M I S E ... Points forts ... ❐ Plusieurs données de la littérature prêtent aux bêtabloquants une protection cardiovasculaire moindre que celle des autres classes antihypertensives. ❐ L’efficacité des bêtabloquants n’est pas remise en cause dans les autres indications, notamment dans le postinfarctus et dans l’insuffisance cardiaque. ❐ Il n’y a pas à proprement parler d’effets délétères des bêtabloquants chez l’hypertendu, ni cardiovasculaires, ni autres. ❐ L’infériorité des bêtabloquants en matière de prévention cardiovasculaire concerne essentiellement, si ce n’est exclusivement, l’aténolol. Étant donné l’absence d’indication de l’aténolol dans le postinfarctus et dans l’insuffisance cardiaque, peut se poser la question de l’intérêt de poursuivre les prescriptions d’aténolol. ❐ Certains patients, notamment les plus jeunes, n’ont peut-être pas de prévention cardiovasculaire moindre avec les bêtabloquants qu’avec les autres drogues anti­hypertensives. ❐ Les nouveaux bêtabloquants semblent avoir des propriétés physiopathologiques qui feraient que leur propension en matière de prévention cardiovasculaire serait supérieure à celle de l’aténolol. Les essais cliniques sont en cours de réalisation. * Unité hypertension artérielle, prévention et thérapeutique cardiovasculaires, centre de diagnostic et de thérapeutique, Hôtel-Dieu, Paris. 88 A U P O I N T Les bêtabloquants dans l’HTA Betablockers in hypertension ❒ J . Blacher*, N. Maufroy*, T. Kondo*, P. Iaria*, B. Tournier*, M. Safar* Mots-clés : Bêtabloquants – Hyper­ tension – Recommandations – Prévention cardio­vasculaire – Méta-analyse – Hété­ rogénéité de classe. Keywords: Betablockers – Hypertension – Guidelines – Cardiovascular prevention – Meta-analysis – Class heterogeneity. L es bêtabloquants sont parmi les premières drogues utilisées en pathologie cardiovasculaire ; en effet, le propranolol a été prescrit pour la première fois il y a environ un demi-siècle. Décennie après décennie, les indications des bêtabloquants se sont élargies. Tout d’abord antihypertenseurs, les bêtabloquants ont été prescrits dans les troubles du rythme cardiaque, dans le postinfarctus, à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde, dans la migraine, dans l’hypertension portale, en périopératoire d’une chirurgie à risque cardiovasculaire élevé ou encore, plus récemment, dans l’insuffisance cardiaque. Pourtant, ces dernières années, les bêtabloquants sont montrés du doigt ; ils auraient des effets délétères, notamment chez les hypertendus, et ne devraient peut-être plus être prescrits en première intention dans l’hypertension artérielle (HTA). Les données scientifiques sur lesquelles reposent ces affirmations sont-elles robustes ? Ces inquiétudes concernent-elles tous les bêtabloquants ? Potentiellement dans d’autres indications que l’HTA ? En traitement de première intention seulement ou aussi en association ? Nous allons revoir au fil de cet article les données actuelles de la science pour tenter de répondre à ces questions et de déterminer si ces inquiétudes sont fondées. Les indications des bêtabloquants en pathologie cardiovasculaire Les bêtabloquants possèdent plusieurs indications majeures en pathologie cardiovasculaire (1). Ces indications sont sous-tendues par des études leur conférant des niveaux de preuve plus ou moins élevés. Dans le cadre de l’infarctus du myocarde L’utilisation des bêtabloquants à la phase aiguë est sujette à controverse (1) ; néanmoins, dans le postinfarctus, il est tout à fait indiscutable que les bêtabloquants réduisent la mortalité. La réduction relative du risque est de 23 % dans la métaanalyse de Freemantle et al. (2). Il est d’ailleurs intéressant de noter que, dans cette analyse, la mortalité était réduite avec l’acébutolol, le métoprolol, le propranolol et le timolol, mais non avec l’aténolol. Notons aussi que la réduction du risque est tout à fait comparable à celle obtenue par des traitements plus “modernes”, les antiagrégants plaquettaires ou encore les statines. Avant l’infarctus, chez les patients angineux, il y a de nombreuses données dans la littérature montrant que les bêtabloquants réduisent les symptômes de la maladie angineuse ; néanmoins, il n’a pas été démontré que les bêtabloquants sont supérieurs aux autres antiangineux, et il n’a pas été clairement démontré non plus qu’ils réduisent le risque de passer de la maladie angineuse à l’infarctus du myocarde. Dans l’insuffisance cardiaque Les bêtabloquants, après avoir été longuement contre-indiqués dans cette indication, sont devenus l’une des pierres angulaires du traitement de cette redoutable pathologie. Cette indication est la plus récente des bêtabloquants ; elle existe depuis une dizaine d’années. Il est Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. V - n° 3 - juillet-août-septembre 2007