R ev u e de presse Coordination : Estelle Louiset (Rouen) L’ocytocine, une hormone antalgique L’ocytocine est connue de longue date pour ses actions stimulantes durant l’accouchement et la lactation. Des études plus récentes ont mis en lumière ses effets dans des comportements sociaux, ouvrant la voie au concept d’hormone de l’attachement, de la confiance et de l’altruisme. L’exploration des effets physiologiques de l’ocytocine ne semble pas terminée. En effet, des chercheurs de l’université de la Méditerranée, à Marseille, ont spéculé sur une action antalgique de l’ocytocine en constatant que les bébés nés par voie basse étaient beaucoup plus résistants à la douleur que ceux nés par césarienne programmée. En utilisant un modèle animal, M. Mazzuca et al. ont recherché l’action de cette hormone dans le contrôle de la douleur lors de la période périnatale. Ils ont observé que la sensibilité des ratons à une douleur thermique ou électrique était plus faible juste après leur naissance que durant les jours qui suivent. L’administration d’un antagoniste du récepteur de l’ocytocine augmente la sensibilité à la douleur des ratons immédiatement après leur naissance mais reste sans effet les jours suivants. À l’inverse, l’injection de l’hormone à des animaux âgés de 2 jours améliore leur résistance à la douleur. L’effet antalgique de l’ocytocine résulte d’une modulation de l’activité de neurones GABA-ergiques de la voie de transmission nociceptive. Ces résultats suggèrent qu’au cours de l’accouchement, l’ocytocine – qui stimule les contractions utérines – pourrait réduire la sensibilité du fœtus à la douleur générée par le travail. Ces données nouvelles contribuent aussi à attribuer une propriété supplémentaire à cette hormone. E. Louiset (Rouen) L’ocytocine, une hormone antalgique Alimentation, dépression et adiposité Apport en protéines, synthèse protidique et exercice physique Expression concomitante des récepteurs du GnRH et de la LH dans les adénomes de Conn Petit déjeuner et repas suivants très souvent par une consommation d’aliments denses et énergétiques (snacks). Par ailleurs, la pratique d’une activité physique est influencée par la confiance en soi, ou plutôt par la confiance en sa propre capacité à la pratiquer. L’équipe finlandaise a étudié 2 312 hommes et 2 674 femmes âgés de 25 à 74 ans enrôlés dans l’étude National Cardiovascular Risk Factor Survey en 2007. Les symptômes de dépression, les freins à l’activité physique, ainsi que l’IMC, le tour de taille et le pourcentage de graisse corporelle ont été quantifiés. Les symptômes de dépression et le “manger-émotionnel” sont corrélés positivement. À l’inverse, la confiance en soi pour pratiquer une activité physique est corrélée négativement à l’IMC, au tour de taille et au pourcentage de graisse corporelle. Des symptômes élevés de dépression sont liés au “manger-émotionnel” et à une plus faible confiance en soi pour l’activité physique, tandis que le “manger-émotionnel” et la confiance en soi pour l’activité physique sont inversement corrélés. L’association dépression-adiposité devient non significative dans les modèles qui incluent le “manger-émotionnel” et la confiance en soi pour l’activité physique, ce qui signifie que ces 2 facteurs sont vraiment des intermédiaires entre dépression et adiposité. C’est donc tout un travail de soutien psychologique qui doit être mis en œuvre dans la prise en charge des patients en surpoids, afin de ne pas aggraver l’obésité par des conseils à la fois frustrants et culpabilisants quand on n’y arrive pas… J.M. Lecerf • Konttinen H, Silventoinen K, Sarlio-Lähteenkorva S, Männistö S, Haukkala A. Emotional eating and physical activity self-efficacy as pathways in the associatin between depressive symptoms and adiposity indicators. Am J Clin Nutr 2010;92,1031-9. • Mazzuca M, Minlebaev M, Shakirzyanova A et al. Newborn analgesia mediated by oxytocin during delivery. Front Cell Neurosci 2011;5:3. Alimentation, dépression et adiposité L’obésité et la dépression augmentent dans les pays développés. Ces pathologies sont-elles liées dans leur genèse, au-delà de la relation que l’on peut faire entre obésité et dépression ? Le lien peut également être inverse. Il peut s’agir aussi de causes communes (stress social et conditions socioéconomiques) ou de mécanismes communs. Le but de l’étude de Konttinen et al. était d’analyser le rôle de facteurs psychologiques conditionnant le comportement alimentaire et l’activité physique. La prise alimentaire émotionnelle se solde Apport en protéines, synthèse protidique et exercice physique La sarcopénie est une diminution progressive de la masse maigre, squelettique et musculaire survenant avec l’âge. On peut considérer qu’elle est liée à une diminution de la synthèse protidique entraînant un déséquilibre entre l’anabolisme et le catabolisme. La hausse de l’anabolisme correspondrait à une diminution de la synthèse postprandiale et après exercice en rapport avec une altération de la digestion des protéines, de la cinétique de leur absorption, conduisant à une baisse de la disponibilité postprandiale des acides aminés. Cette résistance anabolique est considérée comme >>> 306 Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - nos 9-10 - novembre-décembre 2011 JA IN ins (tr de ad M m po ch au aig po alc l’a ar à4 av tra ét M • G ET dia inc dè (n SU DO No l’e pa gly n’e 01 Av co su CoDia 2 R ev u e de presse >>> un facteur clé de l’étiologie de la sarcopénie. Si l’on considère que l’activité physique précède souvent la prise alimentaire, il convient d’étudier cette