R e v u e d e ... Coordination : Philippe Beuzeboc et Stéphane Oudard (Paris)

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COMMENTÉES EN LIGNECOMMENTÉES EN LIGNE
Correspondances en Onco-Urologie - Vol. III - no 3 - juillet-août-septembre 2012
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Coordination : Philippe Beuzeboc et Stéphane Oudard (Paris)
Intérêt du PET-FDG dans le bilan
d’extension du cancer invasif dupénis
Cette étude prospective et monocentrique nantaise a
évalué l’intérêt du PET scan au FDG avant une opération
chez 30 patients traités entre mars 2005 et janvier 2010.
Le statut ganglionnaire a été étudié chez 22 sujets cN0
dans le but de détecter des métastases infracliniques,
et chez 8 sujets cN+ dans le but de quantifi er l’impor-
tance de l’envahissement ganglionnaire. La sensibilité
et la spécifi cité du PET pour les 22 patients cN0 ont été
respectivement de 75 % et de 87,5 %, avec des valeurs
prédictives positive et négative de 37,5 % et de 97,2 %.
Pour les 8 patients cN+, la sensibilité et les valeurs prédic-
tives positive et négative étaient de 100 %. Dans 3 cas
classés cliniquement cN1, le PET a permis de confi rmer
l’atteinte métastatique et de modifi er le stade en pN2.
Commentaire
Cette étude confi rme l’intérêt potentiel du PET-FDG dans les
cancers invasifs du pénis pour détecter un envahissement
ganglionnaire infraclinique.
P. Beuzeboc, Paris
Souillac I, Rigaud J, Ansquer C et al. Prospective evaluation of
18
F-fl uorodeoxyglucose positron emission tomography-computerized
tomography to assess inguinal lymph node status in invasive squamous
cell carcinoma of the penis. J Urol 2012;187(2):493-7.
Le dénosumab retarde l’apparition
desmétastases osseuses dans le cancer
dela prostate résistant à la castration,
mais un traitement prolongé expose
à unrisque élevé d’ostéonécrose
delamâchoire
Dans cet essai de phase III mené en double aveugle,
1 432 patients (inclus dans 319 centres de 30 pays)
souffrant d’un cancer de la prostate résistant à la
castration non métastatique à haut risque de méta stases
osseuses (PSA ≥ 8 ng/ml, ou temps de doublement du
PSA ≤ 10 mois, ou les 2) ont été randomisés (1:1) pour
recevoir du dénosumab 120 mg s.c. (n = 716) ou un
placebo (n = 716) toutes les 4 semaines. Une stratifi -
cation était prévue en fonction des critères d’éligibilité
PSA et selon que les patients recevaient ou avaient reçu
une chimiothérapie ou non. Le critère de jugement
principal était la survie sans métastase osseuse ou le
décès quelle que soit la cause. L’analyse a été faite en
intention de traitement (ITT). Les résultats montrent que
le dénosumab augmente signifi cativement la médiane
de survie sans métastase osseuse de 4,2 mois : 29,5 mois
(IC95 : 25,4-33,3) versus 25,2 mois (IC95 : 22,2-29,5) ;
HR = 0,85 (IC
95
: 0,73-0,98 ; p = 0,028). Le dénosumab
retarde également le temps jusqu’à la première
métastase osseuse : 33,2 mois (IC95 : 29,5-38,0) versus
29,5 mois (IC95 : 22,4-33,1) ; HR = 0,84 (IC95 : 0,71-0,98 ;
p = 0,032). La survie globale nest en revanche pas diff é-
rente dans les 2 groupes : 43,9 mois sous dénosumab
versus 44,8 mois sous placebo (HR = 1,01 ; IC95 : 0,85-1,20 ;
p = 0,91). Les taux d’eff ets indésirables sérieux sont
comparables dans les 2 groupes, à l’exception des ostéo-
nécroses de la mâchoire (ONJ) et des hypo calcémies :
33 patients (5 %) ont développé une ONJ et 12 patients
(2 %), une hypocalcémie.
