DOSSIER THÉMATIQUE
La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue - n° 4 - vol. II - septembre 1999200
ASSOCIATIONS CHIMIOTHÉRAPIE-RADIOTHÉRAPIE
ADJUVANTE
Radio-chimiothérapie postopératoire
L’étude du GITSG a montré en 1986 une amélioration de la sur-
vie sans récidive et de la survie brute avec une combinaison radio-
thérapie-chimiothérapie postopératoire (pendant dix-huit mois !),
par rapport à la chirurgie seule. Plus tard, en 1991, Krook et coll.
rapportaient une étude du NCCTG (18) montrant la supériorité
d’une association chimiothérapie postopératoire (5FU-MeCCNU
deux cures seulement) suivie de radiothérapie (45-50 Gy) + 5FU,
sur la radiothérapie postopératoire seule avec une réduction du
risque relatif de rechute de 34 % et une réduction du risque de
décès de 29 %. La survie sans récidive à cinq ans était de 58,5 %
contre 37,3 % dans le groupe radiothérapie (p = 0,0016). Il exis-
tait une réduction significative du taux de récidive locale et du
taux de métastases. La survie brute à cinq ans était également
améliorée de façon significative (58 versus 47 % ; p = 0,025).
Les résultats de l’étude de Krook joints à ceux de l’étude du
GITSG ont contribué à faire considérer à partir de 1991, au moins
aux États-Unis, la radio-chimiothérapie postopératoire comme
un traitement recommandé dans les cancers du rectum B2 et C,
avec quelques réserves liées à la toxicité du methylCCNU et bien
qu’une troisième étude de l’ECOG, rapportée sous forme de
résumé la même année, ne retrouvait pas de bénéfice avec l’as-
sociation radiothérapie postopératoire + 5FU-MeCCNU (15).
Les autres études comparaient deux types de radio-chimiothéra-
pie postopératoire (tableau IV) : l’étude du GITSG (7180) et une
étude intergroupe coordonnée par le NCCTG (INT 86-4751) ont
comparé l’efficacité d’une chimiothérapie par 5FU seul ou 5FU-
methylCCNU pendant six mois (19-21). Tous les patients rece-
vaient d’abord une radiothérapie postopératoire combinée à du
5FU. Ces deux études, qui ont porté respectivement sur 210 et
453 patients, ne retrouvaient pas de différence sur la survie sans
récidive selon que les patients aient reçu ou non du methylCCNU,
alors que ce produit augmente la toxicité.
Ces résultats devaient amener le National Cancer Institute à “aler-
ter” les cliniciens en mars 1991 sur l’intérêt de la radio-chimio-
thérapie postopératoire : cette note recommandait l’utilisation
d’une radio-chimiothérapie postopératoire à base de 5FU pour
réduire le risque de rechute et de décès chez les patients opé-
rés d’un cancer du rectum (B2 ou C) et précisait que ce traite-
ment constituait le bras contrôle de l’essai intergroupe en cours
INT 0114. Le détail du protocole est donné dans le tableau V.
Plus récemment, en mai 93, le NCCTG présentait sous une autre
forme les résultats de leur étude intergroupe (22) : en effet, les
patients étaient randomisés pour recevoir une chimiothérapie de
six mois par le 5FU seul ou associé au MeCCNU (sans impact sur
la survie sans récidive), mais aussi sur le mode de radio-chimio-
thérapie concomitante postopératoire délivrant soit du 5FU IV en
bolus trois jours successifs pendant la première et la dernière
semaine de la radiothérapie, soit du 5FU continu pendant les cinq
semaines de la radiothérapie. Sur les 680 patients inclus, avec un
recul de 46 mois, il apparaît que les patients ayant reçu le 5FU
continu avaient une amélioration très significative de la survie sans
récidive à quatre ans (63 versus 53 % ; p = 0,01) et de la survie
brute (70 versus 60 % ; p = 0,005) ; ce qui correspond à une réduc-
tion relative du risque de rechute de 27 %, et à une réduction rela-
tive du risque de décès de 31 %. Enfin, l’amélioration de la sur-
vie sans rechute paraissait plus liée à une diminution du taux des
récidives métastatiques (de 47 à 37 % ; p = 0,03), qu’à une dimi-
nution du taux des récidives locales (NS ; p = 0,11).
Radio-chimiothérapie préopératoire
Cette voie paraît plus prometteuse compte tenu de la supériorité de
la radiothérapie préopératoire sur la radiothérapie postopératoire en
terme d’efficacité sur les rechutes locales et de tolérance. Malheu-
reusement, elle a été plus ou moins abandonnée pendant quelques
années, après la publication d’un essai de l’EORTC, en 1984, ne
retrouvant pas d’avantage et rapportant même une toxicité accrue
avec une association 5FU-radiothérapie préopératoire par rapport à
la radiothérapie préopératoire seule (23). Cependant, la technique
de radiothérapie (34,5 Gy/15 fractions sur le pelvis et les ganglions
lombo-aortiques jusqu’en L2) était probablement inadaptée.
Plus récemment, Bosset et coll. en France (24) et Minsky et
coll. aux États-Unis (25) ont réalisé des essais de phase I-II tes-
Tableau IV. Cancers
du rectum (B2 ET C) : essais
contrôlés comparant deux
types de radio-chimiothérapie
postopératoire.
Groupe Patients Traitement Survie Survie
Auteurs/Année (évaluables) sans récidive
GITSG 210 (199) RT-5FU + 5FU-MeCCNU (6 mois)
(Weaver, 1990) RT-5FU + FU (6 mois) NS NS
NCCTG-Mayo 453 (445) RT-5FU + 5FU-MeCCNU (6 mois)
(O’Connel, 1991, 1994) RT-5FU + 5FU (6 mois) NS NS
NCCTG-Mayo 680 (660) RT-5FU (IVD)+ 5FU ± MeCCNU 53 % * 60 %*
(O’Connel, 1993, 1994) RT-5FU (continu)+ 5FU±MeCCNU 63 % 70 %
(p = 0,01) (p = 0,005)
* résultats à 4 ans