Donner la priorité au collège
Redéfinir le collège
Le « collège unique » des années 75, devenu le « collège pour tous » des
années 95 puis le « collège pour tous et pour chacun » des années 2000, est
présenté, dans la circulaire de rentrée 2003, comme le « collège réellement
pour tous ». Ces glissements sémantiques successifs, comme l’insistance
volontariste marquée par l’adverbe réellement, révèlent les difficultés perma-
nentes pour caractériser ce niveau d’enseignement pourtant essentiel.
Le collège est une structure récente, mal définie à ses origines et à la
recherche d’un équilibre entre l’école et le lycée. Il accueille des élèves – qui
quittent l’école primaire en étant de plus en plus différents les uns des
autres – dans des établissements très variés (collèges ruraux et urbains,
grands et petits, de banlieue ou de centre-ville) sans qu’on se soit jamais véri-
tablement mis d’accord sur les objectifs poursuivis. Il a donc éprouvé et
éprouve encore de très grandes difficultés à affirmer son identité. De plus,
des formes de filiarisation rampantes ou déclarées (dérogations à la carte
scolaire, choix des langues, choix des sections, par exemple européennes)
viennent encore, d’un collège à l’autre ou au sein d’un même collège, brouil-
ler le paysage. Ainsi certains collèges se veulent essentiellement « pour
tous » et d’autres avant tout « pour chacun ».
L’enseignement dispensé est, à l’origine, calqué sur celui du lycée
d’enseignement général, avec la prédominance de disciplines juxtaposées et
des tentatives constantes, parfois maladroites, pour développer des formes
d’interdisciplinarité et des démarches pédagogiques (du projet, du détour)
qui se mettent difficilement en place car elles sont exigeantes et appellent des
formes de concertation.
Ainsi le collège se caractérise-t-il par un tronc commun de disciplines
qui apparaissent indispensables pour poursuivre, au lycée d’enseignement
général, le cursus secondaire et, à la périphérie, des actions de contourne-
ment, travaux croisés, parcours diversifiés et, aujourd’hui, itinéraires de
découverte. La succession de ces dispositifs montre l’incapacité persistante à
construire de manière cohérente la structure et les contenus des savoirs
enseignés au collège.
Comment répondre à l’hétérogénéité ?
On a voulu gérer l’hétérogénéité en multipliant les aides ponctuelles et les
mesures de discrimination positive, mais l’a-t-on suffisamment analysée ?
N’a-t-on pas, par exemple, confondu, pendant de nombreuses années, les
élèves en difficulté, ayant besoin d’aide mais ne refusant pas le système sco-
laire, et les élèves en échec, qui sont en situation de décrochage et de rup-
L’ÉCOLE AUJOURD’HUI
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