
Les conditions dans lesquelles ces activités apparaissent, et les contraintes sous lesquelles elles
sont exercées, leur confèrent certaines caractéristiques. « Elles sont informelles en ce sens que la
plupart ne sont ni consignées ni enregistrées dans les statistiques officielles, et qu’elles s’opèrent
sur une très petite échelle et avec un faible niveau d’organisation. La majorité d’entre elles
impliquent un très faible niveau de capital, de productivité et de revenu. Elles tendent à avoir peu
ou pas d’accès aux marchés organisés, aux institutions de crédit, à la technologie moderne, à
l’éducation formelle et aux outils de formation, et à nombre de services et aménagements
publics » (R. Hussmanns, 1997, 10). L’activité ou les activités informelles prennent de plus en
plus de l’ampleur, elles font partie de l’environnement économique et social de l’Algérie. Le lien
est étroit entre pauvreté et informel, chômage et informel, fraude et informel, contrôle de l’Etat
et informel, rareté, spéculation et informel. Les chiffres sur le secteur informel dans toutes ses
facettes ne sont pas disponibles, de par notre observation et les informations fournies par les
médias en Algérie, le secteur informel prend de l’ampleur à fur et à mesure que l’économie
évolue, il paralyse le secteur formel, voire l’économie toute entière. Qu’est ce qui explique la
tendance des acteurs économiques à l’informel ?
On retrouve le phénomène dans les cités et les campus universitaires (coiffure, couture, saisie de
texte, commerce cigarettes et tabacs à chiquer, et d’autres d’objets utilisés par les étudiants…),
dans les villes (pain fait maison, couture, tricotage, mercerie…) ainsi que des étalages de
différents produits aux abords des routes et des trottoirs. Le porte à porte, une forme de
colportage, fait partie de ces activités avec laquelle les produits fabriqués se font écouler. Dans les
caves des bâtiments et les domiciles, les produits de l’artisanat traditionnel (bijoux, …) se
fabriquent. L’activité informelle se livre à une concurrence par les prix étant donné que les coûts
de production sont plus faibles. Des sommes exorbitantes, semblent échapper au fisc et au
contrôle de l’Etat. Depuis deux ans, l’Etat tente d’éradiquer les marchés informels (apparents)
dans les villes jugés comme source de prolifération d’une activité productive illégale (Agharmiou-
Aknine, 2012), mais elle ne peut toucher l’origine de la production qui se trouve dans les
domiciles et les caves. Parmi les éléments à l’origine de ce phénomène :
Lourdeurs bureaucratiques
Depuis les années 1990, l’Algérie a consenti de grands efforts pour contenir la pauvreté,
encourager la création des entreprises privées… Mais cela n’a pas empêché la prolifération de
l’informel. Un certain nombre d’entreprises préfèrent rester non déclarées ou non autorisées dans
le but de ne pas avoir à se conformer à la réglementation. Selon doing business 2012, « En
Algérie, créer une entreprise relève toujours d’un parcours de combattant. Dans ce domaine
l’Algérie est classé à la 153eplace. Quatorze procédures, 25 jours, un coût représentant 12,9% du
revenu par habitant et un capital minimum de 30,6% de revenu par habitant, sont nécessaires
pour créer une entreprise en Algérie ». Faire des affaires en Algérie est, en effet, plus contraignant
que dans le reste des pays du Maghreb.
L’informalisation d’une économie est le signe d’une crise de confiance face aux institutions
existantes (manque de transparence dans les banques, bureaucratie exagérée, un système de
prélèvement fiscal démesuré…). C’est le « coût de la légalité » que les entrepreneurs déclinent. Un
acteur économique n’est enclin à la transparence que si la somme des avantages dépasse celle des
inconvénients, puisque ses décisions sont mues par la rationalité économique.
Chômage et exclusion
Si le secteur informel est toléré dans certain cas en Algérie, c’est dans l’objectif d’appuyer la
sphère des questions sociales (absorber le chômage avec n’importe quel moyen). C’est un
instrument de lutte contre la pauvreté.
La déconfiture du salariat permanent régulier et pas seulement dans le secteur public est le facteur
majeur de cette place ouverte à l’informel, c’est-à-dire que la non permanisation des travailleurs
les rend vulnérables vis-à-vis de leur emploi. Cette évolution fabrique des chômeurs qui n’ont
guère d’autres ressources que de grossir les rangs de l’informel que ce soit comme salariés ou
comme de libres entrepreneurs.
Les barrières à l’entrée, la corruption généralisée et la non-équité supposée dans le partage de la
rente pétrolière en Algérie, engendrent des frustrations et un sentiment de marginalité des régions
et des jeunes. Selon H. Elsenhans (2000, 14) « Les sociétés dominées par l’économie informelle