Les relations de
flexion
et de dérivation se
différencient
aussi par leurs
propriétés
logiques.
La relation de
flexion
est une relation
d’équivalence
(donc une relation
réflexive,
symétrique et
transitive) dans l
’ensemble
de tous les mots (graphiques ou phonologiques).
Comme
toute
relation
d’équivalence
est
réflexive,
il s’ensuit que la relation de
flexion
est « totale » dans
l’ensemble
des mots d’une
langue:
en effet, puisque
tout
mot entre en relation de
flexion
avec lui-
même,
il s’ensuit que
tout
mot entre dans la relation de
flexion
avec au moins un mot. Par
ailleurs,
une relation
d’équivalence
dans un
ensemble
définit une
partition
de cet
ensemble
en
classes
d’équivalence
(c’est-à-dire, techniquement, un ens
emble
de
parties
non-vides disjointes
deux
à
deux,
dont l’union
égale
l’ensemble
en question); dès lors, la relation de
flexion
définit une
partition
de
l’ensemble
des mots d’une
langue
en classes
d’équivalence.
Pour
concrétiser
les choses, considérons l’ensemble des citoyens belges actuellement en vie. La relation
« avoir la même taille que » est une relation
d’équivalence
dans cet ensemble. En effet, toute personne a la
même taille
qu’elle-même
(réflexivité);
si A a la même taille que
B,
alors B a la même taille que A
(symétrie); si B a la même taille que A, et que C a la même taille que
B,
alors C a la même taille que A
(transitivité). Pour autant qu’on se donne un ensemble discret de mesures de tailles
(c’est-à-dire
qu’on
s’arrête
par exemple au centimètre en se mettant
d’accord
sur une
procédure
d’approximation par
« arrondissement » vers le haut ou vers le bas), cette relation définit une partition aisément
concevable
de
manière
intuitive.
Cette relation est aussi totale, car même si j’ai une taille de
3,20m,
il existe une classe
d’équivalence
dont je suis le seul élément; aucun citoyen belge actuellement en vie ne saurait donc tomber
« en dehors » de la partition en cause.
La relation de dérivation est une relation d’ordre
irréflexive,
asymétrique et intransitive
dans
l’ensemble
des
lexèmes
d’une
langue.
C’est aussi une relation qui
peut
être « partielle » (et
qui, dans les faits, est toujours partielle) en ce sens qu’il est possible (et, dans les faits, toujours
vérifié)
que certains
lexèmes
n’entrent en relation de dérivation avec aucun
lexème
(ce qui
exige
l’irréflexivité).
Pour
concrétiser
les choses, considérons de nouveau l’ensemble des citoyens belges actuellement en vie.
La relation « avoir la taille immédiatement
inférieure
à celle de » est une relation d’ordre
irréflexive,
asymétrique et intransitive dans cet ensemble. En effet, personne n’a la taille immédiatement
inférieure
à la
sienne propre (irréflexivité); si A a la taille immédiatement
inférieure
à celle de
B,
alors B n’a pas la taille
immédiatement
inférieure
à celle de A (asymétrie); si B a la taille immédiatement
inférieure
à celle de A, et
C a la taille immédiatement
inférieure
à celle de
B,
alors C n’a pas la taille immédiatement
inférieure
à
celle de A (intransitivité). Cette relation peut être partielle, car si aucun citoyen belge ne mesure
1,21m
et
qu’aucun citoyen belge ne mesure
1,23m,
alors celui qui se trouverait mesurer 1,22 ne saurait constituer
l’un des termes de la relation « avoir la taille immédiatement
inférieure
à celle de ».
Propriétés
empiriques
de la
flexion
La théorie
morphologique
se donne
comme
contrainte empirique que
chacune
des classes
d’équivalence
définies par la relation de
flexion
doit se voir correspondre un et un seul
lexème.
Comme nous le verrons
bientôt,
l’inverse n’est pas vrai: certains lexèmes se voient
correspondre
plus d’une
classe flexionnelle.
Ceci impose que les mots graphiques ou phonologiques qui
peuvent
réaliser
des
lexèmes
différents soient expressément distingués
(« désambiguïsés »)
: on devra donc distinguer