35
Revue
de presse
Le Courrier de la Transplantation - Volume II - n o1 - janvier-février-mars 2002
Les cardiomyocytes
capables
de se régénérer
O
n croyait que les cellules contrac-
tiles du cœur ainsi que les vaisseaux
coronaires étaient incapables de se régé-
nérer. Des suspicions sur la régénération
cardiaque existaient déjà, car des malades
porteurs de cardiomyopathies sévères
pouvaient évoluer vers une amélioration
fonctionnelle et hémodynamique, leur
permettant ainsi de sortir des listes d’at-
tente pour une transplantation cardiaque.
Une étude immunopathologique a été réa-
lisée au New York Medical College, por-
tant sur 8 malades ayant bénéficié d’une
transplantation cardiaque et décédés entre
4 et 552 jours après la greffe. Les rece-
veurs (tous des hommes) avaient reçu des
greffons provenant de femmes. Des
recherches du chromosome Y ont été réa-
lisées sur des échantillons des oreillettes
et des ventricules du cœur greffé, ainsi que
sur les oreillettes de celui du receveur. Les
résultats ont été surprenants, car des cel-
lules portant le chromosome Y ont été
trouvées dans le myocarde ainsi que dans
la paroi des artères coronaires et capil-
laires de tous les cœurs greffés. Les cel-
lules des receveurs représentaient 10 à
20 % de l’ensemble, tant dans le muscle
cardiaque lui-même que dans les arté-
rioles et capillaires environnants. Grâce à
des marqueurs, il a été possible de démon-
trer qu’il s’agissait de précurseurs de
cellules cardiaques contractiles (myo-
cytes) ou d’angioblastes.
Des questions demeurent quant à l’ori-
gine des cellules : ces cellules souches se
développent-elles localement à partir de
résidus du cœur du malade, arrivent-elles
par le sang à partir de la moelle osseuse,
ou font-elles partie du contingent des
cellules hématopoïétiques circulantes ?
Le fameux dogme selon lequel les cel-
lules contractiles du cœur ne peuvent
se régénérer est sur le point de tomber,
car les cellules souches de la personne
greffée peuvent coloniser le nouveau
cœur, se mêlant à celles du donneur et
constituant ainsi une “chimère”.
J.C. Chachques
Quaini F, Urbanek K, Beltrami AP et al. Chimerism
of the transplanted heart. N Engl J Med 2002 ; 346 :
5-15.
ICOS-B7RP-1 :
une nouvelle cible
pour l’induction
de tolérance
L’
activation complète des lympho-
cytes T nécessite l’intervention de
plusieurs signaux de nature différente. Le
signal 1 est donné par la reconnaissance
de l’antigène présenté par les molécules
d’histocompatibilité au récepteur T. Le
signal 2, appelé signal de costimulation,
vient de la liaison de ligands et de leurs
récepteurs situés sur la cellule présentant
l’antigène et sur le lymphocyte T. Enfin,
le signal 3 est un signal de prolifération
qui vient de la liaison des cytokines à
leurs récepteurs. Le blocage des signaux
de costimulation a un intérêt tout parti-
culier en transplantation, car il pourrait
permettre l’obtention d’un état de tolé-
rance immunitaire. Les couples ligand-
récepteurs de costimulation les plus étu-
diés sont B7-CD28 et CD40-CD154.
Leur blocage permet en effet de prolon-
ger la survie des greffons dans certains
modèles animaux. Cependant, le blocage
de B7-CD28 et de CD40-CD154 ne
permet pas toujours d’induire un état de
tolérance complet, suggérant que d’autres
ligands sont impliqués dans la costimu-
lation. Cela semble être le cas pour
le couple de ligand-récepteur ICOS-
B7RP-1, qui paraît avoir un rôle déter-
minant dans la réaction d’allogreffe, et
dont le blocage pourrait permettre d’in-
duire un état de tolérance immunitaire.
