Le Courrier de la Transplantation - Vol. XII - n° 2 - avril-mai-juin 2012 101
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Le Courrier de la Transplantation - Vol. XII - n° 2 - avril-mai-juin 2012
d’éducation thérapeutique et la délivrance
faite par le pharmacien.
Le générique permettrait, certes, un gain
financier. Cependant, il ne faut pas hésiter
à rendre non substituables les traitements
quand il y a un risque majeur de non-obser-
vance ou de perte de l’autonomie dans
leur gestion. Idéalement, il faudrait pouvoir
identifier clairement ce que l’on prescrit et
le produit de remplacement éventuel pour
surveiller de façon rigoureuse l’apparition
d’événements indésirables.
On peut imaginer qu’une diminution
imposée des coûts du princeps aurait
permis d’éviter de recourir aux génériques.
Une enquête conduite par la Société fran-
cophone de transplantation sur l’utilisa-
tion des IS génériques (Pr Pierre Marquet,
pour la commission médicament de la
SFT, chef de service de pharmacologie,
toxicologie et pharmacovigilance, CHU
de Limoges) a mis en avant les point sui-
vants : il serait souhaitable de renforcer
les règles de bioéquivalence en prenant
en compte les C0 et C2, de ne pas faire
des essais exclusivement en dose unique
et d’élargir ces études aux patients trans-
plantés. Le doute repose sur la qualité des
génériques (insuffisante ou inconstante) et
sur les possibles substitutions d’un géné-
rique à l’autre au fil des mois, sachant par
exemple qu’il existe à l’heure actuelle
17formes différentes du mycophénolate
mofétil. Globalement, 42 % des prescrip-
teurs sont défavorables aux génériques et
seraient favorables à une baisse de prix du
médicament princeps.
Le Pr Yann Le Meur (service de néphro-
logie et de transplantation rénale, CHU
de Brest) a fait le point sur les recomman-
dations de l’ESOT, qui propose de conti-
nuer les recherches et enquêtes sur les
réels bénéfices de l’usage des génériques
dans le domaine de la transplantation.
Tant que la bioéquivalence “stricte” de 90
à 111 % par rapport au princeps n’est pas
démontrée, un générique ne devrait pas
obtenir d’autorisation de commercialisa-
tion. De plus, il faudrait veiller à ce que
chaque changement d’un médicament
vers son générique, ou entre plusieurs
formulations génériques entre elles, fasse
l’objet d’un ajustement et d’une réévalua-
tion de la fenêtre thérapeutique au cas
par cas. Le recours au générique risque
également d’entraîner une variation de la
concentration sanguine lors de la conver-
sion. Une coopération maximale entre
pharmacien et médecin transplanteur doit
être instaurée afin d’informer les patients.
Les immunosuppresseurs
de demain
Le Dr Nathalie Dumarcet (chef du dépar-
tement information et bon usage des
médicaments, Direction de l’évaluation
des médicaments et des produits bio-
logiques [ DEMEB], Afssaps) est revenue
sur les alternatives qui existent à l’heure
actuelle pour les traitements coûteux
prescrits hors AMM. Les 2réponses ins-
titutionnelles permettant aujourd’hui
de pouvoir prescrire hors AMM sont les
autorisations temporaires d’utilisation
(ATU) et les protocoles thérapeutiques
temporaires (PTT). Par exemple, depuis
le mois de novembre 2010, l’Afssaps a
accordé la mise en place d’un PTT pour les
immunoglobulines intraveineuses dans la
prise en charge des greffes rénales, avec
un projet dans la greffe cardiaque, mais
sous réserve de l’inclusion dans un suivi
de cohorte nationale.
À côté de ces outils de prescription hors
AMM s’est développé, depuis 2004, le plan
de gestion de risques (PGR), dont l’objectif
est de surveiller et de minimiser les risques
de façon proactive tout au long de la vie
du produit. En effet, d’une façon générale,
on s’aperçoit que, même si le risque est
connu, on observe des différences entre
la pratique médicale courante et la théorie
(les recommandations et RCP du produit).
Le PGR peut être divisé en 2parties (Dr
Christel Saussier, évaluateur, pharmaco-
épidémiologiste, Afssaps). Il consiste à
établir, dans un premier temps, la liste
des risques potentiels, puis un plan de
pharmacovigilance, avec notification des
effets indésirables, rapports périodiques
de sécurité et éventuellement mise en
route d’activités additionnelles, comme
des études d’utilisation. Un plan de mini-
malisation du risque est établi, après avoir
vérifié que le plan européen de gestion des
risques est suffisant et approprié aux régle-
mentations françaises. Le Tysabri® (nata-
lizumab), par exemple, a fait l’objet d’un
PGR européen pour obtenir des données
sur l’incidence des réactions d’hypersen-
sibilité et des infections, et, sur le plan
national, l’objectif était de colliger tous
les cas d’événements indésirables graves
et inattendus pour minimiser ce risque.
Le Pr Gilles Blancho (service de néphro-
logie et de greffe rénale et pancréatique,
CHU de Nantes) a abordé les médicaments
de demain, leurs modalités d’action, leurs
effets indésirables, ainsi que le moment et
la manière de les utiliser. Il s’agit des bio-
thérapies innovantes, des “antigénériques”.
Si l’on regarde l’exemple du bélatacept,
qui sera commercialisé sous le nom de
Nulojix®, il a fait l’objet de nombreuses
études en phases II et III, présentées
et publiées (American Transplant
Congress 2011 ; ESOT 2011). Un autre
exemple est l’éculizumab (ou Soliris®),
dans le traitement de l’hémoglobinurie
paroxystique nocturne, qui est égale-
ment utilisé en transplantation, hors
AMM. Étant donné le risque d’infections
à méningocoques, une vaccination est
obligatoire. En transplantation, cette
vaccination se fait au moment de l’uti-
lisation de la molécule. Une antibiopro-
phylaxie est une mesure additionnelle
efficace au moment de l’utilisation.
Conclusion
(Pr Jean-Paul Squifflet,
président de laSFT)
L’accès aux médicaments génériques
pour les patients transplantés doit faire,
de la part du transplanteur, l’objet d’une
évaluation au cas par cas. La coopération
médecin/pharmacien et l’inclusion du
pharmacien dans le processus de l’édu-
cation thérapeutique semblent un atout
majeur pour le patient. La baisse de prix
des médicaments princeps, plus que l’ar-
rivée des génériques, permettrait de mieux
développer les médicaments de demain.