Actualités Les neuropathies paranéoplasiques Pourquoi connaître les

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S. Cartalat-Carel
Les neuropathies
paranéoplasiques
S. Cartalat-Carel*
Pourquoi connaître les
Quand évoquer un syndrome
syndromes paranéoplasiques ? paranéoplasique ?
En dépit de leur rareté (1,5 % des
patients porteurs d’un cancer), les
SNP sont importants à connaître pour
différentes raisons :
- dans au moins la moitié des cas, la
neuropathie apparaît avant le cancer ;
reconnaître la neuropathie paranéoplasique contribue au diagnostic et
donc au traitement plus précoce de la
néoplasie sous-jacente ;
- le traitement du cancer entraîne parfois
une régression du SNP, mais ce n’est
pas la règle ; la mise en rémission
complète du cancer permet une stabilisation neurologique dans 70 % des
cas ;
- chez un patient ayant un cancer, un
SNP peut simuler une atteinte métastatique et réciproquement ;
- le handicap lié au SNP est en général
plus sévère que celui dû au cancer ;
- lorsqu’il s’accompagne d’un SNP, le
pronostic du cancer est généralement
meilleur, surtout s’il s’agit d’un cancer
du poumon à petites cellules.
Plusieurs arguments cliniques en
faveur d'un SNP :
- les manifestations cliniques sont souvent sévères et invalidantes. Une
atteinte discrète et peu gênante relève
a priori d’une autre cause ;
- certaines neuropathies paranéoplasiques, telle la neuronopathie sensitive
subaiguë, sont très caractéristiques ;
toutefois, aucun syndrome n’est réellement spécifique. Un tableau anatomoclinique superposable peut s’observer en l’absence de tout cancer ;
- l’évolution est en général subaiguë
(quelques semaines à quelques mois) ;
- l’étude du LCR montre une hyperprotéinorachie, parfois associée à une
pléiocytose et à une élévation du taux
d’immunoglobulines. L’hypercytose
tend à disparaître au cours de l’évolution ;
Tableau I. Les neuropathies paranéoplasiques.
* Stéphanie Cartalat-Carel est neurologue
dans le service des professeurs Delattre et
Meininger à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière.
Elle travaille plus particulièrement sur les
syndromes neurologiques paranéoplasiques et vient d’achever une thèse sur
l’association polyradiculonévrite chronique
et cancer.
Note : CPCP = carcinome pulmonaire à
petites cellules.
Act. Méd. Int. - Neurologie (3) n° 2, février 2002
Neuropathies
Motrices :
• neuropathie
motrice subaiguë
• neuromyotonie
• syndrome de
Lambert-Eaton
Polyneuropathies
Tumeurs
Lymphomes, CPCP, rein
CPCP, thymome
CPCP
Sensitives :
• neuropathie
sensitive subaiguë
• neuropathie distale
Carcinomes, lymphomes
Sensitivomotrices :
• aiguë (Guillain-Barré)
• à rechute/chronique
Maladie de Hodgkin
Lymphomes (carcinomes)
Autonomiques :
• pandysautonomique
• obstruction digestive
CPCP
CPCP
CPCP
Focales et
Plexopathie
Maladie de Hodgkin
multifocales
Multinévrite
Lymphomes, carcinomes
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L
e terme de syndrome neurologique paranéoplasique
(SNP) désigne un ensemble
de troubles neurologiques
associés à un cancer et dont la
cause est inconnue. Cette définition
élimine les neuropathies par
compression ou infiltration des
nerfs, les neuropathies associées
à une méningite carcinomateuse,
ou les neuropathies d’origine
iatrogène (chimiothérapie, radiothérapie, ou postchirurgicale),
métabolique ou carentielle.
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Tableau II. Les anticorps antineuronaux.