La molécule de coactivation ICOS est
présente à la surface des lymphocytes T
activés et se lie à B7RP-1, localisé sur les
cellules présentant l’antigène. Dans une
étude récente, Özkaynak et al. ont mon-
tré que l’expression d’ICOS à la surface
des lymphocytes augmente au cours du
rejet de cœur chez la souris. De plus, le
blocage de la liaison d’ICOS à son ligand
par un anticorps monoclonal ou par la
molécule de fusion ICOS-Ig prolonge de
façon significative la survie du greffon
cardiaque. Ce traitement diminue non
seulement l’infiltration du greffon par les
cellules CD4 et CD8, les macrophages et
les cellules exprimant le récepteur de
l’IL-2 de l’hôte, mais aussi la sécrétion
de cytokines et de chémokines impli-
quées dans la réaction de rejet. Par
ailleurs, le traitement des souris par l’as-
sociation d’un anticorps anti-CD154 et
de l’anticorps anti-ICOS permet la sur-
vie prolongée d’une allogreffe de cœur
sans survenue de rejet chronique, contrai-
rement au traitement par anti-CD154, où
un rejet chronique se développe 30 jours
après la transplantation. Enfin, un traite-
ment de quelques jours par l’association
d’anticorps anti-ICOS et ciclosporine
permet la survie prolongée de greffons
cardiaques à plus de 100 jours sans
survenue de lésions de rejet chronique.
Cette étude montre que le blocage
simultané de plusieurs molécules de
costimulation permet d’obtenir la survie
prolongée d’allogreffe cardiaque sans
rejet chronique chez la souris, et fait
du couple ICOS-B7RP-1 une nouvelle
cible pour l’induction de tolérance
immunitaire.
E. Morelon
Özkaynak E. et al. Importance of ICOS-B7RP-1
costimulation in acute and chronic allograft rejec-
tion. Nature Immunol 2001 ; 2, 7 : 591-6.
Profil d’absorption
de la ciclosporine
en microémulsion (Néoral®)
durant les deux premières
semaines après transplantation
rénale
L
es caractéristiques pharmacologiques
des traitements immunosuppresseurs
sont des données indispensables pour le
suivi et l’adaptation de ces traitements,
en particulier pour les médicaments ayant
un faible index thérapeutique (rapport
dose efficace/dose toxique), comme la
ciclosporine. L’étalon pour les mesures
pharmacocinétiques est l’aire sous la
courbe (ASC), mais celle-ci est de réali-
sation pratique difficile en raison des
contraintes imposées aux patients. D’un
autre côté, les concentrations résiduelles
ne reflètent qu’imparfaitement l’ASC.
Enfin, il existe de forts arguments mon-
trant que les concentrations obtenues
durant la période précoce après la trans-
plantation sont importantes pour le deve-
nir clinique.
Les auteurs rapportent l’expérience de six
centres de transplantation canadiens.
Dans ces centres, une pharmacocinétique
complète (8 points) a été réalisée chez
16 patients. Les temps des prélèvements
étaient C0 (avant la prise de médica-
ment), puis 1, 2, 2,5, 3, 4, 6, 8 et 12 heures
après la prise. Cette mesure a été réalisée
à J3, J7 et J14 après la transplantation.
Il n’existe qu’une corrélation faible (r2à
0,5) entre les C0 et l’ASC entre 0 et 12
heures (ASC[0-12]). En revanche, une
AUC abrégée entre 0 et 4 heures après la
prise ([ASC[0-4]) est bien corrélée à
l’ASC[0-12] (coefficients de corrélation
supérieurs à 0,9 à J7 et J14).
Aucune mesure isolée ne permet d’obte-
nir un coefficient supérieur à 0,9. Cepen-
dant, le C2 permet une corrélation
correcte avec l’ASC[0-12] avec un coef-
ficient supérieur à 0,80. Les corrélations
cliniques montrent qu’une ASC[0-4] supé-
rieure à 4 500 µg.h.l-1 ou un C2 supérieur
à 1 500 µgl-1 sont associés à une diminu-
tion significative de survenue d’un épi-
sode de rejet aigu (pour le C2 à J7, sensi-
bilité 100 %, spécificité 75 %, valeur
prédictive positive 58 % et valeur prédic-
tive négative 100 %). Il n’existe pas de
corrélation avec l’exposition à la ciclo-
sporine et le risque de néphrotoxicité.
Ces résultats montrent que le C0 n’est
qu’un piètre marqueur pharmacocinétique
et clinique. L’utilisation d’un marqueur
unique tel que le C2 en période précoce
après la transplantation améliore nettement
le rôle des données pharmacocinétiques
pour l’optimisation des résultats cliniques
après transplantation rénale.
