La Lettre du Rhumatologue • No 390 - mars 2013 | 29
CAS CLINIQUE
Figure 3. Vue peropératoire de la cavité résiduelle du kyste hydatique pelvien.
Cavité résiduelle kystique
Vessie
Cul-de-sac de Douglas
d’aborder le kyste de 90 mm de diamètre au contact de l’axe vasculaire
iliaque droit, refoulant la vessie à gauche et s’étendant vers la racine
de la cuisse droite. L’exploration du reste de la cavité abdominale
ne révèle pas d’autres localisations, notamment hépatiques. Après
protection par des champs imbibés d’eau oxygénée et stérilisation
du kyste, une résection du dôme saillant avec drainage de la cavité
résiduelle est réalisée (fi gure 3). Les suites opératoires sont simples.
Un traitement par albendazole 10 mg/ kg par jour pendant 6 mois
est instauré. L’évolution à 6 mois est favorable, sans récidive locale.
Discussion
L’hydatidose pelvienne est rare. Elle ne représente que 0,30 % à 4,27 %
des localisations hydatiques (2). L’échinococcose est une maladie de
l’adulte jeune, mais qui peut se voir à tout âge. En fait, elle peut débuter
au cours de l’enfance et ne s’exprimer qu’à l’âge adulte, comme chez
notre patient (3). Le mode de contamination de la région pelvienne
demeure hypothétique, mais elle est habituellement consécutive à la
rupture intra-abdominale d’un kyste hydatique hépatique. Les vésicules
fi lles et les scolex libérés se fi xent dans le cul-de-sac de Douglas et
continuent leur développement. Une endothélialisation secondaire les
exclut de la cavité péritonéale. Ainsi, le kyste intrapéritonéal devient
extrapéritonéal et semble faire partie du tissu cellulaire pelvien (1).
Les formes hématogènes sont exceptionnelles et c’est la théorie la
plus logique des localisations osseuses et rétropéritonéales (4, 5).
La symptomatologie est très polymorphe. Il n’y a pas de signe spécifi que
ou évocateur (6). L’anamnèse joue un rôle capital dans le diagnostic de
l’hydatidose, car elle permet de rechercher les facteurs de risque tels,
par exemple, le contact avec les chiens, le contexte socioprofessionnel,
la notion d’intervention antérieure sur une hydatidose hépatique ou
l’existence d’un accident aigu évoquant la rupture ou la fi ssuration d’un
kyste hydatique. L’échinococcose pelvienne est le plus souvent révélée
par une masse abdominopelvienne associée à des douleurs pelviennes
ou à des douleurs de la hanche, comme chez notre patient (7, 8). Elle
peut également être révélée par une symptomatologie génitale
ou obstétricale, ou par une complication aiguë telle qu’une
rétention d’urine ou une anurie par compression bilatérale
des uretères (1, 3, 7). L’échographie constitue le plus souvent
l’examen diagnostique de référence. En effet, elle précise les
caractères de la masse, ses relations avec les organes de voisi-
nage, et permet de rechercher une autre localisation, notam-
ment hépatique. Les images échographiques correspondent
aux 5 stades évolutifs de la maladie hydatique (9, 10). Dans les
cas typiques, elle permet de poser le diagnostic d’hydatidose.
Cependant, il existe des formes atypiques dans lesquelles la
lésion est soit mixte, soit solide “pseudo-tumorale”, avec ou
sans images arrondies trans sonores en son sein. Les images
hypoéchogènes et fi nement échogènes pseudo-tissulaires
correspondent en fait à la boue hydatique (11). L’IRM a rem-
placé la tomodensitométrie pour préciser le nombre, la taille,
la topographie et les rapports avec les pédicules vasculaires.
En effet, le caractère multiplanaire de l’IRM et sa plus haute
résolution assurent une meilleure exploration anatomique et
une analyse précise des parois kystiques (11). Les examens
biologiques permettent la mise en évidence de l’hyper éosino-
philie en cas de fi ssuration du kyste hydatique et surtout la
recherche des anticorps anti-Echinococcus granulosis, qui est
souvent négative dans les localisations pelviennes, comme
dans notre observation (6).
Le traitement de choix de l’hydatidose pelvienne est la
chirurgie. La voie d’abord doit être large pour permettre la
stérilisation du kyste et la protection des champs opératoires
par des solutions scolicides (l’eau oxygénée est la plus uti-
lisée). Il est recommandé de faire une kystectomie ou une
péri-kystectomie des kystes accessibles et une kystectomie
partielle pour les kystes profonds et au contact des éléments
vasculaires (12). Le traitement médical, à base de dérivés imi-
dazolés, est réservé aux cas inopérables, aux localisations
multiples ou en complément de la chirurgie (13).
Conclusion
Une masse abdominopelvienne, surtout dans un pays endé-
mique comme le Maroc, doit évoquer un kyste hydatique. Le
diagnostic repose sur les données épidémiologiques, cliniques,
radiologiques et sérologiques. Le traitement de choix est la
chirurgie, qui dépend du volume, du siège et surtout des rapports
des kystes. Le geste chirurgical doit être radical si les condi-
tions le permettent. Le traitement médical peut être utilisé en
deuxième intention ou en complément de la chirurgie. La pro-
phylaxie est le meilleur moyen pour éradiquer cette pathologie
qui est toujours un problème de santé publique au Maroc. ■
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