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tisme mineur ou à l‘emplacement d’un site chirurgical
récent.4,8 Des lésions de PG ont ainsi été décrites après
une chirurgie cardiaque,9après pose de pacemaker,10 après
hystérectomie,11 césarienne,12 plastie mammaire13,14 ou
cholécystectomie.15 L’aggravation des lésions après une
chirurgie de débridement est illustrée par les deux vignet-
tes cliniques et s’apparente également à ce phénomène.
Exceptionnellement, le PG peut s’étendre à des tissus ex-
tracutanés, avec des infiltrats pulmonaires ou des atteintes
articulaires simulant de véritables arthrites septiques.3,8
La présence concomitante d’une arthrite aseptique avec un
PG et des lésions d’acné est résumée dans le syndrome
PAPA
(Pyogenic sterile arthritis, Pyoderma gangrenosum and acne
syndrome)
.16 Plusieurs variantes de PG ont été décrites, soit
en raison de leurs localisations particulières, soit de leur
évolutivité.1,3,17,18 Ainsi, certaines lésions de
Pyoderma
ap-
paraissent typiquement au niveau des orifices de stomies,
chez des patients souffrant d’une maladie de Crohn ou
d’une recto-colite ulcéro-hémorragique.7,8,19
INVESTIGATIONS
Le PG reste à l’heureactuelle un diagnostic clinique
d’exclusion. L’aspect histologique se révèle le plus souvent
aspécifique, mais permet d’écarter d’autres causes poten-
tielles.7,18 L’expérience montre néanmoins que si le diag-
nostic de PG est souvent évoqué (trop) tard dans l’évolu-
tion de ces malades, de nombreux ulcères attribués au PG
ont en fait d’autres étiologies (vasculaires, tumorales, in-
fectieuses, etc.).20 Dans sa forme précoce, le PG se carac-
térise généralement par un infiltrat inflammatoire centré
sur le derme, à prédominance lymphocytaire, avec une
zone centrale de nécrose et des images de vasculites sur
son pourtour. Les lésions évoluent progressivement vers
un infiltrat riche en polymorphonucléaires, s’associant alors
àdes ulcérations de l’épiderme, des thrombus localisés,
ainsi que des micro-abcès. Ces images peuvent parfois
mimer un tableau de cellulite ou d’abcès d’origine infec-
tieuse.18 Un bilan sanguin hématologique et immunologi-
que, une biopsie cutanée avec des cultures microbiologi-
ques et des recherches éventuelles par PCR sont recom-
mandés. Le bilan complémentaire du PG inclut également la
recherche des pathologies associées, en particulier diges-
tives, rhumatologiques et hématologiques.8
PRISE EN CHARGE ET TRAITEMENT
Il n’existe à l’heure actuelle aucune thérapie spécifique du
PG. En l’absence d’étude clinique, la prise en charge n’est
pas standardisée et repose le plus souvent sur une ap-
proche empirique combinée, associant chirurgie a minima,
soins locaux et corticothérapie systémique.21,22 L’identifi-
cation et la prise en charge précoce des lésions permettent
de limiter les séquelles fonctionnelles et esthétiques.5,23
Toute lésion ulcérée inhabituelle, ou d’évolution défavo-
rable, devrait ainsi attirer l’attention et suggérer la possi-
bilité d’un PG, en particulier lorsque le contexte implique
une pathologie inflammatoire ou hématologique, ou lors-
qu’une prise en charge chirurgicale répétée semble aggraver
le phénomène. En raison de ce phénomène de pathergie,
les débridements chirurgicaux devraient être limités au
strict minimum et la décision de pratiquer une greffe cuta-
née devrait tenir compte du risque d’apparition de nou-
velles lésions au site de prélèvement.5,17
La premièreligne du traitement s’appuie sur une corti-
cothérapie systémique (prednisone 1-3 mg/k/j), associée
éventuellement à un schéma adjuvant de ciclosporine.22
Un traitement d’entretien à faible dose doit parfois être
poursuivi durant plusieurs mois, après la régression des
lésions.18 L’azathioprine, le tacrolimus, le mycophénolate,
la thalidomide et la dapsone constituent des alternatives
possibles, décrites dans des séries de cas.4,22,24 Plusieurs
travaux ont également confirmé l’efficacité des anti-TNF,
tels que l’étanercept ou l’infliximab, en particulier chez des
patients présentant des pathologies inflammatoires diges-
tives.25,26 L’emploi des immunoglobulines, de la plasma-
phérèse ou d’une oxygénothérapie hyperbare reste anec-
dotique.22 Dans certaines formes limitées ou débutantes,
un traitement local topique ou intralésionnel de stéroïdes,
d’immunomodulateurs (ciclosporine, tacrolimus) ou d’anti-
inflammatoires peut se révéler efficace.8,22 Les soins locaux
visent principalement à éviter toute surinfection et s’ap-
puient actuellement sur des systèmes d’aspiration conti-
nue de type VAC
(vacuum-assisted closure)
.21 Enfin, la prise
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Tableau 1. Pathologies associées au Pyoderma
gangrenosum1-5
Association forte (décrite fréquemment)
Maladies inflammatoires de l’intestin
• Rectocolite ulcéro-hémorragique
• Maladie de Crohn
Pathologies rhumatologiques
• Arthrite rhumatoïde séropositive
• Monoarthrite séronégative
•Spondylarthropathies
• Arthrite secondaire (psoriasis, maladie inflammatoire de
l’intestin)
Pathologies hématologiques
• Leucémie myéloïde aiguë ou chronique
• Gammapathie monoclonale de type IgA
•Polycythemia vera
• Hémoglobinurie paroxystique nocturne
•Macroglobulinémie
•Lymphomes
Association faible (décrite occasionnellement)
Anomalie de l’immunité humorale ou cellulaire
• Défauts du complément
•Hypogammaglobulinémie
• VIH, hépatite C
• Traitement par G-CSF ou interférons
Tumeurs solides
• Côlon
• Vessie, prostate
• Sein, ovaire
•Broncho-pulmonaire
Divers
•Vasculites (Wegener,Takayasu, cryoglobulines, etc.)
• Pathologies thyroïdiennes