E. Thervet
Canadian Neoral®Renal Transplantation Study
Group. Absorption profiling of cyclosporine micro-
emulsion (Neoral®) during the first 2 weeks after renal
transplantation. Transplantation 2001 ; 72 : 1024-32.
Régression complète
d’un syndrome
lymphoprolifératif
post-transplantation
en utilisant des cellules T
cytotoxiques spécifiques
du virus Epstein-Barr
partiellement HLA-compatibles
L
es lymphomes après transplantation
d’organe sont des complications rares
mais gravissimes qui peuvent survenir
précocement après la transplantation. Ces
lymphomes précoces sont souvent asso-
ciés à une réplication du virus Epstein-
Barr (EBV) qui infecte plus de 90 % de
la population adulte. Les traitements de
ces syndromes sont variables. Les trai-
tements curatifs comprennent une baisse,
voire un arrêt si possible de l’immuno-
suppression, une chimiothérapie et/ou
une radiothérapie ou, plus récemment,
l’utilisation d’anticorps monoclonaux
anti-lymphocytes B.
L’utilisation d’une thérapie cellulaire
comportant des lymphocytes T cyto-
toxiques du receveur ou du donneur a
été rapportée. En ce qui concerne les
lymphocytes du donneur, ces essais se
heurtent à l’impossibilité d’obtenir ces
cellules en cas de donneur cadavérique.
D’un autre côté, pour le receveur, la lym-
phopénie fréquente observée après trans-
plantation rend aléatoire le recueil d’un
nombre suffisant de lymphocytes après la
greffe.
Les auteurs rapportent l’observation
d’un enfant âgé de 9 mois ayant reçu une
transplantation intestinale et hépatique
combinée en raison d’une maladie de
Hirschsprung. Il développe 9 mois après la
transplantation un syndrome lymphoproli-
fératif ganglionnaire. Les marqueurs pour
les ARN du virus EBV (EBER) sont posi-
tifs par hybridation in situ. À partir d’une
banque de lignées de cellules T cyto-
toxiques (CTL) EBV spécifiques obtenues
à partir de donneurs de sang, les auteurs ont
choisi la lignée la plus proche du receveur
en termes de compatibilité HLA. Après per-
fusion de ces cellules (106/kg), ils notent,
au bout d’une semaine, une régression du
syndrome tumoral associée à la disparition
de la réplication virale dans le sang péri-
phérique. Cette perfusion ne s’est accom-
pagnée d’aucune toxicité décelable.
Ce premier résultat est encourageant en
ce qui concerne l’utilisation d’une théra-
pie cellulaire pour le traitement des syn-
dromes lymphoprolifératifs EBV induits
après transplantation, en évitant l’écueil
du recueil difficile de la population cel-
lulaire chez le donneur ou le receveur.
E. Thervet
Haque T et al. Complete regression of posttransplant
lymphoproliferative disease using partially HLA-
matched Epstein-Barr virus-specific cytotoxic T cells.
Transplantation 2001 ; 72 : 1399-402.
Le GM-CSF et l’IL-2
induisent une immunité
cellulaire spécifique
et permettent
une protection contre
les désordres lymphoprolifératifs
du virus Epstein-Barr
L
es lymphomes observés à la période
précoce après transplantation d’or-
gane ou après greffe de moelle sont sou-
vent induits par le virus Epstein-Barr
(EBV). La compréhension des méca-
nismes de surveillance immunologique
et de contrôle de l’infection à EBV est
donc importante pour mieux prendre en
charge cette complication.
Les auteurs utilisent un modèle de tumeur
humaine induite chez la souris. Des sou-
ris présentant un déficit immunitaire com-
biné sévère (souris SCID) ont été greffées
avec des lymphocytes humains provenant
de donneurs EBV séropositifs. Les souris
ont alors développé un syndrome lym-
phoprolifératif de cellules humaines B qui
ressemble à un syndrome prolifératif post-
transplantation (PTLD). Grâce à ce
modèle, les auteurs ont pu disséquer les
intervenants de la réponse immunitaire et
le rôle des différentes sous-populations.
L’administration d’IL-2 à faible dose pré-
vient la survenue d’un PTLD chez 100 %
des souris. Après déplétion des cellules
natural killer (NK), l’injection d’IL-2 ou
de GM-CSF ne prévient plus le PTLD.