Commentaire
Malgré ces résultats positifs concernant le critère de jugement
principal, l’indication du dénosumab dans la prévention des
métastases osseuses du cancer de la prostate résistant à la
castration non métastatique na pas été retenue, en raison
d’un bénéfi ce insuffi sant en regard du risque élevé d’ONJ, lié
sans doute à une durée de traitement prolongée. Il faut noter
que la médiane de survie globale est de 44mois. Comme
pour l’acide zolédronique, une longue durée d’exposition
augmente fortement le risque d’ONJ. Lindication pourrait
néanmoins être rediscutée pour les sous-groupes les plus
agressifs présentant un temps de doublement du PSA court,
car le bénéfice en termes de délai jusqu’à apparition de
méta stases osseuses peut atteindre 8mois.
P. Beuzeboc, Paris
Smith MR, Saad F, Coleman R et al. Denosumab and bone-metastasis-
free survival in men with castration-resistant prostate cancer: results of a
phase 3, randomised, placebo-controlled trial. Lancet 2012;379(9810):39-46.
Le célécoxib ne potentialise pas l’eff et
thérapeutique de l’hormonothérapie
dans les cancers de la prostate
hormonosensibles
Ce résultat est l’un des premiers de l’étude anglaise
contrôlée et randomisée multibras STAMPEDE. Les
patients, nouvellement diagnostiqués ou en récidive
rapide, traités par une hormonothérapie pour la
première fois, étaient randomisés pour recevoir ou non
PÉNIS
PROSTATE
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du célécoxib 400 mg × 2/j durant 1 an ou
jusqu’à progression. Le critère intermédiaire
de jugement était la survie sans échec. Entre
octobre 2005 et janvier 2011, 584 patients
ont été inclus dans le bras témoin hormono-
thérapie seule et 291 dans le bras combiné.
L’analyse intermédiaire programmée n’a
pas montré de diff érence (HR = 0,98 ; IC
95
:
0,90-1,06). Les survies sans échec à 2 ans ont
été de 51 % dans les 2 bras.
Commentaire
Après leur échec dans le cancer du sein, les inhibi-
teurs de COX-2 se révèlent aussi ineffi caces dans
le cancer de la prostate. La fi n d’un concept…
P. Beuzeboc, Paris
James ND, Sydes MR, Mason MD et al.; for the STAMPEDE
investigators. Celecoxib plus hormone therapy versus hor-
mone therapy alone for hormone-sensitive prostate cancer:
rst results from the STAMPEDE multiarm, multistage, rando-
mised controlled trial. Lancet Oncol 2012;13(5):549-58.
Quelle est la dose optimale
dedénosumab à utiliser
dansletraitement desmétastases
osseuses destumeurs solides ?
Rien de neuf,
maisuneconfi rmation…
Le taux de N-télopeptide urinaire rappor
à la créatininurie (uNTx/Cr) représente un
marqueur classique de la résorption osseuse.
Le but de cette étude était de caractériser
quantitativement la baisse de uNTx/Cr en
fonction de l’exposition au dénosumab utilisé
suivant différentes modalités de doses et
d’intervalles, mais aussi d’un certain nombre
de variables individuelles.
Les données pharmacocinétiques du
dénosumab et la baisse des marqueurs de
résorption ont fait l’objet de nombreuses
études. La biodisponibilité du dénosumab
est de 65 % après son administration sous-
cutanée (1). L’absorption est lente, avec un
pic de concentration (C
max
) survenant dans
les 4 semaines après l’injection. Les concen-
trations baissent ensuite en 4 ou 5 mois ; la
demi-vie est de 25 à 30 jours. Après des
injections mensuelles répétées, on observe
un état stable (× 2,7 environ). Les niveaux
de uNTx/ Cr baissent dès le lendemain de
l’injection avec une durée de suppression
maximale augmentant généralement
avec la dose, persistant pendant plus de
12 semaines après une dose de 3 mg/kg. La
réversibilité de ces eff ets est observée à l’arrêt
du dénosumab.
Pour répondre à la question de la réponse
uNTx/Cr en fonction des concentrations
de dénosumab, ont été analysées avec un
système de modélisation pharmacocinétique
et pharmacodynamique les données de
2 013 échantillons provenant de 373 patients
traités dans 6 études par une ou plusieurs
injections sous-cutanées avec des doses
s’échelonnant de 30 à 180 mg, administrées
toutes les 4 à 12 semaines pour une durée
maximale de 3 ans.
