La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XVI - n° 5 - septembre-octobre 2013 | 209
selon les estimations, 130 à 300 fois plus élevé chez
les personnes atteintes de PAF que dans la popula-
tion générale (8).
◆Polypose duodénale et périampullaire
La polypose duodénale touche plus de 90 % des
patients porteurs de PAF (8). L’âge moyen de décou-
verte d’un cancer du duodénum est de 52 ans. Les
polypes se développent préférentiellement, par
ordre croissant, au niveau de l’ampoule de Vater, du
duodénum proximal et distal et du jéjunum proximal.
Sur le plan endoscopique, les polypes duodénaux
apparaissent petits, plans ou sessiles ; la majorité
des lésions se situe dans les segments D2 et D3, et
épargne le bulbe duodénal avec une atteinte préfé-
rentielle de la zone périampullaire.
Une endoscopie avec vision latérale associée à une
coloration par indigo-carmin est l’examen de réfé-
rence pour le dépistage de ces polypes.
La gravité de l’atteinte duodénale est évaluée par
le score endoscopique et anatomopathologique de
Spigelman. Ce score prend en compte le nombre des
polypes, leurs tailles, leurs types histologiques et
leurs degrés de dysplasie (9). Il comprend 5 stades
allant de 0 à 4, les stades 0 à 2 définissant une
polypose modérée et les stades 3 et 4, une polypose
duodénale sévère.
Plusieurs études ont montré qu’il y avait une aggra-
vation de la polypose duodénale avec le temps.
Cette progression est loin d’être systématique, et
de nombreux cas de stabilité prolongée, voire d’amé-
lioration spontanée des lésions duodénales, ont
été rapportés. Enfin, la classification de Spigelman
semble être un outil peu sensible, ne permettant pas
de dépister l’ensemble des carcinomes duodénaux.
F. Caillié et al. rapportent une série de 19 duodéno-
pancréatectomies céphaliques avec préservation
pylorique pour polypose duodénale sévère. L’examen
histologique définitif retrouvait 7 carcinomes invasifs
dont un seul avait été diagnostiqué avant l’opéra-
tion, c’est-à-dire que 32 % des malades opérés sans
néoplasie diagnostiquée avant l’opération présen-
taient a posteriori un cancer (10). Cela doit être pris en
compte dans la surveillance et le choix thérapeutique.
Le risque cumulé de transformations carcinomateuses
reste cependant limité, de l’ordre de 4 à 10 % à 75 ans.
◆Dystrophie glandulokystique et adénomes
de l’estomac
L’estomac est fréquemment le siège d’une poly-
pose glandulokystique, qui atteint près de 50 % des
patients atteints de polypose. Elle prédomine dans le
fundus et se présente sous la forme de polypes de 1 à
5 mm de diamètre, semi-sessiles, de la même couleur
que la muqueuse gastrique. Histologiquement, ils
correspondent à une dilatation kystique de la glande
fundique sans dysplasie (11). Bien que quelques cas
de dysplasie et cancer aient été décrits, on ne consi-
dère pas que la polypose glandulo kystique présente
un risque de dégénérescence.
L’estomac peut aussi être le siège d’adénomes.
Ceux-ci prédominent dans l’antre et touchent
7 à 14 % des cas (11). L’histoire naturelle de ces
adénomes n’est pas bien connue, mais le risque
d’adénocarcinome de l’antre dans les popula-
tions occidentales ne semble pas plus élevé : seuls
quelques cas ont été rapportés (11).
◆Atteinte de l’intestin grêle
Des polypes jéjunaux et iléaux sont présents dans
30 à 60 % des cas. Ces polypes sont générale-
ment infracentimétriques, et prédominent dans le
jéjunum. L’anatomopathologie de ces polypes n’est
pas connue et peut correspondre à des hyperplasies
lymphoïdes folliculaires plus qu’à des adénomes. Les
adénocarcinomes du jéjunum restent rarissimes. En
revanche, des polypes iléaux sont observés après
chirurgie colique prophylactique.
Après coloproctectomie et anastomose iléoanale
Après anastomose iléoanale (AIA), le risque de
développer des polypes du réservoir iléal est de
75 % des cas à 15 ans. Dans une série prospective
de 33 patients colectomisés pour PAF, Thompson-
Fawcett et al. ont montré que 33 % des patients
sans polypes macroscopiques présentaient des
microadénomes sur des biopsies réalisées de façon
systématique (12).
Le risque de développer un adénocarcinome dans
le réservoir reste cependant très faible : très peu de
cas sont rapportés dans la littérature. De plus, dans
la majorité d'entre eux, il est difficile de distinguer
les adénocarcinomes développés sur les adénomes
récurrents du réservoir, ceux de la zone transition-
nelle au niveau de l’anastomose et ceux qui se
développent sur la muqueuse rectale restante. Il
n’existe pas de recommandation concernant la
place de la surveillance de l’intestin grêle chez les
patients porteurs de PAF avant et après une colec-
tomie totale.
Après colectomie totale et anastomose iléorectale
L’incidence des adénomes iléaux dans l’anse affé-
rente a peu été étudiée. C.J. Groves et al. (13) ont
retrouvé 2 % d’adénomes iléaux en amont d’une
anastomose iléorectale et 5 % de microadénomes
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