Revue de presse
Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - no 4 - octobre-novembre-décembre 2013
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protocoles d’hypofractionnement actuels pour
le cancer prostatique. Pour des raisons obscures
(pressions des reviewers ?), A.Pollack ne reprend
curieusement pas ici son calcul précis du rapport
alpha/bêta, mais, pour qui sait lire entre les lignes,
le résultat est le même. Le schéma hypofractionné
utilisé ici avait été calculé avec le rapport alpha/
bêta “classique” de 1,5Gy ; comme noté plus haut,
ce schéma était censé délivrer une dose équiva-
lant à 84,4Gy par fractions de 2Gy ; les auteurs
attendaient donc logiquement de cette escalade
de dose significative (8,4Gy !) une amélioration
plus ou moins marquée de la survie sans récidive.
Le résultat est sans appel : aucune différence en
termes de rechutes (cliniques ou biologiques). Le
chiffre des rechutes est même un peu plus élevé
dans le bras hypofractionné (mais sans différence
significative). Cela signifie donc que le calcul initial
était probablement faux, et que le sacro-saint
rapport alpha/bêta de 1,5Gy pour le cancer de
la prostate est très probablement, en réalité, plus
élevé. Cet article doit faire réfléchir tous ceux qui se
lancent, peut-être un peu vite, dans l’hypofraction-
nement pour le cancer prostatique, d’autant que
les mauvaises nouvelles ne s’arrêtent pas là : pour
les patients de cet essai présentant des troubles
urinaires significatifs initiaux (IPSS>12), l’hypo-
fractionnement est responsable d’une incidence
cumulative de grades2 urinaires très significative-
ment supérieure (p<0,001) à celle observée après
irradiation classique. Cette observation, qui rejoint
certaines données sur la toxicité aiguë de l’essai de
E.E.Yeoh etal. (article de2006), pourrait remettre
en question l’inclusion dans les essais d’hypofrac-
tionnement même modéré (les doses par séance
utilisées ici n’étaient “que” de 2,7Gy) des patients
présentant des troubles urinaires initiaux.
J.M. Cosset, Paris
•Pollack A, Walker G, Horwitz EM et al. Randomized trial of
hypofractionated external-beam radiotherapy for prostate
cancer. J Clin Oncol 2013;31(31):3860-8.
Radium-223 alpha-émetteur
etsurvie dans le cancer
delaprostate métastatique
Plus de 90 % des patients présentant
un cancer de la prostate résistant à la
castration ont des métastases osseuses,
qui constituent une cause majeure de morbi-
mortalité.
Le radium 223 dichlorure (radium-223) est une
cible alpha-émetteur qui se lie sélectivement
aux zones de remodelage osseux dans les
métastases osseuses, en particulier au stroma
osseux nouvellement formé, et émet des par-
ticules alpha à haute énergie. Le rayonnement
de ces particules induit principalement des
cassures double brin de l’ADN responsables
d’un effet cytotoxique puissant et très localisé
à la lésion cible. Le court chemin de ces parti-
cules alpha permet également que les effets
toxiques sur le tissu sain adjacent, et en parti-
culier sur la moelle osseuse, restent minimes.
ALSYMPCA est une étude de phase III, ran-
domisée, en double aveugle, internationale,
comparant l’efficacité et la tolérance du
radium-223 au placebo chez des patients
atteints d’un cancer de la prostate résistant
à la castration, avec métastases osseuses, pré-
traités ou non éligibles au docétaxel. Neuf cent
vingt et un patients ont été inclus en intention
de traiter suivant un ratio 2:1. Les patients dans
le groupe radium-223 ont reçu 6 injections,
toutes les 4 semaines, de radium-223 à la dose
de 50 kBq/ kg i.v.
L’objectif primaire de l’étude a été atteint : à
l’analyse finale, la médiane de survie globale
(SG) était de 14,9 mois dans le groupe
radium-223 et de 11,3 mois dans le groupe
placebo, soit une réduction de 30 % du
risque de décès (HR = 0,70 ; IC95 : 0,58-0,83 ;
p < 0,001). Le bénéfice du radium-223 sur la
SG était retrouvé dans tous les sous-groupes.
Dans l’analyse actualisée, le bénéfice du
radium-223 se confirme, avec une médiane
de SG de 14,9 mois versus 11,3 mois dans le
groupe placebo.
L’analyse des objectifs secondaires d’effica-
cité est en faveur du radium-223 par rapport
au placebo ; il permet de prolonger signifi-
cativement le temps jusqu’au premier évé-
nement osseux symptomatique (médiane
de 15,6 mois versus 9,8 mois ; HR = 0,66 ;
p < 0,001), le temps d’augmentation des
phosphatases alcalines totales (HR = 0,17 ;
IC
95
: 0,13-0,22 ; p < 0,001), ainsi que le temps
jusqu’à l’augmentation du PSA (HR = 0,64 ;
IC95 : 0,54-0,77 ; p < 0,001). Le nombre de
patients qui ont présenté des effets indési-
rables dans le groupe radium-223 était plus
faible que dans le groupe placebo pour tous
les événements indésirables (93 % versus
96 %), les effets indésirables de grade 3 ou 4
(56 % versus 62 %), sans différence clinique-
ment significative.
Commentaire. Il s’agit d’une étude de phaseIII
franchement positive qui offre une autre molé-
cule dans le traitement de deuxième ligne du
CPRCm. Celle-ci se démarque par son très bon
profil de tolérance, mais reste limitée par la res-
triction des métastases viscérales. Actuellement
on dispose de plusieurs autres molécules (caba-
zitaxel, abiratérone acétate et enzalutamide)
et d’autres sont en cours d’essai ; des études de
stratégie s’imposent pour le choix et la hiérar-
chisation des traitements.
S. Oudard, Paris
•Parker C, Nilsson S, Heinrich D et al. Alpha emitter
radium-223 and survival in metastatic prostate cancer.
N Engl J Med 2013;369(3):213-23.
Étude de phase III évaluant
lezibotentan en combinaison
avecle docétaxel dans les CPRCm
Le docétaxel associé à la prednisone
est le traitement standard de première
intention du cancer de la prostate méta-
statique résistant à la castration (CPRCm). Le
site de prédilection métastatique est l’os.
L’activation du récepteur de l’endothéline A
induit la prolifération de cellules tumorales
prostatiques et un pouvoir métastatique.
Le zibotentan est un puissant inhibiteur de
l’endothéline A (ZD4054) qui a démontré,
dans 2 phases II randomisées, qu’il s’accom-
pagnait d’une augmentation de la survie
chez des patients ayant peu de symptômes
avec des métastases osseuses (1, 2). Dès
lors une étude de phase III randomisée
(R = 1:1), prospective, multicentrique,
en double aveugle, a été réalisée dans le
cadre du programme ENTHUSE, en phase
métastatique chez des patients résistant à
la castration. Cette étude comparait le docé-
taxel + zibotentan au placebo. Les patients
recevaient soit docétaxel (75 mg/ m2 toutes
les 3 semaines) + prednisone (10 mg/j) +
placebo, soit docétaxel + zibotentan
(10 mg p.o.). Le critère principal était la
survie globale (SG) en intention de traiter.
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