Premièrement, on observe une relation entre
le uNTx/Cr et la concentration sérique de
dénosumab. Deuxièmement, à la dose de
120 mg sur 4 semaines, 95 % des patients
présentent des taux de uNTx/Cr inférieurs
à 50 nmol/l, valeur seuil en dessous de
laquelle il a été montré un risque 2 fois plus
faible d’avoir un SRE (Skeletal Related Event).
En revanche, il y a de plus larges fl uctuations
des concentrations sériques de dénosumab et
des taux de uNTx/Cr en cas d’administration
toutes les 12 semaines, avec le risque d’une
effi cacité moindre et d’un échappement…
Enfi n, l’âge, le poids, le sexe, l’ethnie et le type
de cancer évalués comme des covariables
potentielles ne modifi ent pas les données.
Commentaire
Le dénosumab a montré de façon constante une
baisse des taux de uNTx/Cr dans les méta stases
osseuses de différentes étiologies, dont les
cancers de la prostate, ce qui refl ète son effi cacité
contre la résorption osseuse. S.Doshi etal. ont
conclu de leur analyse modélisée que la dose de
120mg sur 4semaines représentait le schéma
optimal. Heureusement, c’est à cette dose que
le dénosumab a été utilisé dans les 4 études de
phaseIII…
P. Beuzeboc, Paris
Doshi S, Sutjandra L, Zheng J et al. Denosumab dose selec-
tion for patients with bone metastases from solid tumors.
Clin Cancer Res 2012;18(9):2648-57.
1. Gibiansky L, Sutjandra L, Doshi S et al. Population phar-
macokinetic analysis of denosumab in patients with bone
metastases from solid tumours. Clin Pharmacokinet 2012;
51(4):247-60.
Estimations de la mortalité
parcancer pour l’année 2012
à partir de la WHO Mortality
Database : baisse de 10 % pour
lecancer delaprostate en 5ans
Cette estimation concerne les 6 pays
européens les plus peuplés (France,
Allemagne, Italie, Pologne, Espagne et
Grande-Bretagne).
Pour les cancers de l’homme, on prédit
depuis 2007 une baisse de la mortalité
de 20 % pour lestomac, de 11 % pour les
leucémies, de 10 % pour le poumon et la
prostate, et de 7 % pour le côlon et le rectum.
Les taux sont stables pour le pancréas.
Commentaire
Ces données confi rment la diminution de 2 %
par an en ce qui concerne la mortalité par cancer
de la prostate, comparable à celle du cancer du
sein (9 % dans cette étude). Seul un diagnostic
précoce et les progrès de la prise en charge
peuvent expliquer cette amélioration. Diffi cile
d’intégrer sur le plan médicoscientifi que, dans
ce contexte, les arguments de la Haute Autorité
de santé contre un diagnostic précoce, sauf si les
raisons sont économiques…
P. Beuzeboc, Paris
Malvezzi M, Bertuccio P, Levi F, La Vecchia C, Negri E.
European cancer mortality predictions for the year 2012.
Ann Oncol 2012;23(4):1044-52.
Quel est l’intervalle de temps
idéal entre 2 dosages du PSA
pour le dépistage du cancer
delaprostate ?
Lobjectif de cette étude nippone était de
défi nir l’intervalle optimal entre les dosages
de PSA pour le dépistage du cancer de
la prostate chez des adultes sains. Une
étude rétrospective a été conduite sur une
population de 7 332 hommes sans cancer
de la prostate qui ont eu un bilan annuel,
incluant un dosage du PSA, entre 2005 et
2008, dans un centre national de médecine
préventive. Les hommes dont la valeur du
PSA était supérieure ou égale à 4 ng/ml ont
eu des examens complémentaires dans un
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seul et même service d’urologie. Les parti-
cipants ont été classés en fonction de leur
âge : inférieur à 50 ans ou supérieur ou égal
à 50 ans.
L’âge moyen des participants était de
50 ans. La valeur moyenne du PSA initial
était de 1,2 ng/ml. Chez les hommes de
plus de 50 ans, selon que le PSA initial était
inférieur à 1,0 ou compris entre 1,0 et 1,9,
entre 2,0 et 2,9 ou entre 3,0 et 3,9 ng/ml, l’inci-
dence cumulée du cancer de la prostate était
de 0 %, 0,1 %, 0,3 % et 5,7 %, respectivement.