résistance anabolique au repos et après un exercice physique. Pennings et al. ont comparé la digestion et l’absorption des protéines, ainsi que la synthèse protidique musculaire postprandiale, au repos et après exercice, chez des hommes jeunes et des hommes âgés. Les sujets ont consommé un bolus de 20 g de protéines contenant de la phénylalanine marquée au C13. Vingt-quatre hommes âgés de 74 ± 1 ans ont été appariés pour le poids à 24 hommes de 21 ± 1 ans. La cinétique d’apparition de la phénylalanine n’était pas différente dans les 2 groupes. Aucune différence n’a été observée entre les 2 groupes d’âge en termes de biodisponibilité de la phénylalanine, tant au repos qu’après l’exercice. De plus, le taux de synthèse de protéines calculé à partir des traceurs était plus élevé en cas d’exercices physiques, tant chez le sujet jeune (+ 16 %) que chez le sujet âgé (+ 30 %). L’exercice physique avant une prise alimentaire est donc le meilleur moyen pour augmenter l’anabolisme protidique quel que soit l’âge. Il est susceptible d’accroître l’accrétion protidique postprandiale et de contribuer ainsi à la réduction de la sarcopénie liée à l’âge. J.M. Lecerf • Pennings B, Koopman R, Beleen M, Senden JM, Saris WH, Van Loon LJ. Exercising before protein intake allows for greater use of dietary protein-derived amino acids for de novo muscle protein synthesis in booth young and elderly meh. Am J Clin Nutr 2011;93 :322-31. Expression concomitante des récepteurs du GnRH et de la LH dans les adénomes de Conn L’implication de récepteurs illégitimes dans le contrôle de la sécrétion de cortisol par des lésions corticosurrénaliennes associées à un syndrome de Cushing a largement été documentée. Des études génomiques ont 308 également permis de mettre en évidence l’expression anormale de gènes codant pour des récepteurs membranaires dans des adénomes surrénaliens associés à un hyper­ aldostéronisme primaire. Quelques études fonctionnelles ont démontré le rôle de récepteurs illégitimes dans le contrôle de la sécrétion d’aldostérone. L’équipe de F. Mantero a suspecté l’expression aberrante de récepteurs chez une femme âgée de 32 ans qui a développé un hyperaldostéronisme au cours d’une grossesse. L’aldostéronémie de cette patiente a augmenté après administration de GnRH (+ 114 %) ou de triptoréline (Décapeptyl® + 120 %), ainsi qu’en réponse à l’hCG (+ 77 %). Ces effets stimulateurs n’ont pas été retrouvés après surrénalectomie unilatérale. L’expression des récepteurs du GnRH et de la LH dans la tumeur a été objectivée par PCR quantitative et immunohistochimie. La présence de ces récepteurs a été retrouvée dans 6 des 22 autres adénomes de Conn étudiés. Ces données montrent que l’expression concomitante de récepteurs du GnRH et de la LH dans un adénome de Conn peut contribuer au développement d’un hyperaldostéronisme quand les taux circulants de GnRH et d’hCG sont élevés, c’est-à-dire au cours de la grossesse. E. Louiset • Albiger NM, Sartorato P, Mariniello B et al. Eur J Endocrinol 2011;164:405-12. Petit déjeuner et repas suivants La relation entre le petit déjeuner et l’obésité n’est pas simple (1). Les personnes prenant un petit déjeuner mangent plus équilibré, ont un poids inférieur, font davantage d’activité physique et ont un niveau socioéconomique plus élevé que celles qui omettent ce repas. Sauter un petit déjeuner peut faire manger plus au repas suivant et sur la journée. Toutefois, les personnes qui prennent un petit déjeuner copieux ne mangent pas forcément moins sur la journée. Kral et al. (2) ont mesuré les effets de la prise d’un petit déjeuner ou de son omission sur l’appétit et sur la prise alimentaire lors des repas suivants chez 21 enfants âgés de 8 à 10 ans. Les enfants ont participé à 2 séries de tests durant lesquels ils ont pris ou non un petit déjeuner, puis un déjeuner proposé ad libitum. Les sujets ont évalué leur appétit durant toute la matinée à travers une échelle visuelle analogique. Les parents ont consigné les apports alimentaires de leur enfant sur toute la journée. Il n’a pas été constaté d’effet important de la prise ou non d’un petit déjeuner sur les apports alimentaires au repas de midi (p = 0,36) ou durant le reste de la journée (p = 0,85). En revanche, l’absence de prise de petit déjeuner était associée à un apport énergétique moindre (– 362 kilocalories) sur l’ensemble de la journée, ce qui signifie qu’il n’y a pas eu de compensation. Néanmoins, les sujets ne prenant pas de petit déjeuner ont ressenti davantage de sensation de faim, moins de sensation de plénitude, et ont déclaré avoir un plus grand appétit avant le repas de midi que le jour où ils ont pris un petit déjeuner. Cette étude ne semble pas confirmer les résultats des données antérieures mais révèle la complexité des faits. Elle montre la différence entre des données expérimentales qui, certes, standardisent, mais n’intègrent pas toutes les composantes (mode de vie, comportement). On peut aisément penser que les enfants qui sautent quotidiennement le petit déjeuner ont davantage faim durant la matinée et mangent plus au repas suivant en présence d’une alimentation abondante et palatable. Les facteurs associés jouent donc probablement un rôle majeur pour expliquer que les enfants ne prenant pas de petit déjeuner ont un poids plus élevé et sont plus souvent obèses. J.M. Lecerf 1. Lecerf JM et al. Petit déjeuner, est-ce utile ? Cah Nutr Diet 2011;46,30-9. 2. Kral TV, Whiteford LM, Heo M, Faith MS. Am J Clin Nutr 2011;93:284-91. Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - nos 9-10 - novembre-décembre 2011