La Lettre du Pneumologue • Vol. XIII - n° 2 - mars-avril 2010 | 57
MISE AU POINT
comparer aux clichés antérieurs. Une hospitalisation
est préférable. La prise en charge associe un traitement
symptomatique (désobstruction rhinopharyngée, kiné-
sithérapie respiratoire, oxygénothérapie ou assistance
ventilatoire, arrêt éventuel de l’alimentation, etc.) et
éventuellement anti-infectieux (antibiotique, antiviral,
immunothérapie anti-VRS hors AMM). En cas de DBP,
un traitement spécifique peut être indiqué :
– en cas de surcharge pulmonaire : furosémide
(Lasilix
®
) 1 mg/kg en intraveineux direct, à renouveler
si besoin, et restriction hydrique ;
– en cas de signes spastiques : aérosols de salbutamol
(Ventoline
®
) et/ou d’ipratropium (Atrovent
®
) dont les
fréquences et les durées dépendent de la sévérité et de
l’évolution (aucune étude n’a cependant pu démontrer
leur efficacité dans ce cadre) ;
– quel que soit le mode de décompensation : cortico-
thérapie courte (3 à 5 jours) à 2 mg/kg x 1/j.
En cas de DBP symptomatique (symptomatologie chro-
nique, décompensations répétées, hospitalisation), un
traitement de fond peut être proposé. Il doit être adapté
en permanence à l’évolution clinique du patient, qui,
nécessairement, associera des périodes d’aggravation
et d’amélioration. Les thérapeutiques à proposer sont :
– une oxygénothérapie à domicile en cas d’hypoxie
persistante ou d’HTAP. La durée quotidienne (souvent
supérieure à 15 h/j) et le débit (souvent faible, inferieur
à 1 l/mn) sont adaptés pour une oxymétrie transcu-
tanée cible supérieure à 92 %. Cette oxymétrie est
contrôlée 1 fois par mois, éventuellement à domicile,
par un enregistrement continu durant des phases
d’éveil, d’alimentation et de sommeil (20) ;
– une ventilation non invasive en cas d’insuffisance
respiratoire chronique sévère hypercapnique ;
– des bronchodilatateurs (salbutamol, terbutaline) en
cas de symptomatologie spastique. Son efficacité est
très variable d’un patient à l’autre, et doit être vérifiée
cliniquement avant d’être poursuivie. Son intérêt peut
être étayé par des EFR, bien qu’elles soient difficiles
à réaliser chez les nourrissons. Les posologies ou les
modalités d’administration (nébulisations, aérosol
doseurs) sont identiques à celles de la bronchite chro-
nique obstructive (BPCO) ;
– une corticothérapie. Elle doit être facilement pres-
crite dans la première année de vie, puis en cas de
dysplasie sévère (plus de 3 épisodes de dyspnée par
an, corticothérapie courte, à forte dose et fréquente).
Il convient de privilégier les nébulisations aux voies
générales et de chercher la posologie minimale efficace.
Le praticien doit garder en tête les risques majeurs
d’effets indésirables des doses cumulées reçues par les
patients atteints de DBP : diminution de l’alvéolisation
pulmonaire, HTA, rétinopathie, anomalie neurologique
à long terme, retard de croissance, diabète. Les poso-
logies ou les modalités d’administration (voie orale,
nébulisations, aérosol doseurs) sont identiques à celles
de l’asthme (21) ;
– des diurétiques en cas de surcharge pulmonaire chro-
nique ou de décompensations répétées. La spirono-
lactone (Aldactone
®
, 5 mg/kg/j en 2 prises) a montré
son efficacité sur la fonction respiratoire et l’oxygéno-
dépendance dans la première année de vie (22). En
seconde intention, l’hydrochlorothiazide (Esidrex
®
)
peut être proposé.
La nature et la fréquence du suivi dépendent de l’âge, de
la sévérité initiale et de l’évolution clinique. En l’absence
de DBP, les enfants nés prématurés ne nécessitent pas
de suivi pneumologique spécifique. En cas de DBP,
un suivi pneumologique est souhaitable durant les 2
premières années de vie, les plus à risque de décom-
pensations. Les enfants peu ou non symptomatiques
nécessitent un suivi pneumologique tous les 4 à 6 mois
dans les 2 premières années de vie. Les enfants les plus
symptomatiques (traitement de fond, symptomato-
logie chronique, décompensations répétées, hospita-
lisations, etc.) ont besoin d’un suivi pneumologique au
long cours, tous les 2 à 3 mois dans la première année
de vie, puis selon l’évolution. Au-delà de 2-3 ans, seuls
les enfants encore symptomatiques nécessitent un suivi
particulier, qui sera identique à celui d’un enfant asth-
matique. Le rôle du scanner thoracique est controversé
et réservé aux enfants les plus symptomatiques étant
donné le peu d’impact thérapeutique. De même, en
cas de persistance des symptômes respiratoires, des
EFR peuvent êtres proposées dès 3-4 ans (mesure des
volumes et résistances) et vers 5-7 ans pour des EFR
complètes.
Conclusion
Les conséquences pulmonaires de la prématurité se sont
modifiées avec l’arrivée de la “nouvelle DBP”. Ces consé-
quences ne sont plus seulement la DBP des 2 premières
années de vie, mais une “maladie pulmonaire chronique
postnéonatale” évoluant jusqu’à l’âge adulte. En effet, la
définition de la DBP fondée sur l’unique oxygénodépen-
dance est aujourd’hui très critiquée, notamment parce
qu’elle rassemble sous un même nom des pathologies
très différentes dans leur présentation et leur évolu-
tion. Une meilleure compréhension du développement
pulmonaire et des mécanismes d’agression permettra
de développer de nouveaux axes thérapeutiques. Il s’agit
notamment de diminuer une corticothérapie, certes
efficace, mais dont les effets délétères à long terme
sont de mieux en mieux connus. ■
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