Aucun cancer de la prostate n’a été diagnos-
tiqué chez les hommes de moins de 50 ans,
quelle que soit la valeur du PSA initial.
Les auteurs ont conclu que si le dosage du
PSA est recommandé pour le dépistage du
cancer de la prostate, les hommes de plus
de 50 ans présentant un PSA initial compris
entre 3,0 et 3,9 ng/ml pourraient n’avoir
qu’un dosage répété tous les 2 ans. Pour
les hommes ayant un PSA initial inférieur
à 3,0 ng/ml, un intervalle d’au moins 3 ans
entre les dosages serait approprié. Le dosage
du PSA pour le dépistage du cancer de la
prostate ne serait pas indiqué chez les
hommes de moins de 50 ans.
Commentaire
La principale limitation de cette étude dans
l’extrapolation des résultats à nos pratiques
tient au fait que tous les participants étaient
japonais. Lincidence du cancer de la prostate a
été rapportée comme étant plus faible dans les
populations asiatiques, et notamment au Japon.
Cependant, la principale étude sur le même sujet,
menée en Europe à la fi n des années1990, avait
montré qu’un intervalle de 4ans entre 2dosages
de PSA conduisait à manquer 13,3 % des cancers
et qu’aucun de ces cancers n’avait de caractéris-
tiques pronostiques péjoratives(1). Cette étude de
l’ERSPC (European Randomized study of Screening
for Prostate Cancer) n’avait pas pris en considé-
ration l’origine ethnique des participants, et il est
probable que des hommes d’ethnies à risque,
comme les Afro-Caribéens, aient été inclus. Au
nal, ce que nous pouvons retenir de cette étude
nippone, c’est que, avec un intervalle de dépistage
inférieur (2ans pour un PSA compris entre 3,0 et
3,9ng/ml) et dans une population à moindre
risque lié à l’ethnie, la probabilité de ne pas
diagnostiquer un cancer de la prostate était de 1 %.
Les prescriptions de dosages du PSA total ont
considérablement augmenté en France au
cours des dernières années. Enexcluant les
dosages réalisés pour le suivi de patients ayant
un cancer de la prostate diagnostiqué, leur
incidence est passée de 3,93millions en2004
à 4,99millions en2007. Sachant que le dosage
du PSA total coûte 18,54euros (B60 : 16,02€+
2,52€ pour le prélèvement) ou 34,92euros si
on lui associe le dosage du PSA libre (B120),
lecoût total annuel pour la société s’élève
donc à plus de 134millions d’euros (source :
étude Observa-Pur). Lespreuves apportées
par les études comme celles de D.Kobayashi
etal. devraient permettre une réduction de ces
dépenses sans mettre en danger le pronostic
des patients.
Y. Neuzillet, Suresnes
Kobayashi D, Takahashi O, Fukui T, Glasziou PP. Optimal
prostate-specifi c antigen screening interval for prostate
cancer. Ann Oncol 2012;23(5):1250-3.
1. Van der Cruijsen-Koeter IW, Van des Kwast TH, Schröder
FH. Interval carcinomas in the European Randomized Study
of Screening for Prostate Cancer (ERSPC)–Rotterdam. J Natl
Cancer Inst 2003;95(19):1462-6.
Facteurs prédictifs du devenir
après une prostatectomie totale
suivie d’une hormonothérapie
adjuvante chez des patients
ayant un cancer de la prostate
à haut risque de récidive, pT3
etavecdesmarges positives
Après une prostatectomie totale, les patients
traités par hormonothérapie adjuvante pour
un cancer de la prostate pT3 avec des marges
positives ont un risque élevé de récidive
biologique. Les auteurs de cette étude ont
identifi é les facteurs prédictifs de décès dans
ce groupe de patients.
Les patients traités par prostatectomie totale
suivie d’une hormonosuppression adjuvante
pour un cancer pT3a/b pN0-1 et ayant une
marge positive ont été sélectionnés pour
cette étude ancillaire d’un essai clinique
prospectif évaluant la prostatectomie dans
le cancer de la prostate à haut risque (défi ni
par un PSA supérieur à 20 ng/ml, par un
stade clinique T supérieur ou égal à 3a, ou
par un score de Gleason biopsique supérieur
ou égal à 8). Aucun des sujets n’avait reçu
de traitement hormonal néo-adjuvant ni de
radiothérapie.
