F. Asri
et al.
L’Encéphale, 2007 ;
33 :
216-9
218
Six semaines après son hospitalisation, devant l’apparition
de céphalées avec une subconfusion, une tomodensitomé-
trie cérébrale a été faite en urgence et a montré une volumi-
neuse image kystique intraparenchymateuse au niveau du
foramen ovale comprimant fortement le mésencéphale. Le
kyste était bien limité, à paroi fine, hypodense, ne prenant pas
le contraste, et sans œdème périlésionnel, faisant évoquer
le diagnostic de kyste hydatique cérébral.
Le bilan complémentaire n’a pas montré d’autres loca-
lisations, et les résultats des examens biologiques n’ont
pas montré d’anomalies particulières. Le patient a été
opéré en neurochirurgie par un abord rétrosigmoïdien
sous microscope opératoire.
En peropératoire, une tentative d’accouchement par
hydrodissection a été tentée sans succès ; le patient ayant
présenté une bradycardie à chaque injection de sérum
physiologique, une évacuation du kyste par ponction a été
décidée.
L’évolution immédiate fut favorable avec disparition de
la confusion et absence de complications. Le patient a été
déclaré sortant mais il fut perdu de vue.
Six mois après, le patient a été réadmis aux urgences
psychiatriques dans un tableau de rechute schizophréni-
que. Il était en arrêt du traitement neuroleptique. Il était
de nouveau agressif, délirant, halluciné, dépersonnalisé
et déréalisé. Le score global à la PANSS était de 63. Il a
été remis sous neuroleptiques, 9 mg/j d’halopéridol et
200 mg/j de chlorpromazine.
Un scanner cérébral de contrôle à titre externe a été
demandé afin d’éliminer une récidive du kyste hydatique,
d’autant que l’intervention s’est limitée à une ponction,
mais le patient n’est plus revenu de sa permission.
OBSERVATION 2
Patient âgé de 53 ans, père de quatre enfants, sans ins-
truction, originaire et résidant à Marrakech, pâtissier de
profession. Il est en contact avec les chiens depuis l’âge
de 12 ans.
Il a été amené aux urgences psychiatriques par sa
famille, sur réquisition de police, suite à une agitation psy-
chomotrice.
L’histoire de sa maladie semblait remonter à huit mois,
par l’apparition progressive d’une instabilité psychomo-
trice, de troubles de sommeil, d’hostilité envers sa famille,
associée à une labilité émotionnelle avec propos incohé-
rents et agressivité.
À l’entretien, il était agité avec une tristesse morbide et
un syndrome délirant congruent à l’humeur. Le patient
n’était pas confus mais il avait une hypopraxie, une amné-
sie de fixation, un trouble de jugement et une légère hémi-
parésie gauche.
Devant ce tableau, une tomodensitométrie cérébrale a
été demandée et révélée trois formations cérébrales de
densité liquidienne ne prenant pas le contraste, compati-
bles
a priori
avec des kystes hydatiques. Le premier
mesure 42
×
40 mm, siège au niveau pariétal droit, au
contact de la corne occipitale, entraînant son amputation
et un effet de masse sur le ventricule homolatéral, la ligne
médiane et le ventricule controlatéral. Les deux autres for-
mations sont également de siège pariétal droit, au niveau
du centre semi-ovale, en arrière de la première, mesurant
respectivement 23 mm et 15 mm sur le grand axe et sans
effet de masse sur les structures médianes. Le bilan
d’extension retrouve des lésions kystiques hépatique, pul-
monaire, médiastinale, péricardique et intraventriculaire.
Le patient a subi une intervention neurochirurgicale
pour ces trois kystes avec bonne récupération sur le plan
psychiatrique et neurologique, puis il a été adressé en ser-
vice de cardiochirurgie pour les localisations cardiaque et
hépatique.
DISCUSSION
Les kystes hydatiques cérébraux sont relativement
rares. Leur fréquence, dans la littérature, est estimée de
1 à 5 %. Ils touchent principalement les enfants moins de
15 ans, avec une prédominance masculine (1, 4, 7).
Le kyste hydatique est souvent solitaire, de localisation
habituelle supratentorielle, parfois infratentorielle. Le tableau
clinique associe des signes neurologiques focaux et/ou des
signes d’hypertension intracrânienne (1, 3, 4, 6, 7, 8).
Les manifestations psychiatriques isolées, au cours
d’un kyste hydatique cérébral ou de toute autre tumeur
cérébrale peuvent se voir au début de leur évolution et cela
dans 1 % des cas. La nature des symptômes psychiatri-
ques est fonction de la localisation tumorale (3, 4, 5, 6, 8).
Toutes les manifestations psychiatriques peuvent se
voir : syndrome dépressif, signes psychotiques et modifi-
cations de la personnalité. Ces manifestations ne sont pas
différentes de celles retrouvées lors de tumeurs d’autres
étiologies sauf que les signes sont le plus souvent insi-
dieux (3, 6, 9).
Dans la littérature, rares sont les études traitant du kyste
hydatique cérébral et des troubles psychiatriques. Une
étude tunisienne publiée a rapporté le cas d’un kyste hyda-
tique frontal chez un enfant de 15 ans révélé par un
mutisme et une akinésie (4).
Concernant le premier cas, le diagnostic de schizoph-
rénie a été retenu en premier devant les critères du
DSM IV. Le kyste hydatique cérébral a été révélé par la
TDM cérébrale, demandée devant l’apparition secondaire
des céphalées et du syndrome confusionnel. L’originalité
de cette observation est que malgré un tableau typique
de schizophrénie avec une évolution de plus d’une année,
une TDM cérébrale devrait être systématique (cela n’a pas
été fait vu les difficultés financières). Devant les signes
confusionnels apparus après introduction des neurolepti-
ques, élément en faveur d’une cause organique, une TDM
en urgence (sur le compte de l’hôpital) avait permis de dia-
gnostiquer un kyste hydatique. Malheureusement, malgré
la réapparition des signes psychiatriques, nous n’avons
pas pu avoir l’accord pour une deuxième TDM sur le
compte de l’hôpital. Ce déficit est une des difficultés