
Le Courrier de la Transplantation - Vol. XII - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2012 189
il arrive que la transplantation soit réalisée sans que
la possibilité d’un déficit en APRT ait été écartée au
préalable. Le diagnostic doit alors impérativement être
évoqué devant la présence de cristaux sur une biopsie
du greffon rénal, même s’ils ne présentent pas de prime
abord l’aspect caractéristique en croix de Malte. Dans
une telle situation, l’étude soigneuse des cristaux en
microscopie à polarisation doit impérativement être
complétée par la spectrophotométrie infrarouge, qui
précisera la nature des cristaux. La recherche de cristaux
de DHA dans l’urine permet également de faire le dia-
gnostic dès les premiers jours après la greffe. Une fois
le diagnostic posé, une enquête familiale doit être réa-
lisée afin de rechercher d’autres sujets atteints, parfois
asymptomatiques (3, 6).
Traitement du déficit en APRT
Le traitement du déficit en APRT repose sur l’allopurinol,
qui inhibe la formation de la DHA en bloquant la xan-
thine oxydase, et sur des apports hydriques élevés (au
moins 2,5 l/j chez l’adulte) associés à un régime limité
en purines. L’alcalinisation des urines est inefficace et
n’est pas recommandée. La dose habituellement effi-
cace d’allopurinol est de 200 à 300 mg/j chez l’adulte
et de 5 à 10 mg/kg/j chez l’enfant. La posologie doit
être adaptée en cas d’insuffisance rénale. Ce traitement
permet habituellement d’obtenir une forte diminution,
voire la disparition des cristaux dans l’urine ainsi que
l’amélioration ou la stabilisation de la fonction rénale (3).
La surveillance de la cristallurie permet de s’assurer
de l’efficacité du traitement, et la persistance d’une
cristallurie abondante doit faire suspecter un défaut
d’observance ou une dose d’allopurinol insuffisante.
Bien que le nombre de patients suivis sur le long terme
soit limité, le traitement semble aussi efficace chez le
transplanté rénal et permet de prévenir la récidive de
la néphropathie cristalline sur le greffon. La bonne tolé-
rance et l’efficacité de l’allopurinol à long terme ont
été montrées chez l’enfant (15). En cas d’intolérance
à l’allopurinol, le fébuxostat, un autre inhibiteur de la
xanthine oxydase, pourrait représenter une alternative
thérapeutique, même si son utilisation n’a pas été rap-
portée dans le contexte du déficit en APRT.
Conclusion
Le déficit en APRT représente un cas de figure unique,
où une maladie évoluant fréquemment vers l’insuffi-
sance rénale terminale peut être traitée au moyen d’un
seul comprimé par jour. En effet, l’allopurinol permet
de bloquer la formation des cristaux de DHA à l’origine
des lithiases et de la néphropathie. Malheureusement,
le déficit en APRT est souvent diagnostiqué tardivement
et il arrive même que la maladie ne soit pas reconnue
avant le stade d’insuffisance rénale terminale. Compte
tenu du risque élevé de récidive de la néphropathie cris-
talline après la transplantation, il est essentiel de penser
à la possibilité d’un déficit en APRT chez les patients en
attente de greffe, lorsque la nature de la néphropathie
initiale est incertaine et qu’il y a des antécédents lithia-
siques, même peu nombreux. Tout retard diagnostique et
thérapeutique après la transplantation risque d’entraîner
la perte irrémédiable de la fonction du greffon rénal. ■
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Références bibliographiques
Récidive de la néphropathie cristalline