Parmi les 550 patients de l’essai, 173 (31,5 %)
répondaient aux critères d’inclusion. La durée
médiane du suivi a été de 67 mois. Pour ces
patients, la survie spécifi que du cancer de la
prostate et la survie globale à 8 ans ont été
respectivement de 86,3 % et de 77 %. Le stade
tumoral et la marge positive au niveau du
col vésical ont été les facteurs prédictifs
indépendants de la mortalité spécifi que et
globale, et ils ont été utilisés pour stratifi er les
patients. Ceux ayant un cancer pT3b avec une
marge positive au col vésical avaient la plus
forte mortalité (survies spécifi que et globale
à 5 ans : 60 % et 52,3 %, respectivement), alors
que ceux ayant un cancer pT3a (quel que soit
le statut des marges et de l’envahissement
ganglionnaire) ou un cancer pT3b sans marge
positive au niveau du col vésical avaient des
survies spécifi que et globale à 8 ans de 92 %
et 84,9 %, respectivement.
Les résultats de cette étude montrent
l’hétéro généité des cancers de la prostate
à haut risque, pT3 et ayant des marges
positives. La stratification en fonction du
stade tumoral et du statut de la marge
chirurgicale au niveau du col vésical pourrait
permettre, d’après les auteurs, d’identifi er les
patients les plus à risque de décès et de leur
proposer des essais cliniques.
Dans la prise en charge thérapeutique
des cancers de la prostate à haut risque,
l’hormono-radiothérapie est actuellement
le traitement combiné de référence. La
prostatectomie totale est une option
possible, mais elle implique la réalisation
d’un curage ganglionnaire étendu et
d’une exérèse large de la prostate afi n de
diminuer les risques de marge chirurgicale
positive. En l’état actuel des connaissances,
l’effi cacité carcinologique de la prostatec-
tomie totale pour les formes localement
avancées est difficile à apprécier en
raison de l’hétérogénéité des séries et de
l’absence de précision sur les traitements
adjuvants ou sur ceux de rattrapage qui
leur sont associés. Cependant, le rationnel
de l’adjonction de l’hormonothérapie à la
chirurgie dans les cancers à haut risque est
le même que celui qui a permis d’obtenir
un gain de survie avec la radiothérapie.
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Avec ce traitement combiné, l’étude de
M. Spahn et al. montre quen l’absence de
marge positive au niveau du col vésical, les
taux de survie à long terme des patients
sont de l’ordre de 85 % à 90 %. Ces résultats
sont tout à fait encourageants si nous les
comparons à ceux obtenus avec l’hormono-
radiothérapie dans les études de l’EORTC et
du RTOG (78 % à 5 ans et 47 % à 10 ans) [1, 2].
LAFU et le GETUG ont récemment mis en place
une étude de phase III, randomisée, ouverte
et multicentrique, évaluant le bénéfi ce d’un
traitement hormonal adjuvant pendant
24 mois après une prostatectomie totale
chez des patients à haut risque de récidive.
Les sujets peuvent être inclus dans les 3 mois
suivant la prostatectomie s’ils ont un cancer de
la prostate dont le score de Gleason postopé-
ratoire est supérieur ou égal à 8 (ou supérieur
ou égal à 7 avec un foyer de grade 5), N0 ou
Nx, M0, sans marge positive, et si leur PSA
postopératoire est inférieur à 0,1 ng/ml. Les
résultats de cette étude AFU-GETUG 20 déter-
mineront la survie sans métastase à 10 ans
en fonction de l’adjonction ou non d’une
hormono thérapie adjuvante.
Commentaire
Létude de M.Spahn etal. montre que le schéma
thérapeutique “prostatectomie totale sans
marge+ hormonothérapie adjuvante, mimant
celui de l’hormono-radiothérapie et combinant
un traitement local et un traitement systémique,
permet d’obtenir des taux de survie très encoura-
geants. Ces résultats confortent l’intérêt majeur
d’une chirurgie adaptée aux cancers à haut risque
devant minimiser les marges au niveau du col
vésical, et ils nous incitent à inclure ces patients
dans l’étude GETUG/AFU20.
