S oins oncologiques de support
Soins oncologiques de support
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La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 7 - décembre 2006
des patients en insuffisance rénale aiguë ne présentant pas ces
facteurs de risque péjoratifs.
L’impact positif du traitement par EPO recombinante sur
l’anémie et la qualité de vie des patients a été largement
démontré. La question d’un impact négatif de ces traitements
sur le contrôle de la maladie et la survie a été soulevée dans
deux études portant sur les cancers du sein métastatiques
et ORL locorégionaux traités par radiothérapie. Les tissus
néoplasiques de 157 patients d’un des centres de l’essai portant
sur les cancers tête et cou ont été étudiés, en recherchant
l’expression ou non du récepteur à l’EPO à la surface des
cellules malades (19). Les survies sans progression ont alors
été analysées selon que les patients avaient reçu de l’EPO ou le
placebo et que leurs tissus étaient positifs ou non au récepteur
à l’EPO. Le traitement par EPO recombinante (rEPO) n’affecte
pas le pronostic des patients dont le cancer est récepteur EPO
négatif. En revanche, le risque de progression locorégionale
et de décès est augmenté pour ces patients traités par radio-
thérapie, ayant une positivité au récepteur et recevant un
traitement par rEPO comparativement à des patients traités
par placebo (risque relatif 1,4/0,7 = 2 ; p = 0,003). D’autres
études complémentaires sont attendues afin de déterminer le
mécanisme exact de ces résultats et de définir une conduite à
tenir pour les patients ORL en cours d’irradiation ayant une
maladie cancéreuse positive au récepteur à l’EPO.
Les soins de support regroupent l’ensemble des actions
nécessaires au confort du malade. Une étude randomisée
menée auprès de patients traités en phase avancée avec un
pronostic péjoratif a évalué la pertinence d’un groupe plu-
ridisciplinaire interventionnel en soins de support (20). Au-
delà des recommandations, des études évaluant les meilleurs
traitements, ce travail a prouvé l’intérêt d’un regroupement
de compétences autour du malade. L’objectif a été de prouver
l’intérêt d’une prise en charge des différents domaines de la
qualité de vie : cognitif, physique, émotionnel, spirituel et
social. Les interventions ont consisté en groupes de travail
de 90 minutes, réunis toutes les trois semaines, en présence
de plusieurs intervenants (notamment psychologues). Cha-
que séance a été structurée en phases de conditionnement
physique, d’informations, de stratégies cognitives, de parole
libre, et s’est close sur une période de relaxation. Le groupe
contrôle a bénéficié de consultations avec des oncologues en
suivant les recommandations de l’ASCO. Trois études portant
sur la qualité de vie ont été menées en début de traitement,
à S4, S8 et S27, au moyen des échelles Linear Analog Scale of
Assessment ou Spitzer Uniscale. Une amélioration de 3 points
de l’évaluation de base a été retrouvée dans le bras soumis à
l’intervention du groupe de travail, tandis que les patients suivis
de façon standard (groupe contrôle) ont eu une détérioration
de 9 points de leur évaluation initiale. La différence entre les
deux bras a été significative (p = 0,009), en faveur du groupe
d’accompagnement, prouvant par voie statistique l’intérêt
d’une telle prise en charge. Forts des réunions de concerta-
tion pluridisciplinaires imposées par le Plan cancer, on peut
imaginer la création de groupes de ce type rassemblant des
compétences volontaires dans chaque centre, visant à déve-
lopper sur le terrain l’accompagnement en soins de support
des malades.
OBSERVATOIRES
Deux observatoires importants ont été mis en place cette année.
Le programme EDIFICE (Étude sur le dépistage des cancers et
ses facteurs de compliance) a été réalisé auprès des médecins
généralistes ainsi que du grand public sur les cancers du sein,
du côlon, de la prostate et du poumon, dans le but d’effectuer
un état des lieux du dépistage des cancers en France. Ce premier
observatoire a mis en évidence que le cancer du sein est diagnos-
tiqué par le biais d’un dépistage dans 93 % des cas, dont 45 %
dans le cadre de dépistages organisés. Le cancer du poumon
est le cancer le moins dépisté (6 %), en l’absence de mesures
clairement identifiées. Le dépistage du cancer du côlon est plus
important dans les 22 départements dans lesquels il est organisé
(34 % contre 20 % dans les autres départements). Le cancer de
la prostate est le second cancer dépisté derrière celui du sein
(36 % des patients diagnostiqués l’ont été par un test de dépis-
tage) bien qu’il soit largement recommandé par les généralistes
(58 % contre 68 % pour le cancer du sein) [X. Pivot et al., ASCO
2006, abstract 6092 ; D. Serin et al., ASCO 2006, abstract 10701 ;
Y. Coscas et al., ASCO 2006, abstract 6078].
Le deuxième observatoire a porté sur la prise en charge initiale
des patients en cancérologie. Cette mine d’informations a été
recueillie sur un an, de mars 2005 à mars 2006, auprès de
1556 patients répartis dans 82 centres. Une immense majo-
rité de malades se sont dits satisfaits de leur prise en charge
(note de 8,2/10) et des informations reçues (94 %). Le dispositif
d’annonce et la formation des non-cancérologues à l’annonce
du diagnostic sont fondamentaux, puisque 90 % des annonces
n’ont pas été faites par un spécialiste du cancer. Soixante-dix
pour cent des patients souhaitent une prise en charge psycho-
logique, et 66 % un accès à un service social. La généralisation
et le développement du dispositif d’annonce doivent mobiliser
l’ensemble des centres traitant des patients atteints de cancer
(G. Ganem, communiqué de presse paru dans Le Quotidien du
médecin du 26 octobre 2006, p.13).
Cette année 2006, riche en recommandations des sociétés
savantes et en communications lors de congrès, a renforcé la
notion de soins de support en oncologie. Les traitements fonda-
mentaux tels que les EPO, les G-CSF ou les antiémétiques sont
codifiés, ainsi que la prise en charge des mucites. L’attention
portée aux anciens patients traités pour cancer augmente. Les
observatoires de prise en charge se multiplient. Au travers de la
prise de conscience de ce domaine de soin, la qualité d’accom-
pagnement des malades doit être en permanence améliorée.
Les recherches et les publications se développent. Gageons que
l’année 2007 sera au moins aussi riche que la précédente. O
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