
Les apports phosphatés ne sont pas limités
dans l’alimentation. Le remodelage osseux
permettant un influx/ efflux de 200 mg/ j et
l’élimination digestive étant de 900 mg/ j envi-
ron, l’équilibre est assuré principalement par
le rein, qui élimine les apports en excès.
On savait que la parathormone (PTH) et la
PTHrp contribuaient à cet équilibre par le
biais de l’absorption intestinale, de l’excrétion
rénale et du remodelage osseux. Cependant,
la régulation du phosphate était encore mal
connue jusqu’à récemment. Par exemple, la
phosphatémie ne modifie pas la sécrétion
de PTH. La découverte des phosphatonines
et des transporteurs de phosphate sodium-
dépendants a apporté une vision nouvelle
de la régulation du phosphate (2). C’est grâce
à des pathologies génétiques rares et aux
modèles animaux qu’ont pu être mis en évi-
dence ces éléments régulateurs : le FGF23,
FGF/Klotho, le récepteur NPT2c, DMP1 et
MEPE (figure). Plusieurs d’entre eux ont été
identifiés comme responsables d’une patho-
logie spécifique par le biais de mutations, par
exemple PHEX pour le rachitisme vitamino-
résistant lié à l’X, le FGF23 pour le rachitisme
autosomique dominant, le DMP1 pour l’hy-
pophosphatémie autosomique récessive, la
GNAS1 pour la maladie de McCune-Albright.
FGF23 et NPT2c
Le premier d’entre eux, le FGF23, illustre
parfaitement l’interaction des 3 tissus
os- parathyroïde-rein dans la régulation
phosphocalcique. C’est une hormone hyper-
phosphaturiante stimulant l’excrétion urinaire
de phosphate. La délétion du gène du FGF23
chez la souris se traduit par des troubles de
la croissance et de la minéralisation ainsi que
par la présence de calcifications artérielles.
À l’inverse, l’hyper expression du gène du
FGF23 dans le tissu osseux induit chez la
souris une hypophosphatémie, une hyper-
phosphaturie et des anomalies osseuses de
type ostéopénique (3). Le FGF23, synthétisé
par les ostéocytes, se lie au niveau du rein à
un récepteur du FGF par l’intermédiaire de
Klotho, une protéine membranaire impliquée
dans l’apoptose et, d’une manière générale,
dans le vieillissement, pour induire diffé-
rents signaux cellulaires comme PI3 kinase
et Erk1/2. À travers ces voies, le FGF23 inhibe
l’activité 1α-hydroxylase et active les cotrans-
porteurs rénaux NPT2a et NPT2c, réduisant
à la fois l’absorption intestinale et la réab-
sorption rénale du phosphate, et induisant
ainsi une perte phosphatée. La production de
FGF23 est régulée de manière complexe, sti-
mulée par la 1,25(OH)2 D3 et inhibée par plu-
sieurs facteurs tels que PHEX ou DMP1. Cette
hormone est particulièrement importante
au cours de l’insuffisance rénale, et son taux
s’élève avec le déclin de la fonction rénale. En
* Service de rhumatologie, hôpital Lariboisière,
Paris ; université Diderot Paris-VII.
'JHVSF Régulation de la phosphatémie (2).
0T 3FJO
PHEX
Inhibition
Inhibition
Inhibition
Inhibition
Sécrétion Klotho
FGFR1(IIIc)
SLC34A1
SLC34A3
Stimulation
FGF23
SPC
CYP27B1
GALNT3
Clivage O-glycosylation
Binding
DMP1