Neuropathies
Tumeurs
Immunologie
Neuropathie sensitive
subaiguë
CPCP
AC anti-Hu
AC anti-CV2
AC anti-Hu
IgM anti-GM1
AC anticanaux calciques
voltage dépendants
Neuropathie motrice
CPCP
lymphome
Syndrome myasthénique
de Lambert-Eaton
CPCP
Polyradiculonévrite
aiguë (GuillainBarré) et chronique
CPCP
Thymome
Lymphopathie
Waldenstrom
Myélome/Castleman
Mélanome
IgM anti-MAG
TNF-α, IL1, IL6
IgM polyclonales anti-GM2
Syndrome CAR
CPCP
AC antirétine2
Neuromyotonie
AC anticanaux
K+
Tableau III. Neuropathie sensitive subaiguë de Denny-Brown (NSSP).
Cancer
Physiopathologie
Clinique
Symptômes associés
EMG
LCR
Évolution
CPCP dans 75 % des cas, découvert plusieurs mois ou
années après les premiers symptômes neurologiques dans
les 2/3 des cas.
Mécanisme auto-immun avec présence d’anticorps anti-Hu
dans le sang et le LCR, dirigés contre le noyau des neurones. Récemment, Molinuevo et al. ont montré que la spécificité des AC anti-Hu dans les NSSP était de 99 % et sa sensibilité de 82 %.
Atteinte de la sensibilé propioceptive au premier plan, mais
toutes les modalités sensitives sont atteintes. Abolition des
ROT.
Syndrome cérébelleux.
Encéphalite lymbique.
Dysautonomie
Atteinte de la corne antérieure.
Atteinte du tronc cérébral.
Potentiels sensitifs diminués ou absents.
Hyperprotéinorachie < 2g/l.
Pléiocytose modérée.
Évolution ascendante des symptômes.
Médiane de survie de 8 à 10 mois.
l'hyperprotéinorachie est plus durable ;
- même si le tableau clinique est dominé
par la neuropathie, il est fréquent d’observer des signes discrets d’atteinte
plus diffuse du système nerveux ; d’où
les termes d’“encéphalomyélite”, en
cas d’atteinte centrale, de “neuromyopathie” en cas d’atteinte périphérique,
ou “d’encéphalomyélonévrite” si
l’atteinte est diffuse.
Comment prendre en charge
une neuropathie paranéoplasique ?
L’évolution est en règle sévère, en
quelques semaines ou mois, associant
une aggravation des troubles sensitifs,
responsables d’une ataxie majeure, et
une atteinte plus diffuse du névraxe.
La médiane de survie est de 8 à 10 mois.
Le décès est le plus souvent de cause
neurologique secondaire à l’état
grabataire ou par arrêt cardiorespiratoire
d’origine dysautonomique.
La tumeur est généralement de petite
taille, sans métastase, et de progression lente. Si elle n’est pas connue, sa
découverte se fait généralement dans
les deux ans, avec un maximum de
quatre ans.
Dans une étude récente, seule une
réponse tumorale complète semble
permettre une stabilisation du tableau
neurologique dans 70 % des cas.
L’utilisation d’immunosuppresseurs
ou d’immunomodulateurs n’a pas fait
la preuve de son efficacité.
Références
• Antoine JC, Honnorat J. Les syndromes
neurologiques paranéoplasiques affectant
le système nerveux périphériques XIIes
Journées francophones d’électromyographie.
Genève, 2000.
• Croft PB, Wilkinson M. The incidence of
carcinomatous neuromyopathy in patients
with various types of carcinoma. Brain
1965 ; 88 : 427-34.
• Keime-Guibert F, Graus F, Broet P et al.
Clinical outcome of patients with anti-Hu
associated encephalomyelitis after treatment
of the tumor. Neurology 1999 ; 53 : 1719-23.
• Molinuevo JL, Grauss F, Serrano C et al.
Utility of anti-Hu antibodies in the diagnosis
of paraneoplastic subacute sensory neuronopathy. Ann Neurol 1998 ; 44 : 976-80.
• Posner JB. Neurologic Complications of
Cancer. Monograph : FA. Philadelphia :
Davis Company, 1995.
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