VO CABULAIR E >> T R A N S L AT I O N * Vocabu laire V Par Alain Rey, directeur de la rédaction du Robert, Paris oici un latinisme largement internatio- À la translation des reliques, au Moyen Âge, va nal, dont le sens premier provient du succéder celle des droits et des titres, dans le lan- verbe transferre, qui a donné en français gage juridique. Le XVIIIe siècle “philosophique” transférer. Le latin ferre a beaucoup d’emplois, donne au mot valeur scientifique : la géométrie autour de la valeur de “porter, inclure, avoir en s’en empare, ainsi que la mécanique. Dès lors, ce soi” ; sous la forme latum – comme on voit, ce mouvement dirigé qui emporte avec lui ce qui verbe est très irrégulier –, il a été affecté à une occupait un lieu, et qu’on mène ailleurs, devient série d’emplois, parfois très proches de la “tra- essentiel en linguistique, en informatique. Quant à duction”, qui est elle aussi une trans-duction, du l’activité médico-chirurgicale, lorsqu’elle n’enlève latin ducere (“conduire”). pas, elle “translate”, transfère, à moins qu’à l’instar de la culture des végétaux, elle ne transplante. En anglais, qui l’a pris à l’ancien français, la translation est une traduction : affaire de mots et de Au centre des innombrables déplacements expri- phrases. En français, après le XVIe siècle, il s’agit més en latin par trans, et qu’il a légués au français, d’autre chose, et la translation devient trans- la translation “porte” (ferre-latum) une charge pré- port et transfert (lui aussi du verbe ferre). Que cieuse, pour la placer en des lieux plus propices. l’on porte ou que l’on conduise, c’est toujours Que cela suscite une intense évolution technique, trans (“à travers”) un milieu spatial ou mental. il ne faut pas s’en étonner. * © Le Courrier de la Transplantation 2009;1:5. 50 Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. I - n° 2 - avril-mai-juin 2012