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VIE PROFESSIONNELLE
La Lettre du Rhumatologue - n° 260 - mars 2000
Perte de sens
Pour les victimes, la nouvelle jurispru-
dence de la Cour de cassation, qui rejoint
celle du Conseil d’État, constitue une
indiscutable avancée. Toutefois, sur le plan
de la responsabilité, on peut estimer qu’il
y a régression dès lors que prouver que les
règles d’hygiène ont été scrupuleusement
respectées est indifférent pour écarter la
responsabilité. La responsabilité de l’éta-
blissement ou du médecin est engagée
qu’il y ait faute ou non.
DES RÉPERCUSSIONS INDIRECTES
SUR LE PLAN PÉNAL ?
Le débat sur la faute est une donnée inté-
grante de la responsabilité, et il serait illu-
soire d’estimer que l’indemnisation
comble l’attente des victimes.
Les règles fixées par le Conseil d’État et
la chambre civile de la Cour de cassation
ne concernent que les procédures en
indemnisation, qui sont en fait gérées par
les compagnies d’assurances. Devant faire
face à un risque nouveau, les compagnies
d’assurances vont augmenter leurs primes,
et la charge financière reviendra en défi-
nitive à l’établissement ou au médecin.
Mais l’on peut se demander si toutes les
victimes trouveront leur compte avec ces
règles nouvelles. En effet, si la victime est
d’abord à la recherche de son indemnisa-
tion, elle cherche également souvent, par
le procès, une forme de réhabilitation par
la reconnaissance d’une faute. Le régime
jurisprudentiel ne permettra plus ce débat
sur les fautes civiles du médecin ou de
l’établissement, la seule question étant
l’existence d’une cause étrangère.
Ainsi, la victime qui estimera que l’in-
demnisation ne suffit pas et qu’il est néces-
saire que soit prononcée une sanction se
trouvera encouragée à choisir la voie
pénale, non pas par animosité à l’encontre
du médecin, mais parce que ce sera le seul
moyen d’obtenir qu’un tribunal se pro-
nonce sur le caractère fautif des causes de
l’infection.
Il est certain que la voie de l’indemnisa-
tion par l’assurance de l’établissement ou
du médecin offre un ensemble de facilités
procédurales qui recueilleront souvent la
préférence des victimes. Mais la victime
qui voudra rechercher l’implication per-
sonnelle du médecin n’aura plus que la
voie pénale pour obtenir un jugement se
prononçant sur les responsabilités. Et sur
ce plan, toute personne ayant participé à la
réalisation du dommage peut être concer-
née par la procédure : infirmière hygié-
niste, médecin, chef de service, président
du CLIN.
Enfin, depuis le nouveau Code pénal, la loi
n’attend plus la réalisation du dommage et
la plainte de la victime. La mise en danger
de la personne d’autrui, qui suppose le
manquement à une obligation de sécurité,
telle que le serait la mauvaise mise en
œuvre de mesures d’hygiène, est désor-
mais une infraction pénale. Le débat se
situe entre le risque inhérent à toute pra-
tique de soins et le risque injustifié qui
génère la condamnation. À noter encore
que l’établissement de soins lui-même, en
tant que personne morale, peut être
condamné pour mise en danger de la per-
sonne d’autrui.
INFORMATION DU PATIENT
La règle jurisprudentielle est, là aussi, exi-
geante : l’information doit porter sur tous
les risques graves, même s’ils sont excep-
tionnels, et la responsabilité est engagée si
le déficit d’information a influé sur la déci-
sion d’acceptation des soins. Les établis-
sements et les praticiens doivent se préoc-
cuper de la mise en œuvre de cette règle.
La réponse ne peut provenir d’un forma-
lisme frileux qui serait celui d’un recours
systématique à des écrits exhaustifs, visant
moins à informer le patient qu’à protéger
le médecin. C’est au cas par cas une
démarche adaptée qui doit être trouvée,
démarche au sein de laquelle l’écrit a sa
place, mais un écrit conçu dans un véri-
table but informatif. Les CLIN ont un
important rôle à jouer dans la fourniture
des éléments de réponse.
!
À noter
Le décret n° 99-1034 du 6 décembre 1999, inséré dans le
Code de la santé publique aux articles R 711-1-1 et sui-
vants, précise les dispositions relatives à l’organisation de la
lutte contre les infections nosocomiales dans les établisse-
ments de santé.
Chaque établissement de santé doit organiser la lutte contre
les infections nosocomiales, y compris la prévention de la
résistance bactérienne aux antibiotiques. Dans ce but, tout
établissement, public ou privé, doit instituer en son sein un
comité de lutte contre les infections nosocomiales, et se
doter d’une équipe opérationnelle d’hygiène hospitalière.
L’établissement, éclairé par le CLIN, doit définir un pro-
gramme annuel d’action. Les actions doivent être périodi-
quement évaluées, les résultats étant utilisés pour l’élabora-
tion de programmes ultérieurs.
Le Comité de lutte contre les infections nosocomiales :
"coordonne l’action des professionnels,
"prépare avec l’équipe opérationnelle d’hygiène hospita-
lière le programme annuel d’action,
"élabore un rapport annuel d’activité.
Étape dans un processus, ce décret est un outil d’action et
mérite une lecture attentive.
G.D.