Le Courrier de la Transplantation - Volume II - n o1 - janvier-février-mars 2002
36
Revue
de presse
Le Courrier de la Transplantation - Volume II - n o1 - janvier-février-mars 2002
37
Revue
de presse
NOUVELLES DE L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
Communiqués des conférences de presse, symposiums, manifestations organisés par l’industrie pharmaceutique
Nouvel engagement
de Roche-Pharma
Roche-Pharma a annoncé, le 6 décembre
2001, qu’elle allait renouveler son sou-
tien à la Roche Organ Transplantation
Research Foundation (ROTRF) pour trois
ans, soit jusqu’en 2006. La dotation
annuelle de cinq millions de francs
suisses à cette fondation indépendante de
recherche avait été instituée en 1998 pour
une période initiale de cinq ans. Cette
extension témoigne d’un engagement à
long terme en matière de recherche,
visant à améliorer la vie quotidienne des
milliers de patients bénéficiant chaque
année d’une greffe d’organe.
La ROTRF est un organisme autonome à
but non lucratif ayant pour vocation de
soutenir directement des projets de
recherche innovants en attirant des cher-
cheurs aux idées scientifiques novatrices,
dans le but de pourvoir à des besoins
médicaux non satisfaits dans le domaine
des greffes d’organes solides.
Le Pr P. Halloran, président du conseil
d’administration de la fondation, a
déclaré : “Nous sommes profondément
reconnaissants à Roche d’avoir réaffirmé
son engagement en faveur de la fonda-
tion. Grâce à cette nouvelle dotation, la
ROTRF va pouvoir continuer à financer
et promouvoir des travaux de recherche
dans de nombreux pays, pour le plus
grand bénéfice des patients greffés. De
plus, les connaissances générées par
cette recherche spécifique auront des
retombées favorables sur les travaux
menés dans d’autres disciplines”.
W.M. Burns, chef de la division Pharma
de Roche, a ajouté : “Roche a été très
impressionnée par l’envergure des études
financées par la ROTRF, et sa décision
de prolonger son soutien à la fondation
témoigne de son engagement en faveur
des patients greffés. Nous sommes fiers
de notre association avec cette remar-
quable fondation”.
À ce jour, Nantes (trois fois) et Bordeaux
(une fois) ont déjà fait partie des lauréats. !
Agenda-congrès
!American Transplant Congress 2002
du 26 avril au 1er mai 2002, Washington,
États-Unis
Renseignements :Meeting office, 17000,
Commerce Parkway, Suite C, Mt Laurel,
NJ, 08054 États-Unis
Tél. : 856 439 0880
Fax:856 439 1972
!XIXeCongrès de “The Transplanta-
tion Society”, du 25 au 30 août 2002,
Miami, États-Unis
Renseignements : Central Business
Office, The Transplantation Society, 205,
Viger Avenue West, suite 201, Montreal,
QC, Canada H2Z 1G2
Tél. : 514 874 1998
Fax:514 874 1580
http://www.TxMiami2002.com
!Congrès de la Société francophone
de transplantation, du 24 au 27 octobre
2002, Montréal, Canada
Renseignements :
http://www.SocfrancoTx2002.com
L’association de ces deux cytokines
retarde le développement du PTLD
même en cas de déplétion des cellules
NK. En déplétant les différentes sous-
populations cellulaires, les auteurs mon-
trent que les cellules NK, les cellules T
CD8+ et les monocytes interviennent
dans l’action protectrice de l’IL-2 et du
GM-CSF. Le traitement par IL-2 et GM-
CSF entraîne l’expansion d’une popula-
tion de lymphocytes CD3+ CD8+ qui se
fixent spécifiquement sur des tétramères
HLA complexés avec des peptides déri-
vés de l’EBV.
Cette étude montre que les cellules
CD8+, ce qui était déjà connu, mais aussi
les cellules NK sont nécessaires à l’im-
munosurveillance des infections à EBV.
De plus, l’efficacité de la combinaison
IL-2 à faible dose et GM-CSF ouvre la
voie à de nouvelles avancées thérapeu-
tiques pour cette complication grave sur-
venant après transplantation.
E. Thervet
Baiocchi RA et al. GM-CSF and IL-2 induce speci-
fic cellular immunity and provide protection against
Epstein-Barr virus lymphoproliferative disorder.
J Clin Invest 2001; 108 : 887-94.
1 / 3 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !