Critères cliniques d’indication d’une VNI
L’atteinte respiratoire est souvent sous-évaluée chez le patient
atteint d’une maladie neuromusculaire, car elle se caractérise par
des symptômes et des signes cliniques peu spécifiques, fréquem-
ment non recherchés et sous-estimés par les patients eux-mêmes.
Le tableau IIénumère les nombreux symptômes qu’il faut recher-
cher à l’interrogatoire et à l’examen clinique. Ces signes suggèrent
souvent la nécessité d’une VNI.
Critères fonctionnels d’indication d’une VNI
Il paraît raisonnable de procéder au minimum, chez le patient atteint
d’une maladie neuromusculaire, à la recherche de critères de
nécessité d’une VNI :
–une spirométrie, avec détermination des volumes pulmonaires
(la mesure de la capacité vitale [CV] sera la plus utile dans le suivi
du patient) ;
–une évaluation de la force des muscles inspiratoires par mesure
de la pression inspiratoire maximale (Pimax) et sniff test (renifle-
ment maximal) ;
–une gazométrie artérielle ;
–un enregistrement de la saturation nocturne en ventilation
spontanée.
D’une façon générale, il paraît souhaitable que la mesure de la CV
devienne de plus en plus un élément systématique de l’examen
clinique de ces patients, ce qui implique que, comme la pression
artérielle, elle puisse être mesurée simplement par n’importe quel
intervenant, médical ou paramédical, formé à la prise en charge.
La disponibilité de plus en plus grande de spiromètres électro-
niques miniatures fiables devrait, dans les années à venir, permettre
à cette proposition de devenir une réalité.
Quand proposer une VNI à un patient
atteint d’une maladie neuromusculaire ?
Les critères objectifs les plus communément suivis sont actuel-
lement ceux de la conférence de consensus américaine publiée
en 1999 sur la ventilation non invasive dans les insuffisances res-
piratoires chroniques secondaires à un syndrome restrictif (6). Cette
conférence inclut la présence de symptômes (tableau II) et des
critères physiologiques suivants :
–PaCO2>45mmHg, et/ou
–oxymétrie nocturne montrant des désaturations en oxygène non
expliquées par une autre maladie, et/ou
–Pimax < 60 cm H2O ou une CVF < 50 % prédite.
Beaucoup de ces critères ne reposent pas sur des preuves scienti-
fiques très solides ; ils bénéficient toutefois de la grande expérience
des auteurs dans le domaine. Ils sont actuellement utilisés par la
plupart des équipes s’occupant de maladies neuromusculaires. Le
groupe SLA de la Société de pneumologie de langue française va
publier des recommandations de mise en route de la ventilation au
long cours qui seront très proches de ces critères.
Outre les critères médicaux, il ne faudra pas oublier que de nom-
breux paramètres entrent en compte dans l’indication d’une VNI :
l’avis du patient, de sa famille, les possibilités de logement, les pos-
sibilités de retour à domicile, les possibilités d’apprentissage de
ces techniques. Le pneumologue a l’expérience de ces contraintes
extramédicales chez les patients ventilés au long cours.
Méthodes de ventilation mécanique au long cours
✓La durée quotidienne de la VNI dépend du degré d’atteinte
de la ventilation ; elle se fait généralement la nuit au début de la
maladie.
✓Le mode de ventilation. La VNI doit toujours être privilégiée.
La nécessité d’une ventilation invasive est discutée plus loin.
✓Le type de ventilateur, l’interface et les réglages choisis
dépendent de la situation clinique, de l’environnement à domi-
cile et d’un choix personnel des équipes soignantes. Aucune diffé-
rence en termes d’efficacité n’a pu être démontrée entre les diverses
techniques. Des renseignements techniques sont disponibles sur
www.handicap.org pour les interfaces et sur http://www.chu-
rouen.fr/pneumobg/accueil.htm pour les ventilateurs, ainsi que
dans la série “Ventilation à domicile” publiée dans la Revue des
Maladies respiratoires (7-10).
✓Mise en route. Toute VNI doit être installée en plusieurs jours,
en structure hospitalière spécialisée. La prise en charge par l’assu-
rance maladie est de 100 % dans les maladies neuromusculaires.
Elle est installée à domicile par des prestataires de service asso-
ciatifs ou privés qui assureront tout le suivi technique, 24 heures
sur 24, 7 jours sur 7. Tout le territoire français sans exception est
couvert.
✓Information du patient. L’information du patient et de son
entourage sur l’insuffisance respiratoire et ses implications doit
être précoce, et il est indispensable qu’elle soit faite, comme le
suivi des patients, par des pneumologues ayant l’expérience du
sujet et une bonne connaissance de la ventilation à domicile et des
circuits correspondants.
Le sujet de la trachéotomie, de ses avantages et inconvénients, doit
être discuté de façon précoce.
✓Alternatives à la VNI. La ventilation par trachéotomie (dite
“invasive”) doit être réservée à des circonstances particulières :
décompensation respiratoire aiguë, dysfonction des muscles oro-
pharyngés empêchant la déglutition et l’expulsion des sécrétions
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La Lettre du Pneumologue - Volume VIII - no6 - novembre-décembre 2005
Tableau II. Signes cliniques d’atteinte respiratoire à rechercher sys-
tématiquement chez un patient atteint de maladie neuromusculaire.
Signes de dysfonction Signes d’hypoventilation Signes d’hypercapnie
diaphragmatique nocturne
✓Tachypnée ✓Asthénie diurne ✓Céphalées
✓Dyspnée à l’exercice ✓Sommeil non réparateur ✓Sueurs
puis au repos ✓Céphalées matinales ✓Troubles des fonctions
✓Diminution ✓Pollakiurie nocturne supérieures
de l’intensité de la voix ✓Troubles de la mémoire ✓Coma hypercapnique
✓Orthopnée ✓Cauchemars, notamment ✓Tachycardie
✓Utilisation des muscles à thème respiratoire ✓Tachypnée
respiratoires accessoires ✓Réveils nocturnes
(tirages, pouls respiratoire) fréquents
✓Respiration paradoxale, ✓Diminution
notamment allongée des performances scolaires
✓Diminution des
performances intellectuelles
✓Somnolence diurne
✓Irritabilité
✓Perte d’appétit
✓Baisse de la libido