Y. Neuzillet, Suresnes
Spahn M, Briganti A, Capitanio U et al. Outcome predictors
of radical prostatectomy followed by adjuvant androgen
deprivation in patients with clinical high risk prostate
cancer and pT3 surgical margin positive disease. J Urol
2012;188(1):84-90.
1. Bolla M, Collette L, Blank L et al. Long-term results with
immediate androgen suppression and external irradiation
in patients with locally advanced prostate cancer (an
EORTC study): a phase III randomised trial. Lancet 2002;
360(9327):103-6.
2. Pilepich MV, Winter K, Lawton CA et al. Androgen sup-
pression adjuvant to defi nitive radiotherapy in prostate
carcinoma – long-term results of phase III RTOG 85-31. Int
J Radiat Oncol Biol Phys 2005;61(5):1285-90.
La prise en charge du cancer
delaprostate nest pas dictée
parPIVOT
Pour les hommes ayant un cancer de la
prostate détecté par le biais d’un dosage du
PSA, l’intérêt de la chirurgie par rapport à
l’observation n’est pas clairement défi ni.
Entre novembre 1994 et janvier 2002,
731 patients ayant un cancer de la prostate
localisé (âgés en moyenne de 67 ans et ayant
un PSA médian de 7,8 ng/ml) ont été rando-
misés pour être soit traités par prostatec-
tomie totale, soit surveillés. Ils ont été suivis
jusqu’en janvier 2010. Les critères d’évaluation
primaire et secondaire ont été respectivement
la mortalité globale et la mortalité spécifi que.
Au terme d’un suivi médian de 10 ans, 171
des 364 patients (47,0 %) traités par prosta-
tectomie totale et 183 des 367 patients
(49,9 %) surveillés sont décédés (HR = 0,88 ;
IC95 : 0,71-1,08 ; p = 0,22 ; réduction du risque
absolu de 2,9 points). La mortalité spécifi que
au cancer de la prostate (ou à son traitement)
a été de 5,8 % parmi les hommes traités par
prostatectomie totale et de 8,4 % parmi les
patients uniquement surveillés (HR = 0,63 ;
IC
95
: 0,36-11,09 ; réduction du risque absolu de
2,6 points). Leff et du traitement sur la mortalité
globale et spécifi que au cancer n’a pas été
diff érent selon l’âge, l’ethnie, les comorbidités,
le performance status ou les caractéristiques
histologiques de la tumeur. La prostatectomie
totale a été associée à une réduction de la
mortalité globale chez les patients ayant un
PSA supérieur à 10 ng/ml (p = 0,04) et possi-
blement chez ceux ayant une tumeur de risque
intermédiaire ou de haut risque (p = 0,07). Le
taux de complications liées à la prostatectomie
totale a été de 21,4 % et comprenait un décès.
Les auteurs concluent que, parmi les patients
ayant un cancer de la prostate localisé détecté
par le dosage du PSA, la prostatectomie totale
ne réduit pas signifi cativement le risque de
mortalité globale et spécifique à plus de
10 ans. Les différences absolues ont été
inférieures à 3 points.
Commentaire
À première vue, l’étude PIVOT apporterait donc
un argument supplémentaire en défaveur du
dépistage du cancer de la prostate. La contro-
verse concernant l’intérêt du dépistage par le
dosage du PSA, principalement alimentée par
les publications d’Andriol et al. et Schröder et
al., a conduit, en mai dernier, à l’émission d’une
recommandation de l’U.S. Preventive Services
Task Force aux États-Unis disant que “le cancer
de la prostate est une problématique de santé qui
aff ecte des milliers d’hommes et leurs familles”,
mais que “avant de réaliser un dosage du PSA,
chaque homme doit être informé qu’il n’y a qu’un
très faible bénéfi ce potentiel et des conséquences
signifi catives liées au traitement. L’U.S. Preventive
Services Task Force “encourage les cliniciens à
prendre en considération ces éléments formels
et à ne pas pratiquer de dépistage au moyen
du PSA sans que les individus dépistés aient été
informés de ses bénéfi ces/risques et aient pris
une décision éclairée.
Dans le cas de l’étude PIVOT, il est néanmoins
important de ne pas manquer de circons-
pection dans l’analyse des résultats pour ne
pas en pervertir le message. Premièrement, la
puissance statistique de cette étude nest pas suffi -
sante : 1200patients auraient dû être inclus et
randomisés afi n de pouvoir mettre en évidence
une réduction relative de 25% de la mortalité
avec une puissance de 90% et un risque α de 5%.
Or, les auteurs n’ont pu inclure que 731patients.
Deuxièmement, le choix de la mortalité globale
comme critère de jugement primaire nest pas
adéquat dans une pathologie où 85% des décès
ne lui sont pas attribuables. Létude aurait plutôt
dû être conçue pour mettre en évidence une diff é-
rence de mortalité spécifi que. Troisièmement,
dans le bras observation, 20% des patients ont
nalement reçu un traitement pour leur cancer
de la prostate. Inversement, 23% des patients du
bras prostatectomie radicale nont fi nalement pas
reçu ce traitement. En tenant compte de toutes
ces limitations, il apparaît une tendance à une
réduction de la mortalité spécifique chez les
patients ayant un cancer de la prostate de haut
risque.
Par ailleurs, la conclusion de l’étude PIVOT est
en contradiction avec celle de l’étude SPCG-4
publiée 1an plus tôt dans le même journal. Dans
cette étude comparant également la prostatec-
tomie totale à la surveillance, avec un eff ectif de
patients et un suivi comparables, Bill-Axelson et
al. rapportaient une diminution de la mortalité
spécifi que liée au cancer chez les patients traités
(14,6% versus 20,7% [p = 0,01] ; HR = 0,62 ;
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IC95 : 0,44-0,87 ; réduction du risque absolu de
6,1points). Le bénéfi ce de survie spécifi que en
faveur de la prostatectomie était observé dans
tous les groupes pronostiques, avec cependant
une restriction aux patients âgés de moins de
65ans. La diff érence principale entre ces 2études
reposait dans l’usage du PSA. Dans la cohorte
scandinave du SPCG-4, plus ancienne, 41,7%
des cancers ont été diagnostiqués par le biais
de symptômes et uniquement 5,2% lors d’un
dépistage. En revanche, dans l’étude PIVOT, les
cancers ont tous été dépistés par un dosage du
PSA.
Ce que montre donc l’étude PIVOT, c’est que le
dépistage du cancer de la prostate par le dosage
du PSA permet le diagnostic de cancers non létaux
et que, par conséquent, des critères de sélection
doivent être utilisés pour désigner les patients
qui bénéficieront du traitement en termes de
réduction de la mortalité spécifique. Pour les
spécialistes du cancer de la prostate, cet article
est fi nalement bien pauvre en informations. Outre
le fait qu’il est inadapté pour démontrer un tel
bénéfi ce, le schéma de l’étude PIVOT ne permet
pas non plus de défi nir ces critères. En revanche,
publiée dans un journal généraliste prestigieux, la
diff usion simpliste de sa conclusion pourrait avoir
des conséquences déplorables pour l’information
des patients.
Y. Neuzillet, Suresnes
Wilt TJ, Brawer MK, Jones KM et al.; Prostate Cancer
Intervention versus Observation Trial (PIVOT) Study Group.
Radical prostatectomy versus observation for localized pros-
tate cancer. N Engl J Med 2012;367(3):203-13.
Critères prédictifs de mortalité
spécifi que dans les essais HT-RT
De nombreux schémas d’association
d’hormono thérapies ont fait l’objet détudes
randomisées, et plusieurs ont notamment
démontré un bénéfi ce en survie globale par
rapport à la radiothérapie seule dans les
cancers de la prostate localisés. Le schéma
de l’EORTC (European Organisation for
Research and Treatment of Cancer) [Bolla
et al.], associant 3 ans d’hormonothérapie
à la radiothérapie, sest imposé dans les
cancers localement avancés. Cependant,
l’essai américain du Dana-Farber Cancer
Institute (D’Amico et al.) propose un schéma
différent associant 6 mois d’hormono-
thérapie à l’irradiation, avec également un
bénéfi ce en survie globale.
Afin d’améliorer la sélection des patients
candidats à ces associations d’hormono-
thérapie et d’irradiation dans les stades
localisés, A.V. D’Amico et al. ont analysé
une population de 734 patients, provenant
de 2 études randomisées positives − l’une
australienne, l’autre américaine − associant
6 mois d’hormono thérapie à la radiothérapie
prostatique, entre 1996 et 2001. Bien qu’il y
ait un léger avantage au schéma comportant
3 ans d’hormono thérapie associée, ce
traitement engendre une majoration des
toxicités : il serait donc utile de pouvoir
détecter précocement les patients candidats
à une hormonothérapie plutôt courte ou
allongée, associée à la radiothérapie.
Deux paramètres ont été plus spécifi quement
mis en avant : le nadir du PSA ainsi que le
PSA supérieur à 0,5 ng/ml à la fi n des 6 mois
d’hormonothérapie.
Les patients traités par 6 mois d’hormono-
thérapie et de radiothérapie avaient une
amélioration signifi cative de ces 2 paramètres
par rapport à ceux traités par radiothérapie
seule (p < 0,0001).
Ces 2 paramètres, à la fin des 6 mois
d’hormono thérapie, étaient corrélés à la
mortalité spécifi que par cancer de la prostate
dans les 2 essais, américain (nadir du PSA :
p = 0,0016 ; PSA à 6 mois : p = 0,017) et
australien (nadir du PSA : p < 0,0001 ; PSA à
6 mois : p = 0,0012).
Les auteurs concluent qu’après radiothérapie
et 6 mois d’hormonothérapie, les patients
avec un PSA à 6 mois supérieur à 0,5 ng/ ml
sont candidats à une hormonothérapie
longue tandis que les patients dont le nadir
du PSA excède 0,5 ng/ml doivent être inclus
dans des études randomisées évaluant
les nouvelles molécules bénéfiques dans
les cancers prostatiques réfractaires à la
castration hormonale.
Commentaire
La synergie entre hormonothérapie et radio-
thérapie améliore le pronostic des cancers de
la prostate avancés. La durée de l’hormono-
thérapie reste débattue, entre 6mois et 3ans,
et certains paramètres, comme le nadir du PSA
ou le PSA à 6mois supérieur à 0,5ng/ml, nous
aident à catégoriser les patients, et à adapter
les traitements.
A. Tolédano, Neuilly-sur-Seine
D’Amico AV, Chen MH, de Castro M et al. Surrogate
endpoints for prostate cancer-specific mortality after
radiotherapy and androgen suppression therapy in men
with localised or locally advanced prostate cancer: an
analysis of two randomised trials. Lancet Oncol 2012;13(2):
189-95.
Radiothérapie hypofractionnée
versus étalement conventionnel
La durée d’un traitement conventionnel
de radiothérapie prostatique sétale sur
7 à 8 semaines, à raison de 4 à 5 séances
de 1,8 à 2,2 Gy par semaine. À cette
radio thérapie conventionnelle, normo-
fractionnée (cest-à-dire délivrant des
doses par séance entre 1,8 et 2,2 Gy), il
existe de nombreuses modalités alterna-
tives rapportées dans la littérature. Celles
délivrant une dose par fraction supérieure
à 2,2 Gy, appelées hypofractionnées,
présentent des avantages évidents en
termes pratiques avec un raccourcissement
du temps global de l’irradiation, mais leur
effi cacité et leur tolérance sont encore mal
connues.
L’hypofractionnement pourrait améliorer
l’efficacité en augmentant l’efficacité
anti tumorale de chaque séance d’irra-
diation, et écourter la durée de l’irradiation
avec moins de séances, avec peut-être une
effi cacité équivalente, voire supérieure.
Cet essai de phase III multicentrique britan-
nique a été réalisé entre 2002 et 2006 :
11 institutions ont randomisé 153 patients
atteints d’un cancer de la prostate localisé
de stade I/II entre une radiothérapie conven-
tionnelle normofractionnée et une radio-
thérapie hypofractionnée par technique de
modulation d’intensité (RCMI). Les patients
recevaient de 3 à 6 mois d’hormono-
thérapie néo-adjuvante. Le schéma
d’irradiation standard délivrait 74 Gy en
37 séances de 2 Gy, et les schémas expéri-
mentaux délivraient 60 Gy en 20 séances
de 3 Gy, ou 57 Gy en 19 séances de 3 Gy.
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